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Jurisprudence : Diffamation

vendredi 22 février 2019
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TGI de Pau, ch. corr., jugement correctionnel du 12 novembre 2018

M. X. / M. Y.

diffamation publique - directeur de la publication - injure publique - réseaux sociaux - titulaire du compte

A l’appel de la cause, le président, a constaté la présence et l’identité de M. Y. et a donné connaissance de l’acte qui a saisi le tribunal.

Le président informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire.

Le président a instruit l’affaire, interrogé le prévenu présent sur les faits et reçu ses déclarations.

L’avocat de M. X. a été entendu en sa plaidoirie.

Le ministère public a été entendu en ses réquisitions.

Maître Gosseaume Paul, conseil de M. Y. a été entendu en sa plaidoirie.

Le prévenu a eu la parole en dernier.

Le greffier a tenu note du déroulement des débats.

Puis à l’issue des débats tenus à l’audience du VINGT-NEUF OCTOBRE DEUX MILLE DIX-HUIT, le tribunal composé comme suit :

Président : Monsieur Jean-Talon Marc, président,

Assesseurs : Monsieur Diximier Pierre, magistrat honoraire,
Monsieur Lambert Stéphane, vice-président,

assisté de Madame Cilluffo Patricia, greffière

en présence de Monsieur Lambert Bernard, vice-procureur de la République,

a informé les parties présentes ou régulièrement représentées que le jugement serait prononcé le 12 novembre 2018 à 13:45.

A cette date, vidant son délibéré conformément à la loi, Monsieur Diximier, assesseur, ayant participé aux débats, a donné lecture de la décision, en vertu de l’article 485 du code de procédure pénale,

Composé de :

Président : Madame Cariou Christel, vice-président,

Assesseurs :

Monsieur Diximier Pierre, magistrat honoraire,
Monsieur Rossignol Dominique, vice-président,

Assisté de Madame Martine Isabelle, greffière, et en présence du ministère public.

Le tribunal a délibéré et statué conformément à la loi en ces termes :

Le prévenu a été renvoyé devant le tribunal correctionnel par ordonnance de Madame Guiroy Joelle, juge d’instruction, rendue le 6 août 2018.

Le prévenu a été cité par le procureur de la République,

M. Y. a comparu à l’audience assisté de son conseil ; il y a lieu de statuer contradictoirement à son égard.

Il est prévenu :

d’avoir à Pau, le 9 juin 2017, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, allégué ou imputé un fait portant atteinte à l’honneur ou à la considération de M. X., par parole, écrit, image, moyen de communication au public par voie électronique, en l’espèce en publiant des commentaires sur Facebook comportant les propos suivants « nous avons été en contact direct avec Superbus pour une demande de date. Les termes des contrats sont clairs. Mais le promoteur (local) dont ils parlent a l’art et la manière d’arranger les contrats à sa sauce pour vendre et faire du fric. Apparemment il n’en serait pas à son coup d’essai puisque nous avons connu ce genre de « saloperie » avec lui. Voilà un promoteur qui n’aime pas les artistes et qui a tellement de couilles qu’il fait porter le chapeau de ses propres erreurs aux artistes qu’il « vend ». Une honte pour la profession … On espère qu’à force sa licence lui sera retirée et que les organisateurs locaux feront appel à des gens sérieux »., faits prévus par ART.32 AL.1, ART.23 AL.1, ART.29 AL.1, ART.42 LOI DU 29/07/1881. ART.93-3 LOI 82-652 DU 29/07/1982. et réprimés par ART.32 AL.l LOI DU 29/07/1881.

d’avoir à Pau, le 9 juin 2017, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, injurié publiquement M. X., par tout moyen de communication au public par voie électronique, en l’espèce en publiant des commentaires sur Facebook comportant notamment les termes suivants « gros salopard », « spécialiste des magouilles », « lascar », « sacré FDP », « enfoiré »., faits prévus par ART.33 AL.2, ART.23 AL.1, ART.29 AL.2, ART.42 LOI DU 29/07/1881. ART.93-3 LOI 82-652 DU 29/07/1982. et réprimés par ART.33 AL.2 LOI DU 29/07/1881.

SUR QUOI LE TRIBUNAL

FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES

Sur l’action publique

En application des articles 23, 29, 32 et 33 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, sont punies d’une amende de 12.000 euros :

– la diffamation, définie comme étant toute allégation publique ou imputation publique d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé ;

– l’injure, définie comme étant, publiquement, toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait.

Les articles 93-2 et 93-3 de la loi du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle instituent comme responsable des infractions commises dans un service de communication au public par voie électronique le directeur de la publication, défini comme la personne physique qui fournit le service. Le titulaire d’un compte Facebook en est en conséquence le directeur de la publication.

En l’espèce, M. Y. est poursuivi pour avoir commis le délit d’injure publique sur son compte Facebook « M.Y. » et le délit de diffamation publique sur le compte Facebook « Pau de Casetas ».

Sur le délit de diffamation publique

La prévention reproche précisément à M. Y. d’être responsable de la publication des propos suivants sur le compte Facebook « Pau de Casetas » :

« Nous avons été en contact direct avec Superbus pour une demande de date. Les termes des contrats sont clairs. Mais le promoteur (local) dont ils parlent à l’art et la manière d’arranger les contrats à sa sauce pour vendre et faire du fric. Apparemment il n’en serait pas à son coup d’essai puisque nous avons connu ce genre de « saloperie » avec lui. Voilà un promoteur qui n’aime pas les artistes qu’il « vend ». Une honte pour la profession… On espère qu’à force sa licence lui sera retirée et que les organisateurs locaux feront appel à des gens sérieux ».

Créateur du compte, dont il paie toujours les droits de publication, et titulaire des codes d’accès, M. Y. est bien le directeur de la publication du compte. Il ne saurait dénier sa responsabilité au seul motif qu’il aurait donné les codes à des personnes dont il refuse de donner le nom.

Toutefois parmi les propos incriminés seuls ceux relatifs à l’arrangement des contrats pour gagner de l’argent et ceux relatifs à l’existence d’un précédent malheureux qualifié de « saloperie» sont susceptibles d’être diffamatoires. Or ces termes ne désignent pas de fait suffisamment précis pour constituer la diffamation.

M. Y. sera en conséquence renvoyé des fins de la poursuite de ce chef.

Sur le délit d ‘injure publique

La prévention reproche précisément à M. Y. d’être responsable de la publication des propos suivants sur le compte Facebook à son nom :

«gros salopard», «spécialiste des magouilles », « lascar », « sacré FDP », « enfoiré».

M. Y. ne conteste pas être l’auteur de ces propos dans les circonstances de fa prévention, ainsi qu’il l’a reconnu devant le magistrat instructeur et à l’audience..

Il ne saurait être sérieusement soutenu que la personne désignée n’était pas identifiable, la précision qu’il s’agissait d’un agent de Lescar ne pouvant laisser aucun doute sur le fait que M. X. était visé.

Enfin les termes utilisés constituent bien une expression outrageante, termes de mépris ou invective, ne renferment en eux-mêmes l’imputation d’aucun fait et ne sont pas associés de manière indivisible à l’article de presse commenté par M. Y.

M. Y. doit alors être déclaré coupable d’avoir commis le délit d’injure publique.

En l’absence d’antécédents, M. Y. sera condamné à une peine d’amende entièrement assortie du sursis.

Sur l’action civile

M. X. se constitue partie civile et réclame la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts, la diffusion de fa décision et fa somme de 5.000 euros en application de l’article 475-1 du code de procédure pénale.

Du fait de la modestie de fa diffusion des injures, une indemnité de 1.000 euros réparera intégralement le préjudice subi, sans qu’il ne soit nécessaire d’ordonner la publication de la présente décision.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. X. les frais irrépétibles qu’il a dû exposer pour obtenir gain de cause.

DÉCISION

Le tribunal, statuant publiquement, en premier ressort et contradictoirement à l’égard de M. Y. et M. X.,

SUR L’ACTION PUBLIQUE :

Renvoie des fins de la poursuite Y. Eric pour les faits de DIFFAMATION ENVERS PARTICULIER(S) PAR PAROLE, ECRIT, IMAGE OU MOYEN DE COMMUNICATION AU PUBLIC PAR VOIE ELECTRONIQUE commis le 9 juin 2017 à Pau ;

Déclare Y. Eric coupable de INJURE PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER PAR PAROLE, ECRIT, IMAGE OU MOYEN DE COMMUNICATION AU PUBLIC PAR VOIE ELECTRONIQUE- 376- commis le 9 juin 2017 à Pau ;

Condamne Y. Eric au paiement d’ une amende de mille euros ( 1000 euros)

Vu l’article 132-31 al.l du code pénal ;

Dit qu’il sera sursis totalement à l’exécution de cette peine, dans les conditions prévues par ces articles ;

Le Président, suite à cette condamnation assortie du sursis simple, n’a pu donner l’avertissement, prévu à l’article 132-29 du code pénal, au condamné, absent au prononcé du jugement ;

En application de l’article 1 0 1 8 A du code général des impôts, la présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure de 127 euros dont est redevable :
– M. Y. ;
Le condamné est informé qu’en cas de paiement de l’amende et du droit fixe de procédure dans le délai d’un mois à compter de la date du jugement, il bénéficie d’une diminution de 20% sur la totalité de la somme à payer.

SUR L’ACTION CIVILE :

Déclare recevable la constitution de partie civile de M. X. ;

Condamne M. Y. à payer à M. X. la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts réparant le préjudice moral subi et celle de 800 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale ;

Conformément aux dispositions de l’article 706-15 du code de procédure pénale, avis est donné aux parties civiles que, dans le cas où elles sont victimes des infractions prévues aux articles 706-3, 706-14 et 706-14- J du même code et où elles réunissent les conditions prévues par ces articles, elles ont la possibilité de saisir la commission d’indemnisation des victimes d’infractions pénales du tribunal de grande instance, dans le délai de 3 ans à compter de la date des faits ou, si ce délai a expiré, dans le délai d’1 an à compter du présent jour.

Le Tribunal : Marc Jean-Talon (président)Stéphane Lambert (vice-président), Pierre Diximier (magistrat honoraire), Patricia Cilluffo (greffière)

Avocats : Me Henri de la Motte Rouge, Me Paul Gosseaume

Source : Legalis.net

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* Nous portons l'attention de nos lecteurs sur les possibilités d'homonymies particuliérement lorsque les décisions ne comportent pas le prénom des personnes.