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mercredi 23 décembre 2009
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La loi française s’applique à Google Livres

 

Dans une décision limpide du 18 décembre 2009, la 3ème chambre du TGI a rejeté l’application de la loi américaine et a considéré que Google avait commis des actes de contrefaçon en numérisant et en diffusant des extraits des livres français sans autorisation des titulaires des droits. En conséquence, le tribunal a interdit à Google Inc de poursuivre ces agissements sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard et a condamné l’entreprise américaine à verser 300 000 euros de dommages-intérêts aux éditions du Seuil, Delachaux & Niestle et Harry N. Abrams, ainsi qu’un euro au Syndicat national de l’édition et à la Société des gens de lettres. Google a fait appel de la décision.
Le tribunal se prononce sans ambiguïté pour l’application de la loi française, contrairement à une décision d’une autre section de la 3ème chambre dans une affaire SAIF. Google avait invoqué la loi américaine et le « fair use », se fondant sur l’article 5. 2 de la convention de Berne selon lequel, en matière de conflits complexes, la loi applicable serait celle du territoire sur lequel sont commis les actes délictueux. En l’occurrence, la numérisation a été réalisée aux Etats-Unis.
Le tribunal a balayé cet argument en rappelant que la loi applicable en la matière est celle de l’Etat du lieu où le fait dommageable s’est produit, « ce lieu s’entend aussi bien de celui du fait générateur du dommage que de celui du lieu de réalisation de ce dernier ». En l’espèce, le tribunal constate que le litige concerne des œuvres d’auteurs français numérisées pour être accessibles aux internautes français sur le territoire national. Par ailleurs, il note que la société Google France a son siège en France, que le nom de domaine permettant l’accès au site www.books.google.fr possède une extension en « .fr » et qu’il est rédigé en langue française. « Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la France est le pays qui entretient les liens les plus étroits avec le litige, ce qui justifie l’application de la loi française ».

Sur les atteintes au droit d’auteur, le tribunal rejette l’exception pour citation. Google a certes numérisé les couvertures des ouvrages en cause ainsi que l’intégralité des ouvrages. Mais lors d’une requête d’internaute à partir de mots clés, seules des citations de quelques lignes sont affichées de manière aléatoire. Pour le tribunal, l’exception ne peut cependant s’appliquer car « les couvertures concernées sont communiquées au public dans leur intégralité, même en format réduit, et que l’aspect aléatoire du choix des extraits représentés dénie tout but d’information tel que prévu par l’article L 122-5 3°du Code de la Propriété Intellectuelle ». Le tribunal estime également que le fait de faire apparaître les œuvres de manière aléatoire sous forme de bandeaux de papier déchirés constitue une atteinte à l’intégralité des œuvres.