Jurisprudence : Responsabilité
Tribunal de commerce de Nanterre 2ème chambre Jugement du 16 novembre 2011
Les publications Conde Nast / L'Equipe, Presse sports investissement
article 1382 du code civil - concurrence déloyale - copie servile - interdiction - internet - presse - rubrique
FAITS
L’Equipe édite notamment le quotidien sportif L’Equipe ainsi qu’un supplément intitulé Sport & Style dont la publication a été confiée à sa filiale la société PSI.
La société Conde Nast est l’éditeur en France des magazines Vogue, Glamour, AD, GQ et Vogue Hommes International et le magazine GQ, mensuel édité depuis mars 2008.
Dans ce magazine figure une rubrique intitulée « Style Académie », qui est constituée d’une série de conseils vestimentaires et de style destinés aux hommes.
Ces conseils sont présentés sous forme de questions numérotées avec, pour chacune d’elles, une réponse courte dans un style accrocheur et ludique, une des spécificités de cette rubrique étant d’être en outre illustrée par des dessins.
En mars 2009, Conde Nast a également édité un supplément au numéro 13 du magazine GQ, petit livret intitulé « Les 100 choses à savoir quand on est un homme » contenant cent règles de style masculin numérotées accompagnées d’un petit texte explicatif et illustrées de petits dessins.
En mars 2011, la société Conde Nast a constaté que, dans le numéro 24 du magazine Sport & Style, édité pour L’Equipe, sous la chronique ((Mode d’emploi – Le Manuel du mec (presque) parfait », une rubrique intitulée « Trente règles pour être un mec (presque) parfait » était une copie quasi-servile des publications précitées de GQ, tant dans le contenu que dans la présentation.
D’après la société Conde Nast, les deux magazines sont vendus dans les mêmes points de vente, notamment dans les maisons de la presse selon des modes de commercialisation identiques relevant de la même cible de lecteur.
Dès qu’elle a eu connaissance de l’existence de cette rubrique, la société Conde Nast a mis en demeure, les sociétés L’Equipe et PSI, par courrier en date du 21 mars 2011 de supprimer dès le prochain numéro du magazine Sport & Style la rubrique « Mode d’emploi – Le Manuel du mec (presque) parfait » de manière à faire cesser les agissements fautifs.
Cette mise en demeure est demeurée vaine puisque les sociétés L’Equipe et PSI répondaient par une fin de non-recevoir par un courrier du 28 mars 2011, confirmé par celui du 31 mars 2011.
De plus, le numéro d’avril 2011 de Sport & Style paru le 2 avril 2011 contenait encore une rubrique « Trente règles pour être un mec (presque) parfait » reprenant la même présentation et les thèmes et/ou contenus de nombre de textes précédemment publiés par la demanderesse.
PROCÉDURE
C’est dans ces circonstances, que par actes d’huissier remis à personne le 28 avril 2011, la société Conde Nast a assigné les sociétés L’Equipe et PSI devant ce tribunal auquel il est demandé :
Vu le code civil et plus particulièrement les articles 1382 et suivants,
– dire que les sociétés L’Equipe et PSI, en publiant dans la chronique « Mode d’emploi – Le Manuel du mec (presque) parfait » la rubrique « Trente règles pour être un mec (presque) parfait » reprenant les éléments caractéristique de la rubrique « Style Académie » publiée dans le magazine GQ par la société Conde Nast, crée une confusion dans l’esprit du public entre sa rubrique et celle de sa concurrente, commettant ainsi des actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société Conde Nast,
En conséquence
– ordonner aux sociétés L’Equipe et PSI de supprimer la rubrique « Trente règles pour être un mec (presque) parfait » de la chronique « Mode d’emploi – Le Manuel du mec (presque) parfait » publiée dans le magazine Sport & Style dès le prochain numéro à paraitre et ce sous astreinte de 2000 € par infraction constatée et par exemplaire ne respectant pas l’injonction prononcée,
– ordonner aux sociétés L’Equipe et PSI de faire cesser la diffusion sur internet et la communication via l’application « Sport & Style» compatible avec l’iPhone, l’iPod Touch et l’iPad de ladite rubrique portant atteinte aux intérêts patrimoniaux de la société Condé Nast et plus généralement la diffusion par tous moyens par tous tiers autorisés par les défenderesses à exploiter la rubrique, et ce, dans les quarante-huit heures suivants la signification de la décision à intervenir, et ce sous astreinte de 2000 € par jour de retard,
– ordonner aux sociétés L’Equipe et PSI de retirer de la vente et du prêt les exemplaires des numéros 24 et 25 de Sport & Style dans les huit jours suivant la signification de la décision à intervenir, et ce, sous astreinte de 2000 € par magazine non retiré de la vente ou du prêt,
– ordonner aux sociétés L’Equipe et PSI de détruire les stocks des magazines des numéros de Sport & Style comportant la rubrique litigieuse et de faire parvenir à Conde Nast la preuve de cette destruction au plus tard huit jours après la signification de la décision à intervenir, et ce, sous astreinte de 2000 € par jour de retard,
– ordonner la publication du jugement à intervenir
– dans le prochain numéro du magazine Sport & Style, à la place de cette rubrique et en pleine page
et
– sur la page d’accueil du site internet de Sport & Style en début de page,
– condamner les sociétés L’Equipe et PSI à payer à la société Conde Nast la somme de 100 000 € de dommages et intérêt en réparation des préjudices patrimoniaux et moraux subis du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire commis, à parfaire,
– condamner les sociétés L’Equipe et PST in solidum à verser à la société Conde Nast la somme de 20 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner les sociétés L’Equipe et PSI aux entiers dépens in solidum,
– prononcer l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
Par conclusions déposées à l’audience du 31 mai 2011, les sociétés L’Equipe et PSI demandent au tribunal de :
– déclarer la société Conde Nast mal fondée en ses demandes, fins et prétentions à l’encontre des sociétés L’Equipe et PSI.
En conséquence,
– débouter la société Conde Nast de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.
A titre reconventionnel
– condamner la société Conde Nast à verser aux sociétés L’Equipe et PSI la somme de 10 000 € chacune, à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.
En tout état de cause
– condamner la société Conde Nast à verser aux sociétés L’Equipe et PSI la somme de 7000 € chacune sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
– condamner la société Conde Nast aux entiers dépens, sur le fondement de l’article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par conclusions en réplique déposées à l’audience du 14 juin 2011, la société Conde Nast réitère ses précédentes écritures, porte sa demande au titre de l‘article 700 du cpc à 30 000 € et demande au tribunal de débouter les sociétés L’Equipe et PSI de leurs demandes reconventionnelles.
Par conclusions n°2 déposées à l’audience du 28 juin 2011, les sociétés L’Equipe et PSI ont réitéré leurs précédentes écritures.
A son audience du 13 septembre 2011, le juge rapporteur après avoir entendu les parties a clos les débats et mis le jugement en délibéré par mise à disposition au greffe le 16 novembre 2011.
MOYENS
La société Conde Nast soutient que :
– L’Equipe et PSI ont commis des actes de concurrence déloyale et des actes de concurrence parasitaire.
En l’espèce, la rubrique « Trente règles pour être un mec (presque) parfait » du magazine Sport & Style reprend nombre d’éléments de présentation des publications de Conde Nast.
La forte ressemblance dans la présentation des 2 rubriques est susceptible de créer un risque de confusion dans l’esprit du public, d’autant que les deux magazines s’adressent à la même cible de lectorat et sont vendus dans les mêmes points de vente.
– L’Equipe et PSI ont usurpé les efforts économiques de la société Conde Nast imité l’apparence de son produit et repris le concept qu’elle avait développé.
L’élaboration du contenu de GQ et en particulier de la rubrique « Style Académie », qui est aujourd’hui une rubrique phare de ce magazine, a donc nécessité de gros investissements de la part de Conde Nast, qui a consacré un important budget à l’étude et la promotion du magazine de plus de 8 millions d’€.
– les sociétés L’Equipe et PSI ont affaibli la position sur le marché que la société Conde Nast avait acquise du fait du caractère innovant de la rubrique qu’elle a développée pour le magazine GQ notamment en la banalisant.
En effet, non seulement le magazine Sport & Style vient directement concurrencer le magazine GQ en publiant une rubrique très similaire à la rubrique « Style Académie » développée par GQ, mais de plus, le magazine Sport & Style bénéficie d’une diffusion largement supérieure au nombre d’exemplaires du magazine GQ.
– La reprise dudit concept est condamnable au titre du parasitisme.
L’argument selon lequel la rubrique litigeuse serait en parfaite corrélation avec les thèmes déjà traités, les rubriques existantes et le ton adopté au sein du supplément Sport & Style depuis l’origine est complètement infondé. Ni les rubriques ni le ton ni le style de «l’ancien» Sport et Style ne correspondent à ceux du « nouveau » Sport et Style.
– Les différences formelles et minimes pointées par les défenderesses entre la rubrique de Sport & Style et celle de GQ ne suffisent pas à démontrer l’absence de risque de confusion et de copie quasi-servile de la rubrique de GQ.
La société Conde Nast ne revendique pas de monopole sur les rubriques de conseils de mode ou de savoir-vivre destinés aux hommes, ni sur les conseils présentés sous la forme de règles numérotées ou encore sur les illustrations sous forme de dessins mais reproche à L’Equipe et PSI d’avoir repris toutes les spécificités de « sa » rubrique.
– les antériorités invoquées par L’Equipe et PSI issues de supports de diffusion, de marchés, de publics visés et de contenus différents, ne portent que sur certains éléments de la rubrique « Style Académie » pris séparément et jamais sur la totalité des éléments. C’est la réunion de tous ces éléments qui caractérisent l’acte de concurrence déloyale et de parasitisme.
Les sociétés L’Equipe et PSI répliquent que :
– eu égard aux actes de concurrence déloyale, les éléments de présentation relevés par Conde Nast ne sont absolument pas caractéristiques de la rubrique ainsi que des suppléments évoqués par la société Conde Nast.
Il est relevé notamment :
– la pratique courante d’utiliser une numérotation au sein d’une rubrique recensant des conseils ou questions présentés de manière brève,
– le style humoristique et accrocheur, la répartition des textes dans l’espace et la présence de dessins d’illustration, repris dans de nombreuses rubriques existantes dont les plus anciennes parutions du supplément Sport & Style en 2004,
– les couleurs et plus particulièrement celle du rouge et noir habituellement utilisées dans ce type de rubrique notamment dans le cadre de publications antérieures du Groupe L’Equipe tel que L’Equipe Mag, dont le premier numéro a été publié au mois de février 1980, la couleur rouge étant celle du logo de la société L’Equipe,
– la présentation de la rubrique Mode d’emploi – Le Manuel du mec (presque) parfait distincte de celle de la rubrique Style Académie du magazine GQ et desdits suppléments notamment par la typographie et la présentation de la numérotation constitués de chiffres de couleurs et de tailles différentes, la répartition des textes et des illustrations dans l’espace, le style des illustrations, caricatural pour la rubrique Mode d’emploi – Le Manuel du mec (presque) parfait, et un style « classique » pour la rubrique Style Académie du magazine GQ et lesdits suppléments
– la charte graphique avec, notamment, une importante utilisation d’« encadrés » de différentes tailles et couleurs pour la rubrique Mode d’emploi – Le Manuel du mec (presque) parfait.
De telle sorte qu’aucune confusion dans l’esprit du public n’est donc possible.
Les thèmes et sujets dans ce type de rubriques de conseils vestimentaires et de style ne peuvent pas constituer des éléments caractéristiques,
– Le lectorat des publications de L’Equipe, largement orientées vers le sport, n’est pas le même que celui du magazine GQ.
– Le magazine GQ se définit comme un mensuel masculin généraliste de la culture et du style alors que le supplément Sport & Style – L’Equipe a pour objectif depuis sa création de donner une autre vision du sport.
Les valeurs véhiculées par le supplément Sport & Style – L’Equipe sont le sport, l’esthétisme et l’hédonisme tel que l’illustre le numéro du mois de mai 2011 dont la rubrique est constituée de conseils exclusivement consacrés au tennis.
– les thèmes rédactionnels du supplément Sport & Style – L’Équipe pour l’année 2011, sont loin d’être caractéristiques de ceux du magazine GQ,
– le supplément Sport & Style – L’Equipe ne vise pas la même cible que le magazine GQ qui s’adresse aux passionnés de sport au-delà même des catégories socio-professionnelles,
– le supplément Sport & Style – L’Equipe est un supplément du quotidien L’Equipe. Il est alors vendu, sous blister, avec ce dernier et L’Équipe Mag le premier samedi de chaque mois à la différence du mensuel GQ,
– le litige ne porte que sur une rubrique de cinq pages et non sur l’ensemble du magazine GQ, le montant total des investissements de la société Conde Nast qui s’élève, selon cette dernière, à 8 Millions d’€ ne serait être affecté à la totalité de la rubrique.
De plus, ces données financières ne sont pas corroborées par des pièces objectives certifiées mais uniquement par des articles de presse, des études et des attestations de complaisance. Les investissements qui seraient relatifs à la rubrique en cause Style Académie de cinq pages ne sont absolument pas identifiés parmi les nombreux chiffres mentionnés dans ces éléments et les différentes factures communiquées :
– eu égard aux agissements parasitaires, il a été démontré qu’il n’existe aucune ressemblance quant à la présentation entre les deux rubriques.
– la société Conde Nast ne peut revendiquer de prétendus droits sur le concept « des conseils vestimentaires et de style destinés aux hommes » qui aurait nécessité « de gros investissements ».
– la société Conde Nast ne démontre en aucune manière l’existence et l’ampleur des préjudices qu’elle aurait subis (pouvant, notamment, justifier les dommages et intérêts importants ainsi que les publications qu’elle sollicite) telle que perte financière, chute de ses ventes, manque à gagner, ou détournement de clientèle.
DISCUSSION
Sur la demande principale au titre des actes de concurrence déloyale et d’actes de parasitisme
Attendu que la concurrence déloyale est définie par la jurisprudence comme un usage excessif, par un concurrent, de la liberté de la concurrence, par emploi de tout procédé malhonnête dans la recherche de la clientèle, dans la compétition économique et que constitue un acte de concurrence déloyale le fait de commercialiser des produits similaires à ceux d’un concurrent, dans des conditions susceptibles d’entraîner un risque de confusion dans l’esprit du public sur la provenance des produits ainsi commercialisés.
Attendu qu’il appartient au tribunal d’apprécier si la reprise au sein de la rubrique du magazine Sport & Style, des éléments caractéristiques de la rubrique Style Académie du magazine GQ, est susceptible de créer un risque de confusion auprès du lectorat de ces magazines ; que pour ce faire le tribunal analysera l’impression d’ensemble à partir des éléments de comparaison versés aux débats,
Attendu que le tribunal relève, au vu de ces éléments, que sans constituer une copie quasi-servile de la rubrique Style Académie, la rubrique « Trente règles pour être un mec (presque) parfait » présente de nombreuses similitudes tant dans sa présentation que dans son contenu avec la rubrique Style Académie,
Attendu que le tribunal constate ces similitudes par la reprise des éléments suivants le concept même de la rubrique qui consiste à édicter sous forme humoristique de brefs conseils dont les hommes devraient s’inspirer, livrant ainsi les tendances sur la mode masculine,
– le principe de la numérotation des conseils rédigés pour l’un sous forme d’interrogations et pour l’autre sous forme d’affirmations,
– la présentation des conseils et la répartition des textes dans l’espace en plusieurs colonnes,
– l’illustration des conseils par des dessins,
– la présence d’un texte d’explication court pour chaque conseil,
– la mise en avant de certains conseils sous un fond de couleur de la typographie des numéros, bordeaux pour la rubrique Style Académie et rouge pour la rubrique du magazine de L’Equipe,
– la reprise du contenu des sujets traités. Sur la base d’un tableau de correspondances établi par la partie demanderesse, le tribunal observe que sur les 30 conseils traités du numéro de mars 2011 du magazine Sport & Style, 29 portent sur des thèmes déjà traités dans les magazines GQ publiés en 2009 et 2010 et son supplément de mars 2009 ; que certains de ces sujets sont totalement originaux de sorte qu’il est difficile de prétendre qu’ils ne constituaient pas un emprunt des thèmes de la rubrique Style Académie.
A titre d’exemples, le tribunal relève la reprise des sujets suivants :
« Faites la part des choses entre col boutonné et non boutonné » et « faut-il porter des chemises à col boutonné ou non boutonné » du magazine GQ d’octobre 2008, « Ne créez pas votre notice Wikipédia vous-même » et « tu ne créeras pas ta notice wikipedia toi-même » du supplément GP de mars 2009,
« N’hésitez pas à glacer vos chaussures » et « en quoi consiste le glaçage des chaussures » du numéro d’août 2010 de GQ.
– l’utilisation d’un jeu de couleur similaire, bordeaux et noire pour Style Académie et rouge et noire pour L’Equipe, même si les couleurs illustrant la rubrique Style Académie ont varié en fonction des années.
Attendu que si chacun de ces éléments peut être repris individuellement par la presse masculine, qu’il est effectivement classique par exemple d’utiliser une numérotation au sein d’une rubrique pour recenser des conseils, c’est la réunion d’autant de similitudes que l’on ne retrouve pas au sein d’autres magazines de presse masculine, qui démontre l’acte de concurrence déloyal,
Attendu qu’il ressort des pièces versées aux débats que les récentes modifications apportées au contenu du magazine Sport & Style tendant à lui accorder un contenu plus généraliste par rapport à son ancien format consacré principalement au sport, ces deux magazines s’adressent aujourd’hui à la même cible de lectorat tel qu’il ressort des articles de presse comme les hommes jeunes actifs CSP+ âgés de 25 à 50 ans, pour lesquels les annonceurs sont communs,
Attendu que depuis mars 2011, le magazine Sport & Style est également vendu seul au prix de 3.90 € alors qu’il était auparavant disponible exclusivement comme supplément sous blister avec le quotidien L’Equipe et L’Equipe Mag, le 1er samedi du mois,
Attendu qu’en conséquence, la disponibilité récente du magazine Sport & Style les autres jours du mois indépendamment de l’édition du week end du 1er samedi du mois de L’équipe et de L’équipe Mag, établit la volonté de L’Equipe d’apparenter ce supplément à un magazine mensuel de presse masculine à l’image du magazine GQ,
Attendu qu’en conséquence s’agissant de magazines s’adressant au même lectorat, la réunion d’autant d’éléments de similitudes de la rubrique Style Académie est de nature à créer un réel risque de confusion entre les deux magazines diffusés,
Qu’en conséquence, le tribunal dira que les sociétés L’Equipe et PSI ont commis des actes fautifs de concurrence déloyale engageant leur responsabilité au regard de l’article 1382 du code civil, et ordonnera aux sociétés L’Equipe et PSI :
– de supprimer la rubrique « Trente règles pour être un mec (presque) parfait » de la chronique « Mode d’emploi – Le Manuel du mec (presque) parfait » publiée dans le magazine Sport & Style à compter de la 1ère publication à paraître en 2012, et sous astreinte de 50 € par infraction constatée et par exemplaire ne respectant pas l’injonction prononcée,
– de faire cesser la diffusion sur internet et la communication via l’application « Sport & Style » compatible avec I’iPhone, l’iPod Touch et l’iPad de ladite rubrique et plus généralement la diffusion par tous moyens par tous tiers autorisés par les défenderesses à exploiter la rubrique, sous astreinte de 50 € par jour de retard, et ce, à compter de la 1ère publication à paraître en 2012 et, déboutera pour le surplus,
Sur les demandes de mesures réparatrices
Attendu néanmoins que la société Conde Nast ne démontre en aucune manière l’existence de préjudices dont elle entend obtenir réparation,
Attendu en effet que la société Conde Nast n’établit nullement une quelconque perte financière, une chute des ventes de son magazine, ou baisse des consommations de consultation de sa rubrique auprès des différentes applications, un manque à gagner ni même un détournement de clientèle,
Attendu au surplus qu’il n’est pas établi que la rubrique de quatre pages du magazine Sport & Style entraîne un risque de baisse des ventes du magazine GQ, qui contient lui-même environ 200 pages,
Qu’en conséquence, le tribunal constatera l’absence de préjudice tant patrimonial que moral, le tribunal déboutera la société Conde Nast des demandes ordonnant :
– le retrait de la vente et du prêt des exemplaires des numéros de Sport & Style comportant la rubrique litigieuse,
– de détruire les stocks des magazines Sport & Style comportant la rubrique litigieuse,
– la publication du jugement à intervenir dans le prochain numéro du magazine Sport & Style à la place de cette rubrique et en pleine page et sur la page d’accueil du site internet de Sport & Style en début de page,
– la condamnation des sociétés L’Equipe et PSI à payer à la société Conde Nast la somme de 100 000 € de dommages intérêts en réparation des préjudices patrimoniaux et moraux,
Sur la demande reconventionnelle des sociétés L’Equipe et PSI
Attendu que le tribunal a reconnu que les sociétés L’Equipe et PSI ont commis des actes de concurrence déloyale, il les déboutera de leur demande de dommages intérêts pour procédure abusive,
Sur l’exécution provisoire
Attendu que l’exécution provisoire du jugement est sollicitée et est compatible avec la nature de la cause, le tribunal, l’estimant nécessaire, l’ordonnera sans constitution de garantie,
Sur l’application de l’article 700 du CPC et les dépens
Attendu que pour faire reconnaître ces droits, la société Conde Nast a dû exposer des frais non compris dans les dépens qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge, le tribunal compte tenu des éléments d’appréciation en sa possession, condamnera in solidum les sociétés L’Equipe et PSI à payer la somme de 5000 €, déboutant pour le surplus et les condamnera aux dépens.
DECISION
Le tribunal statuant en premier ressort par jugement contradictoire,
– dit que les sociétés L’Equipe et PSI ont commis des actes fautifs de concurrence déloyale engageant leur responsabilité au regard de l’article 1382 du code civil,
– ordonne aux sociétés L’Equipe et PSI de supprimer la rubrique « Trente règles pour être un mec (presque) parfait » de la chronique « Mode d’emploi – Le Manuel du mec (presque) parfait » publiée dans le magazine Sport & Style à compter de la 1ère publication à paraître en 2012 sous astreinte de 50 € par infraction constatée et par exemplaire ne respectant pas l’injonction prononcée, astreinte dont le tribunal se réserve la liquidation éventuelle et déboute pour le surplus,
– ordonne de faire cesser la diffusion sur internet et la communication via l’application « Sport & Style » compatible avec l’iPhone, l’iPod Touch et l’iPad de ladite rubrique et plus généralement la diffusion par tous moyens par tous tiers autorisés par les défenderesses à exploiter la rubrique, à compter de la 1ère publication à paraître en 2012 sous astreinte de 50 € par jour de retard, astreinte dont le tribunal se réserve la liquidation éventuelle et déboute pour le surplus,
– déboute de l’ensemble des autres demandes formulées par la société Conde Nast,
– déboute les sociétés L’Equipe et PSI de sa demande reconventionnelle,
– condamne les sociétés L’Equipe et PSI aux dépens,
– ordonne l’exécution provisoire du jugement sans constitution de garantie,
– condamne in solidum les sociétés L’Equipe et PSI à payer à la société Conde Nast la somme de 5000 € au titre de l’article 700 du CPC déboute pour le surplus.
Le tribunal : M. Mermier (président), M. Misiraca et Mme Gueneteau (juges)
Avocats : Me Gilles Vercken, SCP Schmerber, Me Bruno Anatrella
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* Nous portons l'attention de nos lecteurs sur les possibilités d'homonymies particuliérement lorsque les décisions ne comportent pas le prénom des personnes.