Jurisprudence : Contenus illicites
Tribunal de Police de Paris, jugement du 19 novembre 2018
M. le Procureur de la République, M. X. / M. Y.
condition de publicité - courrier électronique - email - Injure non publique
Prévenu du chef d’injure non publique en raison de l’origine, l’ethnie, la nation, la race ou la religion, faits commis le 15 mars 2018 à Paris
DÉBATS
Par jugement n° 18/B60088 en date du 9/07/2018, le tribunal a ordonné le versement par la partie civile d’une consignation d’un montant de 300 euros et a renvoyé l’affaire pour plaidoirie à l’audience de ce jour ;
A l’audience du 15 octobre 2018, la Présidente, après avoir informé la personne, de son droit d’être assistée par un interprète, a constaté la présence et l’identité de Monsieur Y. et a donné connaissance de l’acte qui a saisi le tribunal.
Le président informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire.
La Présidente a instruit l’affaire, interrogé Je prévenu présent sur les faits et reçu ses déclarations.
L’avocat de M. X. a été entendu en ses demandes et observations.
Le ministère public a été entendu en ses réquisitions.
Maître Tauzin, avocate du prévenu, a été entendue en sa plaidoirie ;
Le prévenu a eu la parole en dernier.
Le greffier a tenu note du déroulement des débats.
Puis à l’issue des débats, la Présidente a informé les parties présentes ou régulièrement représentées que le jugement serait prononcé Je 19 novembre 2018 à 09:00 en chambre 2 ;
Le tribunal a délibéré et statué conformément à la loi en ces termes :
M. Y. a comparu à l’audience assisté de son conseil ; il y a lieu de statuer contradictoirement à son égard.
Il est prévenu d’avoir à Paris, le 15 mars 201 8, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, dans une correspondance privée, en l’occurrence un courrier électronique, écrit : « voila je tai donné mes horaires pour que tu puisses truander avec le bougnoul. »
Faits qualifiables d’injure non publique commises envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée, faits prévus par ART.R.625-8-1 AL.1 C.PENAL. ART.29 AL.2 LOI DU 29/07/1881. et réprimés par ART.R.625-8-1 AL.1. ART.R.625-8-2 C.PENAL.
SUR L’ACTION PUBLIQUE :
Attendu que Monsieur Y. a signé un contrat de travail avec la société Fortia le 15 janvier 2018 avec une période d’essai de trois mois ;
Que cette société a notamment été créée par Monsieur X.;
Que la compagne de ce dernier , Mme Z. ,travaille comme Directrice au sein de cette même société ;
Attendu qu’il ressort des éléments du dossier ainsi que de l’audience que Monsieur Y. a envoyé un message électronique sur la boite mail de Mme Z. contenant les propos suivants: « Voila je t’ai donné mes horaires pour que tu puisses truander avec le bougnoul » ;
Que les propos tenus ne sont pas contestés ;
Que Monsieur X. est identifiable comme étant le tiers étant visé par le propos injurieux ;
Attendu toutefois que ces propos ,pour être constitutifs de la contravention d’injure non publique, doivent avoir été faits avec un minimum de publicité comme ayant été prononcés devant un ou plusieurs tiers ou ayant été distribué par courrier, voir messagerie électronique à un autre destinataire au moins en dehors de la personne visée par cette injure ;
Qu’en l’espèce force est de constater qu’aucun tiers n’a eu connaissance de ces propos en dehors du destinataire lui même d’une part et que ces propos contenus dans un message électronique sont couvert par le secret des correspondances d’autre part ;
Qu’enfin les propos ne vise pas le destinataire du message mais un tiers et que les propos injurieux visant un tiers ne constituent à l’égard de celui ci la contravention d’injure non publique que si l’écrit qui les contient a été adressé dans des conditions exclusives de tout caractère confidentiel ce qui n’est pas le cas en l’espèce ;
Qu’ainsi les écrits contenant les propos soumis au Tribunal ont été adressés dans des conditions leur conférant un caractère privé et confidentiel ;
Qu’en conséquence, la contravention d’injure non publique n’est, en l’espèce, pas constituée ;
Qu’il convient de relaxer Monsieur Y. des faits qui lui sont reprochés.
Attendu qu’il y a lieu d’ordonner la restitution de la somme de 300 euros consignée le 02/08/2018 auprès de la Régie du Tribunal de grande instance ;
SUR L’ACTION CIVILE :
Attendu que Monsieur X., partie civile, sollicite, en réparation des différents préjudices qu’il a subis les sommes suivantes :
– trois mille euros (3000 euros) en réparation du préjudice moral
– trois mille euros (3000 euros) en vertu de l’a1ticle 475-1 du code de procédure pénale ;
qu’au vu de la relaxe du prévenu, il y a lieu de débouter la partie civile de l’ensemble de ses demandes comme n’étant pas fondées ;
DÉCISION
Le tribunal, statuant publiquement, en premier ressort et contradictoirement à l’égard de Monsieur Y. et Monsieur X.,
SUR L’ACTION PUBLIQUE :
Relaxe M. Y. des fins de la poursuite ;
SUR L’ACTION CIVILE :
Déboute M. X., partie civile, de l’ensemble de ses demandes ;
Ordonne la restitution à M. X., partie civile, de la somme de 300 euros consignée le 02/08/2018 auprès de la Régie du Tribunal de grande instance.
Le Tribunal : Elisabeth Condat (vice-présidente), Christian Guinand (greffier)
Avocats : Me Mathieu Croizet, Me Tauzin
Source : Legalis.net
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