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Jurisprudence : Diffamation

lundi 02 mars 2020
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Cour d’appel de Douai, ch. 1 – sec. 2, arrêt du 16 janvier 2020

M. X et Umalis Group / MM. Y., Z., W. et EGS Portage Salarial

compétence judiciaire - concurrence déloyale - diffamation

Vu l’ordonnance du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Lille du 29 avril 2019 ;

Vu la déclaration d’appel de M. X. et de la société Umalis Group reçues au greffe de la cour d’appel de Douai le 22 mai 2019 ;

Vu les conclusions de la société Umalis Group et de M. X. déposées le 26 juillet 2019 ;

Vu les conclusions de la société EGS portage salarial et de MM. Y., Z., W. déposées le 02 octobre 2019 ;

Vu l’ordonnance de clôture du 14 octobre 2019.

EXPOSE DES MOTIFS

Les sociétés EGS portage salarial et Umalis Group ont une activité de portage salarial. La société EGS portage salarial a été créée par trois anciens salariés de la société Umalis Group, MM. Y., Z., W.

La société Umalis Group est dirigée par M. X.

Par actes signifiés le 26 novembre 2018, la société EGS portage salarial et MM. Y., Z. et W. ont fait assigner la société Umalis group et M. X. devant le tribunal de grande instance de Lille afin de le voir :
– déclarer recevable et bien fondée l’action des demandeurs
– juger que la société Umalis Group s’est rendue coupable de concurrence déloyale et de parasitisme à l’encontre de la société EGS portage salarial, par cybersquattage et par reproduction, mot pour mot, d’un article de la société EGS portage salarial, élément de son savoir-faire
– juger que la société Umalis Group, directeur de publication et éditeur, et M. X., auteur, se sont rendus coupables de diffamation publique à l’encontre de MM. Y., Z., W. et de la société EGS portage salarial
– en conséquence,
– condamner Umalis Group au transfert au proWt d’EGS portage salarial des noms de domaine « egs-portage.com » « egs-portage.tech » et « egs-portage.biz » correspondant à sa dénomination sociale antérieure, dans un délai de 7 jours francs à compter de la signification du jugement, sous peine d’astreinte de 100 euros par jour de retard et de manquement
– ordonner à Umalis Group et à M. X. la cessation de toute reproduction des éléments de savoir-faire (et notamment la reproduction ou l’imitation d’articles des demandeurs) ou d’identification des demandeurs (et notamment dénomination sociale, enseigne, nom commercial, marque, noms patronymiques), sans autorisation des demandeurs, dans un délai de 7 jours francs à compter de la signification du jugement, sous peine d’astreinte de 100 euros par jour de retard et de manquement, et leur interdire de reproduire totalement ou partiellement tout contenu ou élément d’identification d’EGS portage salarial
– condamner Umalis Group et M. X. à la suppression des articles diffamatoires et de toutes ses rediffusions, totales ou partielles, par M. X. et la société Umalis Group, dans un délai de 7 jours francs à compter de la signification du jugement, sous peine d’astreinte de 100 euros par jour de retard et de manquement.
– condamner Umalis Group au paiement de la somme de 10 000 euros à EGS portage salarial, à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire commis à son encontre,
– condamner in solidum Umalis Group et M. X. au paiement de la somme de 30 000 euros à M. Y., et de 15 000 euros à chacun des autres demandeurs, à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la diffamation publique commis à leur encontre
– ordonner publication sur la page d’accueil des sites internet
– africatopsports.com
– et africatopsuccesscom
dont le directeur de publication et éditeur est Umalis Group et M. X. l’auteur de lapublication initiale ou de ses reproductions, et sur les comptes Twitter de M. X., Africa Top Success, et Africa Top Sports, durant 15 jours francs consécutifs, dans les 7 jours francs à compter de la signification du jugement, sous peine d’astreinte de 300 euros par jour de retard ou de manquement, d’un communiqué, en caractères gras, noirs, police Arial, taille 12, précédé du titre en majuscules, taille 14, Arial « Communiqué judiciaire », le tout dans un encadré noir, sans autre mention ou commentaire, libellé ainsi :
« Par jugement en date du XX, le Tribunal de grande instance de Lille a condamné Umalis Group et M. X., pour avoir publiquement diffamé Ms Y., Z. et W., ainsi que la société EGS portage salarial, dans des textes initialement mis en ligne les 1er avril 2018, 30 juillet 2018 et 1eraoût 2018, sur les sites internet africatopsuccess.com, africatopsportscom et sur leurs comptes Twitter. Le Tribunal a ordonné la publication du présent communiqué afin de rétablir les intéressés dans leurs droits. »
– se réserver expressément la compétence pour liquider l’astreinte
– condamner in solidum Umalis Group et M. X. au paiement de la somme de 1.200 € à chacun des demandeurs sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile
– condamner in solidum Umalis Group et M. X. au paiement des entiers frais et dépens, en ce compris les constats internet dressés par Huissier de justice.
– ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant opposition ou appel et sans caution.

Par ordonnance du 29 avril 2019, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Lille a :
– rejeté l’exception d’incompétence soulevée par la société Umalis group et M. X. au profit du tribunal de commerce de Lille,
– débouté les parties de leurs demandes formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– ordonné le renvoi de l’affaire à l’audience de mise en état du 24 mai 2019, avec injonction de conclure au fond à la société Umalis group et M. X., à défaut de quoi l’affaire sera fixée à plaider,
– réservé le paiement des dépens de la procédure d’incident.

La société Umalis group et M. X. ont formé appel de cette décision.

Aux termes de leurs conclusions susvisées, ils demandent à la cour d’appel de :
– juger le tribunal de grande instance de Lille incompétent pour statuer sur les demandes fondées sur la concurrence déloyale et parasitaire par la société EGS portage salarial à l’encontre de la société Umalis group ;
– renvoyer en conséquence l’examen de ces demandes devant le tribunal de commerce de Lille ;
– débouter la société EGS portage salarial, MM. Y., Z. et W. de l’ensemble de leurs demandes
– condamner la société EGS portage salarial à payer à la société Umalis group la somme de 2000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
– la condamner aux dépens d’appel.

Aux termes de leurs conclusions susvisées, la société EGS portage salarial et MM. Y., Z. et W. demandent à la cour d’appel de :
– confirmer l’ordonnance déférée du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Lille du 29 avril 2019 et rejeter purement et simplement l’exception de procédure ;
– y ajoutant :
– condamner in solidum la société Umalis group et M. X. au paiement de la somme de 5000 € aux intimés au titre de la procédure abusive et dilatoire menée ;
– condamner in solidum la société Umalis group et M. X. au paiement de la somme de 1 200 € à chacun des intimés sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner in solidum la société Umalis group et M. X. aux dépens.


EXPOSE DES MOTIFS

Aux termes des dispositions de l’article L. 721-3 du code du commerce : « Les tribunaux de commerce connaissent :
1° Des contestations relatives aux engagements entre commerçants, entre établissements de crédit, entre sociétés de financement ou entre eux ;
2° De celles relatives aux sociétés commerciales ;
3° De celles relatives aux actes de commerce entre toutes personnes.
Toutefois, les parties peuvent, au moment où elles contractent, convenir de soumettre à l’arbitrage les contestations ci-dessus énumérées. »

Aux termes des dispositions de l’article L. 211-1 du code de l’organisation judiciaire :
« Le tribunal de grande instance connaît de toutes les affaires civiles et commerciales pour lesquelles compétence n’est pas attribuée, en raison de leur nature ou du montant de la demande, à une autre juridiction. »

Aux termes des dispositions de l’article R. 211-4 du code de l’organisation judiciaire :
« Le tribunal de grande instance a compétence exclusive dans les matières déterminées par les lois et règlements, au nombre desquelles figurent les matières suivantes : (…)13° Actions civiles pour diffamation ou pour injures publiques ou non publiques, verbales ou écrites (…). »

Aux termes des dispositions de l’article 101 du code de procédure civile : « S’il existe entre des affaires portées devant deux juridictions distinctes un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble, il peut être demandé à l’une de ces juridictions de se dessaisir et de renvoyer en l’état la connaissance de l’affaire à l’autre juridiction. »

Les sociétés Umalis group et EGS portage salarial sont des sociétés commerciales. En conséquence l’action en concurrence déloyale formée par la société EGS portage salarial à l’encontre de la société Umalis group relève de la compétence du tribunal de commerce.

L’action en diffamation formée par EGS portage salarial, MM. Y., Z. et W. à l’encontre de la société Umalis group et de M. X. relève de la compétence exclusive du tribunal de grande instance.

L’action en concurrence déloyale et l’action en diffamation ne sont pas indivisibles.

En revanche, les faits reprochés à la société Umalis Group et à son dirigeant M. X. par la société EGS portage salarial et ses dirigeants MM. Y., Z. et W., s’inscrivent dans le contexte de la création par trois anciens salariés de la société Umalis Group, d’une société concurrente. Les faits de concurrence déloyale reprochés par la société EGS portage salarial à la société Umalis Group et les faits de diffamation reprochés par la société EGS portage salarial et ses dirigeants MM. Y., Z. et W. à la société Umalis Group et M. X. ont pour objet, selon les société EGS portage salarial et ses dirigeants, de porter atteinte à la société EGS portage salarial concurrent de la société Umalis Group.

En conséquence, il existe entre les affaires un lien tel qu’il est de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble.

Il convient en conséquence de rejeter l’exception d’incompétence soulevée par la société Umalis Group.

L’ordonnance du juge de la mise en état sera confirmée.

II) Sur la demande de dommages et intérêts de la société EGS portage salarial et MM. Y., Z. et W.

La preuve d’une faute de la société Umalis group et de M. X. dans l’exercice de leur droit à défendre à une action en justice ou à exercer une voie de recours n’est pas établie.

Les intimés seront déboutés de leur demande de dommages et intérêts.

III) Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

L’ordonnance sera confirmée de ce chef.

Succombant à l’appel, la société Umalis Group et M. X. seront condamnés in solidum aux dépens et à payer à la société EGS portage salarial la somme de 1200€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

 

DÉCISION

La cour,

– CONFIRME l’ordonnance entreprise ;
y ajoutant

– DÉBOUTE la société EGS portage salarial et MM. Y., Z. et W. de leur demande en dommages et intérêts ;

– CONDAMNE in solidum la société Umalis Group et M. X. à payer à la société EGS portage salarial la somme de 1200€ au titre des frais exposés en appel ;

– DÉBOUTE la société Umalis Group et M. X. de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– CONDAMNE in solidum la société Umalis Group et M. X. aux dépens d’appel.


La Cour :
Catherine Bolteau-Serre (président de chambre), Sophie Tuffreau (conseiller), Jean-François Le Pouliquen (conseiller), Stéphanie Hurtrel (greffier)

Avocats : Me Fabienne Menu, Me Lucie Delporte, Me Coraline Favrel

Source : Legalis.net

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