Jurisprudence : Vie privée
Cour de cassation Chambre sociale Arrêt du 24 novembre 2009
Carte et services / Olivier A.-C.
vie privée
La cour de cassation, chambre sociale, a rendu l’arrêt suivant, statuant sur le pourvoi formé par la société Carte et services, société anonyme, dont le siège est à Rungis, contre l’arrêt rendu le 19 juin 2008 par la cour d’appel d’Aix en Provence (9ème chambre A), dans le litige l’opposant :
1°/ à M. Olivier A.-C.
2°/ à l’Assedic des Bouches du Rhône, dont le siège est à Marseille,
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
[…]
DISCUSSION
Sur le moyen unique
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 19 juin 2008), que M. A.-C., engagé en qualité de technicien de maintenance le 5 janvier 2001 par la société Carte et services (la société), a été licencié pour faute le 18 octobre 2005 pour avoir adressé aux techniciens de l’entreprise un appel à la grève en utilisant à cette fin l’outil de production au lieu de l’outil de messagerie interne ;
Attendu que la société fait grief à l’arrêt de la condamner à payer des dommages-intérêts au salarié pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que commet une faute le salarié dépourvu de tout mandat syndical qui appelle ses collègues à une grève nationale en utilisant la messagerie électronique de l’entreprise, dont l’usage, même pour les messages syndicaux, doit avoir été autorisé par un accord d’entreprise ; qu’ainsi, en l’espèce où M. A.-C. avait sur la messagerie interne de l’entreprise envoyé à tous ses collègues le message “tous en grève demain à Marseille…. merci de participer”, la cour d’appel, en se bornant à se référer au compte rendu de l’entretien préalable du conseiller du salarié, pour considérer qu’un doute subsistait et que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, sans apprécier elle-même le comportement du salarié, a violé les articles L. 122-14-3 et L. 412-8 du code du travail (L. 1235-1 et L. 2142-6 nouveaux) ;
2°/ qu’en adoptant le compte rendu du conseiller du salarié selon lequel M. A.-C. dans son message n’a pas appelé à la grève mais a rappelé une journée nationale d’action, la cour d’appel a dénaturé ledit message dans lequel le salarié écrivait “tous en grève demain à Marseille… merci de participer”, incitant ainsi à faire grève, et a violé l’article 1134 du code civil ;
Mais attendu que la cour d’appel a relevé, d’une part et sans dénaturation, qu’il existait un doute sur la volonté délibérée du salarié d’utiliser à tort la messagerie de l’entreprise, outil de production ; et exerçant, d’autre part, le pouvoir d’appréciation qu’elle tient de l’article L. 1235-1 du code du travail, a estimé que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;
DECISION
Par ces motifs :
. Rejette le pourvoi ;
. Condamne la société Carte et services aux dépens ;
. Dit n’y avoir lieu à application de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Moyen produit par la SCP Bachellier et Potier de La Varde, avocat aux Conseils pour la société Carte et services
Le moyen reproche à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir dit le licenciement de Monsieur A.-C. dépourvu de cause réelle et sérieuse, condamné la société Carte et Services à verser à Monsieur A.-C. les sommes suivantes : dommages intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse : 18 000 €, et au titre de l’article 700 du Code de procédure civile : 1800 €,
Aux motifs que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, fait grief à Monsieur A.-C. d’avoir délibérément utilisé l’outil de messagerie interne Mosaic, plutôt que l’outil de messagerie, pour diffuser le 3 octobre 2005 aux techniciens de la société le message suivant « tous en grève, demain à Marseille, cinq techs la font, merci de participer. Olivier A 98302 » ; que cette lettre ajoute que Monsieur A.-C. ayant reconnu qu’il avait commis une erreur, ne l’a pas regrettée et n’a rien exprimé pouvant permettre de penser qu’il mesurait son geste ; que l’employeur qui reproche à Monsieur A.-C. d’avoir délibérément utilisé l’outil de travail de manière incorrecte s’est placé sur le terrain disciplinaire ; il lui appartient donc de prouver les faits reprochés ;
que la société produit deux attestations l’une de la directrice des ressources humaines, signataire de la lettre de licenciement et l’autre d’un salarié, représentant de l’employeur lors de l’entretien préalable qui, en outre, ne sont pas accompagnées d’une pièce d’identité permettant à la Cour de vérifier l’identité de leurs auteurs ; que ces attestations sont dénuées de valeur probante ; que le compte rendu de l’entretien préalable indique que Monsieur A.-C. a reconnu s’être servi de l’ordinateur pour envoyer un SMS non pour appeler à la grève mais pour rappeler la journée nationale d’action, que très habitué à travailler par téléphone, il ne s’est pas rendu compte qu’il employait ainsi le canal de communication interne de l’entreprise et donc l’outil de production et que cette possibilité de diffusion étant accessible à tous, il n’a pas mesuré sur le moment la conséquence de son acte ;
qu’en l’état il subsiste à tout le moins un doute quant à la volonté délibérée de Monsieur A.-C. d’utiliser l’outil de production de façon incorrecte et à l’absence de regret qui lui est reprochée ; que son licenciement est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Alors que, d’une part, commet une faute le salarié dépourvu de tout mandat syndical qui appelle ses collègues à une grève nationale en utilisant la messagerie électronique de l’entreprise, dont l’usage, même pour les messages syndicaux, doit avoir été autorisé par un accord d’entreprise ; qu’ainsi, en l’espèce où Monsieur A.-C. avait sur la messagerie interne de l’entreprise envoyé à tous ses collègues le message « tous en grève demain à Marseille …. merci de participer », la Cour d’appel, en se bornant à se référer au compte rendu de l’entretien préalable du conseiller du salarié, pour considérer qu’un doute subsistait et que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, sans apprécier elle-même le comportement du salarié, a violé les articles L. 122-14-3 et L. 412-8 du Code du travail (L. 1235-1 et L.2142-6 nouveaux).
Alors que, d’autre part, en adoptant le compte rendu du conseiller du salarié selon lequel Monsieur A.-C. dans son message n’a pas appelé à la grève mais a rappelé une journée nationale d’action, la Cour d’appel a dénaturé ledit message dans lequel le salarié écrivait « tous en grève demain à Marseille… merci de participer », incitant ainsi à faire grève, et a violé l’article 1134 du Code civil.
La Cour : M. Bailly (président), M. Mansion (conseiller référendaire rapporteur), M. Moignard, Mme Lambremon (conseillers), M. Aldigé (avocat général)
Avocats : SCP Bachellier et Potier de La Varde, SCP Delvolvé.
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