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Jurisprudence : Responsabilité

mardi 23 juin 2009
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Cour d’appel de Lyon Chambre sociale Arrêt du 08 juin 2007

René-Marc L. / Haco

responsabilité

FAITS ET PROCEDURE

Monsieur René-Marc L. a été embauché le 18 mai 1998 par la société Haco France, qui importe et fabrique des machines-outils, en qualité de technicien de service après vente. Il était chargé de l’installation des machines, de la formation des utilisateurs, d’interventions auprès des clients et de démonstrations dans les foires ou salons professionnels.

Au dernier état de sa collaboration, il percevait un salaire mensuel moyen de 2 721 €.

La convention collective applicable était celle des ingénieurs et cadres de la métallurgie.

Le 28 avril 2005, Monsieur René-Marc L. a été convoqué à un entretien préalable fixé au 9 mai 2005, en vue de son licenciement, convocation assortie d’une mise à pied.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 mai 2005, il a reçu notification de son licenciement pour faute grave, aux motifs suivants :
– téléchargement des logiciels et des messages de service mis à la disposition de la société Haco par la société Robosoft,
– mention sur les feuilles de route d’un nombre de kilomètres supérieurs à ceux réellement effectués,
– établissement de notes de remboursement de frais d’hôtel et de repas alors qu’il ne passait pas la nuit à l’hôtel mais à son domicile,
– utilisation abusive du téléphone portable de l’entreprise à des fins personnelles,
– mauvaise exécution du contrat de travail,
– dénigrement du personnel commercial.

Monsieur René-Marc L. avait saisi le conseil de prud’hommes de Lyon dès le 30 juillet 2003, d’une demande de rappel de salaire. La contestation du licenciement s’est ajoutée à ses prétentions initiales.

Par jugement du 1er juin 2006, le conseil de prud’hommes, section encadrement, a dit que le licenciement reposait sur une faute grave mais a condamné la société Haco France à payer à Monsieur René-Marc L. les sommes suivantes :
– à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires réalisées de 1998 à 2004 21 797,88 €
– au titre des congés payés afférents 2179,79 €
– à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions applicables en matière de repos compensateurs 5000 €
– sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile 1000 €

Ce jugement a été notifié à Monsieur René-Marc L. le 3 juin 2006.

Il en a interjeté appel le 28 juin 2006 par lettre recommandée adressée au greffe.

La société Haco France a interjeté un appel incident.

Monsieur René-Marc L. se plaint d’avoir dû régulièrement travailler au- delà de 39 heures par semaine sans parvenir à obtenir le paiement des heures supplémentaires et repos compensateurs correspondants.

Il expose qu’en janvier 2002, son employeur lui a imposé, malgré son refus, un calcul de son temps de travail selon un forfait annuel de 217 jours de travail et non en heures tout en exigeant qu’il procède au décompte de son temps de travail.

Il rappelle qu’il a saisi le conseil de prud’hommes du litige l’opposant à son employeur sur le paiement des heures supplémentaires dès le 30 juillet 2003 et que c’est alors que cette affaire était sur le point d’être plaidée qu’il a fait l’objet d’un licenciement.

Il demande la condamnation de la société Haco France à lui verser les sommes suivantes :
– 1665,31 € au titre des heures effectuées de la 35ème à la 39ème heure du 1er février 2000 au mois de février 2002
– 166,53 € au titre des congés payés afférents
– 4173,96 € au titre des heures supplémentaires effectuées au-delà de 39 heures au cours de l’année 1998, à compter de la semaine 28
– 417,39 € au titre des congés payés afférents
– 7676,50 € heures supplémentaires effectuées au-delà de 39 heures au cours de l’année 1999
– 767,65 € au titre des congés payés afférents
– 7917,49 € heures supplémentaires effectuées au-delà de 39 heures au cours de l’année 2000
– 791,74 € au titre des congés payés afférents
– 6291,12 € heures supplémentaires effectuées au-delà de 39 heures au cours de l’année 2001
– 629,11 € au titre des congés payés afférents
– 6536,52 € heures supplémentaires effectuées au-delà de 35 heures du 1er mars 2002 au 31 décembre 2002
– 653,65 € au titre des congés payés afférents
– 6463,71 € au titre des heures supplémentaires effectuées au-delà de 35 heures au cours de l’année 2003
– 646,71 € au titre des congés payés afférents
– 3503,54 € au titre des heures supplémentaires effectuées au cours de l’année 2004
– 350,35 € au titre des congés payés afférents
– 10 000 € à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice subi du fait du non respect par son employeur de la législation afférente au repos compensateur
– 8163,66 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis
– 816,36 € au titre des congés payés afférents
– 3809,70 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement
– 65 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
– 1500 € supplémentaires sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Il maintient sa contestation relative au décompte de son temps de travail, expliquant que la société Haco France lui transmettait téléphoniquement ses ordres de mission sans vérifier le nombre d’heures de travail déjà effectuées.

Il affirme qu’il remettait régulièrement à l’employeur ses bordereaux de déplacement en même temps que des fiches d’intervention renseignant sur l’objet et le temps de chacune de ses missions. II s’explique sur le détail de son emploi du temps, sur les distances séparant les interventions et sur ses temps de route.

Il conteste l’application à son cas de l’accord national du 26 février 1976, qui exclut les ingénieurs et cadres et qui n’a pas été étendu.

A titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la Cour confirmerait la déduction de 1h30 au titre des déplacements, il a établi un décompte au terme duquel il forme une demande complémentaire de 2120,59 €.

Monsieur René-Marc L. soutient que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et répond à la seule volonté de se séparer de lui du fait du litige les opposant.

Il fait valoir qu’il était dans l’obligation d’avoir à sa disposition l’intégralité des logiciels et messages de service, ne pouvant prévoir en début de semaine à quelle intervention ou panne il devrait faire face.

Il précise que l’importance du téléchargement de janvier 2005 s’explique par le fait qu’il a alors bénéficié d’une connexion ADSL.

Il précise que ces documents n’étaient pas susceptibles d’être utilisés dans un but concurrentiel alors qu’ils devaient être mis à jour constamment et qu’il a rendu sa clé Hardware à son départ.

S’agissant du kilométrage mentionné sur ses feuilles de route, il explique qu’il est amené à rallonger le parcours séparant deux missions pour trouver un hôtel correspondant au forfait journalier de 60 € alloué.

Il ajoute qu’il était d’usage dans l’entreprise de régler aux salariés le forfait journalier que ceux-ci rentrent ou non à leur domicile.

Il indique que l’achat annuel d’un atlas routier était indispensable à l’exercice de ses fonctions.

Il conteste l’usage abusif du téléphone portable.

Il affirme que l’incident professionnel signalé par l’employeur est le premier en six ans et qu’il ne peut lui en être fait grief.

II dénie tout dénigrement du personnel commercial de l’entreprise.

La société Haco France sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a rejeté les demandes relatives au licenciement, son infirmation en ce qu’il a fait droit aux demandes de rappel de salaire et la condamnation de Monsieur René-Marc L. à lui payer 1500 € sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Elle soutient que les heures supplémentaires réalisées par Monsieur René- Marc L. n’ont pas été commandées, qu’il disposait d’une grande liberté dans la gestion de son temps et surchargeait son temps de travail à son insu, que son statut de cadre se prêtait à l’adoption d’un régime de forfait en jours mais qu’il s’y est toujours refusé tout en ne se pliant pas à l’établissement des fiches auto-déclaratives de temps.

Elle indique que Monsieur René-Marc L. s’octroyait unilatéralement des jours de réduction de temps de travail.

Elle réfute au salarié la possibilité de considérer comme temps de travail le temps habituel de trajet entre le domicile et le travail, approuvant la décision du conseil de prud’hommes en ce qu’elle a déduit des demandes 1h30 par jour à ce titre, ce d’autant plus que Monsieur René-Marc L. choisissait de temps à autre, par commodité personnelle, d’effectuer un long trajet pour rejoindre son domicile plutôt que de passer la nuit à l’hôtel.

Elle affirme qu’il y a lieu également à déduction des temps de pause et de restauration.

Pour le reste, elle conteste les décomptes effectués par Monsieur René-Marc L.

Elle affirme qu’il a bénéficié de nombreux jours de repos compensateurs, qu’elle énumère.

S’agissant du licenciement, la société Haco France reprend les termes de la lettre de rupture.

Elle réfute les explications fournies par le salarié.

Elle rappelle que les logiciels et les messages de service mis à la disposition des techniciens, qui accèdent au site au moyen d’un code, décrivent notamment la marche à suivre en cas de panne d’une machine.

Elle expose qu’elle a été alertée par la société Robosoft le 21 avril 2005 du comportement anormal de Monsieur René-Marc L., qui avait téléchargé le dimanche 23 janvier pratiquement tous les logiciels disponibles et tous les messages de service édités depuis 1998.

Elle indique que ses craintes ont été ultérieurement confirmées puisque après son départ, elle a découvert qu’il avait créé avec son épouse une société ayant pour objet la maintenance industrielle, l’audit, le conseil, la mise en service et l’entretien de machines outils et qu’il avait proposé ses services à certains de ses clients, qu’elle a demandé la désignation d’un huissier du justice lequel a, avec l’aide de la Gendarmerie et d’un informaticien, mis en évidence l’utilisation du logiciel Robosoft téléchargé et a saisi des documents.

Elle explique par ailleurs que l’examen des feuilles de route justifié par le litige relatif au temps de travail l’a amenée à mettre en évidence la déclaration d’un nombre de kilomètres supérieur à celui indiqué sur internet et l’établissement de fausses notes de frais en vue de se faire rembourser l’hôtel lorsqu’il rentre à son domicile.

Elle fait des observations sur les autres griefs invoqués à l’appui du licenciement.

Subsidiairement, elle demande la réduction des indemnités sollicitées à de plus justes proportions.

DISCUSSION

Sur les heures supplémentaires

Selon l’article L 212-4 du contrat de travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles.

Il résulte de l’article L. 212-1-1 du Code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties et que l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

En l’absence de convention d’entreprise et d’avenant au contrat de travail de Monsieur René-Marc L. relatif à l’adoption d’un forfait annuel en jour, le salarié restait soumis aux dispositions légales ou conventionnelles relatives à la durée du travail.

S’agissant de la demande afférente à la période du 1er février 2000, date de mise en oeuvre de la réduction de temps de travail à 35 heures par semaine, au mois de février 2002, l’examen des bulletins de salaire démontre que le temps de travail effectué entre la 35ème heure et la 39ème heure a été rémunéré en sus mais au taux horaire normal alors qu’il aurait dû être payé en heures supplémentaires.

La demande formée à ce titre, en paiement de 1665,31 € outre congés payés afférents, est justifiée et la condamnation prononcée doit être confirmée.

A compter du 1er mars 2002, la demande porte sur les décomptes d’heures présentés par Monsieur René-Marc L.

C’est en vain que la société Haco France se défend d’avoir commandé à Monsieur René-Marc L. l’exécution d’heures de travail, alors qu’il n’a pas été contesté que le salarié n’avait pas l’initiative des interventions auxquelles il devait procéder et n’intervenait chez les clients qu’à la demande de l’employeur au fur et à mesure de ses disponibilités.

Il relevait du pouvoir disciplinaire et de direction de ce dernier d’exiger la production régulière des fiches horaires de son salarié, de vérifier l’absence de dépassements et de lui donner des instructions précises quant aux limites horaires de ses interventions.

S’agissant des temps de trajet, il convient de faire la distinction entre le trajet accompli entre deux lieux de travail différents, qui constitue un temps de travail effectif et le temps de trajet entre le domicile de Monsieur René-Marc L. et les différents lieux d’intervention, qui ne doit être considéré comme temps de travail que dès lors qu’il déroge au temps normal du trajet d’un travailleur se rendant de son domicile à son lieu de travail habituel.

Or, l’accord national sur les conditions de déplacement dans la métallurgie du 26 février 1976, qui s’applique à la société Haco, adhérente au syndicat patronal signataire, précise que le temps de trajet nécessaire au salarié pour se rendre chaque jour du lieu d’hébergement au lieu de travail ne donne lieu à rémunération qu’au-delà d’une heure et demi.

Rien ne justifie que l’appréciation de la durée habituelle du domicile au lieu de travail soit appréciée de manière différente pour les cadres et pour les autres catégories de personnel dans un même domaine d’activité.

C’est à juste titre que le conseil de prud’hommes a déduit des décomptes hebdomadaires la durée des déplacements du domicile ou de l’hôtel au lieu de l’intervention et inversement dès lors que celle-ci était inférieure à 45 minutes ou a déduit 45 minutes (1 heure 30 par jour) lorsqu’elle était supérieure.

La société Haco France a dressé en pièces 4 et 6 un tableau récapitulatif des heures supplémentaires sollicitées par Monsieur René-Marc L. dont elle a soustrait le temps de trajet habituel.

Ce décompte n’est cependant pas exact en ce qu’il est hebdomadaire et déduit, au titre du trajet normal 1h30 par jour travaillé alors que certains bordereaux présentés par le salarié comportent des temps de route moindre notamment en cas d’interventions séparées par une nuit à l’hôtel.

Les temps de repas et de pause ne constituent un temps de travail effectif que lorsque le salarié est à la disposition de l’employeur et doit de conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles.

Ni la brièveté des pauses, ni les circonstances limitant les possibilités du salarié de s’éloigner du lieu de travail ne permettent de les considérer comme un temps de travail effectif.

En l’espèce, Monsieur René-Marc L., qui avait la possibilité de s’octroyer un réel moment de détente lorsqu’il faisait une pause de la durée qui lui convenait et au lieu de son choix sans devoir se tenir à la disposition de l’employeur n’est pas en droit de les décompter comme temps de travail.

L’examen des bordereaux de déplacement démontre qu’en milieu de journée, Monsieur René-Marc L. prenait une pause d’une heure qui n’était comptabilisée ni en temps de trajet, ni en temps d’intervention. Il n’y a donc pas lieu à déduction au titre du temps de repas du midi.

En revanche, les pauses que le salarié admet avoir régulièrement prises au cours des trajets ne sont pas décomptées.

La Cour est d’avis qu’il y a lieu à déduction à ce titre de 20 minutes par jour travaillé.

La société Haco France relève, en proposant à la Cour une seule vérification de bordereau hebdomadaire que Monsieur René-Marc L. a mentionné des indications de distances et donc de temps de trajet inexactes. Monsieur René-Marc L. indique que le procédé n’est pas fiable et fournit des explications. La Cour observe que la démonstration de l’employeur, qui repose sur l’examen d’un seul bordereau correspondant à une semaine pour laquelle il n’est d’ailleurs pas invoqué d’heures supplémentaires, n’est pas convaincante.

La société Haco France invoque encore le décompte par le salarié du temps du trajet aller-retour à son domicile qu’il substituait à la possibilité de rester sur place qui lui était offerte par l’employeur et dont il usait par ailleurs en percevant l’indemnité pour repas du soir et nuitée d’hôtel.

Elle fonde toutefois sa démonstration sur l’examen de la semaine 16 de 2002 (pièce 12) pour laquelle il n’est pas sollicité d’heures supplémentaires.

La Cour observe que le salarié a usé de cette faculté alors qu’il accomplissait des missions peu éloignées de son domicile de sorte que le temps de trajet excédant la durée de 1 h ½ déductible en tout état de cause est peu important.

La perception simultanée d’indemnité d’hôtellerie justifie un grief d’ordre disciplinaire mais au regard du décompte des heures supplémentaires, en l’absence de démonstration par l’employeur que Monsieur René-Marc L. a formulé une telle réclamation dans des cas où la durée du trajet, supérieure à 1 h ½, se trouve à l’origine du dépassement de la durée hebdomadaire du travail, la Cour écarte ce chef de contestation de décompte du temps de travail.

Dès lors, la Cour a acquis la conviction que Monsieur René-Marc L. a accompli des heures supplémentaires non payées, dans une mesure moindre de 20 minutes par jour travaillé que celle appréciée par les premiers juges.

Elle ramène à 17 183,44 € la somme due par la société Haco France à Monsieur René-Marc L. au titre des heures supplémentaires effectuées et non payées, qui sera augmentée des congés payés afférents.

Sur les repos compensateurs

Selon l’article L 212-5-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent ouvrent droit à un repos compensateur obligatoire dont la durée est égale à 100% du temps de travail accompli en heures supplémentaires pour les entreprises de plus de 10 salariés.

Ce droit à repos compensateur s’exerce dès lors que des heures supplémentaires sont effectuées au-delà du contingent annuel d’heures supplémentaires.

Pour le surplus, l’examen des bordereaux hebdomadaires démontre que Monsieur René-Marc L. a pris des repos d’une demi-journée ou d’une journée au cours de semaines civiles pendant lesquelles il n’a pas par ailleurs déjà accompli 35 heures de temps de travail effectif.

Il apparaît à la Cour que, compte tenu des éléments relevés ci-dessus, Monsieur René-Marc L. a été en mesure de formuler une demande de repos compensateur correspondant aux heures supplémentaires éventuellement effectuées au-delà du contingent et ne peut prétendre à l’octroi d’une indemnité à ce titre.

Sur la légitimité du licenciement

La combinaison des articles L 122-6, L 122-14-2 (alinéa 1er) et L 223-14-3 du code du travail impose à l’employeur, qui se prévaut d’une faute grave du salarié, de rapporter la preuve de l’exactitude du ou des faits imputés à celui-ci dans la lettre de licenciement, et de démontrer qu’ils constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail, d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis.

Aux termes de la lettre de licenciement, la société Haco France fait essentiellement grief à Monsieur René-Marc L. d’avoir procédé au téléchargement des logiciels et des messages de service mis à la disposition de l’entreprise par la société Robosoft en ces termes :

« Le 21 avril dernier, la société Robosoft, notre partenaire, nous a indiqué que vous aviez le dimanche 23 avril 2005, téléchargé la quasi- totalité des logiciels disponibles (180) et tous les messages de services depuis 1998 dans leur intégralité avec le code d’accès de la société Haco.
Vous savez que vous, ainsi que les autres techniciens, êtes tenus à une utilisation strictement professionnelle et limitée de ces logiciels, c’est-à-dire que vous devez utiliser les seuls logiciels dont vous avez besoin, et nécessaires à l’accomplissement de votre mission uniquement.
Le téléchargement de l’ensemble des logiciels n’est en aucun cas justifié par votre travail. En effet, les informations que vous avez téléchargées concernent les machines qui ne sont pas du tout entretenues par le service après vente de la société Haco (poinçonneuses, machines à bois, Mubea…) et des machines qui ne se trouvent pas sur votre secteur géographique.
Vous avez purement et simplement fait un usage abusif et personnel d’un instrument mis à votre disposition pour le travail.
Votre comportement nuit à notre réputation mais également à notre partenaire, la société Robosoft, puisque les informations en votre possession sont de nature à permettre une concurrence déloyale dont les conséquences seraient désastreuses.
Dès lors, en procédant à une telle opération de téléchargement, vous manquez à votre obligation de confidentialité et vous portez atteinte aux droits de la propriété intellectuelle de la société Robosoft.»

Monsieur René-Marc L. ne disconvient pas avoir téléchargé, le dimanche 23 janvier 2005, 174 logiciels et messages de service sur 191 disponibles sur le site.

Le caractère inhabituel du téléchargement pratiqué par Monsieur René-Marc L. est tel qu’il a suscité une alerte spontanée du fournisseur de données.

La société Robosoft a souligné, dans la lettre adressée le 21 avril 2005 à la société Haco France le «comportement anormal et en aucun cas nécessaire pour son travail»

Elle a précisé que les fichiers téléchargés concernent « des machines qui ne sont pas du tout entretenues par le service après vente Haco (poinçonneuses, machines à bois) et des machines qui ne se trouvent pas du tout dans le secteur géographique de Monsieur L. » ajoutant que « cette information peut, dans les mains d’un concurrent, nous créer d’énormes préjudices. »

La société Haco France indique, sans être utilement contredit par le salarié, que la pratique habituelle des techniciens et sa propre pratique antérieure consiste, lorsque le besoin apparaît lors d’une intervention, à procéder au téléchargement du document utile chez le client sur l’ordinateur portable mis à leur disposition.

Ce comportement, sans qu’il soit utile de procéder à l’examen des autres griefs, constitue une violation par le salarié des obligations de loyauté et d’honnêteté qui s’imposent à lui, porte un grave préjudice à l’entreprise et justifie la rupture immédiate du contrat de travail, s’agissant d’un manquement grave qui rend impossible son maintien dans l’entreprise pendant la durée du préavis.

DECISION

Par ces motifs, la Cour,

. Confirme le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de Lyon le 1er juin 2006 en ce qu’il a dit que le licenciement de Monsieur René-Marc L. par la société Haco France était justifié par une faute grave,

. L’infirmant partiellement sur le surplus,

. Condamne la société Haco France à payer à Monsieur René-Marc L. :
– à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires effectuées entre la 35ème heure et la 39ème heure de février 2000 à février 2002, 1665,31 €
– au titre des congés payés afférents 166,53 €
– à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires réalisées de 1998 à 2004, 17 183,44 €
– au titre des congés payés afférents 1718,34 €

. Déboute Monsieur René-Marc L. de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions applicables en matière de repos compensateurs,

. Dit n’y avoir lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

. Dit que chacune des parties gardera la charge de ses dépens de l’instance d’appel.

La cour : Mme Elisabeth Panthou-Renard (président), Mmes Anne Marie Durand et Hélène Homs (conseillers)

Avocats : Me Virginie Denis-Guichard, Me Paule Welter

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