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Jurisprudence : E-commerce

lundi 21 juillet 2008
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Juridiction de proximité de Vanves Jugement du 5 octobre 2007

Olivia L. / Opodo

e-commerce

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte d’huissier en date du 22 décembre 2006, Mademoiselle Olivia L. a fait délivrer assignation au fond à la société Opodo aux fins de l’entendre condamner à lui payer ;
– la somme de 709,29 € au titre du remboursement du billet d’avion
– la somme de 150 € au titre des frais
– la somme de 1000 € au titre du préjudice moral, corporel financier
– la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La juridiction de proximité de Vanves a été saisie suite au jugement d’incompétence du 22 février 2007 du tribunal d’instance de Vanves des demandes de Mademoiselle Olivia L.

L’affaire a été appelée à l’audience du 11 mai 2007, puis à celle du 6 juin 2007, et à cette audience l’affaire a été renvoyée à celle du 7 septembre 2007 où elle a été entendue.

Mademoiselle Olivia L. comparait et y reprend ses demandes au soutien desquelles elle expose qu’elle a commandé sur internet auprès de la société Opodo en date du 8 mars 2006 un billet aller-retour Paris Doha via Milan et Rome pour le retour,

Le départ était prévu le 7 avril 2007 sur la compagnie aérienne Alitalia à 21 heures au départ de l’aéroport Roissy Charles de Gaulle ; le vol de retour était prévu le 23 avril 2006.

Mademoiselle Olivia L. s’est présentée à l’aéroport le 7 avril 2006 à 19 heures 15 au service d‘enregistrement des bagages et à ce moment a été informée que le vol pour Milan avait été avancé à 18 heures 25 car le vol de Milan pour Doha avait été avancé.

Mademoiselle Olivia L. a téléphoné pour obtenir une reprotection immédiate à la société Opodo, ou dans les jours suivants. Puis, elle a demandé le remboursement de son billet.

La société Opodo lui a proposé de la reprotéger sur le vol du 10 avril 2006 mais la société Opodo est revenue sur sa proposition, suite au refus de la compagnie aérienne Alitalia.

Mademoiselle Olivia L. a demandé le remboursement de son billet par mails et par lettre recommandée en date du 12 avril 2006 ainsi que le remboursement des frais engendrés ;

Le conseil de Mademoiselle Olivia L. a renouvelé ses demandes par l’envoi d’autres courriers recommandés en date du 9 mai 2008, du 8 juin 2006, et du 19 septembre 2006.

Mademoiselle Olivia L. sollicite l’application de l’article 20 de la loi n°92-645 du 13 juillet 1992, car elle soutient que la société Opodo avait l’obligation de l’informer du changement d’horaires, en confirmant ce changement par écrit,

Mademoiselle Olivia L. soutient que la société Opodo est responsable de plein droit en application de l’article L121-20-3 du code de la consommation,

Mademoiselle Olivia L. soutient avoir subi un préjudice car elle se rendait à Doha pour rencontrer la famille de son ami ; et de plus elle a subi un préjudice financier et un préjudice corporel.

La société Opodo comparait et conteste les demandes de Mademoiselle Olivia L.

La société Opodo exposa que suite à l’achat du billet par Mademoiselle Olivia L., la compagnie aérienne Alitalia a informé la société Opodo le 27 mars 2006 via le système informatique de réservation de l’avancement du vol Milan-Doha AZ7016 à 22 heures 55 au lieu de 23 heures 30 le 7 avril 2006, puis le lendemain la compagnie aérienne Alitalia I’a confirmé par courrier.

Le jour même, la société Opodo a tenté de joindre Mademoiselle Olivia L. par téléphone au numéro indiqué lors de sa réservation pour l’avertir de ses changements.

La société Opodo n’ayant pu la joindre directement lui a envoyé un mail à la même adresse que celle qu’utilisée pour la réservation des billets.

Ce jour, Mademoiselle Olivia L. a été alors reprotégée sur le vol AZ7351 dont le départ était prévu le 7 avril 2006 à 18 heures 25 à l’aéroport Roissy Charles de Gaulle et arrivant à Milan à 20 heures.

De plus, Mademoiselle Olivia L. a contacté le service client le 6 avril 2006 pendant 9 minutes, à ce moment l’avancement de son vol lui a été confirmé ainsi que ses billets étaient non échangeables et non remboursables.

Mais, Mademoiselle Olivia L. s’est quand même présentée le 7 avril 2006 disant n’avoir seulement à ce moment connaissance de l’avancement du vol.

La société Opodo a proposé une reprotection pour le 10 avril, mais la compagnie aérienne Alitalia a refusé au motif que Mademoiselle Olivia L. ne s’était pas présentée à l’heure prévue à l’enregistrement et qu’elle ne s’était pas rendue au comptoir de la compagnie aérienne Alitalia de l’aéroport le jour même pour trouver une solution,

Mademoiselle Olivia L. a alors sollicité par mail le remboursement du billet et la société Opodo lui a répondu de faire parvenir une liste précise des documents et la société Opodo a envoyé un mail récapitulant l’historique du dossier.

La société Opodo sollicite l’inopposabilité de l’article L 121-20-3 du code de la consommation et sollicite de sursis à statuer au motif que l’article 15 de la Loi sur la Confiance dans l’Economie Numérique du 21 juin 2004 devenu l’article L121-20-3 du code de la consommation étant une règle technique spécifique aux services de l’information, la directive transparence lui est applicable et donc cette règle technique doit être notifiée è la commission européenne et aux états membres avant que celle-ci soit adoptée par leurs droits nationaux

D’autre part, la société Opodo déclare que cet article du code de la consommation est inopposable car il s’agit d’un article de portée générale et contraire aux dispositions du code du tourisme en application de l’adage « generalia specialibus non derogant ».

La société Opodo expose que l’article L211-18 du code du tourisme est seul applicable qui dispose que le régime de responsabilité de plein droit des agences de voyage prévu à l’article L211-17 du même code est exclu notamment en cas de réservation ou de vente relative à des titres de transport aérien n’entrant pas dans le cadre d’un forfait touristique, et donc en cas de vols secs.

La société Opodo a vendu un vol sec à Mademoiselle Olivia L. et donc il s’agit d’un contrat de mandat et les conditions générales de vente de la société Opodo sont explicites à ce sujet.

Mademoiselle Olivia L. a accepté les conditions générales de ventes du site Opodo et donc la société Opodo est un intermédiaire et par conséquent tiers au contrat de transport conclu entre la compagnie aérienne Alitalia.

La société Opodo soutient qu’il n’y a pas de faute de sa part, Mademoiselle Olivia L. a été avisée du changement d’horaires. Et, en ce qui concerne la reprotection de Mademoiselle Olivia L. ce n’est pas la société Opodo qui a refusé de la reprotéger mais la compagnie aérienne Alitalia.

Certes, Mademoiselle Olivia L. soutient ne pas avoir reçu le mail, mais celui-ci a été envoyé à l’adresse où la société Opodo (d’autres mails) lui avait été précédemment envoyé, ceux-ci avaient bien été reçus par Mademoiselle Olivia L.

D’autre part Mademoiselle Olivia L. a appelé pendant 9 minutes la société Opodo pour s’informer des conditions d’annulation et de modifications de ses billets d’avion reçus,

L’affaire entendue est mise en délibéré pour jugement au 5 octobre 2007.

DISCUSSION

Aux termes de l’article 1315 du Code Civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit le prouver,

Aux termes de l’article L 121-20.3 du code de la consommation, le professionnel est responsable de plein droit à l’égard du consommateur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat conclu à distance, que ces obligations soient à exécuter par le professionnel qui a conclu ce contrat ou par d’autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.

Aux termes de l’article L211-17 du code du tourisme, toute personne physique ou morale qui se livre aux opérations mentionnées à l’article L. 211-1 est responsable de plein droit à l’égard de l’acheteur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat, que ces obligations soient à exécuter par elle-même ou par d’autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci,

Toutefois, elle peut s’exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que l’inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable soit à l’acheteur, soit eu fait, imprévisible et insurmontable, d’un tiers étranger à la fourniture des prestations prévues au contrat, soit à un cas de force majeure.

Aux termes de l’article L211-18 du code du tourisme, les dispositions de l’article L 211-17 ne s’appliquent pas aux personnes physiques ou morales pour les opérations de réservation ou de vente n’entrant pas dans un forfait touristique, tel que défini à l’article L. 211-2, relatives soit à des titres de transport aérien, soit à d’autres titres de transport sur ligne régulière.

Sur l’application de l’article L121-20-3 du code de la consommation

Aux termes de l’article L211-17 du code du tourisme instaure une responsabilité de plein droit de l’agence de voyages, même dans le cas ou ses obligations sont à exécuter par elle-même ou par d’autres prestataires de service, mais l’article 211-18 du code du tourisme exclu la responsabilité de plein droit pour la vente n’entrant pas dans le cadre de forfait touristiques, c’est à dire la vente de vols secs.

Aux termes de l’article L121-20-3 du code de la consommation qui reprend I‘article 15 de la Loi pour la Confiance dans l’Economie Numérique du 21 juin 2004 (la” LCEN) établit une responsabilité de plein droit « Le professionnel est responsable de plein droit à l’égard du consommateur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat conclu à distance, que ces obligations soient à exécuter par le professionnel qui a conclu ce contrat ou par d’autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci ».
Toutefois, il peut s’exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que l’inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable, soit au consommateur, soit au fait, imprévisible et insurmontable, d’un tiers au contrat, soit à un cas de force majeure.

Cet article stipule une responsabilité de plein droit du commerçant en ligne, il s’applique à toutes fournitures de produits ou de services en ligne d’un professionnel à un consommateur.

Or, il résulte des débats à l’audience et des pièces produites que Mademoiselle Olivia L. ayant acheté un vol aller-retour à la société Opodo, le code du tourisme exclu la responsabilité de plein droit dans ce cas, et le code de la consommation maintient une responsabilité de plein droit.

L’article L211-17 du code du tourisme, instaure un régime de spéciale de responsabilité pour les agences de voyage.

L’article L 121-20-3 du code de la consommation, à une vocation d’application générale à tout consommateur et à tout produit et services, sans exclusion.

Suivant l’application de l’article 211-18 du code du tourisme

Le régime de la responsabilité de plein droit est exclu pour les vols secs et l’article L121-20-3 du code de la consommation impose une responsabilité de plein droit pour tout produit et services sans exclusion.

Il convient d’appliquer dans ce cas l’adage “generalia specialibus non derogant” c’est à dire que le principe est que les lois de portée générale ne dérogent pas aux dispositions contraires spéciales antérieures sauf volonté expresse du législateur. En conséquence, le code de la consommation ne s’applique qu’à défaut de règles particulières du code du tourisme.

Dans ces conditions la responsabilité de la société Opodo ne peut être retenue que sur le fondement de l’article L211-7 du code du tourisme et non pas sur les dispositions du code de la consommation.

Sur l’application de l’article L211-17 du code du tourisme

Sur l’obligation d’information

Selon les conditions générales de vente de la société Opodo.

En acceptant les présentes conditions de vente et d’utilisation, vous reconnaissez que Vivacances – Groupe Opodo agit uniquement en qualité de mandataire pour toutes les prestations hors forfait touristique au sens de l’article L. 211-2 du Code du tourisme.

A ce titre, lorsque vous ferez une réservation sur le site hors forfait touristique et que le service désiré sera disponible, le contrat sera conclu entre vous et le fournisseur de voyages.

La société Opodo est donc un intermédiaire et par conséquent tiers au contrat de transport entre la compagnie aérienne Alitalia et Mademoiselle Olivia L. La société Opodo a agit en tant que mandataire de la compagnie aérienne Alitalia et donc seul le mandant est lié envers Mademoiselle Olivia L.

La responsabilité de la société Opodo est de ce fait une responsabilité extra contractuelle, Mademoiselle Olivia L. soutient qu’il y a faute de la part de la société Opodo car elle n’a pas été informée du changement d’heure du vol.

On peut noter sur le mail du 8 mars 2006 de 20 heures 51 envoyé par la société Opodo à Mademoiselle Olivia L. concernant la réservation de ses billets que la société Opodo a pris la précaution d’indiquer à ses clients « nous vous conseillons de consulter régulièrement vos e-mails afin d’être averti dans le cas de modification ou d’annulation de votre vol, veuillez signaler tout changement d’adresse-email ou numéro de téléphone”.

Sur l’historique du dossier de Mademoiselle Olivia L., on peut constater que la société Opodo a, dès qu’elle a été informée par la compagnie aérienne Alitalia du changement d’horaires de ses vols, en a informé par tous moyens Mademoiselle Olivia L.

La société Opodo a téléphoné au numéro donné par Mademoiselle Olivia L. lors de sa réservation, et la société Opodo a envoyé des mails à l’adresse déjà utilisée lors de la réservation de Mademoiselle Olivia L.

De plus, le 28 mars 2006 Mademoiselle Olivia L. n’a pu être jointe au numéro qu’elle avait donné à la société Opodo et donc la société Opodo a envoyé un mail à l’adresse e-mail communiquée par Mademoiselle Olivia L.

Puis, lors de son appel téléphonique du 1er avril 2006 à la société Opodo, Mademoiselle Olivia L. est restée 9 minutes au téléphone pour s’informer des conditions d’annulation et de modification de son vol.

La société Opodo n’a pas commis de faute en ce qui concerne son obligation d’information ;

La société Opodo a utilisé le numéro de téléphone et l’adresse e-mail donné par la cliente pour l’informer du changement.

On note d’autre part que Mademoiselle Olivia L. a téléphoné, la veille de son départ, 9 minutes à la société Opodo pour s’informer des conditions d’annulation.

Il convient donc de constater qu’il n’y a pas de taule de la part de la société Opodo dans l’exécution de son mandat.

Déboute Mademoiselle Olivia L. de sa demande de dommages et intérêts ce titre.

Sur l’obligation de reprotection

La compagnie aérienne Alitalia a le 28 mars 2006 reprotégée Mademoiselle Olivia L. sur le vol Paris-Milan AZ7357 du 7 avril 2006 à 18 heures 25.

Mademoiselle Olivia L. ne s’est pas présentée à l’embarquement de ce vol.

La société Opodo a demandé à la compagnie aérienne Alitalia de reprotéger Mademoiselle Olivia L. sur le vol du 10 avril 2006 mais la compagnie aérienne Alitalia a refusé au motif que Mademoiselle Olivia L. ne s’était pas présentés à I’heure prévue à I’enregistrement.

Force est de constater que la société Opodo ne peut être tenue responsable de la décision de son mandataire, la compagnie aérienne Alitalia,

Déboute Mademoiselle Olivia L. de sa demande de dommages et Intérêts à ce titre.

Sur l’application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

Il parait équitable d’y faire droit pour la somme de 400 €.

Condamne Mademoiselle Olivia L. verser la somme de 400 € à la société Opodo.

Sur les dépens

Mademoiselle Olivia L. succombant, supporte les dépens.

Condamne Mademoiselle Olivia L. aux dépens.

DECISION

La juridiction de proximité de Vanves statuant en audience publique par jugement contradictoire et en dernier ressort ;

. Déboute Mademoiselle Olivia L. de ses demandes ;

. Condamne Mademoiselle Olivia L. au versement de la somme de 400 € au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile à la société Opodo ;

. Condamne Mademoiselle Olivia L. aux dépens.

Le tribunal : M.M. Baccou

Avocats : Me Jean François Joffre, Me Elisabeth Nenon

 
 

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