Jurisprudence : Jurisprudences
Cour d’appel de Montpellier, ordonnance du 18 avril 2018
M. X. / M. Le Préfet de l'Hérault et Le Ministère Public
consultation du fichier - Fichier biométrique - fichier de police - personnalité habilitée à consulter le traitement
Nous, Emmanuelle Wacongne conseillère à la cour d’appel de Montpellier, déléguée par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 551-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, assistée de Maryline Thomas, greffier,
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Vu les dispositions des articles L 512-1, L 551-1, L 552-5, L 552-6 et R 552-1 à R 552-10-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;
Vu l’arrêté du 12 avril 2017 de Monsieur le Préfet de l’Hérault portant obligation de quitter le territoire national sans délai et ordonnant la rétention de Monsieur X., pendant 48 heures dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire ;
Vu la décision de placement en rétention administrative du 12 avril 2017 de Monsieur X., pendant 48 heures dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire ;
Vu la requête de Monsieur X. en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative en date du 14 avril 2017 ;
Vu la requête de Monsieur le Préfet de l’Hérault en date du 14 avril 2017 tendant à la prolongation de la rétention de Monsieur X. dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée vingt-huit jours ;
Vu l’ordonnance du 15 Avril 2017 à 14 heures 00 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Montpellier qui a :
– rejeté la requête en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative formée par Monsieur X.,
– ordonné la prolongation de la rétention administrative de Monsieur X., pour une durée de vingt-huit jours à compter du 14 avril 2017 à 18 heures 10,
Vu la déclaration d’appel faite le 16 Avril 2017, par Me Jauffié Codognes, avocat, agissant pour le compte de Monsieur X., transmise au greffe de la cour d’appel de Montpellier le même jour, à 10 heures 42 ;
Vu la télécopie adressée le 16 Avril 2017 à Monsieur le Préfet de l’Hérault l’informant que l’audience publique sera tenue ce jour à 09 heures 30 et l’invitant à prendre toutes les dispositions utiles pour faire remettre à Monsieur X. l’avis à comparaître à cette audience par l’intermédiaire des services de police ou de gendarmerie compétents.
Vu les télécopies adressées le 16 Avril 2017 à Monsieur le Préfet de l’Hérault, à l’intéressé, à
son conseil et au Ministère Public les informant que l’audience sera tenue ce jour à 09H30.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Monsieur X. confirme son identité telle que mentionnée dans l’ordonnance entreprise et déclare : « Je veux être libérer, faire mes papiers, je suis en France depuis 1 mois 1/2. J’ai toute ma famille ici qui est en situation régulière. J’ai une promesse d’embauche.».
L’avocat, Me Jauffré Codognes développe les moyens de l’appel formé contre l’ordonnance du Juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l’étranger.
Monsieur le représentant, de Monsieur le Préfet de l’Hérault, demande la confirmation de l’ordonnance déférée.
DISCUSSION
Sur les moyens de nullité
– sur l’absence d’identification de l’agent notificateur
L’article R 551-4 du CESEDA invoqué dispose que le procès-verbal de notification des droits en rétention est signé par l’intéressé, qui en reçoit un exemplaire, le fonctionnaire qui en est l’auteur et le cas échéant l’interprète. Cet article ne prévoit pas la nécessité de mentionner le nom et le matricule de l’agent notifiant.
Ce moyen sera rejeté.
– sur le contrôle d’un Officier de Police judiciaire
Il ressort de la procédure que cette dernière a été établie par l’officier de Police judiciaire Guillemot et qu’il ne peut être sérieusement soutenu qu’elle n’a pas été établie sous le contrôle d’un Officier de Police judiciaire.
Ce moyen de nullité sera rejeté.
Le moyen de nullité sera donc rejeté.
– sur le placement en rétention dans des locaux séparés de personnes gardées à vue
Cette obligation légale est prévue par l’article L 611-1 du CESEDA. En l’espèce, aucun élément de la procédure, et aucune déclaration de la personne retenue ne permet de penser qu’il a été placé dans des locaux avec des personnes gardées à vue.
Ce moyen de nullité sera rejeté.
– sur l’absence d’habilitation des fonctionnaires ayant consulté les fichiers biométriques
L’article L 611-4 du ceseda dispose que les données du fichier FAED peuvent être consultées par les agents expressément habilités. Ce fichier ne peut d’ailleurs être consulté que par des agents expressément habilitées qui disposent d’un code qui leur est propre. La consultation a donc nécessairement été effectuée par des personnes habilitées.
Quant à la production de l’habilitation, cette pièce ne fait pas partie des pièces considérées comme devant être automatiquement produites à la procédure et ne sont donc pas utiles.
Leur absence n’entraîne en conséquence aucune irrégularité de procédure.
Le même raisonnement est applicable à la consultation du fichier Visabio.
Ces deux moyens de nullité seront rejetés.
– sur la comparaison des fichiers
Il ne ressort d’aucun pièce de la procédure que les données des fichiers Visabio ou Faed auraient été comparées, la mention de la consultation des deux fichiers dans la même phrase ne sous-entendant pas qu’un croisement des données a été effectué.
Ce moyen non fondé sera également rejeté.
– sur l’irrégularité de la prise d’empreinte
Il ressort expressément de la procédure que la consultation des fichiers à l’aide d’empreinte n’a pas donné lieu à collecte d’empreinte, mais a juste fait l’objet de consultation aux fins de comparaison. Aucune prise d’empreinte n’a donc été effectuée, aucune irrégularité de ce chef ne saurait être retenue, pas plus de facto que concernant l’ absence de fourniture de renseignements sur ce point à Monsieur X.
Ce moyen sera également écarté comme non fondé.
– Sur l’incapacité à lire le français de Monsieur X.
Monsieur X. a déclaré dans sa première audition auprès des services de police qu’il savait lire et écrire le français. Il a donc été procédé conformément à ses déclarations. Il ne saurait dès lors en être tiré grief par la suite, et ce dès lors qu’en tout état de cause Monsieur X. a été en mesure d’exercer ces droits, notamment d’appel, et qu’il n’en a donc subi aucun grief.
Ce moyen sera également rejeté.
– sur le défaut d’intérêt à agir de la préfecture
L’autorité administrative française ne possède aucune autorité sur les instances Etatiques des autres pays et n’est pas en mesure d’exiger de leur part le respect des accords internationaux conclus. Ainsi si le pays d’origine impose des conditions de prise de rendez-vous sans tenir compte des délais prévus dans les accords internationaux, les autorités administratives françaises ne sauraient en être tenues pour responsable.
En l’espèce le consulat Tunisien impose que les rendez-vous pour leur ressortissant, ou ceux
qui se déclarent tels, se déroulent exclusivement le mercredi.
La préfecture de l’Hérault a pris contact avec le consulat Tunisien qui a fixé un rendez-vous au mercredi 19 avril 2017 pour rencontrer l’intéressé. Le dépassement du délai de 5 jours prévu par les accords franco-tunisien ne lui est donc pas imputable, cette dernière ayant effectué les diligences nécessaires en temps utile.
Ce moyen sera également rejeté.
– sur l’absence du procès-verbal d’inventaire de fouille
La production de cette pièce à la procédure n’est imposée par aucun texte, et ne constitue pas une pièce utile, dont l’absence entraînerait une irrégularité de la procédure.
Ce moyen sera rejeté comme infondé.
SUR LE FOND
En l’espèce, l’intéressé ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure (article L 551-1 du CESEDA et L 511-1 II 3è) :
– en ce qu’il ne justifie pas de la possession de documents d’identité ou de voyage en cours
de validité,
La promesse d’embauche versée aux débats concerne un CDI avec un salaire de 1800 euro
bruts mensuels, alors même que Monsieur X. n’est pas en situation irrégulière et ne peut dès lors travailler régulièrement. Cette promesse d’embauche présente toutes les caractéristiques de la promesse de complaisance.
L’hébergement proposé est chez une personne qui ne fait pas partie de la famille de Monsieur X. et ne présente aucun caractère de sérieux.
Il ne présente dès lors aucune garantie sérieuse de représentation.
L’assignation à résidence ne peut en conséquence en l’état être ordonnée.
Monsieur X. est en situation irrégulière en France.
Il y a lieu en conséquence de confirmer l’ordonnance déférée.
DÉCISION
Statuant publiquement,
Déclarons l’appel recevable,
Rejetons les moyens de nullité et d’irrecevabilité,
Confirmons la décision déférée,
Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l’article R 552-15 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d ‘Asile.
La Cour : Emmanuelle Wacongne (conseillère à la cour d’appel de Montpellier, déléguée par ordonnance de Monsieur le premier président), Maryline Thomas (greffier)
Avocat : Me Jauffré Codognes
Source : Legalis.net
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