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mardi 26 janvier 2016
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Compétence du tribunal français pour des photos diffusées sur un site belge

 

Dans un arrêt très clairement motivé du 21 janvier 2015, la cour d’appel de Versailles a réaffirmé la compétence des juridictions françaises pour des atteintes au droit à l’image et aux droits d’artiste-interprète d’une comédienne française dont des photos d’elle avaient été diffusées, sans son accord, sur un site belge. Ce dernier avait soulevé l’incompétence du tribunal de Nanterre, invoquant l’article 2. 1 du règlement européen du 22 décembre 2000 qui pose le principe de la compétence de la juridiction du lieu du défendeur. Or, rappelle la cour, le règlement a aussi prévu, au titre des compétences spéciales, qu’une personne domiciliée dans un Etat membre, en l’occurrence la Belgique, peut être attraite dans un autre Etat, la France dans cette affaire, en matière délictuelle ou quasi délictuelle, devant le tribunal où le fait dommageable s’est produit. La Cour de justice de l’UE avait justement eu à se prononcer dans l’arrêt eDate Advertising sur une atteinte aux droits de la personnalité d’un comédien pour la mise en ligne de contenus non autorisés et elle avait estimé que la personne lésée peut saisir le tribunal de l’Etat membre dans lequel se trouve le centre de ses intérêts. Et dans un arrêt du 22 janvier 2015, la CJUE avait cependant précisé que cette juridiction n’est compétente que pour connaître du seul dommage causé sur le territoire de son ressort.

En application du droit européen, la cour de Versailles a jugé que le centre des intérêts de l’actrice française était bien situé en France, lieu où elle est née, où elle travaille et où réside sa famille. Un tribunal français est donc bien compétent pour connaître de l’atteinte alléguée à son droit à la personnalité pour la réparation de l’intégralité du dommage causé et de l’atteinte à ses droits voisins d’artiste-interprète pour le seul dommage causé sur le territoire français. Par ailleurs, le constat ayant été réalisé à Colombes, ville du ressort du TGI de Nanterre, ce tribunal est par conséquent compétent en vertu des règles de compétence interne figurant à l’article 46 du code de procédure civile.
Dans cette affaire, le site Sudpresse.be avait mis en ligne une galerie de douze photos de la comédienne intitulée « M. X. se laisse voir seins nus sur le tournage ». Certaines photos avaient été prises alors qu’elle interprétait le rôle du film. Pour la cour, la fixation puis la diffusion de la prestation de l’actrice, sans son autorisation, en plus tronquée, constituent une atteinte à ses droits d’artiste-interprète. Et les clichés la montrant dans ses moments d’attente entre deux prises ou lors d’une pause constitue une atteinte à son droit à l’image, peu importe que le tournage se soit déroulé dans un lieu public.