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Contrat d’intégration : pas de rupture brutale sans relation stable et durable
Par un arrêt du 22 novembre 2019, la cour d’appel de Paris a confirmé le jugement du tribunal de commerce de Paris qui avait débouté les Etablissements Nicolas de leurs demandes au titre de la rupture brutale de la relation commerciale établie et de la tentative d’obtention de conditions manifestement abusives, dans le cadre d’un projet de modernisation d’un système d’information destiné aux activités d’exportation et au développement de nouveaux modes de distribution multicanaux de vins et autres boissons alcoolisées. La cour a également débouté le prestataire SQLI de sa demande de paiement des factures émises pour les prestations exécutées, faute d’avoir communiqué les comptes-rendus d’activité aux collaborateurs qui auraient rendu exigible le paiement.
Pour le projet baptisé « knowledge management » des Etablissements Nicolas, une proposition d’étude de cadrage avait été rédigée et à l’issue du rapport final de l’étude les travaux d’intégration du logiciel Hybris avaient été engagés sur la base de la proposition commerciale de SQLI, acceptée par le client par deux lettres d’intention. Mais le contrat définitif n’a pas été signé. En conséquence, SQLI a supprimé l’accès des Etablissements Nicolas à la plateforme d’échanges et a émis quatre factures pour les travaux exécutés que le client a refusé de régler. Le prestataire l’a donc mis en demeure de lui verser les sommes pour les travaux réalisés en régie dans le cadre de l’exécution de la lettre d’intention. Le spécialiste du vin s’estimant toutefois victime d’une rupture brutale des relations commerciales nouées avec SQLI l’a assigné en justice.
Dans son arrêt, la cour rappelle que la relation entre les parties est ponctuelle s’il n’existe aucune continuité d’un courant d’affaires entre elles, ni de stabilité de leur relation, ni de progression constante du chiffre d’affaires. Dans cette affaire, elle explique que « le contrat conclu entre les parties, formalisé par les deux lettres d’intention circonscrites au seul “projet ecommerce/Pim”, dont la seconde lettre précise qu’il est scindé en une phase de conception et une phase de réalisation, ne pouvait légitimement faire croire à la société Etablissements Nicolas que la relation entre les parties s’étendrait au-delà de l’exécution du contrat et s’inscrirait dans la durée par la réalisation d’autres missions, peu important à ce titre qu’aucune des deux lettres d’intention conclues ne prévoit de terme extinctif à la réalisation des prestations convenues. ». En l’absence donc d’une relation stable, régulière et durable entre les parties, aucune relation commerciale établie n’est caractérisée au sens de l’article L 442-6 I.5° du code de commerce.
La cour a par ailleurs considéré qu’il n’y avait pas eu de tentative d’obtention de conditions manifestement abusives, sur le fondement de l’article L 442-6 I.4° du code de commerce. « En coupant tout accès à la plate-forme d’échange depuis le 30 avril 2014, en formalisant,par sa lettre du 6 mai 2014, cette suspension de l’exécution de ses prestations à compter du
30 avril 2014 et en refusant de reprendre ses prestations, à défaut d’accord des parties sur une base contractuelle acceptée, la société SQLI a également appliqué les termes de la lettre d’intention du 21 mars 2014, et nullement profité de la prétendue situation de dépendance économique de sa cocontractante pour lui imposer des conditions tarifaires abusives par
rapport à celles négociées entre elles. », a conclu la cour.