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Protection d’une base de données : le contenu, rien que le contenu
Par un arrêt du 15 novembre 2013, la cour d’appel de Paris a confirmé le jugement du TGI de Paris qui avait dénié à Pressimmo Online, éditeur de seloger.com, la protection du producteur de base de données, faute d’avoir apporté la preuve d’investissements substantiels pour la création et la constitution du contenu de sa base.
Yakaz.com, Gloobot.com et comintoo.com sont des moteurs de recherche qui indexent automatiquement les annonces qu’ils trouvent sur des sites au moyen d’un robot explorateur. L’internaute qui est intéressé par une annonce ne dispose pas des informations essentielles, à savoir les coordonnées du vendeur ou de son mandataire. S’il souhaite les obtenir, il doit cliquer sur l’annonce pour être dirigé vers le site dont elles sont issues. Pour faire cesser ces pratiques, Pressimmo On Line, éditeur du site seloger.com, a assigné en justice les trois moteurs de recherche. Mais le tribunal comme la cour d’appel ne lui ont pas donné gain de cause.
La cour rappelle, de manière très motivée, que pour bénéficier du droit sui generis sur les bases de données, le producteur doit consentir des investissements substantiels pour la constitution, la vérification ou la présentation de son contenu. Elle reprend les précisions données par la Cour de justice de l’UE selon laquelle ces investissements doivent être réalisés en vue d’assurer la fiabilité de l’information figurant dans ladite base, au contrôle de l’exactitude des éléments recherchés, lors de la constitution de cette base, ainsi que pendant la période de fonctionnement de celle-ci. Ils ne se confondent pas avec ceux consacrés à la création des éléments constitutifs du contenu d’une base de données et à des opérations de vérification, purement formelle, pendant cette phase de création consistant notamment à les collecter auprès de professionnels et à les diffuser tels que recueillis de ses clients, précise la cour d’appel. « Que, s’agissant des investissements humains et financiers liés à l’obtention du contenu de sa base de données, au sens des textes et de la jurisprudence communautaire précités, que l’appelante déclare leur consacrer – investissements qui auraient dû faire l’objet d’une ventilation précise et dont le caractère substantiel aurait dû être prouvé – force est de relever qu’ils ne sont aucunement démontrés ».
La cour n’a pas davantage accueilli les demandes de Pressimmo sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire. Cette dernière invoquait notamment comme faute la méconnaissance délibérée de sa charte d’utilisation, le fait de priver l’internaute de ses autres produits ou de recettes publicitaires ou de sa faculté de licencier sa base de données. Elle avait ajouté que sans l’utilisation de sa base, les sites concurrents auraient été dépourvus d’intérêt. La cour rétorque que « l’appelante ne peut, sous couvert d’une action fondée sur l’article 1382 du code civil, reconstituer un droit privatif qui lui a été dénié – étant incidemment relevé qu’elle ne peut, de ce fait, se prévaloir de la méconnaissance de sa charte d’utilisation dans laquelle elle se présente comme “titulaire de droits concernant (…) sa base de données” – et que le simple fait de copier un produit ou un service non protégé, dans un contexte de liberté du commerce et de l’industrie, n’est pas, en soi, fautif ».
La cour réfute également les arguments tenant au parasitisme car l’internaute qui consulte une annonce de seloger.com à partir des moteurs de recherche litigieux est appelé à se diriger vers le site source pour en connaître tous les détails. Elle en conclut qu’« il ne peut être considéré que ces dernières (qui font pour leur part valoir qu’elles ont en fait augmenté la visibilité de ce site) se sont placées dans son sillage pour en capter la valeur ».