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Jurisprudence : Logiciel

vendredi 10 novembre 2000
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Tribunal de grande instance de Grasse, Jugement correctionnel du 10 novembre 2000

Midi Musique / Sylvie G.

contrefaçon - logiciel

Faits et procédure

La société Midi Musique déposait plainte le 20 décembre 1996 à l’encontre de la société Maxi Music, sise à Vallauris, pour vol et contrefaçon de programmes.

La plaignante exposait que dans le cadre de son activité de production et d’édition de phonogrammes informatiques, elle avait conclu avec la société Maxi Music le 19 mars 1996 un contrat Midiself, permettant à cette société de procéder, à l’aide d’une application informatique fournie, au téléchargement des fichiers MIDI désirés par ses clients.

La société Midi Musique soutenait que la socciété Maxi Music avait reproduit et commercialisé de manière illicite des séquences musicales inscrites à son catalogue.

Suivant ordonnance en date du 28 juin 1999, Sylvie G., gérante de la Sarl Label Music à l’enseigne Maxi Music, était renvoyé devant le tribunal correctionnel du chef de vol et de reproduction ou diffusion non autorisée de phonogrammes informatiques.

Sur l’action publique

Il ressort des pièces du dossier que l’activité exercée par la société Midi Musique concerne la vente de matériel de musique , d’électronique et d’informatique, la vente de tous produits matériels neuf ou d’occasion s’y rattachant, la production musicale assistée par ordinateur, la production phonographique, et l’édition musicale. A ce titre, elle produit et commercialise des oeuvres musicales sous forme de fichiers informatiques à la norme MIDI (Musical Instrument Digital Interface).

Dans le cadre du contrat souscrit entre les parties, la société Midi Musique a mis à la disposition de Maxi Music un logiciel nommé Midiself lui permettant, grâce à un modem, de se connecter sur un kiosque afin de télécharger des fichiers musicaux pour les revendre à ses clients.

Les phonogrammes MIDI arrivent alors instantanément sur le disque dur de l’ordinateur du magasin distributeur. Ils sont copiés sur la disquette que le client pourra emporter avant d’être effacés du disque dur.

Le distributeur facture ensuite à son client le prix des phonogrammes achetés et reverse le prix convenu par contrat à Midi Musique.

Sur l’infraction de vol

Le fait matériel du vol est constitué en l’espèce par le fait d’avoir copié sur disquette les fichiers MIDI transmis sur le disque dur du distributeur Maxi Music.

Il convient de constater que ces fichiers MIDI ont été volontairement remis par la société Midi Musique à Maxi Music dans le cadre du contrat souscrit avec la société Label Music.

Dans ces conditions, le fait pour le distributeur Maxi Music d’avoir disposer indûment de ces fichiers volontairement remis, en les ayant copiés, ne constitue pas un vol au sens de l’article 333-1 du Code Pénal. Il y a donc lieu de renvoyer Sylvie G. des fins de la poursuite de ce chef.

Sur l’infraction de reproduction ou diffusion non autorisée de phonogrammes

Il ressort des pièces du dossier et cela est confirmé à l’audience par la prévenue que celle-ci, directement ou par l’intermédiaire de ses subordonnés, a copié sur le disque dur de l’ordinateur de Maxi Music les fichiers Midifile téléchargés, et que ceux-ci ont été ensuite reproduits sur disquette et distribués à certains clients de Maxi Music, à titre de gratification lors d’achats importants.

Sylvie G. conteste la matérialité du délit de contrefaçon qui lui est reproché en soutenant que la société Midi Musique n’est pas producteur de phonogrammes et qu’elle n’est pas propriétaire des oeuvres copiées.

Il ressort du dossier que la société Midi Musique a produit un certificat émanant de la société civile pour l’exercice des droits des producteurs phonographiques certifiant que cette dernière était admise comme membre depuis le 30 novembre 1993, en sa qualité de producteur de phonogrammes, défini par le Code de la Propriété Intellectuelle comme la personne physique ou morale ayant l’initiative et la responsabilité de la première fixation d’une séquence son.

L’enquête révèle en outre que les producteurs de séquences MIDI ont fait des demandes d’autorisation à la SACEM / SDRM (Société pour l’administration de Droits de Reproduction Mécanique des Auteurs Compositeurs et Editeurs), celle-ci menant des négociations avec le Syndicat des Producteurs de Phonogrammes Informatiques.

Il apparaît que le système MIDI ((Musical Instrument Digital Interface) permet de reproduire, d’utiliser des sons d’enregistrement préexistants dans le but de créer une oeuvre sonore nouvelle à l’aide de l’ordinateur.

L’activité créative de la société Midi Musique consisite à rechercher les sons utilisables par l’ordinateur, d’adapter les instruments aux contraintes techniques en se rapprochant le plus possible des oeuvres originales. Cette prestation intellectuelle aboutit à la création de séquence MIDI, et à la production de phonogrammes.

La société Midi Musique est dès lors fondée à bénéficier de la protection particulière accordée au producteur de phonogrammes par les articles L213-1 et suivants du Code de la Propriété Intellectuelle.

Il convient donc d’entrer en voie de condamnation à l’encontre de Sylvie G. pour reproduction et diffusion non autorisée de phonogrammes, dès lors qu’elle reconnaît avoir copié les fichiers MIDI et les avoir distribués à ses clients sans l’autorisation de Midi Musique.

Une peine d’amende apparaît justifiée pour sanctionner ce délit.

Sur l’action civile

La société Midi Musique se constitue partie civile et réclame la condamnation de Madame G. et de la société MAXI MUSIQUE à lui payer :

– la somme de 108 000 francs en réparation du préjudice matériel,

– la somme de 100 000 francs en réparation de l’atteinte à son patrimoine moral,

– outre la somme de 15 000 F sur le fondement des dispositions de l’article 475-1 du Code de Procédure Pénale.

Cette constitution de partie civile est régulière et recevable en la forme.

Quant au fond, il ressort des pièces du dossier et des débats qu’il n’est pas contesté que 1200 fichiers MIDI ont été relevés sur le disque dur de la société Label Music, à l’enseigne Maxi Music. Dès lors en prenant pour base de calcul le prix facturé par la société Midi Musique, soit la somme de 30 francs par fichiers, le préjudice matériel s’établit à la somme de 36 060 francs.

Compte tenu du préjudice moral résultant de l’atteinte à l’œuvre, il sera fait une juste appréciation du préjudice global subi par la société Midi Musique en fixant à la somme de 50 000 francs le montant de la réparation à lui allouer.

Il apparaît équitable de fixer la somme de 10 000 francs l’indemnité due à la partie civile au titre des frais exposés par celle-ci, conformément aux dispositions de l’article 475-1 du Code de Procédure Pénale.

Par ces motifs

Le Tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire, en premier ressort

Sur l’action publique

Renvoie Sylvie G. des fins de la poursuite du chef de vol

Déclare Sylvie G. coupable du délit de reproduction ou diffusion non autorisée de phonogrammes informatiques

Condamne Sylvie G. au paiement d’une amende délictuelle d’un montant de 20 000 francs, en application des dispositions des articles L 213-1, 335-4 du Code de la Propriété Intellectuelle ;

La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d’un montant de six cents francs (600 Frs) dont est redevable chaque condamné.

Dit que la contrainte par corps s’exercera suivant les modalités fixées par les articles 749, 750 et 751 du Code de Procédure Pénale, modifiés par la loi du 30 décembre 1985.

Sur l’action civile

Reçoit la société Midi Musique en sa constitution de partie civile,

Condamne Sylvie G. à payer à la société Midi Musique la somme de cinquante mille Francs (50 000 francs) à titre de dommages et intérêts toutes causes de préjudices confondues,

Condamne Sylvie G. à payer à la société Midi Musique la somme de Dix mille Francs (10 000 francs) en application des dispositions de l’article 475-1 du Code de Procédure Pénale.

Le tout en application des articles 406 et suivants et 485 du Code de Procédure Pénale et des textes susvisés.

Le tribunal : Mme Carracha (Président), M. Portail, Mme Bina (Juges assesseur), Mme Andreu (Greffier), en présence de Melle Noel, substitut de M. le Procureur de la République adjoint.

Avocats : Me Gitton / Me Petraccini

 
 

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