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Jurisprudence : Droit d'auteur

vendredi 20 octobre 2000
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Cour d’appel de Paris, 4ème chambre, section B, Arrêt rendu le 20 octobre 2000

Digisoft Music Sarl / F.S.

Jugement du Tribunal de Commerce
Arrêt du 16 juin 2000

Faits et procédure

Par arrêt en date du 16 juin 2000, auquel il convient de se référer pour l’exposé des faits, de la procédure et des moyens antérieurs des parties, cette cour, infirmant le jugement du tribunal de commerce de Créteil du 16 février 1999, a prononcé la nullité du contrat conclu le 6 septembre 1991 entre Frédéric S. et la société Digisoft et a ordonné la réouverture des débats à l’audience du 15 septembre 2000 pour que les parties présentent leurs observations sur les conséquences de cette nullité. La cour a par ailleurs sursis à statuer sur les demandes reconventionnelles de Frédéric S. et sur l’application des dispositions de l’article 700 du NCPC.
Frédéric S. a conclu à ce que Digisoft soit condamnée à lui payer les sommes de :

– 252 630 F en restitution des profits tirés de la commercialisation des phonogrammes informatiques Midi avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 17 décembre 1996,

– 50 000 F en réparation de son préjudice moral,

– 20 000 F au titre de l’article 700 du NCPC.

Digisoft a conclu au rejet des prétentions de Frédéric S. et réclamé le versement d’une somme de 30 000 F au titre de l’article 700 du NCPC.

La discussion

Considérant que Frédéric S. fait valoir que, nonobstant la nullité du contrat du 6 septembre 1991, il demeure titulaire de ses droits de producteur de phonogrammes, lesquels ont été violés par Digisoft ; qu’il ajoute qu’il n’a jamais contesté que la fixation de ses phonogrammes informatiques supposait la rémunération des auteurs et titulaires de droits des œuvres reproduites et que, à cette fin, il avait consigné une provision sur le montant des redevances dues aux auteurs ; qu’enfin, il prétend être en droit de réclamer le paiement de la somme de 252 630 F que Digisoft aurait reconnu lui devoir ;

Considérant que Digisoft se prévaut de sa bonne foi pour s’opposer à toute restitution ; que, par ailleurs, elle soutient que Frédéric S. qui a fait preuve d’une mauvaise foi manifeste ne saurait, sur le fondement de l’équité, réclamer une indemnité compensatrice et que lui accorder une quelconque restitution reviendrait à priver de tout effet la nullité et à lui permettre de tirer profit d’un produit acquis frauduleusement ; qu’elle ajoute qu’il ne peut prétendre avoir subi un préjudice moral ;

Considérant, ceci exposé, que du fait de la nullité du contrat du 6 septembre 1991, les choses doivent être remises en l’état où elles étaient antérieurement à sa conclusion mais que, ainsi que la cour l’a dit dans son précédent arrêt, Digisoft ne peut restituer les produits qu’elle a vendus à des tiers incorporant les séquences Midi fournies par Frédéric S. et qu’il convient, en conséquence, de procéder à des restitutions par équivalent excluant tout bénéfice tant de Frédéric S. que de Digisoft ; que cette dernière ne saurait s’opposer à toute restitution au motif que Frédéric S. lui a cédé en connaissance de cause des bandes Midi sans avoir obtenu au préalable les autorisations des auteurs des œuvres dès lors qu’elle-même a fait preuve de négligence en s’abstenant de procéder à la moindre vérification auprès de la Sacem Sdrm avant la signature du contrat et en poursuivant la commercialiation des séquences après avoir reçu le 6 juin 1996 une lettre d’information de la Sdrm ;

Considérant qu’il est constant que Frédéric S. n’a perçu des redevances que jusqu’en juin 1992 ; qu’il résulte du rapport de Mme Peninon que Digisoft a commercialisé les séquences à travers trois canaux (la société Accetera qui les a revendues à Carrefour, la société Musitem qui les a distribuées aurès des magasins appartenant à la chaîne Music Leader International et le réseau Surcouf) jusqu’au milieu de l’année 1992 et courant 1996 ; qu’en revanche, l’expert relève qu’aucune preuve de commercialisation n’a été apportée, ni pièce comptable, ni bon de commande pour la période se situant entre mi-1992 et mi-1996 et que,si entre 1992 et 1994, des fichiers ont été préparés aux nouvelles normes, rien ne démontre qu’ils aient été distribués ;

Considérant que Frédéric S., quant à lui, ne produit aucun élément permettant d’évaluer le coût de réalisation des 220 masters de séquences Midifiles aux formats MS DOS 3,5 et MC, observation étant faite qu’il ne justifie pas avoir consigné une provision entre les mains de la Sacem Sdrm au titre des redevances dues aux auteurs ;

Que, compte tenu des ventes réalisées par Digisoft et des éléments d’appréciation dont la cour dispose, il convient d’allouer à Frédéric S. à titre de restitution la somme de 150 000 F avec intérêts au taux légal à compter du 16 juin 2000, celle-ci ayant une nature intermédiaire ;

Considérant que le contrat liant Frédéric S. à Digisoft étant annulé, celui-ci ne saurait réclamer réparation du préjudice qu’il aurait subi du fait de la violation par Digisoft de l’obligation qu’elle avait de mentionner le nom de Midi Service sur les séquences qu’elle commercialisait ;

Considérant que Digisoft qui a vendu les séquences Midi pendant plusieurs années sans être troublée dans son exploitation et qui ne justifie pas des sommes qu’elle aurait investies, ne justifie d’aucun préjudice et sera déboutée de sa demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts formée par conclusions du 2 mars 2000 ;

Considérant que l’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du NCPC à l’une ou l’autre des parties.

La décision

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi :

Vu l’arrêt du 16 juin 2000,

. condamne la société Digisoft Music à payer à Frédéric S. la somme de 150 000 F avec intérêts au taux légal à compter du 16 juin 2000 ;

. rejette toute autre demande des parties ;

. condamne la société Digisoft Music aux dépens de première instance et d’appel.

Le tribunal : Mme Mandel (président), Mme Regniez et M. Lachacinski (conseillers).

Avocats : Me Virginie de Laleu et Me Antoine Gitton.

 
 

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