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jeudi 12 avril 2012
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Facebook : compétence du tribunal français

 

Dans un arrêt du 23 mars 2012, la cour d’appel de Pau a estimé que la clause des conditions générales d’utilisation de Facebook qui donne compétence aux tribunaux de Californie pour tous litiges est inapplicable et renvoie l’affaire devant la juridiction française. La cour fonde sa décision sur l’absence de consentement à cette clause attributive de compétence, réputée non écrite car l’internaute ne s’est pas engagé en pleine connaissance de cause.
Dans cette affaire, un internaute avait ouvert un compte Facebook à la fin 2007 et n’a plus eu la possibilité d’y accéder à partir de juin 2009, sans avertissement préalable du réseau social. Il a été réactivé en janvier 2010, de manière restreinte, pour finalement être définitivement désactivé. En juin 2009, il a créé un nouveau compte avec une autre adresse email, mais il connaîtra le même sort que le précédent compte. Comme deux autres qu’il essaiera d’ouvrir par la suite. Devant cette situation, il décide d’assigner Facebook pour obtenir 1 500 € de dommages-intérêts.
Facebook a soulevé l’exception d’incompétence du tribunal français, en application de ses CGU. Et la juridiction de proximité lui a donné gain de cause. L’internaute en litige s’est alors tourné vers la cour d’appel de Pau afin qu’elle se prononce sur ce point de procédure. Elle a contredit la décision de première instance et a affirmé que le tribunal français est parfaitement compétent pour connaître du litige en application de l’article 46 du code de procédure civile qui prévoit que le demandeur peut saisir le tribunal du lieu où le dommage a été saisi. Elle a donc renvoyé l’affaire devant la juridiction de proximité de Bayonne pour se prononcer au fond.
La cour commence par rappeler l’article 48 du CPC qui dispose que « toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu’elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée. ». La cour ne met pas l’accent sur la qualité de consommateur de l’internaute mais insiste sur son absence de consentement à cette clause attributive de compétence. Elle constate qu’à cette époque les CGU étaient rédigées en anglais, en petits caractères et que la clause en question était noyée dans le texte. Elle déplore également qu’« il suffit d’une simple et unique manipulation lors de l’accès au site (clic) et non d’une signature pour que le consentement de l’utilisateur soit considéré comme acquis ce qui suppose que l’attention de celui-ci soit particulièrement attirée sur la clause dont se prévaut la société Facebook ce qui n’est pas le cas en l’espèce puisque lors de cette manipulation la clause n’est pas facilement identifiable et lisible ». S’ajoute à ces points le fait que le dommage, la fermeture de son compte utilisateur, s’est produit au domicile de l’internaute. En application donc de l’article 46 du CPC, la cour conclut que le tribunal français est compétent.
Aujourd’hui, les CGU ont été modifiées. Elles sont rédigées en (mauvais) français. La nouvelle présentation les rend plus lisibles mais la compétence reste toujours attribuée au tribunal californien. Cela changerait-il les conclusions de la cour ? Pas sûr.