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Pas d’exploitation numérique prévue dans la clause de cession : l’AFP condamnée en contrefaçon
L’Agence France Presse a été condamnée en contrefaçon par la cour de Paris pour l’exploitation numérique des photographies de 23 de ses salariés, le 9 juin 2009. La cour a, en effet, remis en cause la clause de cession de droits d’auteur insérée dans les contrats de travail qui autorise l’agence à reproduire et à diffuser « par quelque moyen, sous quelque forme et en quelque langue que ce soit, aussi souvent qu’elle l’estime utile, les articles et photographies que vous réaliserez dans l’exercice de vos fonctions à l’agence ». Cette clause avait été rédigée bien avant le numérique. Mais l’ouverture en 1998 du service internet Image Forum a changé la donne. L’AFP offre désormais aux abonnés l’accès direct à sa base de données de photos numériques et elle propose aussi différents services d’exploitations de son fond photographique. De cette exploitation croissante et très lucrative de leurs oeuvres, les photographies n’ont obtenu aucune rémunération supplémentaire. D’où leur action en justice, après l’échec des négociations avec l’agence.
Dans un jugement du 2 février 2007, le conseil des prud’hommes de Paris a considéré que ces clauses de cession « n’englobent pas valablement l’exploitation électronique, par le serveur Image Forum ». Cette décision a été confirmée par la cour de Paris. Elle rappelle que si le code de la propriété intellectuelle autorise une rémunération forfaitaire des œuvres d’un salarié par son employeur, entreprise d’information, il impose néanmoins que chacun des droits cédés fasse l’objet d’une mention distincte dans l’acte de cession. Ce document, rappelle la cour, doit préciser le domaine d’exploitation des droits cédés quant à l’étendue, la destination, le lieu et la durée. Ces exigences s’imposent d’autant plus avec l’exploitation numérique des photos sur internet car elle permet de nouvelles exploitations commerciales des œuvres, bien au-delà de la mission traditionnelle de l’agence de presse.
La cour a examiné la clause de cession à l’aune du principe d’interprétation stricte en faveur des auteurs salariés qui cèdent leurs droits moyennant une rémunération forfaitaire. Elle en a conclu que le mode d’exploitation numérique n’ayant pas été mentionné dans la clause, les droits d’auteur n’avait pas été cédés. En conséquence, l’AFP a commis des actes de contrefaçon en reproduisant et diffusant les photographies numérisées sans le consentement de leurs auteurs, à compter de l’ouverture du service Forum Images. La cour n’a pas ordonné l’interdiction de l’exploitation des clichés des 23 photographes pour ne pas paralyser le fonctionnement de l’agence. Mais elle a condamné l’agence à leur verser une provision 4 000 euros de dommages-intérêts ainsi que 2 000 au titre des frais de justice.