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Jurisprudence : Responsabilité

mercredi 04 juin 2014
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Juridiction de proximité de Dreux Jugement du 22 janvier 2014

Mme P. / O. Aménagement

contentieux - contrat d'entreprise - déclaration au greffe - procédure - signature électronique - validité

FAITS ET PROCÉDURE

Par déclaration reçue au greffe en date du 28 octobre 2013, Mme Lucette P. épouse M., a assigné la société O. Aménagement devant le juge de proximité de Dreux, aux fins de la voir condamnée à lui verser la somme de 2000 € au titre de travaux non terminés, outre 1000 € de dommages et intérêts.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l’audience du 18 décembre 2012. A l’audience, les parties étaient présentes ou représentées.

Mme P. expose que :

– Elle a fait exécuter par la société O. Aménagement, entre octobre 2012 et août 2013, des travaux d’aménagement sur sa propriété : dallage de la descente de garage, rénovation des piliers et des lisses de la clôture avec repose des portails, aménagement sous l’escalier d’un réduit ouvrant sur l’extérieur ;
– Elle lui a reproché le refus de réinstallation d’un portail et diverses malfaçons : trous dans les piliers, absence de produit de jointement entre les pavés, mauvais ajustement de la porte du réduit rendant impossible sa fermeture, absence d’enduit sur les piliers et le mur du réduit ;
– Elle demande au tribunal de faire obligation à O. Aménagement de terminer les travaux, outre 2000 € de dommages et intérêts et 1000 € de réparation du préjudice moral ;
– Sur la question de sa signature soulevée en cours d’audience par la défense, elle précise qu’étant passée par les services sur site internet « demander justice » elle n’a pu signer elle-même sa déclaration au greffe qui, adressée par l’internet, a utilisé le système de la signature électronique ;

En cours d’audience elle communique des photos supplémentaires qui ont été retenues par le tribunal.

La société O. Aménagement, représentée par Maître Jean-Marie Depied, fait exposer que :
– Elle considère comme irrecevable la demande en justice de Mme P. car la signature y est différente de celle portée sur sa carte d’identité ;
– Elle note que la demanderesse ne fournit pas de justificatif du préjudice qui a été fixé arbitrairement et pas de devis des travaux à effectuer ;
– L’attestation que fournit madame P. au sujet de la fermeture de la porte n’est pas conforme ;
– La pose du portail n’est pas prévue dans le devis ;
– Pour les piliers seuls la mise en œuvre d’un accrocheur et d’une peinture blanche est prévue dans le devis ;
– Mme P. a renoncé à la pose d’un enduit sur les parpaings situés sous l’escalier ;

DISCUSSION

Sur la recevabilité de la déclaration au greffe

La déclaration au greffe a fait l’objet d’une signature électronique « émise par un opérateur de services de certification électronique qualifié, conformément au décret n° 2001-272 du 30 mars 2001 ». Il est rappelé que la signature électronique d’un document a la même valeur légale qu’une signature manuscrite.

Sur la demande principale

L’article 1134 du code civil prévoit que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ;

L’article 1315 du code civil prévoit que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver ; réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de l’obligation ;

L’article 1184 du code civil prévoit que la condition résolutoire est toujours sous entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l’une des parties ne satisfera pas à ses engagements ;

Dans ce cas le contrat n’est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté a la faculté de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts ;

II ressort de l’audience et des pièces versées aux débats, et notamment :
– lettre de mise en demeure « d’effectuer les réparations ou de rembourser », du 19 août 2013 ;
– devis des 26 septembre et 3 octobre 2012, 28 février 2013 ;
– factures des 3 octobre 2012 et 6 août 2013 ;
– relevés du compte bancaire de Mme M. ;
– courriels des 8 août et 13 septembre 2012 et du 30 octobre 2013 ;
– photos prises par la demanderesse ;
– lettre d’engagement d’O. Aménagement de réaliser les joints des paves ;
– état récapitulatif des devis, factures et règlements, dresse par le défendeur ;

Que :
Mme P. a fait réaliser des travaux par la société O. Aménagement ;
Les factures, d’un montant de 15 413,35 €, ont, à l’exception d’un reliquat de 3,10 €, été honorées dans leur intégralité ;
Les travaux ne sont pas terminés ;

Qu’en effet l’un des 2 portails, celui de droite, n’a pas été réinstallé et que divers aménagements ne sont pas terminés ;

Que s’agissant du portail il est prétendu par l’artisan :
– qu’il ne peut être remonté car inadapté aux nouveaux piliers ;
– que sa repose n’est pas prévue dans le devis ;

Attendu que la repose du portail de gauche, pourtant non indiquée dans le devis, a bien, elle, été réalisée ;

Qu’ainsi la thèse de la non-conformité aux lieux du portail de droite peut être retenue ;

Que d’ailleurs Mme P. s’est bien préoccupé de son remplacement ;

Attendu en outre que la facture du 3 octobre signalait la pose de deux butées de portail ;

Que cela signifie que la pose des deux portails était bien envisagée ;

En conséquence la société O. Aménagement sera condamnée à installer le nouveau portail une fois celui-ci mis à sa disposition par la demanderesse ;

Que s’agissant des piliers Mme P. reproche à l’artisan de ne pas avoir procédé à la pose d’un enduit qui n’aurait pas laissé apparaître de trous ;

Attendu que le devis ne fait pas état de cet enduit ;

Qu’il est cependant légitime de penser que, pour des raisons d’homogénéité esthétique, il a été décidé, comme pour les lisses, de se contenter de la mise en œuvre d’un accrocheur puis d’une peinture blanche ;

En conséquence Mme P. sera déboutée sur ce point ;

Que s’agissant du réduit construit sous l’escalier Mme P. déplore :
– d’une part l’humidité du mur imputable à l’absence de recouvrement des parpaings par un enduit ;
– d’autre part l’impossibilité de fermer la porte ;

Attendu qu’une construction en parpaings réalisée par un professionnel ne s’entend pas sans un enduit de ciment ;

Que l’on imagine mal la demanderesse exécuter elle-même ce travail ;

Attendu d’un autre côté que les photos produites à l’audience ne laissent planer aucun doute sur le mauvais ajustement du chambranle de la porte ;

En conséquence, il est demandé à la société O. Aménagement d’enduire de ciment les parpaings du réduit et de réinstaller la porte dans les règles de l’art ;

Que s’agissant de la pose du joint entre les pavés dans la descente de sous-sol la demanderesse reproché à l’artisan l’état d’inachèvement du chantier ;

Attendu que les photos produites à l’audience sont sans équivoque sur ce fait ;

Que d’ailleurs la société O. Aménagement ne peut ignorer son engagement de « venir réaliser les joints en sable polymère sur les pavés, une fois ces derniers seront complètement secs, soit aux beaux jours » ;

En conséquence la société O. Aménagement sera condamnée à mener cet aspect du chantier à bonne fin.

Dans ces conditions la société O. Aménagement sera condamnée à exécuter les obligations suivantes : pose du nouveau portail, pose d’un enduit sur les parpaings et réajustement du chambranle et de la porte du local sous escalier, réalisation des joints entre les pavés, dans le délai de 2 mois à compter de la signification du présent jugement puis sous astreinte de 30 € par jour de retard qui sera liquidée par ce tribunal.

Sur la demande de dommages et intérêts et de préjudice moral

Mme Lucette P. ne fournit pas la preuve d’un dommage distinct de celui jugé à titre principal ; elle sera déboutée.

Sur la demande reconventionnelle

La société O. Aménagement étant succombante sera déboutée.

DÉCISION

Le juge de proximité statuant par mise à disposition du jugement au greffe de cette juridiction, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’alinéa de l’article 450 du code de procédure civile par jugement contradictoire et en dernier ressort

. Ordonne la société O. Aménagement d’exécuter les travaux suivants :
– pose du nouveau portail,
– pose d’un enduit de ciment sur les parpaings et réajustement du chambranle et de la porte du local construit sous l’escalier extérieur,
– réalisation des joints entre les pavés dans la descente du garage,
dans un délai de deux mois à compter de la signification du présent jugement, sous astreinte de 30 € par jour de retard au delà de ce délai.

. Dit que l’astreinte sera liquidée par la juridiction de proximité de Dreux.

. Déboute Mme Lucette P. de ses demandes de dommages et intérêts

. Déboute la société O. Aménagement de sa demande reconventionnelle.

. Condamne la société O. Aménagement aux dépens.

Le tribunal : M. Christian Loiret (juge)

Avocats : Me Jean-Marie Depied

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