Jurisprudence : Logiciel
Cour de Cassation chambre criminelle Arrêt du 6 février 2001
Stéphane P. / Microsoft Corporation
délit d'importation de logiciels contrefaits
Statuant sur le pourvoi formé par Stéphane P., contre l’arrêt de la chambre d’accusation de la cour d’appel de Paris, en date du 30 mars 2000, qui, sur le seul appel par la partie civile de l’ordonnance de non-lieu rendue par le juge d’instruction, l’a renvoyé devant le tribunal correctionnel pour délits de contrefaçon ;
Vu l’article 574 du code de procédure pénale ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 122-6-3° et L. 335-3, alinéas 1 et 2, du code de la propriété intellectuelle, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
« en ce que l’arrêt infirmatif attaqué a renvoyé Stéphane P. devant le tribunal correctionnel des chefs du délit d’importation de logiciels contrefaits et du délit de contrefaçon ;
« aux motifs qu’il résulte tant de l’enquête effectuée par les services d’enquête sur les fraudes aux technologies de l’information – Sefti – que des conclusions de l’expert judiciaire – D 357 – que :
– la société MBP, par l’intermédiaire de la société Steific, avait importé au Canada, courant 1995 début 1996, 100 Packs Office réservés au marché canadien et, le 7 juin 1996, 180 autres contrefaits, la société HID, 1 050 Packs Office entre le 21 mai et le 1er juillet 1996, vraisemblablement contrefaits dès lors que comportant le même libellé de facture que la livraison concomitante de produits contrefaits à la société Steific (intermédiaire de la société MBP),
– 11 logiciels saisis dans les locaux de la société MBP, un dans le véhicule personnel du dirigeant de fait de la société HID, Maurice Pascale, et 2 autres chez un revendeur de cette dernière, étaient des reproductions de la version 4.2 du logiciel Microsoft, les 9 autres scellés saisis à la société HID contenant des produits originaux, mais exclusivement destinés au marché canadien ;
que si, à dires d’expert, ses reproductions de bonne qualité pouvaient avoir trompé un utilisateur moyen, » un examen minutieux » ne laissait aucun doute quant au caractère non original de ses produits » ;
que ni Stéphane P., ni Maurice Pascale, tous deux respectivement dirigeant de fait, à raison d’une interdiction de gérer les sociétés MBP et HID, ne peuvent prétendre en leur qualité de professionnel de l’informatique avoir été trompés sur la réalité des produits importés, alors même que :
– le prix de vente de 2 999 F TTC du logiciel était de la moitié de celui de 4 500 F auquel il était régulièrement commercialisé en France,
– le manuel et la licence n’étaient que des photocopies et le conditionnement sans marque apparente ;
qu’au demeurant, la découverte par les services de police des documents d’importation desdits produits au domicile personnel de Stéphane P. dissimulés sous son matelas, d’une part, l’absence en stock des produits contrefaits constatée à la société HID, qui cependant n’en avait revendu que 970 d’après l’examen des factures, mais dont Maurice Pascale détenait un exemplaire dans le coffre de son véhicule, attestent de la connaissance qu’avaient les intéressés du caractère contrefait des logiciels ;
que la mise en vente de marchandises contrefaites, quel qu’en soit le contrefacteur, constitue une contrefaçon au sens de l’article 335-3, alinéa 1er, du code de la propriété intellectuelle ;
que le renvoi de Stéphane P. et de Maurice Pascale devant le tribunal correctionnel pour répondre du délit d’importation de logiciels contrefaits est par conséquent justifié ;
que, par ailleurs, les intéressés, sous couvert des sociétés MBP et HID, ont commercialisé en France des logiciels originaux réservés exclusivement au marché canadien ;
que le contrat de licence joint dans le conditionnement de ces appareils spécifiant que la concession des droits n’était valable que pour le Canada, ne permettait aucune confusion sur ce point ;
que, par conséquent, la mise sur le marché français à titre onéreux d’exemplaires du Pack Microsoft réservé au territoire canadien, sans l’autorisation de la société Microsoft Corporation, titulaire des droits d’auteur sur l’ensemble des logiciels regroupés sous le terme Microsoft Office, s’est faite en violation des droits de la partie civile ;
qu’il y a lieu à renvoi de Stéphane P. et de Maurice Pascale pour répondre du délit de contrefaçon, en application des articles L. 122-6-3°, et L. 335-3, alinéa 2, du code précité ;
» alors, d’une part, que la contrefaçon est un délit intentionnel ; que la chambre d’accusation, qui relève que la société MBP – par l’intermédiaire de la société Steific – avait importé au Canada, courant 1995 début 1996, 100 Packs Office réservés au marché canadien et, le 7 juin 1996, 180 autres contrefaits, la société HID 1 050 Packs Office entre le 21 mai et le 1er juillet 1996 vraisemblablement contrefaits, dès lors que comportant le même libellé de facture que la livraison concomitante de produits contrefaits à la société Steific, a statué sur des motifs purement hypothétiques insusceptibles de justifier le renvoi de Stéphane P. devant le tribunal correctionnel du chef de délit de contrefaçon ;
» alors, d’autre part, que la qualité de professionnel de l’auteur présumé de l’infraction ne suffit pas à établir la mauvaise foi du prévenu ; qu’en l’espèce, la chambre d’accusation, qui reconnaît que les reprodcutions étaient de bonne qualité et pouvaient avoir trompé un utilisateur moyen, n’a pas établi que Stéphane P. connaissait l’existence de la contrefaçon, sa seule qualité de professionnel ne permettant pas de caractériser l’élément intentionnel du délit incirminé ;
» alors, enfin, qu’en ce qui concerne la vente en France d’un produit dont la vente était strictement limitée au Canada, il résulte de l’instruction que la société Microsoft ne distribuait pas directement ses produits et que ceux-ci étaient distribués par l’intermédiaire de grossistes tant en France qu’en Belgique et en Afrique ; que, pendant la période de rupture de stocks, les sociétés Hermes Informatique et MBP Jocker ont fait appel à un fournisseur canadien de langue française qui affirmait être agréé et cela pendant la période litigieuse ; qu’en réalité, le litige révèle le caractère hautement commerical des enjeux ; que, par suite, la chambre d’accusation a statué par des motifs insuffisants insusceptibles de justifier le renvoi du prévenu devant le tribunal corrctionnel pour avoir mis sur le marché français, à titre onéreux, des exemplaires du Pack Microsoft réservés au marché canadien, sans l’autorisation de la société Microsoft Corporation, titulaire des droits d’auteur ;
Attendu que le moyen se borne à critiquer les énonciations de l’arrêt relatives aux charges que la chambre d’accusation a retenues contre le prévenu et à la qualification qu’elle a donnée aux faits poursuivis ; que, ces énonciations ne présentant aucune disposition que le tribunal saisi de la poursuite n’aurait pas le pouvoir de modifier, le moyen est irrecevable en application de l’article 574 susvisé ;
Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme.
La Cour, en son audience publique :
. rejette le pourvoi.
La Cour : M. Cotte (président), Mme Mazars (conseiller rapporteur), M. Roman (conseiller de la chambre), Mme Fromont (avocat général).
Greffier de chambre : Me Choucroy.
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