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Jurisprudence : Contenus illicites

lundi 13 septembre 2004
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Cour de cassation Chambre sociale Arrêt du 2 juin 2004

Marc P... / Spot image

contenus illicites - injure - licenciement - messagerie électronique

DISCUSSION

Attendu que la société Spot image met à la disposition de ses salariés une messagerie électronique comportant, avant le sigle @, le nom du salarié, et après ce sigle, le nom de la société ; que le 12 octobre 2000, M. Y…, président directeur général de ladite société, recevait un courriel émis par M. Z…, domicilié en Israël, dénonçant un courriel contenant des injures et menaces antisémites qui lui avait été adressé le 9 octobre et dont l’adresse électronique de l’expéditeur était la suivante : Marc.P….@spotimage.fr ; que M. Y. a engagé une procédure de licenciement pour faute grave contre Marc P…, qui était « chef de service station-réception directe » de la société Spot image ; que l’arrêt attaqué, après avoir retenu que Marc P… était bien l’émetteur du courriel incriminé, a estimé qu’il n’avait pas commis de faute grave, son licenciement ayant seulement une cause réelle et sérieuse ;

Sur les deux moyens réunis du pourvoi principal de Marc P… :

Attendu que Marc P… fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir retenu qu’il était l’auteur du courriel et invoque des moyens tirés d’une contestation d’attestations et de défaut de réponse à des conclusions ;

Mais attendu que la cour d’appel, répondant aux conclusions et analysant l’ensemble des éléments de preuve soumis à son appréciation, et notamment l’historique des envois électroniques de la société et plusieurs attestations, a constaté qu’il était établi que Marc P… était bien l’auteur du courriel incriminé ; que les moyens, qui ne tendent qu’à remettre en cause cette appréciation souveraine, sont sans fondement

Mais sur le moyen unique, pris en ses trois branches du pourvoi incident de la société Spot image :

Vu les articles L 122-6, L 122-8 et L 122-14-3 du code du travail ;

Attendu que pour décider que Marc P… n’avait pas commis de faute grave en envoyant le courriel incriminé, la cour d’appel, après avoir énoncé à bon droit qu’il s’agissait d’une violation des obligations découlant de son contrat et des relations de travail, énonce qu’il n’était pas établi que ce courriel avait été envoyé dans le cadre de ses fonctions, qu’il n’avait pas commis de manquement antérieur et qu’il n’avait pas justifié de répercussions prévisibles du comportement de ce dernier sur la marche de l’entreprise ;

Attendu, cependant, que le fait pour un salarié d’utiliser la messagerie électronique que l’employeur met à sa disposition pour émettre, dans des conditions permettant d’identifier l’employeur, sur un courriel contenant des propos antisémites est nécessairement constitutif d’une faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis ; d’où il suit qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu’il n’y a pas lieu à renvoi devant une autre cour d’appel, la Cour de cassation pouvant mettre fin au litige par application de l’article 627 du ncpc ;

DECISION

. Rejette le pourvoi principal formé par Marc P… ;

. Casse et annule, en ce qu’il a décidé que Marc P… n’avait pas commis de faute grave, l’arrêt rendu le 28 mai 2003, entre les parties, par la cour d’appel de Toulouse ;

. Dit n’y avoir lieu à renvoi devant une autre cour d’appel ;

. Dit que Marc P… a commis une faute grave exclusive du paiement de l’indemnité conventionnelle de licenciement, de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés sur préavis ;

. Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

La Cour : M. Sargos (président), Mme Slove (conseiller référendaire)

Avocat général : M. Foerst

Avocat : SCP Gatineau

Voir l’arret de la cour d’appel