Les avocats du net

 
 


 

Jurisprudence : Responsabilité

mardi 12 juillet 2016
Facebook Viadeo Linkedin

Tribunal de commerce de Nanterre, 4ème ch., jugement du 24 juin 2016

MACIF / IGA Assurances

dommages-intérêts - licence - logiciel - logiciel d’intégration - maintenance - manquements - obligations - résiliation

Le tribunal ayant le 15 avril 2016 ordonné la clôture des débats pour le jugement être prononcé par mise a disposition au greffe le 24 juin 2016, après en avoir delibéré.

LES FAITS

La Mutuelle Assurance des Commerçants et Industriels de France et des cadres et salariés de l’industrie et du commerce (MACIF) est la maison-mère d’un groupe de sociétés exerçant dans le domaine de l’assurance mutue11e. E1le compte, panni ses filiales, la société MACIFILIA, plus particulièrement consacrée à l’assurance de flottes et de transports et à celle des biens des entreprises. Dans le cadre d’une réorganisation de la MACIFILIA décidée en 2011, passant par le transfert de l’essentiel de ses portefeuilles d’assurances vers la maison mère et par son
repositionnement sur des produits destinés à des particuliers, la MACIF décide de l’acquisition d’une nouvelle solution logicielle IARD « incendie, accidents et risques divers » pour le remplacement d’une solution précédemment utilisée par la MACIFILIA mais considérée comme largement obsolète et lance le 15 mai 2012 un appel d’offres auquel la société IGA ASSURANCES (IGA), éditeur de logiciel et intégrateur, répond par une proposition commerciale le 11 juin 2012.

Par un contrat de cadrage en date du 20 juillet 2012, la MACIF confie dans un premier temps à IGA pour un prix de 234 416 € TIC, une prestation d’analyse complète de ses besoins afin de préciser le périmètre fonctionnel de son projet de réorganisation, d’en identifier les écarts avec les fonctionnalités standard du progiciel VEOS d’IGA, de définir les réponses spécifiques nécessaires pour compléter la couverture fonctionnelle standard et de proposer un chiffrage
forfaitaire pour fournir la solution cible, en fonction du nombre nécessaire d’adaptations spécifiques. La phase de cadrage a duré 6 mois, à l’issue de laquelle, le 15 décembre 2012, IGA livre à la MACIF une Matrice des Besoins et des Ecarts fonctionnels (ci-après Matrice des besoins) exposant 1079 besoins fonctionnels après actualisation.

Le 8 février 2013, les parties concluent :

– Un contrat d’intégration pour la livraison de la solution logicielle préfigurée au terme du contrat de cadrage et son intégration incluant les adaptations nécessaires au moyen de paramétrages ou de développements spécifiques, selon un calendrier compris entre janvier 2013 et juillet 2015 garantie contractuelle comprise, pour un montant forfaitaire de 4 097 158 € HT, dont 1 539 134 € HT au titre de la première version résultant du découpage du projet, intitulée Vl, payable à hauteur de 200/o au démarrage.

– Un contrat de licence et de maintenance pour la concession du droit d’utilisation du progiciel de gestion intégré VEOS d’IGA pour un montant total de redevances de
900 000 € HT dont 30% payables à la signature du contrat, 30% à la mise en production de la V1 du projet et 40% à la mise en production de la V2 du projet. Le montant de la redevance annuelle de maintenance est fixé à 18% du montant total des redevances, soit 162 000 € HT.

Le projet fait l’objet d’un découpage en 4 versions (VI, V2 … ) successives de la solution cible, découpées elles-mêmes en sous-projets. La V1 est dédiée à l’intégration des activités relatives à la couverture des ‘Loyers Impayés’.

Au contrat d’intégration est annexé un Plan Qualité Projet (PQP). Une méthodologie est convenue prévoyant des ateliers de conception itérative et progressive pour aboutir à la rédaction de spécifications fonctionnelles détaillées (SFD) devant être validées, phase préalable à leur transcription dans la solution logicielle.

IGA livre le 30 janvier 2013 les SFG de la VI. Les 5 et 7 février 2013, les parties échangent des messages sur le caractère incomplet des SFG transmises par IGA et sur les difficultés rencontrées dans l’obtention des éléments par cette dernière. IGA adresse ensuite les premières SFD à la MACIF en février 2013.

Le planning de l’établissement et de la livraison des SFD fait l’objet de plusieurs reports jusqu’en juillet 2013 période pendant laquelle IGA adapte sa méthode de spécification des besoins par la mise en place d’ateliers dynamiques.

Une réunion de coordination est organisée le 14 février 2013 pour l’examen d’un nouveau planning, approuvé le 19 février, visant à une livraison des SFD avant la fin du mois de mai.
Le 22 mars 2013 une réunion de mise au point est organisée pour définir le niveau de précision des SFD.
Le 27 mars, les parties signent un avenant de report calendaire fixant au 23 août 2013 la livraison des développements logiciels finalisés et la levée des réserves ainsi que la mise en production pour le 18 octobre 2013 au plus tard.
Le 3 mai, IGA adresse à la MACIF un nouveau planning de livraison des SFD remises à niveau pour la partie « coeur fonctionnel de la V1 ».
Le 16 mai, le planning de livraison est réactualisé, IGA propose une modification de la méthode de spécification des besoins par la mise en place d’ateliers dynamiques et adresse une nouvelle proposition de planning de livraison des SFD révisées de la V1 au 11 juillet 2013.

Après avoir annulé la tenue d’un comité de suivi prévu le 22 juillet, par courrier recommandé du 23 Juillet 2013, la MACIF met IGA en demeure de livrer l’ensemble des SFD sous 30 jours soit au 23 août au plus tard.
Par courrier du 2 août 2013, IGA conteste ta demande et met à son tour la MACIF en demeure de valider sous 30 jours les SFD qu’elle lui a transmises.
Le 6 août 2013, IGA livre des SFD de la V1 et complète ses livraisons les 7 et 9 août.
Le 13 août 2013 la MACIF lui demande de confiemer si les livraisons au titre de la V1 sont complètes, finalisées et exhaustives,
Le 19 août 2013, IGA confirme le caractère exhaustif de sa livraison. Le 28 août 2013, IGA adresse un rapport dans lequel elle indique que 62 SFD sur les 75 de la V1 ont été livrées, 11 n’ayant pas été livrées et 2 n’ont pas été rédigées.
Dans l’intervalle la MACIF effectue des contrôles avec l’appui à maîtrise d’ouvrage (AMOA) de STERIA. Elle constate dans un courrier recommandé du 12 septembre 2013 qu’IGA n’a pas respecté le délai imparti pour livrer l’intégralité des SFD de la Version 1, en indiquant que ces documents ne « couvrent pas la moitié des besoins exprimés dans la matrice des besoins annexée au contrat» et prononce la résiliation du contrat pour faute grave et répétée d’IGA.

Par assignation en date du 30 octobre 2013, la MACIF demande la nomination d’un expert judiciaire informatique afin de déterminer si les spécifications fonctionnelles fournies par IGA reprennent bien l’intégralité des besoins qu’elle a exprimés depuis l’établissement de son cahier des charges jusqu ‘aux travaux des ateliers de restitution et dynamiques et ce, dans quelle proportion et de dire également si leur degré de précision permet d’en effectuer la validation.

Par ordonnance du 17 décembre 2013, le président du tribunal de commerce de Nanterre a fait droit à la demande de la MACIF.

Le 24 février 2015 Monsieur Jean-Raymond Lemaire, expert désigné par le tribunal, rend son rapport. Il conclut que « sur 132 besoins identifiés sur un périmètre de 350 appartenant à la V1, 65 justifient la position de la MACIF, pour 9 d’entre eux les réponses apportées par IGA sont justifiées et pour 58 d’entre eux une ou plusieurs réunions complémentaires auraient dû avoir lieu afin d’éclaircir le besoin ou la réponse faite ». Le rapport indique, entre autres, que « la MACIF était contractuellement responsable de la validation de l ‘exhaustivité des SFD mais que /GA aurait dû vérifier l’exhaustivité ou la suivre et la gérer avec la MACIF ».

PROCEDURE

C’est dans ces circonstances que, par acte d’huissier du 15 juin 2015, délivré à personne, la MACIF assigne IGA devant ce tribunal, lui demandant de :

Vu les articles 1134 et suivants, ainsi que l’article l 14 7 du code civil,
– Prononcer la résolution judiciaire du contrat d’intégration du 8 février 2012 et du contrat de licence et maintenance associé aux torts d’IGA ASSURANCES ;
– Condamner la société IGA ASSURANCES à rembourser le montant de 710 366,34 €
TIC à la Mutuelle Assurance des Commerçants et Industriels de France et des cadres et salariés de l’industrie et du commerce (MACIF), au titre des sommes payées en pure perte et sans contrepartie par la MACIF à IGA ASSURANCES ;
– Condamner la société IGA ASSURANCES à payer le montant de 1 328 667,29 €, sauf à parfaire, à la Mutuelle Assurance des Commerçants et Industriels de France et des cadres et salariés de l’industrie et du commerce (MACIF), en réparation des coûts exposés par la MACIF en pure perte en raison de l’échec du projet faute d’exécution de ses engagements contractuels par IGA ASSURANCES ;
– Condamner la société IGA ASSURANCES à payer le montant de 600 000 €, sauf à
parfaire, à )a Mutuelle Assurance des Commerçants et Industriels de France et des
cadres et salariés de l’industrie et du commerce (MACIF), en réparation des manques à gagner que cell~ci subit du fait de l’absence d’outil logiciel intégré et personnalisé qu’elle avait commandé à IGA ASSURANCES ;
– Condamner la société IGA ASSURANCES à payer le montant de 230 175,03 € à la
Mutuelle Assurance des Commerçants et Industriels de France et des cadres et salariés de l’industrie et du commerce (MACIF), au titre de l’article 700 du CPC, ainsi qu’aux entiers dépens ;

A l’audience du 9 juillet 2013, IGA dépose des conclusions, demandant au tribunal de :
Vu le rapport de Monsieur l’expert Lemaire du 24 février 2015,
Vu les articles 1134, 1147, 1792-6 du code civil
– Dire la MACIF irrecevable, et en tout état de cause mal fondée, en l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
– L’en débouter ;
– Dire la société IGA recevable et bien fondée en toutes ses demandes, fins et
réclamations ;
– Y faire droit ;
En conséquence :
– Condamner la MACIF à verser une somme de 276 120,64 € TIC en règlement de sa facture impayée (SF 130216), avec intérêts, conformément au droit commun, à partir du 15 novembre 2013 ;
– Condamner la MACIF à verser une somme de 3 575 012 € HT à la société IGA en
réparation du préjudice subi du fait de la résiliation abusive des contrats de licence et d’intégration ;
– Autoriser la société IGA à faire publier par extraits le jugement à intervenir dans cinq journaux ou périodiques français de son choix, aux frais de la MACIF à concurrence de 15 000 € par insertion ;
– Condamner la MACIF à publier, par extraits choisis par la société IGA, le jugement à intervenir, en français et en anglais, sur la page d’accueil de tout site Internet exploite par la MACIF ou toute société lui étant liée, en particulier le site https://www.macif.fr;
– Condamner la MACIF à verser une somme de 197 498 € à la société IGA au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamner la MACIF aux entiers dépens ;
– Prononcer l’exécution provisoire de la décision à intervenir, sans constitution de
garantie.

L’affaire est renvoyée à l’audience du 30 juillet puis à celle du 3 septembre 2015 au cours de laquelle le tribunal confie l’instance à un juge chargé d’instruire l’affaire qui convoque les parties à son audience du 23 septembre pour l’établissement d’un calendrier de la mise en état.

A cette audience, la MACIF dépose des conclusions complétant et modifiant ses écritures introductives d’instance et demandant au tribunal de :

– Condamner la société IGA ASSURANCES à payer le montant de 668 581,70 € sauf à parfaire, à la Mutuelle Assurance des Commerçants et Industriels de France et des cadres et salariés de l’industrie et du commerce (MACIF), en réparation des coûts internes exposés par la MACIF en pure perte en raison de l’échec du projet faute d’exécution de ses engagements contractuels par IGA ASSURANCES ;
– Condamner la société IGA ASSURANCES à payer le montant de 555 032,96 € HT soit 661 872,78 € TTNRC sauf à parfaire, à la Mutuelle Assurance des Commerçants et Industriels de France et des cadres et salariés de l’industrie et du commerce (MACIF), en réparation des coûts externes exposés par la MACIF en pure perte en raison de l’échec du projet faute d’exécution de ses engagements contractuels par IGA ASSURANCES ;
– Condamner la société IGA ASSURANCES à payer le montant de 500 000 € à la
Mutuelle Assurance des Commerçants et Industriels de France et des cadres et salaries de l’industrie et du commerce (MACIF), en réparation du préjudice d’image que celle-ci subit auprès de ses sociétaires et sur le marché des compagnies d’assurances ;
– Ordonner la publication d’extraits de la décision à intervenir sur le site d’IGA
ASSURANCE et dans 5 publications au choix de la MACIF à hauteur de 10 000 €
chacune ;
– Rejeter l’ensemble des demandes reconventionnelles formées par IGA ASSURANCE
et l’en débouter ;

Dans le cadre du calendrier établi, IGA dépose des conclusions n°2 par lesquelles elle porte sa demande au titre de l’article 700 à la somme de 226 190 €.

A l’audience du juge chargé d’instruire l’affaire fixée dans le cadre du calendrier à la date du 17 décembre 2015, les parties ayant réitéré oralement leurs dernières demandes, elles sont invitées par le juge à rechercher une voie amiable à leur différend, ce qu’elles ont accepté.

Par jugement en date du 12 février 2016, Je tribunal désigne l’Association Nationale des Médiateurs prise en la personne de Madame Maud NEUKIRCH pour procéder à l’exécution d’une mission de médiation. Par courrier du 15 avril 2016 adressé au tribunal, Madame Maud NEUKIRCH met fin à la mission de médiation, les discussions n’ayant pas permis d’aboutir à un accord. A réception du courrier du médiateur, le juge en charge d’instruire l’affaire clôt les débats et met le jugement en délibéré pour un prononcé par mise à disposition au greffe le 24 juin 2016.

Pour l’exposé des prétentions et des moyens des parties, soutenus oralement à l’audience, il est renvoyé aux dernières conclusions déposées. Ils seront examinés dans les motifs de la décision.

MOYENS ET MOTIVATION

Sur la rupture des deux contrats

DISCUSSION PAR LES PARTIES

La MACIF expose que :

IGA a contracté des engagements fermes en connaissance des besoins de la MACIF qui sont des obligations de résultat et même des obligations essentielles au sens du contrat.
IGA a manqué à son obligation de résultat de fournir un dossier de spécifications détaillées conforme dans le respect des délais impartis.
C’est IGA qui a défini les adaptations fonctionnelles à apporter à son progiciel après la phase de cadrage poussée et c’est elle qui a proposé en connaissance le forfait contractuel et le calendrier des opérations sous sa maîtrise d’oeuvre.
La méthodologie du projet a fait l’objet d’un plan qualité projet (PQP). Elle prévoyait que :
1. Le prestataire traduise en Spécifications Fonctionnelles Générales (SFG) les besoins métiers exprimés par le client pendant la phase de cadrage et pendant les ateliers de conception ;
2. Le prestataire entre ensuite dans le détail de ces SFG afin d’en faire des Spécifications Fonctionnelles Détaillées (SFD) décrivant pas à pas chacune des fonctionnalités finales ;
3. Le client valide ce« dossier de spécifications>> formé par les SFG et les SFD, par rapport à ses besoins exprimés (selon le cahier des charges et via les ateliers).
Or, IGA a livré des SFG lacunaires, elle a escamoté cette étape, en contrevenant à sa propre méthodologie et aux pratiques en matière d’intégration de logiciels.
Alors qu’elle s’est engagée sur des délais, elle ne tient pas les engagements, change de méthode en cours de route et le planning dérive.
Malgré les alertes et les mises au point, les SFD n’atteignent pas le niveau de précision et de complétude attendu par la MACIF et IGA in fine propose de ne livrer que les SFD « majeures » sans définition.
Les SFD livrées ne sont finalement pas conformes et il n’a pas été possible pour la MACIF de parvenir à la recette d’un livrable et de poursuivre les étapes suivantes du projet.
IGA nie avoir livré des SFD incomplètes et indigentes mais engage une action à l’encontre de son sous-traitant en lui reprochant justement de lui coûter sa cliente la MACIF.
C’est pourquoi, perdant confiance, la MACIF a été contrainte de procéder à la résiliation du contrat, la clause résolutoire étant toujours comprise dans un contrat quand bien même elle n’est pas rédigée, et de demander une expertise judiciaire sur la non-conformité des SFD réalisées par IGA.
L’expertise a montré que les SFD livrées les 6 et 9 août étaient gravement incomplètes dans des proportions rédhibitoires qui justifient à elles seules la résiliation du contrat.
Toutefois l’expert ne s’est attaché qu’aux griefs quantitatifs et n’a pas examiné la question de la conformité qualitative des SFD.
L’expert n’a pas à déterminer qui est responsable des engagements contractuels, c’est au tribunal qu’il revient de le dire, or le contrat stipule que IGA en tant que maîtrise d’oeuvre de la VI devait assurer le suivi de l’avancement de ses travaux de spécification par rapport au référentiel et en infonner régulièrement la MACIF. Elle n’a jamais communiqué les indicateurs de suivi prévus au PQP.
Elle ajoute qu’il est apparu au cours de l’expertise qu’IGA connaissait les exigences de la MACIF, savait qu’elle n’avait pas instruit la totalité des besoins ni ne les avait retranscrits en totalité dans les SFD, qu’en conséquence, la livraison du mois d’août est non seulement non conforme mais également dolosive.

IGA rétorque :
Que la remise en cause du projet par la MACIF n’est pas sans lien avec l’évolution à fin mars 2013 du contexte législatif relatif à la mise en place de la garantie universelle des loyers à la charge de l’Etat et au profit des propriétaires en cas d’impayés, qui a rendu inutile les produits d’assurance tels que la couverture pour Loyers Impayés, objet de la version 1 du projet d’intégration, que dans le cadre du projet d’intégration, la MACIF l’a en réalité empêchée d’aller au bout de sa prestation et a précipité la résiliation du contrat en contravention avec les dispositions contractuelles,
Que la résiliation pour faute prononcée par la MACIF est abusive dès lors que le taux de spécifications fonctionnelles détaillées manquantes avancé par celle-ci dans son courrier de résiliation n’a pas été confirmé ni retenu par l’expertise diligentée par le tribunal, qu’aucune obligation ne pèse en réalité sur elle de produire des SFD pour 100% des besoins identifiés par la matrice des besoins puisque que les SFD ne sont nécessaires que pour les besoins non couverts par le progiciel en standard et requérant soit un paramétrage, soit un développement
spécifique,
Que les constats de l’expertise disqualifient le motif de résiliation avancé par la MACIF aussi bien sur le plan qualitatif puisqu’elle relève que la MACIF n’a pas émis de critique qualitative justifiée, ni sur le plan quantitatif puisqu’il est apparu que 139 besoins fonctionnels sur 489 initiaux de la V1 ne devaient finalement pas être traités dans les SFD de cette version.
Qu’il appartenait dans le cadre de la répartition des responsabilités en réalité à la MACIF et non à IGA de procéder à la vérification de l’exhaustivité des SFD par rapport aux points de la matrice des besoins qui nécessitaient un retraitement particulier, que la MACIF ne l’a pas effectuée avant juin 2013 et n’en a pas communiqué le résultat à IGA, manquant alors à son obligation contractuelle de loyauté en ne lui communiquant pas les griefs dont elle avait connaissance et en provoquant délibérément la faute qu’elle a ensuite imputé à IGA,
Qu’elle n’a en outre pas respecté la procédure contractuelle de validation en ne communiquant aucune remarque fonna1isée sur chacun des livrables et alors qu’elle connaissait les réserves depuis plus d’un mois avant la date de la mise en demeure, ce qui n’a pas permis à IGA de traiter les remarques et de relivrer selon le processus établi pour aboutir à une version définitive du livrable,
Elle répond aux arguments de la MACIF en indiquant que la recette de la solution devait se faire par rapport aux SFD uniquement pour les besoins traités et par rapport à la matrice de conformité pour tous ceux qui n’ont pas à être retraités, qu’en aucun cas les SFD n’avaient vocation à devenir le référentiel unique de conformité,
Elle soutient que la résiliation a été effectuée en contravention avec les dispositions contractuelles qui limitent la résiliation au défaut de recette au seul cas où il n’a pas été possible pour le client de recetter à plus de deux reprises successives et sans anomalie bloquante tout ou partie de la solution, tandis que la MACIF a procédé à la résiliation après un seul et unique refus de recette.
Elle rappelle qu’elle n’avait pas à piloter le projet mais à livrer la solution.

DISCUSSION

Attendu que dans le contexte de la réorganisation menée par le groupe MACIF visant à rationaliser et à redistribuer les principaux domaines d’activités exercés au sein de ses filiales, dont la MACIFILIA, et à refondre à cette occasion le système d’information qui les supportait, les parties se sont liées par deux contrats conclus le 8 février 2013, pour l’utilisation et la maintenance d’une part et l’intégration d’autre part dans le système d’information du groupe MACIF de la solution logicielle VEOS éditée par IGA Assurances,

Qu’il s’agissait en l’espèce, de remplacer une application infonrmatique de gestion d’activités d’assurance considérée par la MACIF comme obsolète, par un progiciel de gestion, correspondant à une famille d’applications informatiques composées d’un socle de fonctionnalités génériques répondant à des besoins standards, ne nécessitant pas d’adaptation à l’exception d’un personnalisation possible, mais pouvant être complété d’une couche spécifique configurable pour répondre aux particularités d’une entreprise,

Qu’il y a lieu de relever que dans le cadre de ce projet, la MAClF a affirmé son intention, d’adopter un progiciel en limitant les développements spécifiques (article 1.4 du contrat d’intégration) et a demandé à IGA de privilégier tout au long du projet les solutions standards aux solutions spécifiques (article 2. 7 du même contrat), qu’en faisant ainsi le choix de la solution progicielle VEOS à l’issue d’une phase préalable d’analyse comparative, la MACIF a nécessairement entendu adapter majoritairement ses modes de fonctionnement et ses processus au nouvel outil et non l’inverse, qu’en conséquence toutes les fois que le prestataire a tenté au cours de l’exécution du contrat de proposer une fonctionnalité standard du progiciel, il n’y a pu avoir de « forçage » du besoin,

1. Sur le contrat d’intégration

Attendu que la MACIF a résilié le contrat d’intégration au motif que les SFD livrées au mois d’août 2013 par IGA ne couvraient pas la moitié des besoins exprimés dans la matrice des besoins annexée au contrat mais qu’IGA conteste avoir contrevenu à une obligation contractuelle pour avoir livré des SFD ne traitant pas 100% des besoins de la matrice des besoins, qu’il en résulte au vu des pièces versées et des débats que le litige né entre les parties trouve son origine dans une interprétation opposée de leurs responsabilités et obligations respectives qu’il y a lieu de clarifier, qu’en effet :

a) Sur l’obligation d’IGA

Attendu que l’obligation essentielle d’IGA, telle qu’elle ressort des dispositions contractuelles, était de livrer à chaque version du programme,. dans un délai convenu, une solution évolutive composée d’un ensemble regroupant, outre Je logiciel intégrant des adaptations fonctionnelles devant constituer le socle de la version suivante, des paramétrages, des développements spécifiques permettant de dialoguer et d’interopérer avec les systèmes en place, et ce, en conformité avec un référentiel contractuellement défini,

Qu’à l’issue de la phase de cadrage ayant précédé la conclusion du contrat, 1 079 besoins avaient été exprimés par la MACIF pour être confrontés aux fonctionnalités du progiciel VEOS, dont il a résulté la répartition principale suivante :
– 659 besoins exprimés pouvant être couverts par le progiciel ou par paramétrage
spécifique,
– 163 besoins à couvrir par développements spécifiques « progicialisables »,
– 83 développements d’interfaces à réaliser entre le progiciel et le système
d’information de la MACIF,

Attendu que, sur la base du lotissement du programme, la MACIF attendait donc que pour chaque ligne de besoin exprimé, soit 489lignes fonctionnelles résultant du tri de la matrice pour la V1, IGA lui livre des spécifications fonctionnelles détaillées correspondantes et c’est ce qu’elle exigeait dans son courrier de mise en demeure,

Attendu qu’alors que le contrat d’intégration comporte un chapitre entièrement consacré à des définitions, celle de la spécification fonctionnelle détaillée n’a pas été prévue par les parties mais que cette action se situe dans les méthodologies courantes de développement de projet, sur le chemin entre l’analyse et le prototypage de la solution, qu’elle figure en l’espèce, dans le schéma du cycle en V (page 14 du PQP), dans les livrables attendus de la phase de conception de la solution de la V1, qu, elle a donc vocation à documenter les futurs développements,

Attendu que les paramétrages pour leur part, sont définis contractuellement comme une personnalisation sans modification du code source du progiciel, qu’ils s’apparentent en quelque sorte à des réglages du progiciel et n’impliquent donc pas les mêmes exigences en matière de spécifications des besoins,

Qu’ainsi à partir des trois catégories fonctionnelles envisagées par les parties, (L) la couverture des besoins par les fonctionnalités du progiciel, objectif principal, requiert plutôt la description des fonctionnalités du progiciel par IGA pour que les utilisateurs adaptent leurs processus et leur organisation à l’outil et non la couverture de leurs besoins, (ii.) les développements spécifiques, en ce inclus, le cas échéant, ceux qui n’ont pas vocation à intégrer les versions de base ultérieures du progiciel, requièrent des spécifications détaillées, sur la base de la méthode itérative convenue, (iii.) les paramétrages font l’objet de choix parmi des fonctionnalités existantes dans l’outil et non de spécifications,

Attendu qu’aucune disposition contractuelle ne fait obligation de couvrir l’intégralité des besoins de la matrice par des spécifications fonctionnelles détaillées, l’obligation de résultat contractée par IGA se trouve en conséquence circonscrite à la livraison de celles qui sont indispensables aux développements et aux adaptations à apporter à chaque version de base de la solution,

Dès lors, c’est pertinemment qu’IGA objecte qu’il n’y a pas d’utilité de faire rédiger des spécifications détaillées toutes les fois que le progiciel est en mesure de couvrir nativement un besoin exprimé sans recourir à un développement, qu’il en est ainsi pour les 659 besoins listés ci-dessus, sous réserve des paramétrages spécifiques à réaliser dont le nombre n’est pas précisé et pour lesquels un simple renvoi à une documentation ou un moindre niveau de complétude était exigibles,

Attendu que si IGA n’a émis aucune contestation en réponse aux demandes, rappels et mise en demeure de la MACIF pour faire valoir sa position avant notification de la résiliation du contrat, ce silence ne modifie pas le champ des obligations contractuelles, le contrat ne pouvant être modifié que par voie d’avenant notamment dans les cas de modification de périmètre impactant
les prestations à la charge du prestataire (Contrat d’intégration article 3./),

b) Sur les SFD manquantes

Attendu que les parties ont défini leurs responsabilités respectives en matière de pilotage du programme et des différents sous-projet le composant, qu’une matrice « RACI » des responsabilités figurant au chapitre 7 du PQP attribue à IGA la réalisation, sous le vocable de maîtrise d’oeuvre, et à la MACIF la responsabilité sur les livrables de spécifications détaillées, qu’il revenait donc à cette dernière, à ce titre, d’en effectuer le suivi et le contrôle quantitatif, même si IGA pouvait le faire, et qu’elle est donc mal fondée à réclamer à son prestataire de la visibilité sur la progression des SFD et à lui reprocher un pilotage approximatif et opaque,

Attendu que la MACIF se devait de préciser dans sa lettre de résiliation en quoi les SFD livrées par IGA ne couvraient pas la moitié des besoins exprimés dans la matrice, ce qu’elle n’a pas exactement motivé, or il s’avère qu’elle détenait des éléments quantitatifs issus des études qu’elle a fait réaliser en interne et par l’intermédiaire de son appui à maîtrise d’ouvrage et que ces éléments ne permettent pas de corroborer le taux de non-couverture allégué,

Qu’en effet, le nombre des besoins exprimés par la MACIF au titre de la VI du programme a été substantiellement réduit de 489 à 350, ainsi que le relève l’expert, parmi lesquels 132 besoins ont finalement été identifiés comme n’étant pas traités dans les SFD livrées par IGA,

Attendu que le rapport d’expertise pointe que la matrice n’avait pas été mise à jour au fur et à mesure de la livraison des SFD par IGA, qu’il en est résulté une comptabilité imprécise et évolutive depuis le début de la réalisation de cette phase, qu’ainsi l’expert relève « le manque de clarté des différents comptes rendus d’ateliers qui n’a pas permis d’apporter des éléments clairs sur les travaux des deux sociétés durant la première phase du projet » et qu’il « n’y a pas eu de pilotage de cette phase en fonction de la complétude des besoins demandés par la Macif »,

Que le même rapport (réponse aux chefs de mission p 7) conclut que sur 65 besoins non spécifiés par rapport à la matrice, 17 sont reconnus par IGA mais indique toutefois qu’il « reste à savoir s ‘ils font partie du standard ou non » et que pour 58 des besoins, des réunions complémentaires auraient dû avoir lieu afin d’éclaircir le besoin ou la réponse,

Attendu qu’il a été établi ci-avant qu’IGA n’avait pas d’obligation contractuelle de livrer des spécifications détaillées pour la totalité des besoins exprimés par la MAC IF, qu’en conséquence et pour caractériser le défaut de livraison sur le plan quantitatif, la MACIF se devait d’indiquer précisément quelles spécifications n’avaient pas couvert un besoin destiné à un développement spécifique, qu’en l’absence de cette précision, le doute n’ayant pas été levé sur la nature des
besoins, le grief n’est pas démontré,

c) Sur la qualité des SFD

Attendu que la MACIF considère que les SFD étaient non conformes aux besoins exprimés, car incomplètes et imprécises,

Attendu que les dispositions contractuelles ne comportent non plus aucune définition du degré de précision des spécifications fonctionnelles détaillées ainsi qu’il a été relevé précédemment, qu’il suffit de se reporter aux écritures de la MACIF qui se réfèrent à la réunion organisée le 22 mars 2013 pour constater que les parties ont dû se livrer a posteriori à une description de leur contenu, mais que malgré ces définitions, la MACIF a persisté dans ses reproches,

Attendu qu’il y a lieu de déduire de l’objet même d’une spécification fonctionnelle d’un besoin à des fins de programmation, que sa qualité et le temps qui sera nécessaire pour la construire, va dépendre in fine aussi bien de l’expression du besoin par l’utilisateur final en des termes précis, intelligibles, non évolutifs et reposant sur une organisation et des processus stabilisés, que de celle de sa retranscription pas à pas dans des termes permettant sa compréhension et sa
validation, qu’il en résulte que pour imputer la responsabilité de leur non-conformité à IGA, la MACIF se devait de démontrer que ses demandes étaient exemptes d’incohérences et qu’elles n’excédaient pas l’objectif initia) de standardisation pour tendre vers une solution de plus en plus spécifique, ce qui n’a pas été établi alors que la MACIF se présente elle-même en voie de transfert de ses lignes d’activités entre la maison-mère et les filiales et qu’elle apparaît plutôt
en situation de construction concomitante de sa solution informatique avec une réorganisation,

Attendu que les parties se sont affranchies de la méthode du cycle en V pour la conception détaillée et le paramétrage du progiciel (PQP article 6.1. ), que la spécification des besoins a été effectuée à partir d’une méthodologie dite de développement rapide (RAD), basée sur une démarche itérative entre la maîtrise d’ouvrage et le maître d’oeuvre, impliquant que les concepteurs fonctionnels et les représentants des utilisateurs définissent ensemble l’application lors des ateliers de conception, et conduisant à ce que la configuration du progiciel se stabilise progressivement et continue à évoluer assez tardivement dans le projet (PQP article 6.1.2.),

Attendu que dans ce cas, la responsabilité des spécifications et l’engagement associé sont alors collectifs, ce que confirme le rapport d’expertise qui indique que la méthode RAD a permis une validation successive et régulière des SFD, les ateliers spécifiques à cette méthode et réalisés durant cette phase de conception des SFD ont permis de les orienter et de les valider, et conclut sur ce point que l’analyse qualitative des besoins n’apparaissait pas utile durant l’expertise,

Attendu que si l’animation des ateliers de conception dynamiques était placée sous
l’organisation d’IGA, la qualité de leur production ne peut donc relever de son unique responsabilité et il n’a pas été démontré que dans le cadre de cette construction collective, la dérive dans le temps pointée par la MACIF ait résulté uniquement du fait d’1GA,

Attendu en outre que certaines fonctionnalités ont été exclues de la méthode RAD (PQP page 15 et 16) lorsqu’elles ne se prêtaient pas à une démarche itérative conduisant à ce que certaines spécifications n’avaient pas à être construites en atelier dynamique, qu’il en résulte que la MACIF ne peut porter une appréciation globale des spécifications livrées sur leur défaut qualitatif sans opérer une distinction par rapport à la méthode suivie,

Attendu en conséquence que le défaut de qualité ne pouvant être exclusivement imputable à IGA et l’absence de qualité des spécifications étant insuffisamment justifiée selon les différentes méthodologies suivies, le grief ne sera pas retenu contre elle ;

d) Sur les délais

Attendu que le contrat d’intégration stipulait une date de mise en production pour la fin du mois de septembre 2013, que les délais de réalisation ont effectivement été qualifiés d’obligation essentielle du contrat d’intégration,

Attendu que les parties ont établi un avenant en date du 27 man 2013 pour une date de livraison pour recette utilisateurs au plus tard le 23 août 2013 s’agissant de la VI, la livraison ne peut s’apprécier que par rapport à l’avenant susvisé,

Attendu que des spécifications détaillées ont été effectivement livrées début août 2013, qu’il a été établi précédemment que leur nombre n’avait pas à couvrir tous les besoins, que parmi les spécifications qui auraient dû être livrées, rien n’indique clairement qu’elles relevaient de l’obligation essentielle de délivrance d’IGA, c’est-à-dire venant en support des développements spécifiques ou des adaptions convenues du progiciel, en conséquence le défaut de livraison dans les délais reproché par la MACIF ne sera pas retenu faute de ces justifications,

e) Sur l’obligation de la MACIF

Attendu qu’outre la responsabilité du pilotage de la phase litigieuse, la MACIF se devait de communiquer l’ensemble des documents raisonnablement nécessaires à la réalisation des prestations et d’une manière générale de coopérer de bonne foi avec le prestataire afin de lui permettre de réaliser les prestations dans de bonnes conditions,

Attendu que le 5 juin 2013 la MAClF s’est livrée à une analyse des écarts entre la matrice des besoins et les SFD fournies à cette date (courriel interne du 5 juin pièce n° JO DEF), qu’il s’est avéré au cours de l’expertise que ce courriel n’avait pas été transmis à IGA alors qu’il comporte des indications présentant un intérêt manifeste pour le suivi et la réalisation des prestations puisqu’il liste des interrogations sur la réception de certaines SFD et des indications d’incompréhension de la formulation de la matrice des besoins,

Attendu que la MACIF a également fait effectuer un audit par la société STERIA afin de « disposer d’une vision externe objective et exhaustive des besoins pour lesquels une solution a effectivement été spécifiée et/ou documentée de manière détaillée, indépendamment d’éventuelles imprécisions erreurs ou oublis qu’aurait pu commettre IGA en renseignant la table de correspondance entre la matrice des besoins annexée au contrat d’intégration et la documentation fournie »,

Attendu que le résultat de telles études, dont l’existence a également été révélée au cours des travaux d’expertise, présente également un intérêt manifeste pour parvenir à la réalisation des prestations puisqu’il a vocation à fournir l’outil de suivi des travaux effectués en ateliers dynamiques, qu’il n’a pas non plus été communiqué au prestataire en temps utile, le privant d’une possibilité d’exécution dans de bonnes conditions, ce qui constitue une méconnaissance de plus de la part de la MACIF de son obligation de coopération de bonne foi,

En conséquence, le défaut de livraison tant quantitatif que qualitatif n’étant pas retenu à l’encontre d’IGA et la MACIF ayant manqué à son obligation de coopération de bonne foi dans l’exécution du contrat d’intégration, le tribunal prononcera la résolution Judiciaire du contrat d’intégration du 8 février 2012 aux torts de la MACIF et la déboutera de l’ensemble de ses demandes ;

Il. Sur le contrat de licence-maintenance

Attendu que la MACIF a prononcé la résolution de plein droit du contrat de licence-maintenance, en application de 1′ article 2 1. 7 dudit contrat, suite à la résiliation du contrat d’intégration sur le fondement de l’existence d’un ensemble contractuel liant les deux contrats,

Mais attendu que le premier contrat a été abusivement résilié, le tribunal prononcera de même la résolution du contrat de licence-maintenance aux torts de la MACIF ;

Sur les demandes reconventionnelles d’IGA

a) Sur la facture du 10 septembre 2013

Attendu que la résiliation du contrat sera prononcée aux torts de la MACIF IGA est en conséquence fondée à présenter sa facture au titre de la phase de validation des spécifications de la V1 en cours d’exécution au moment de la résiliation,

En conséquence, le tribunal condamnera la MACIF à payer à IGA la somme de 276 120,64 € TTC en règlement de la facture SF 130216 du 10 septembre 2013 majorée des intérêts de droit à partir du 15 novembre 2013, date d’échéance de la facture ;

b) Sur la demande de dommages et intérêts

i. Le manque à gagner sur le contrat d’intégration

Attendu qu’IGA fait valoir un préjudice lié au manque à gagner au titre du contrat d’intégration résilié pour un montant de 711 692 € HT, correspondant à une marge moyenne de 20% réalisable sur le reste à facturer au titre de la totalité dudit contrat,

Mais attendu que le contrat d’intégration stipule en son article 21.7 que le client dispose d’une faculté de résiliation à tout moment, à sa discrétion, donnant lieu, outre la somme devant être facturée à l’issue de l’étape en cours, au paiement d’une indemnité forfaitaire de 10% des sommes restant dues au titre du contrat non exécuté jusqu’au terme,

Attendu qu’en vertu de cette faculté de résiliation stipulée au profit de la MACIF, le risque encouru par IGA sur ce manque à gagner ne peut excéder ce montant contractuellement défini,

En conséquence, sur un reste à facturer de 3 558 461 € HT, abstraction faite du règlement de la facture susvisée, le montant de la réparation au titre du préjudice subi ne saurait excéder la somme de 355 846 € HT,

Attendu que le tribunal condamnera Ja MACJF à payer à IGA la somme de 355 846 € en réparation de ce chef de préjudice ;

ii. Le manque à gagner au titre de la licence

Attendu que les licences ont été mises à la disposition de la MACIF dans le cadre de l’exécution du projet de la V1, que la MACIF a procédé au règlement de 30% du prix sur la base de l’échéancier convenu, que le contrat de licence a été rompu de manière abusive, qu’il y a donc lieu de réparer intégralement le préjudice subi au titre de la perte de ce contrat, que celui-ci s’élève à la somme de 900 000 € sous déduction du premier règlement partiel de 30% effectué, soit un solde résiduel de 630 000 € HT,

Attendu que Je préjudice exposé, lié à l’évolution prévisible du contrat de licence n’apparaît pas réaliste, le tribunal ne fera pas droit à cette demande complémentaire,

En conséquence, le tribunal condamnera la MACIF à payer à IGA la somme de 630 000 € au titre de ce chef de préjudice ;

iii. Le manque à gagner au titre de la maintenance

Attendu que le préjudice allégué par IGA au titre des dépenses de maintenance est justifié, que le taux de 18% et la durée de maintenance servant de base au calcul de ces dépenses ont été stipulés au contrat, qu’eu égard à l’investissement réalisé, la durée d’utilisation de 5 ans est admissible, que toutefois le taux de marge à retenir sera équivalent à celui proposé par IGA pour les prestations du contrat d’ intégration, soit 20%, en lieu et place de 40%, qu’il en résulte un préjudice ramené à la somme de (900 000 x 18% x 5 ans x 20%) 162 000 €,
Attendu que la demande complémentaire liée à l’évolution du parc des licences et donc de la maintenance associée ne sera pas non plus retenue,

En conséquence, te tribunal condamnera la MACIF à payer à IGA la somme de 162 000 € au titre de ce chef de préjudice ;

Attendu que le tribunal rejettera les autres demandes de réparation, en ce inclus celle au titre du préjudice d’image qui n’apparaît pas justifié eu égard à la fréquence des échecs constatés en matière de projets informatiques d’intégration de progiciel,

Attendu que le tribunal condamnera la MACIF à payer à IGA la somme globale de (355 846 € + 630 000 € + 162 000 € =) 1 147 846 €, déboutant pour le surplus des demandes de réparation ;

c) Sur les demandes de publication et de parution

Attendu qu’il n’apparaît pas utile d’ordonner la publication du présent jugement dans des périodiques, ni d’ordonner une parution sur un site institutionnel, le tribunal déboutera IGA de sa demande ;

Sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Attendu que pour faire reconnaître ses droits, IGA a dû exposer des frais non compris dans les dépens qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge,

le tribunal condamnera la MAC IF à lui payer la somme de 226 190 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et condamnera la MACIF, qui succombe, aux dépens ;

Sur la demande d’exécution provisoire

Attendu que l’exécution provisoire du jugement est sollicitée et qu’elle est compatible avec la nature de la cause, le tribunal l’estimant nécessaire, l’ordonnera :

– sans constitution de garantie à hauteur du montant de la facture du 10 septembre 2013 majorée des intérêts de droits s’y attachant ainsi que pour le montant à verser au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– avec constitution de garantie sous la forme d’une garantie bancaire pour le solde des condamnations.

DECISION

Le tribunal, statuant par un jugement contradictoire en premier ressort,

– Prononce la résolution des contrats d’intégration et de licence-maintenance du 8 février 2013 aux torts de la Société d’assurance mutuelle à cotisations variables La Mutuelle Assurance des Commerçants et Industriels de France et des cadres et salariés de l’industrie et du commerce ;

– Condamne la Société d’assurance mutuelle à cotisations variables La Mutuelle Assurance des Commerçants et Industriels de France et des cadres et salariés de l’industrie et du commerce à payer à la Sarl IGA Assurances la somme de 276 120,64 € TTC en règlement de la facture SF 130216 du 10 septembre 2013, majorée des intérêts de droit à partir du 15 novembre 2013 ;

– Condamne la Société d’assurance mutuelle à cotisations variables La Mutuelle Assurance des Commerçants et Industriels de France et des cadres et salariés de l’industrie et du commerce à payer à la Sarl IGA Assurances la somme de 1147 846 € à titre de dommages et intérêts ;

– Condamne la Société d’assurance mutuelle à cotisations variables La Mutuelle Assurance des Commerçants et Industriels de France et des cadres et salariés de l’industrie et du commerce à payer à la Sarl IGA Assurances la somme de 226 190 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Ordonne l’exécution provisoire de ce jugement :
– sans constitution de garantie à hauteur du montant de la facture du 10 septembre 2013 majorée des intérêts de droits s’y attachant ainsi que pour le montant à verser au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– avec constitution de garantie, sous forme de garantie bancaire, pour le solde des condamnations ;

– Condamne la Société d’assurance mutuelle à cotisations variables La Mutuelle Assurance des Commerçants et Industriels de France et des cadres et salariés de l’industrie et du commerce aux dépens ;

– Reçoit les parties en leurs demandes plus amples ou contraires, les dit mal fondées et les en déboute en toutes fins qu’elles comportent.

Liquide les dépens du Greffe à la somme de 89,55 €uros, dont TV A 14,93 €uros.

Délibéré par Monsieur Lemoine, Madame de Bonadona et Monsieur Gouterman.

Le présent jugement est mis à disposition au greffe de ce Tribunal, les parties en ayant été préalablement avisées verbalement lors des débats dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du C.P.C.

Le Tribunal : M. Lemoine (président du délibéré), Valérie Moussaoui (greffier),
Mme de Bonadona (juge chargé d’instruire l’affaire)

Avocats : Me Alain Oltramare, Me Richard Fourcault, Me Denis Gantelme, Me Bertrand Mahl, Me Nicole Delay-Peuch, Me Margnoux

Notre présentation de la décision

 
 

En complément

Maître Alain Oltramare est également intervenu(e) dans l'affaire suivante  :

 

En complément

Maître Bertrand Mahl est également intervenu(e) dans l'affaire suivante  :

 

En complément

Maître Denis Gantelme est également intervenu(e) dans l'affaire suivante  :

 

En complément

Maître Nicole Delay Peuch est également intervenu(e) dans les 11 affaires suivante  :

 

En complément

Maître Pierre-Yves Margnoux est également intervenu(e) dans les 3 affaires suivante  :

 

En complément

Maître Richard Fourcault est également intervenu(e) dans l'affaire suivante  :

 

En complément

Le magistrat de Bonadona est également intervenu(e) dans l'affaire suivante  :

 

En complément

Le magistrat Lemoine est également intervenu(e) dans les 2 affaires suivante  :

 

En complément

Le magistrat Valérie Moussaoui est également intervenu(e) dans l'affaire suivante  :

 

* Nous portons l'attention de nos lecteurs sur les possibilités d'homonymies particuliérement lorsque les décisions ne comportent pas le prénom des personnes.