Jurisprudence : Responsabilité
Cour d’appel de Paris 9ème chambre, section A Arrêt du 23 janvier 2007
Ministère public / Mohamed E.
adresse IP - e-commerce - escroquerie - vente en ligne
FAITS ET PROCÉDURE
La prévention
Mohamed E. a été renvoyé devant le tribunal correctionnel de Paris par ordonnance du juge d‘instruction en date du 04 juillet 2005, sous la prévention d’avoir à Paris, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, en employant des manoeuvres frauduleuses, en l’espèce en mettant fictivement en vente divers objets sur internet, et notamment sur le site eBay, trompé diverses personnes telles que recensées sur la liste figurant en cote D 507, afin de les déterminer à remettre des fonds, le préjudice total s’élevant à la somme de 111 582,16 €,
faits prévus et réprimés par les articles 313-1, 313-3, 313-7 et 313-8 du Code pénal.
Le jugement
Le tribunal, par jugement contradictoire, a déclaré Mohamed E. coupable d’escroquerie, courant 2001, à Paris et sur le territoire national, infraction prévue par l’article 313-1 al. 1, al. 2 du Code pénal et réprimée par les articles 313-1 al. 2, 313-7, 313-8 du Code pénal
l’a condamné sur l’action publique à 18 mois d’emprisonnement avec sursis et 5 000 € d’amende ;
a rejeté la demande de non inscription au bulletin n°2 du casier judiciaire ;
sur l’action civile :
a reçu la constitution de partie civile de James C., Stéphan L., Kenneth K.,
l’a condamné à payer solidairement avec Mahmoud N. les sommes de :
– 6 122,73 € à James C.
– 1 568,95 € Stéphan L.
– 1 542,82 € à Kenneth K.
a débouté la partie civile, Kenneth K., du surplus de sa demande
Les appels
Appel a été interjeté par :
Monsieur Mohamed E., le 18 novembre 2005 sur les dispositions civiles et pénales
M. le procureur de la République, le 18 novembre 2005 contre Mohamed E.
[…]
DISCUSSION
Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi,
En la forme
Considérant que les appels de Mohamed E. et du ministère public ont été interjetés dans les formes et délais de la loi ; qu’ils seront en conséquence déclarés recevables ;
Considérant que Stéphan L., Kenneth K. et James C., parties civiles, cités à parquet étranger, ne se sont pas présentés, ni fait représenter, qu’il sera statué par défaut à leur égard ;
Au fond
Considérant que référence faite aux énonciations du jugement déféré pour plus ample rappel des faits, il convient de rappeler, qu’à la suite d’un signalement du secrétaire général du “Traitement du Renseignement et Action contre les Circuits Financiers clandestins” (Tracfin), qui avait des soupçons concernant Mahamoud Abdel R. N. Mohamed, lequel avait bénéficié sur son compte chèques postaux de neuf virements reçus du 7 au 14 août 2001 en dollars américains équivalents à 494 000 francs, et dont les donneurs d’ordre étaient tous différents, et avait ainsi constaté une divergence entre le libellé de l’identité du bénéficiaire de ces virements et l’identité du bénéficiaire du compte ouvert auprès des chèques postaux de Bretagne, l’intéressé déclinant son identité sous plusieurs combinaisons et orthographes différentes, une enquête était confiée à l’office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication, qui révélait qu’une trentaine de victimes, toutes ressortissantes étrangères, représentant un préjudice de 111 582,16 €, s’étaient connectées sur le site “ebay”, site de commerce en ligne de vente de particulier à particulier, et que 21 d’entre elles avaient réglé leurs enchères par virements, soit sur le compte de Mahamoud N., soit sur le compte d’un dénommé El. S., ou par mandats postaux à Mahmoud N. ; qu’or en l’espèce les produits proposés étaient fictifs ;
Considérant que Mahmoud N. alias “M. M. », expliquait, que connaissant Mohamed E. depuis deux ans, ce dernier lui avait demandé un relevé d’identité bancaire pour faire rentrer de l’argent de Belgique en France et qu’après lui avoir fourni un “RIB”, il avait constaté sur son compte des virements en dollars, et avait ensuite retiré l’argent en espèces pour le remettre à Mohamed E., il avait agi de même avec les mandats postaux ; que pour ce faire il avisait par téléphone Mohamed E. de l’arrivée des virements sur son compte aux fins de lui remettre les espèces ;
Considérant que Mahmoud N. a été déclaré coupable de complicité d’escroquerie à titre définitif par les premiers juges ;
Considérant que Mohamed E. a fait plaider sa relaxe à titre principal et, subsidiairement, a sollicité l’indulgence de la cour, notamment la non inscription de la condamnation au bulletin numéro deux de son casier judiciaire ;
Considérant que les déclarations de Mahmoud N. sont corroborées par les éléments de l’enquête qui a établi :
– qu’au vu des renseignements communiqués par les victimes ou par “e-bay”, que lors de l’inscription des enchérisseurs chez “ebay” et dans leurs contacts avec ces derniers, les “vendeurs” avaient utilisés deux logins “Kingyoga” et “cnet2”, lesquels correspondaient aux adresses “IP » attribuées au moment de la connexion, pour le premier le 2 mai 2001 et pour le second le 23 mars 2001, à Monsieur Mohamed E., domicilié à Paris ;
– que le téléphone portable de M. M. (Mahmoud N.), pour la période de juillet à octobre 2001, avait enregistré plus de 90 communications avec le numéro de portable 06 72 …attribué à Mohamed E. ; ce dernier les expliquant par le fait que Mahmoud N. lui avait demandé de lui rendre service pour une affaire concernant son frère qui avait des ennuis en Egypte ;
– que les comptes de Mohamed E. avaient enregistrés de nombreux dépôts en espèces pendant la période suspecte, notamment le compte “BNP Paribas” du 2 août 2001 au 10 octobre 2001 pour une somme de 16 982 €, et le compte “Société Générale” une remise de chèque de 30000 francs le 22 août 2001 et un versement d’espèce de 1372,04 € le 3 octobre 2001, alors qu’à cette époque ce dernier ne travaillait pas, et qui n’a pu donner comme seule explication qu’il s’agissait d’argent de poche donné par son père ;
Considérant que devant le tribunal Mohamed E. a versé deux rapports d’expertise, précisant qu’une adresse “IP” pouvait faire l’objet de piratage ;
Mais considérant, ainsi que les premiers juges l’ont relevé pertinemment, les rapports ont été déposés tardivement, interdisant toute possibilité d’investigations complémentaires, et surtout que l’un des expert a noté “qu’il conviendrait de procéder à une analyse poussée du poste informatique pour lequel les adresses “IP” ont été retrouvées” ; qu’or Mohamed E., qui a toujours indiqué en cours d’enquête que le poste informatique en sa possession pendant la période des faits était en Egypte chez sa soeur, s’est bien gardé, alors même qu’il était allé en Egypte au cours de l’instruction, de mettre cet ordinateur à la disposition de la justice pour que soit effectuée cette véritable expertise contradictoire ;
Considérant dès lors, au vu de l’ensemble de ces constatations, que le délit d’escroquerie tel que visé à la prévention est caractérisé en tous ces éléments à l’égard de Mohamed E. ;
Considérant que la cour estime que les premiers juges ont fait une exacte application de la sanction pénale ;
Qu’en conséquence le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions pénales ;
Considérant que compte tenu des circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu à faire droit à la demande de non inscription de la condamnation au bulletin numéro deux du casier judiciaire du prévenu ;
Sur l’action civile
Considérant que compte tenu de la déclaration de culpabilité intervenue à l’égard du prévenu, la cour estime que les premiers juges ont fait une exacte appréciation du préjudice direct et actuel des parties civiles résultant des agissements frauduleux de Mohamed E. ;
Qu’en conséquence le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions civiles ;
DECISION
La cour statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de Mohamed E., par défaut à l’égard de Levy L., Kenneth K. et James C., et en second ressort ;
En la forme
. Reçoit les appels de Mohamed E. et du ministère public ;
Au fond
. Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions pénales et civiles ;
. Dit que si le condamné s’acquitte du montant de l’amende dans un délai d’un mois à compter de ce jour, ce montant est diminué de 20 % sans que cette diminution puisse excéder 1 500 euros ;
. Dit que le paiement ne fait pas obstacle à l’exercice des voies de recours ;
. Dit n’y avoir lieu à faire droit à la demande de non inscription de la présente condamnation au bulletin numéro deux du casier judiciaire de Mohamed E.
La cour : Mme Beauquis (président), M. Morel et Mme Filippini (conseillers)
Avocat : Me Mohamed El Accad
Voir décision de Cour de cassation
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