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Jurisprudence : E-commerce

mardi 11 janvier 2011
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Tribunal d’instance de Nîmes Jugement du 4 janvier 2011

Marilyn S. / Price Minister, Lionel M.

confirmation - conseil - défaut - e-commerce - livraison - paiement - réserve - vente - vice caché

FAITS ET PROCEDURE

Mme S. a acheté à M. M., par l’intermédiaire du site internet Price Minister, pour le prix de 1500 € un monte-escalier. Le matériel a été livré chez elle par le vendeur le 1er novembre 2009.

Par acte d’huissier en date des 10 mars et 30 avril 2010, Mme S. fait citer M. M. et la société Price Minister.
Elle demande au tribunal de les condamner solidairement à lui rembourser la somme de 1500 €, correspondant au prix de vente du monte-escalier et à lui payer la somme de 3000 € à titre de dommages-intérêts.

Elle expose que, à réception, il s’est avéré que le matériel ne pouvait être monté et mis en service dans la mesure où des pièces étaient à remplacer ou manquantes. La société « Cévennes aménagement”, professionnel mandaté a constaté l’état du matériel, qu’il a refusé de réparer en raison du coût trop élevé de la réparation nécessaire.
Elle a alerté son vendeur par téléphone, puis a saisi de la difficulté la société Price Minister, par mail du 10 novembre 2009, puis lettre recommandée du 26 novembre 2009.
Elle estime que le matériel vendu est affecté d’un vice caché le rendant impropre à l’usage auquel il était destiné et que la société Price Minister n’aurait pas dû débloquer le prix de vente entre les mains de M. M., dans la mesure où elle a formulé sa réclamation dans les 6 semaines de la vente (application des articles 4-3 et 4-4 des conditions générales).
Elle précise qu’elle avait acheté ce matériel pour sa mère qui devait venir en longue convalescence à son domicile, et a dû en l’état de l’impossibilité de l’installer prendre un crédit pour faire installer en urgence un autre matériel neuf.

M. M. soulève l’incompétence territoriale de ce tribunal, au profit du tribunal d’instance d’Aix-en-Provence, en l’état de son domicile, et subsidiairement conclut au débouté, et à la condamnation de Mme S. à lui payer la somme de 2600 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il développe, notamment, l’argumentation suivante :
– sur l’incompétence Mme S. a commandé sur internet un matériel mais non sa livraison non prévue au contrat (rubrique “frais de port et suivi » non cochée mention mode de livraison retrait chez le vendeur). L’option de l’article 46 aIinéa 2 du Code de procédure civile ne trouve donc pas à s’appliquer en l’espèce
– au fond Mme S. a commis une faute qui est l’unique cause du dommage et produit dès lors un effet totalement exonératoire de sa responsabilité. Elle a en effet détérioré l’appareil en tentant de le monter elle-même avec son gendre, alors qu’il s’agit d’un matériel qui doit être installé par un professionnel ainsi qu’en attestent diverses sociétés dont le fabriquant du monte-escalier vendu.

La société Price Minister conclut au débouté, estimant n’avoir commis aucune faute contractuelle et demande paiement de la somme de 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle expose qu’elle est une plate-forme technique de mise en relation de vendeurs et d’acheteurs (donc un intermédiaire et non un cyber-marchand). Dans le cadre de son intervention existent donc un contrat de mandat la liant au vendeur et un contrat de service la liant à l’acheteur outre le contrat de vente entre vendeur et acheteur. Concrètement elle perçoit le prix de vente qui est placé sur un compte-séquestre, et ne procède au paiement entre les mains du vendeur que lorsque l’acheteur a confirmé la bonne livraison de la marchandise.
Elle développe notamment l’argumentation suivante :
– Mme S., qui a reçu livraison du monte-escalier alors qu’elle devait aller en prendre possession, a, dès le 1ernovembre 2009, confirmé sa réception conforme notant le vendeur avec une note 5/5 et un commentaire élogieux. Ce faisant, elle a souverainement autorisé le paiement du vendeur, dans les conditions prévues à l’article 7-5 des conditions générales d’utilisation du site
– de ce fait, sa réclamation formalisée ultérieurement était vaine (puisque Price Minister s’était dessaisi du prix dans les conditions prévues)
– elle a par ailleurs exécuté sans faute le mandat donné par M. M. et a traité sérieusement et avec diligence les réclamations de Mme S. qui ont été transmises au vendeur
– Mme S. a elle-même commis un faute ayant contribue à la réalisation de son dommage en ne vérifiant pas lors de la livraison la présence de toutes les composantes du monte-escalier et en ne confiant pas son installation à un professionnel.

En réponse, Mme S. développe notamment l’argumentation suivante :
– sur la compétence ce tribunal est compétent en application de l’article 46 alinéa 2 du Code de procédure civile du fait de la livraison effective du matériel par le vendeur à son domicile
– M. M. lui a vendu un matériel qui ne pouvait fonctionner en l’état de nombreuses pièces manquantes ou à remplacer, pour un coût trop important en rapport au coût d’un appareil neuf (butée de fin de course, transformateur, platine moteur, batteries télécommande). Elle maintient donc sa demande de remboursement du prix de vente à l’encontre de M. M. précisant que le matériel est à sa disposition chez ses parents à Villeviaille
– dans son certificat de retrait adressé à Price Minister lors de la réception du monte-escalier, elle a émis des réserves quant au fonctionnement du matériel. Le prix de vente n’aurait donc pas dû être débloqué au profit du vendeur.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il y a lieu de se référer à leurs conclusions respectives, oralement soutenues, expressément visées ici en application de l’article 455 du code de procédure civile.

DISCUSSION

Sur la compétence

Il est constant que, alors même que la transaction prévoyait que le matériel acheté devait être retiré par l’acheteur et non livrée, le monte-escalier objet du contrat a en réalité été livré par M. M. au domicile de Mme S. Cela résulte tant du commentaire de Mme S. dans sa confirmation de réception, que des courriers de M. M. lui-même (cf. courrier adresse à l’acheteuse en novembre 2009 et courrier à l’UFC-Quechoisir du 25-01-2009).

L’article 46-2 du Code de procédure civile prévoit la possibilité, en matière contractuelle, de saisir le tribunal du lieu de la “livraison effective » de la chose.

De jurisprudence, il y a lieu de prendre en compte le lieu où la livraison est matériellement intervenue et non celui où elle aurait dû intervenir (Com 3 nov 1988 Bull. Civ. IV N° 291).

Dans ces conditions, et Mme S. étant domiciliée à Sommières (30250) ce tribunal est bien compétent pour connaître du litige.

Sur la demande dirigée contre M. M.

Cette demande est fondée sur la garantie des vices cachés. Mme S. soutenant que le monte-escalier livre par M. M. était impropre à l’usage auquel il était destiné.

Elle s’appuie sur un écrit de la société Cévennes aménagement, attestant de ce que diverses pièces sont à remplacer pour son fonctionnement, pour un coût trop important en rapport au coût d’un appareil neuf.

II appartient à l’acheteur, qui soutient que le bien acheté est affecté d’un vice caché, de rapporter la preuve de ce que le vide allégué est antérieur à la vente.

Or, en l’espèce, il résulte de la réclamation telle que formulée par Mme S. notamment dans un courriel adressé à Price Minister le 9 novembre 2009, que la difficulté rencontrée se caractérise par le fait que lors du montage que Mme S. a tenté de faire avec son gendre, un court-circuit s’est produit suite à une défaillance du circuit imprimé.

M. M. pour sa part établit, par la production d’écrits émanant de trois professionnels le fait que l’installation d’un monte-escalier tel que vendu nécessite des compétences techniques et doit être confié à un professionnel.
Il souligne, sans être contredit, que lorsqu’il est venu au domicile de Mme S. pour lui apporter le monte-escalier il a signalé cette nécessité.

Dans ces conditions, il apparaît que Mme S. ne rapporte pas la preuve de ce que le dysfonctionnement du monte-escalier litigieux trouve son origine dans l’existence d’un vice caché antérieur à la vente, et non dans un montage défectueux réalisé par un non-professionnel et ayant généré un court-circuit endommageant l’appareil.

En conséquence, elle sera déboutée de sa demande dirigée contre M. M. lequel, vendeur non professionnel, n’était pas débiteur d’une obligation spécifique d’information et de conseil.

Sur la demande dirigée contre la société Price Minister

La société Price Minister intervient, dans le cadre de ventes par internet, en tant qu’intermédiaire ou plate-forme technique de mise en relation du vendeur et de l’acheteur.

Les conditions générales définissant son intervention mentionnent qu’elle ouvre, pour le compte du vendeur un compte séquestre des sommes perçues au cours de la transaction.

L’article 7-5 de ces mêmes conditions générales prévoit : « Dès la réception des produits commandés, l’acheteur confirmera leur conformité à la commande. A défaut, l’acheteur déposera une réclamation. Si au bout de six semaines à partir de la date d’un achat aucune confirmation ou réclamation n’a été reçue la transaction est réputée parfaite. La transaction est également réputée parfaite dès confirmation de la part de l’acheteur ».

En l’espèce, il est constant que Mme S. a confirmé la réception du matériel et noté le vendeur 5/5 le 1er novembre 2009.

Par ailleurs, la société Price Minister produit une copie de la page-écran faisant apparaître la fenêtre d’avertissement qui s’ouvre sur l’ordinateur de l’acheteur lors de sa confirmation de la bonne réception de la marchandise, au cours de laquelle il attribue une note au vendeur assortie le cas échéant d’un commentaire. Cet avertissement est ainsi rédigé « Confirmation de réception. L’attribution de la note vaut confirmation de réception et autorise Price Minister à payer le vendeur ».

Dans ces conditions, le fait que parallèlement Mme S. a omis une réserve quant au fonctionnement du monte-escalier dans le certificat de retrait fait en deux exemplaires conservés uniquement par l’acheteur et le vendeur est inopérant et Mme S. est mal fondée à reprocher à la société Price Minister d’avoir versé à M. M. le prix convenu pour la vente.

Par ailleurs la société Price Minister a par la suite traité normalement la réclamation de Mme S. en en transmettant les termes au vendeur, puis en transmettant en retour la réponse du vendeur.

Dans ces conditions, aucune faute contractuelle ne peut être retenue à l’encontre de la société Price Minister.

Mme S. sera donc déboutée de sa demande dirigée contre elle.

Sur application de l’article 700 du Code de Procédure Civile

L’équité ne justifie pas qu’il soit fait application en l’espèce de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

DECISION

Par ces motifs, le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire et en premier ressort,

. Se déclare compétent,

. Déboute Mme S. de sa demande,

. Dit n’y avoir lieu de faire application de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

. Dit que Mme S. supportera les dépens.

Le tribunal : M. Jean Launay (président)

Avocats : Me Texier, Me Le Guen

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