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La « taxe Sacem » objet de distorsion de concurrence entre sites français et étrangers
La redevance pour copie privée sur les supports d’enregistrement peut-elle encore se maintenir en l’état alors qu’elle génère des distorsions de concurrence entre opérateurs de commerce électronique français soumis à la « taxe Sacem » et leurs concurrents européens qui ne la paient pas ? C’est toute la question posée par le contentieux qui oppose le site français rueducommerce.com à plusieurs opérateurs de commerce électroniques européens.
Dans le dernier épisode d’un feuilleton judiciaire commencé en 2005, la cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 25 janvier 2007, a condamné les sites étrangers concernés à liquider les astreintes (entre 22 600 et 47 500 euros) qu’ils auraient dû payer pour n’avoir pas respecté l’injonction ordonnée par le tribunal de commerce de Bobigny, le 15 septembre 2005. Celle-ci leur avait fait obligation d’insérer les informations sur la redevance dans leur publicité en ligne, apparaissant notamment sur les sites comparateurs. Et la cour d’appel est allée plus loin en élevant l’astreinte prévue par le tribunal de Bobigny de 200 euros à 10 000 euros pendant six mois.
Des sites concurrents implantés dans l’Union européenne ont su tirer profit du caractère territorial du dispositif français de rémunération pour copie privée pour proposer à la vente des CD et DVD vierges sans payer cette redevance. Rappelons qu’elle s’élève à 0,35 euros HT sur les CD et à 1,58 euros HT sur les DVD. Dans ces conditions, les sites français qui respectent leur loi nationale ne peuvent absolument pas être concurrentiels. Et c’est sur ce terrain que la rueducommerce a exercé son action.
Dans sa décision du 15 septembre 2005, le tribunal de Bobigny avait estimé que les sites étrangers n’accomplissaient aucun acte déloyal en ne payant pas la redevance française. Selon l’article L 311-4 du code de la propriété intellectuelle, seul le fabricant, l’importateur ou la personne qui réalise les acquisitions de supports en question sont redevables de cette rémunération. Or, les sites étrangers n’entrent dans aucun des trois cas, et notamment pas celui d’importateur car ils sont originaires d’un Etat membre de l’UE. En revanche, l’internaute français qui achète ces produits doit la payer. Mais en ne prévenant pas le consommateur français sur les conditions d’achat auxquelles il est soumis, les sites en question l’exposent à des sanctions pénales puisqu’il devient contrefacteur. C’est la raison pour laquelle le tribunal avait enjoint les sociétés en question de cesser toute publicité à destination d’un public français qui ne mentionne pas de manière explicite et précise l’obligation pour l’acquéreur français d’acquitter la « taxe Sacem ». Il avait, en outre, ordonné aux sites concernés d’insérer une telle mention dans leurs conditions générales de vente.
Si la dernière injonction n’a pas posé trop de difficulté, la première n’a pas été respectée. Dans son arrêt du 25 janvier dernier, la cour d’appel de Paris a refusé d’admettre l’argument des sites étrangers selon lequel il leur serait impossible matériellement d’introduire la mention en question dans leur publicité en ligne en raison des formats imposés.