Jurisprudence : E-commerce
Tribunal d’instance de Dieppe Juridiction de proximité Jugement du 07 février 2011
Igor D. / Priceminister
droit de rétractation - e-commerce - particulier - vente
FAITS ET PROCEDURE
Par le biais du service d’annonces en ligne de la société Priceminister, Monsieur D. Igor (nom d’utilisateur « Igor xx ») a commandé en date du 5 septembre 2010 auprès d’un vendeur dénommé « Jual xx » un appareil d’occasion robot mixeur Thermomix pour un montant de 180 €.
En date du 6 septembre 2010, Monsieur D. Igor a adressé une demande d’annulation de la commande à la société Priceminister par courrier électronique.
En date du 7 septembre 2010 la société Priceminister informe Monsieur D. de l’impossibilité de bénéficier du délai de rétractation de sept jours la vente ayant été conclue entre particuliers.
Monsieur D. a réitéré sa demande.
En date du 14 septembre 2010, la société Priceminister adresse un courrier électronique mentionnant les modalités d’exercice du droit de rétractation.
Le même jour à 8 heures 27, la société Priceminister adresse un second courrier électronique rectificatif informant Monsieur D. de l’impossibilité de se rétracter du fait que le vendeur est un particulier.
Par déclaration reçue au greffe en date du 17 septembre 2010, Monsieur D. Igor a sollicité :
– La restitution de la somme de 180 € correspondant au prix d’achat du robot, suite à la rétractation effectuée dans le délai de 7 jours.
Au soutien de sa demande, Monsieur D. Igor déclare qu’en sa qualité de consommateur, il bénéficie d’un droit de rétractation accordé par la loi dans le cadre des ventes à distance ou vente à domicile.
En réplique, la société Priceminister soutient que :
– le contrat de vente a été conclu entre Monsieur D. et un vendeur particulier
– la société Priceminister n’est pas le vendeur du produit mais un intermédiaire mettant en relation un vendeur et un acheteur par le biais d’une plate-forme électronique
– l’achat effectué par Monsieur D. via la plate-forme Priceminister n’ouvre pas droit au droit de rétractation prévu à l’article L. 121-20 du Code de la Consommation.
En conséquence la société Priceminister sollicite le débouté de la demande de Monsieur D. ainsi que sa condamnation au paiement d’une somme de 450 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile et aux entiers dépens.
L’affaire a été mise en délibéré le 7 février 2011.
DISCUSSION
Vu l’article 1134 du Code Civil,
Vu l’article L121-16 du Code de la Consommation,
Les dispositions de la présente sous-section s’appliquent à toute vente d’un bien ou toute fourniture d’une prestation de service conclue, sans la présence physique simultanée des parties entre un consommateur et un professionnel qui pour la conclusion de ce contrat utilisent exclusivement une ou plusieurs techniques de communication à distance. Toutefois, elles ne s’appliquent pas aux contrats portant sur des services financiers.
Vu l’article L. 121 20 du code de la consommation,
Le consommateur dispose d’un délai de sept jours francs pour exercer son droit de rétractation sans avoir à justifier de motifs ni à payer de pénalités à l’exception, le cas échéant des frais de retour. Le consommateur peut déroger à ce délai au cas où il ne pourrait se déplacer et ou simultanément il aurait besoin de faire appel à une prestation immédiate et nécessaire à ses conditions d’existence. Dans ce cas il continuerait à exercer son droit de rétractation sans avoir à justifier de motifs ni à payer de pénalités.
La société Priceminister est un service d’annonces en ligne permettant la mise en relation de vendeur annonceur et d’acheteur.
Les conditions générales de vente de la société Priceminister prévoient expressément que :
– « Priceminister n’est en aucun cas revendeur des produits dans le cadre de la mise en relation et n’entre pas, sauf mention disposition particulière figurant au présent contrat, en possession des produits.
– Le contrat de vente est conclu entre l’acheteur et le vendeur sous la condition suspensive de la confirmation de la disponibilité du produit par le vendeur. »
Force est de constater que la société Priceminister ne vend aucun bien, son activité consistant seulement à mettre à disposition de ses utilisateurs une structure fonctionnelle et organisationnelle permettant la conclusion des contrats de vente.
En l’espèce, le vendeur « Jual xx » est un particulier.
La société Priceminister verse aux débats une copie permettant de visualiser des offres de vente sur leurs sites et la distinction entre vendeur particulier et professionnel.
Un macaron « PRO » est accolé au nom d’utilisateur des vendeurs agissant à titre professionnel et permettant de les identifier.
L’article L 121-20 du Code de la Consommation permet à l’acheteur de disposer d’un droit de rétractation pour les ventes conclues à distance et notamment par le biais du commerce électronique.
L’article L. 121-16 du code de la consommation prévoit expressément que cette prérogative de rétractation ne trouve à s’appliquer que lorsque le contrat de vente à distance a été conclu par un consommateur avec un vendeur professionnel.
La transaction litigieuse a été réalisée de particulier à particulier, en conséquence l’acquéreur ne pourra bénéficier du droit de rétractation.
Monsieur D. ne pourra se prévaloir des dispositions relatives au démarchage à domicile, la technique du commerce électronique relevant du régime des ventes à distance.
En tout état de cause, l’ensemble de ces régimes protecteurs du consommateur ne s’applique qu’en présence d’une transaction entre particuliers et professionnels.
Monsieur D. soutient que la société Priceminister aurait validé sa demande de rétractation dans sa correspondance électronique du 14 septembre 2010.
En effet, une erreur a été commise dans l’envoi de ce courrier électronique mentionnant les modalités d’exercice du droit de rétractation.
Néanmoins, il convient de préciser que la société Priceminister :
– avait déjà indiqué par correspondance électronique adressée à Monsieur D. en date du 7 septembre 2010 que faute pour le vendeur d’être professionnel il ne saurait y avoir au droit de rétractation au profit de l’acquéreur.
– a adressé une correspondance électronique rectificative en date du 14 septembre 2010 mentionnant l’absence de droit de rétractation.
Force est de constater que Monsieur D. ne pourra bénéficier d’un droit de rétractation, la vente ayant été conclue entre particuliers.
Il y aura lieu de débouter Monsieur D. de sa demande de remboursement de la somme de 180 €.
Il n’y aura pas lieu de condamner Monsieur D. lgor sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile, en raison du principe d’équité.
Monsieur D. Igor perdant à l’instance, sera tenu aux entiers dépens.
DECISION
La Juridiction de Proximité statuant publiquement, par jugement contradictoire et en dernier ressort :
– Déboute Monsieur D. Igor de sa demande de restitution de la somme de 180 €.
– Dit n’y avoir lieu l’application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
– Condamne Monsieur D. Igor au paiement des entiers dépens.
Le tribunal : Béatrice Morival (juge de Proximité)
Notre présentation de la décision
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