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Jurisprudence : Logiciel

jeudi 27 septembre 2001
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Tribunal de commerce de Nanterre, 8ème Chambre, Jugement du 27 septembre 2001

Sarl Syn'x Relief, Raymond P. et Isabelle C. / Sarl Softimage France, Sté de droit canadien Softimage Inc. et Sté Digital

logiciel

Jugement du 26 septembre 1997

Les faits

Par un jugement en date du 26 mars 1997, le tribunal a mis Microsoft hors de cause, joint les causes et, avant dire droit, nommé Yves Cailleau en qualité d’expert, avec pour mission de :

– fournir au tribunal les éléments techniques lui permettant de déterminer si les ressemblances entre le logiciel ayant fait l’objet d’un dépôt auprès de l’Agence pour la protection des programmes par les demandeurs et ceux commercialisés par Softimage, sont telles que l’accusation de contrefaçon peut être retenue,

– fournir au tribunal tous éléments techniques et de fait lui permettant de déterminer les responsabilités de chacune des parties dans l’exploitation et la commercialisation du logiciel incriminé,

– pour ce faire, entendre tout sachant, se faire communiquer tous documents qu’il estimera nécessaires à l’accomplissement de sa mission.

Yves Cailleau, expert, a rendu son rapport le 27 mars 2000.

La procédure

Par conclusions déposées à l’audience du 20 septembre 2000, les demandeurs demandent au tribunal de :

– constater que Softimage a commis des actes de contrefaçon en reproduisant illicitement le logiciel « Character » dans le logiciel Softimage,

– constater l’appropriation illicite des fonctionnalités et la violation des dispositions contractuelles, – constater la concurrence déloyale et le parasitisme de Softimage,

– condamner Softimage à payer aux auteurs la somme de 130 millions de francs à titre de dommages-intérêts, outre les intérêts légaux à compter de l’exploit introductif d’instance,

– ordonner la suppression sous astreinte définitive de 100 000 F par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir, de tous les éléments ci-dessus qualifiés,

– ordonner la publication de la décision à intervenir dans deux journaux spécialisés au choix des auteurs et aux frais de la défenderesse,

– ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir, nonobstant appel et sans constitution de garantie,

– condamner la défenderesse au paiement de la somme de 200 000 F au titre de l’article 700 du Ncpc,

– la condamner aux dépens, en ce compris les frais d’expertise.

Par conclusions déposées à l’audience du 18 janvier 2001, les demandeurs demandent au tribunal de leur adjuger le bénéfice de leurs précédentes écritures et de débouter les défendeurs de toutes leurs demandes.

Par conclusions déposées à l’audience du 18 janvier 2001, les défendeurs demandent au tribunal de :

– constater la péremption de l’instance engagée par la société Syn’x Relief,

– juger que cette société n’a pas qualité pour agir en contrefaçon, celle-ci n’étant pas titulaire des droits d’auteur sur le logiciel « Character »,

– prononcer la nullité de la saisie-contrefaçon du 6 novembre 1995,

– prononcer la nullité de la saisie-contrefaçon du 22 février 1996,

– juger que Softimage n’a commis aucun acte de contrefaçon du logiciel Character,

– juger que Softimage n’a commis aucun acte de concurrence déloyale ou de parasitisme,

– débouter les demandeurs de l’intégralité de leurs demandes,

– à titre reconventionnel, condamner conjointement et solidairement Raymond P. et Isabelle C. à verser à Softimage la somme d’un franc à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

– les condamner à lui verser la somme de 500 000 F au titre de l’article 700 du Ncpc, – les condamner aux dépens, en ce compris les frais et honoraires d’expertise.

Par conclusions déposées à l’audience du 8 juin 2001, les demandeurs demandent au tribunal de :

– leur adjuger le bénéfice de leurs précédentes écritures mais, précisant ou modifiant,

– à titre principal, constater que la Sarl Softimage et la société de droit canadien Softimage ont commis des actes de contrefaçon en reproduisant illicitement le logiciel Character dans le logiciel Softimage,

– constater l’appropriation illicite des fonctionnalités et la violation des dispositions contractuelles,

– constater la concurrence déloyale et le parasitisme,

– condamner solidairement la Sarl Softimage et Softimage Inc. à payer aux concluant la somme de 130 millions de francs à titre de dommages-intérêts, outre les intérêts légaux à compter de l’exploit introductif d’instance,

– ordonner la suppression sous astreinte définitive de 100 000 F par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir de tous les éléments ci-dessus qualifiés,

– ordonner l’exécution provisoire,

– condamner les défenderesses au paiement de la somme de 200 000 F au titre de l’article 700 du Ncpc,

– les condamner aux dépens qui comprendront les frais d’expertise.

La discussion

Sur la demande en principal

Raymond P. et Isabelle C. demandent que Softimage soit condamnée pour contrefaçon car elle a reproduit illicitement le logiciel Character dans le logiciel Softimage.

Attendu qu’il est ressorti des débats que le logiciel de Raymond P. et d’Isabelle C. présentait une originalité certaine en ce qu’il permettait de réduire sensiblement le temps de réalisation de dessins animés tout en leur conservant l’impression de mouvements non saccadés recherchés ; que le rapport de l’expert indique que, si la version 3.0 de Creative Environment ne contient pas la fonction “Compute” fournie par Raymond P., il n’est pas douteux que Character fait partie de Creative Environment même si c’est dans une version différente de la version initiale, Raymond P. ayant travaillé lui-même pour adapter son produit aux logiciels de Softimage ; que le tribunal retiendra donc l’accusation de contrefaçon à l’encontre de Softimage.

Sur le quantum du préjudice

Raymond P. et Isabelle C. demandent que leur soit allouée la somme de 130 millions de francs à titre de dommages-intérêts.

Mais attendu que ce montant est sans rapport avec les chiffres qui ont été avancés dans cette affaire, et notamment la redevance minimum de 180 0000 $ par an que Softimage devait verser à Raymond P. pour la période allant de mars 1994 à mars 1995 :

Que Character, le logiciel de Raymond P., a dû être sensiblement remanié pour qu’il soit plus convivial ;

Qu’il ne représente qu’une petite partie du logiciel global, Creative Environment ;

Que, parmi les fonctionnalités revendiquées par Raymond P. et Isabelle C., seule “Compute” représente réellement une innovation ainsi que l’établit le rapport de l’expert ;

Que la demande de Raymond P. et d’Isabelle C. est manifestement et grossièrement excessive ;

Que le tribunal condamnera Softimage à leur payer la somme de 3 millions de francs correspondant à la moitié de trois ans de redevance.

Sur la concurrence déloyale et le parasitisme

Attendu que les demandeurs ont conclu un contrat avec Softimage dans l’espoir de donner à leur produit une diffusion qu’ils n’auraient pas été en mesure d’assurer par eux-mêmes ; que le parasitisme n’est qu’une des modalités par lesquelles peuvent s’exercer des actes de concurrence déloyale ;

Attendu que les demandeurs ne sont en aucune façon des concurrents de Softimage mais qu’ils ont seulement contribué à l’élaboration du produit vendu par celle-ci, Creative Environment ; que, de plus, ils n’ont démontré aucun préjudice de ce fait, ni a fortiori de lien entre les actions de Softimage et leur préjudice ;

Que le tribunal les déboutera de leur demande à ce titre.

Sur les demandes subsidiaires
Attendu que les autres demandes de Raymond P. et d’Isabelle C. ne sont pas justifiées, compte tenu de la décision que prendra ce tribunal ; que celui-ci déboutera les demandeurs de leurs demandes d’interdiction de commercialiser le produit Creative Environment, de confiscation des produits et de publication de la décision.

Sur l’exécution provisoire

Attendu qu’il ne s’agit que du paiement d’une somme d’argent aisément remboursable ; que le tribunal ordonnera la mesure sollicitée sous réserve que les demandeurs fournissent une garantie bancaire de même montant en cas d’appel.

Sur l’article 700 du Ncpc
Attendu que les demandeurs ont dû exposer les frais non compris dans les dépens pour faire valoir leur droit ; qu’il convient de les en dédommager ; que le tribunal condamnera Softimage à leur payer la somme de 40 000 F au titre de l’article 700 du Ncpc, déboutant pour le surplus.

Par ces motifs

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort :

. condamne la Sarl Softimage à payer à Raymond P. et à Isabelle C. la somme de 3 millions de francs à titre de dommages-intérêts pour contrefaçon ;

. ordonne l’exécution provisoire sous réserve qu’en cas d’appel, Raymond P. et Isabelle C. fournissent une caution bancaire égale au montant des condamnations prononcées ;

. condamne la Sarl Softimage aux dépens qui comprendront les frais d’expertise et au paiement de la somme de 40 000 F au titre de l’article 700 du Ncpc, déboutant pour le surplus ;

. déboute les parties de toutes leurs autres demandes.

Le Tribunal : M. Bruno Meynial (président), MM. Soleil et Paulhac (juges).

Avocats : SCP Schermann Masselin, SCP August & Debouzy, Mes Alterman et Danielle Da Palma.

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