Jurisprudence : Logiciel
Analyse statistique des décisions rendues en matière de logiciel
Population statistique [1]
L’étude porte sur 33 décisions rendues entre 1997 et juillet 2005 et publiées sur le site situé à l’adresse https://www.legalis.net.
Ces décisions concernent exclusivement des litiges en matière de logiciel. La majorité de ces dernières sont des jugements (52%). Il est intéressant de relever la proportion de décisions rendues par les juridictions provinciales (52%) qui est quasiment équivalente à celle des juridictions parisiennes (43%). Par contre, nous ne disposons que d’une seule décision exploitable rendue par Nanterre. Nous ne prendrons donc pas en compte cette dernière lors de nos comparaisons entre juridictions afin de ne pas fausser nos conclusions.
Comme pour les matières précédentes, le pourcentage d’ordonnance de référé avoisine les 30%. La même explication que celle fournie en matière de droit d’auteur peut être reproduite. La contrefaçon de logiciels peut coûter cher à la victime si elle ne fait pas cesser rapidement ce trouble.
Durée des litiges
En moyenne, un jugement de première instance est rendu au bout de 16,4 mois. Ce délai augmente jusqu’à 21 mois pour une décision d’appel. Bien que rendues rapidement, les décisions de référé sont obtenues dans un délai supérieur à celui constaté généralement (3,5 mois au lieu de 1,4 mois).
A la lecture du tableau suivant, on s’aperçoit que ce délai moyen assez long d’obtention d’une décision de référé est du aux juridictions de province. Au contraire, les juridictions parisiennes rendent des ordonnances de référé dans un délai très bref de 0,2 mois, c’est à dire environ 6 jours.
Dépens
Les parties demandent en moyenne 4 144 € pour les dépens. Les magistrats leur accordent en moyenne 2 586 €. Elles obtiennent donc 62% de la somme demandée. Il faut toutefois remarquer que les juridictions parisiennes accordent un montant moyen de 2 818 €, soit 75% du montant demandé
(3 739 €).
Publications judiciaires
La moyenne nationale pour une condamnation à une publication judiciaire est de 4 802,14 €. Celle-ci est beaucoup plus faible que dans les autres matières étudiées. Cette différence est principalement due aux juridictions provinciales qui prononcent, en matière de logiciel, des condamnations à des publications judiciaires dans une limite de 1 220 €. Or, en général, ces mêmes juridictions condamnent à des publications judiciaires dans une limite de 8 225 €.
Quant aux autres juridictions, nous ne disposons de données en matière de publication judiciaire que pour les juridictions de Paris. Ces dernières sont au contraire supérieures à la tendance générale, à savoir 8 385 € au lieu de 7 036 €.
Astreintes
Au regard des sommes accordées pour les astreintes, les décisions rendues en matière de logiciel se distinguent encore de la tendance générale. En effet, les magistrats accordent 74% de la somme demandée au titre des astreintes par jour. Cela représente environ 3 149,49 €, ce qui est une somme relativement importante lorsqu’elle est comparée à celle mise en évidence lors des litiges concernant le droit d’auteur (867 €). Cependant, elle reste dans des zones proches de la tendance générale qui est de 2 479 € par jour.
Concernant les astreintes par infraction, il s’agit de sanctions peu demandées par les parties dans cette matière. En effet, sur les 21 décisions étudiées, seule une affaire faisait état d’une telle demande. De plus, le montant réclamé ne semble pas révélateur de la réalité. En effet, les parties désiraient voir prononcer une astreinte de 1 500 000 € par infraction constatée. Les magistrats leur ont accordé 150 000 €.
Dommages-Intérêts
En moyenne, les parties demandent 93 465 € de dommages et intérêts et reçoivent 30 964 €, soit 33% de la somme réclamée. Une fois encore, ces résultats démontrent une perception et une évaluation nettement différente entre les magistrats et les avocats. Cependant, malgré un pourcentage d’obtention assez proche de celui obtenu en droit d’auteur, les sommes en jeu sont nettement supérieures.
Nous pouvons observer que les juridictions parisiennes accordent les montants les plus importants en matière de dommages et intérêts. En effet, elles accordent en moyenne 55 100 €, ce qui représente près du double de ce qu’elles accordent en général (29 284 €). Cependant ce sont les juridictions de Province qui concèdent un plus fort pourcentage de la somme demandée.
Répartition des sommes allouées
En matière de logiciel comme dans les autres domaines étudiés, les dommages et intérêts représentent la principale sanction pécuniaire. Cependant, il faut noter que les publications judiciaires retombent dans les mêmes limites que les autres sanctions pécuniaires. Or dans les précédentes études, nous constations la part importante occupée par cette sanction pécuniaire. Cependant, ce chiffre reste conforme à la tendance générale selon laquelle seules 7 % des sommes allouées le sont au titre des publications judiciaires.
Enfin, le fait que les parties obtiennent une somme plus proche de celle demandée lorsqu’elles justifient matériellement leur prétention se confirme. En effet, les juridictions accordent en moyenne 62% des sommes demandées au titre des dépens (75% pour les juridictions parisiennes). A l’inverse, les demandes de dommages et intérêts ne sont satisfaites qu’à hauteur de 33%, celles-ci n’étant pas soutenues par des documents faisant apparaître clairement le montant du préjudice.
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[1] Rappel méthodologique :
Compte tenu de l’irrationalité constatée de certaines demandes ou des particularismes de certaines affaires, les décisions s’écartant trop des ratio moyens ont été supprimées du panel étudié ou ont fait l’objet de corrections.
Par ailleurs, il est rappelé au lecteur que l’étude statistique porte uniquement sur les décisions publiées sur le site situé à l’adresse https://www.legalis.net (568 décisions publiées entre 1996 et juillet 2005). Ces résultats ne valent donc que pour l’échantillon étudié.
* Nous portons l'attention de nos lecteurs sur les possibilités d'homonymies particuliérement lorsque les décisions ne comportent pas le prénom des personnes.