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lundi 13 février 2012
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Typosquatting : atteinte au nom de domaine, au nom commercial, à la marque et au droit d’auteur

 

La cour d’appel de Paris confirme et alourdit les sanctions prononcées par le TGI de Paris contre la société Web Vision qui, par la pratique du typosquatting, avait bénéficié d’une rémunération indue chaque fois qu’un internaute saisissait le nom du site 2xmoinscher.com en commettant certaines fautes de frappe. Dans son arrêt du 30 novembre 2011, elle condamne Web Vision à verser 15 000 € de dommages-intérêts à Trockers, l’éditeur du site typosquatté, et ajoute 30.000 € pour les frais de publication, avec consignation des fonds chez le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Paris, et enfin 20.000 € au titre des frais de justice.

Web Vision avait réservé deux noms de domaine très proches de 2xmoinscher.com, plateforme de mise en relation des internautes pour la vente de biens neufs ou d’occasion éditée par Trockers. Lors de la saisie de 2xmoinschers.com et de 2moinscher.com, une redirection se mettait en place vers le site Cibleclick puis vers 2xmoinscher.com : Trockers et Web Vision étant tous deux affiliés au réseau de régie publicitaire de Cibleclik. En orientant les internautes vers 2xmoinscher.com, Web Vision percevait ainsi les commissions versées par Trockers via Cibleclick.
Le TGI n’avait reconnu que les atteintes au nom de domaine et la cour confirmé ce point. Elle rappelle que Web Vision avait réservé ces noms de domaine pour se procurer un avantage économique généré par la valeur propre de ceux qu’elle avait copié en les déformant. Elle infirme cependant le jugement sur plusieurs points. Elle reconnaît d’abord l’atteinte au nom commercial 2xmoinscher.com qu’exploite Trockers et surtout la contrefaçon de marque. Ces imitations ont été conçues pour tromper le public qui ne se rendait pas compte qu’il suivait à son insu un chemin détourné vers les produits désirés. Pour la cour, même si ces actes n’ont pas pour but d’attirer les internautes vers des biens concurrents exploités par la marque légitime, puisque Web Vision n’exerce aucune activité dans le secteur de Trockers, la cour estime néanmoins que la contrefaçon de marque est caractérisée « dès lors qu’il concourt à désigner, ainsi que le prévoit l’article L.713-3, b, du code de la propriété intellectuelle « des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement ».» La cour reconnaît aussi l’atteinte au droit d’auteur du site de mise en relation, non pas pour reproduction non autorisée puisque le contenu du site n’a pas été copié mais pour représentation illicite. Les juges d’appel ont considéré que « Web Vision a communiqué ce site au public par un moyen non autorisé et ainsi procédé à une exploitation de ce site distincte de celle initialement souhaitée par son titulaire ». En revanche, ils excluent la contrefaçon sur le titre du site « à supposer démontré que l’expression 2xmoinscher.com puisse être regardée comme le titre du site internet de la société Trokers présentant en lui-même un caractère original, que force est de constater que la société Web Vision n’a pas utilisé ce titre pour individualiser une œuvre du même genre puisque, comme il a été précédemment indiqué, elle n’a élaboré elle-même aucun site internet ».