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Jurisprudence : Diffamation

lundi 11 décembre 2006
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Tribunal de grande instance de Nanterre 14ème chambre Jugement du 05 septembre 2006

Ministère public / Charles et Joëlle C.-R.

diffamation

PROCEDURE

Charles C.-R. est prévenu :

d’avoir à Puteaux, entre le 15 juin et le 17 juin 2004, en tout cas sur le territoire national depuis temps non prescrit, été complice, au préjudice de Christophe G., du délit de diffamation publique reproché à Joëlle C.-R. pour avoir publié sur le site officiel de la mairie de Puteaux (http/:www.mairie-puteaux.fr) une lettre adressée le 15 juin au Préfet des Hauts de Seine, Michel D., par Charles C.-R., en sa qualité de conseiller général, maire adjoint de la ville de Puteaux, et sénateur des Hauts de Seine, commençant par « Monsieur le Préfet, je lis sur des sites socialistes de Puteaux » et se terminant par « la priorité à la lutte contre l’insécurité que font régner des bandes de délinquants », à raison de la phrase « En effet, l’intéressé possède la fâcheuse habitude de photographier les enfants et de les approcher sans l’autorisation des parents », faits prévus par les articles 32 al. 1, 23 al. 1, 29 al. 1, 42 de la loi 81-L000 du 29/07/1881, et prévue par les articles 121-6 et 121-7 du code pénal en ce qui concerne la complicité,

Joëlle C.-R. est prévenue :

d’avoir à Puteaux, entre le 15 juin et le 17 juin 2004, en tout cas sur le territoire national depuis temps non prescrit, par écrits, images exposés en libre accès au public, par un moyen de communication audiovisuelle, en l’espèce par un moyen de communication électronique, à savoir le site officiel de la mairie de Puteaux (http/:www.mairie-puteaux.fr) porté des allégations ou imputations d’un fait portant atteinte à l’honneur et à la considération de Christophe G., en l’espèce en publiant sur ce site une lettre adressée le 15 juin au Préfet des haut de Seine, Michel D., par Charles C.-R., en sa qualité de conseiller général, maire adjoint de la ville de Puteaux, et sénateur des Hauts de Seine, commençant par « Monsieur le Préfet, je lis sur des sites socialistes de Puteaux » et se terminant par « la priorité à la lutte contre l’insécurité que font régner des bandes de délinquants », à raison de la phrase « En effet l’intéressé possède la fâcheuse habitude de photographier les enfants et de les approcher sans l’autorisation des parents », faits prévus par les articles 32 al. 1, 23 al. 1, 29 al.1, 42 de la loi 81-L000 du 29/07/1881.

DISCUSSION

Sur l’action publique :

Faits et procédure

Par une plainte reçue le 2 septembre 2004 par la juridiction d’instruction de ce siège, Christophe G. a engagé l’action publique du chef de diffamation publique envers particulier au visa de l’article 32 de la loi du 29 juillet 1881 modifiée contre Charles C.-R. et Joëlle C.-R. à raison de la mise en ligne constatée par un huissier le 17 juin 2004, sur le site internet de la mairie de Puteaux d’un texte rédigé par Charles C.-R. dont un extrait insinue, selon la partie civile, qu’il serait pédophile.

Il ressort des pièces déposées au soutien de cette plainte, selon la partie civile :
– que le 15 mai 2004 à Puteaux, suite à leur rencontre fortuite sur la voie publique, Christophe G. dit avoir été l’objet de la part de Charles C.-R. de gestes menaçants puis avoir interpellé par deux personnes dont l’une était revêtue d’un uniforme de policier municipal,
– qu’ayant été rapidement rejoint par quatre autres policiers municipaux, ceux-ci l’avaient encerclé ; seule l’arrivée sur les lieux d’un équipage de la police nationale ayant mis un terme à cette « arrestation »,
– que se disant « militant socialiste de la ville de Puteaux » (cf. D1/2), une plainte avait été déposée au commissariat de police de la ville et il avait obtenu des instances politiques départementales de son parti qu’elle « alerte » le préfet des Hauts de Seine le 17 mai 2004,
– que le 18 mai, Mme la maire de Puteaux avait pris un arrêté interdisant la prise de photographie dans les lieux et espaces communaux, d’enfants, sans autorisation préalable des parents,
– que le 24 mai 2004, l’autorité préfectorale avait adressé une réponse au courrier du 17 mai par lequel le récipiendaire apprenait qu’instruction avait été donnée au directeur de la sécurité publique afin qu’une enquête fut diligentée sur les événements du 15 mai,
– que le 15 juin 2004, Charles C.-R. en sa triple qualité de conseiller général, de Maire adjoint de la ville de Puteaux, et de sénateur des Hauts de Seine, adressait par fax un courrier à l’autorité préfectorale susvisée,
– que le lendemain, ce courrier et la réponse de M. le préfet des Hauts de Seine étaient mis en ligne sur le site internet http://www.mairiedeputeaux.fr,

Cette mise en ligne à disposition du public, constitué des internautes, s’étant connecté à ce site, était diffamatoire à raison d’un passage situé au huitième paragraphe du courrier de Charles C.-R.

Faisant référence au courrier que M. le préfet des Hauts de Seine avait adressé (le 24 mai 2004) à M. B., (le responsable politique qui l’avait saisi du différent du 15 mai 2004), Charles C.-R. affirmait qu’en cette occasion : « ce n’est pas le provocateur que la police municipale a voulu contrôler mais son appareil photographique. En effet, l’intéressé possède la fâcheuse habitude de photographier les enfants et de les approcher sans l’autorisation de ses parents ».

Christophe G. (cf. plainte D1/3, D1/4, D1/6) en déduit que cet écrit tend à insinuer qu’il est « pédophile », « qu’il constituerait une menace pour les enfants de la ville » et que l’auteur de l’article « tentait à provoquer un amalgame entre l’homosexualité de Christophe G. et la pédophilie ».

Le montant de la consignation ayant été versée, M. le procureur de la République ouvrait une information judiciaire le 25 octobre 2004 contre Joëlle C.-R. en qualité d’auteur et Charles C.-R. en qualité de complice de diffamation publique envers particulier, infractions réprimées par l’article 32 alinéa 1er de la loi sur la presse.

Entendue le 18 mai 2005, Mme la maire de Puteaux ne contestait pas sa qualité de responsable juridique sur site internet de sa ville et précisait que le retrait, le lendemain de sa mise en ligne de « la lettre de son père », s’expliquait par la réactualisation du site. Mme la maire de Puteaux était à l’issue de son interrogatoire mise en examen dans les termes du réquisitoire introductif.

Entendu le 10 juin 2005, Charles C.-R. était mis en examen du chef de complicité après avoir énoncé être l’auteur de l’écrit incriminé et « en particulier de la phrase incriminée qui était à tort critiquée » et qu’il « maintenait ».

Suite à l’envoi de l’avis à partie le 13 juin 2005, le conseil des mis en examen a déposé le 1er juillet suivant une requête en annulation de la procédure, l’ensemble des moyens alors invoqués étant rejeté par un arrêt de la chambre d’instruction de la cour d’appel de Versailles le 26 octobre 2005.

Le 24 janvier 2006, les deux mis en examen étaient renvoyés devant le tribunal correctionnel dans les termes ci-dessus mentionnés en première partie de ce jugement, de l’ordonnance de renvoi.

Le 6 janvier précédent, par ordonnance du président de la chambre criminelle de la Cour de cassation, le pourvoi formé contre l’arrêt de la chambre d’instruction de la cour d’appel de Versailles était déclaré nul en application (notamment) de l’article 59 alinéa 1er de la loi sur la presse.

Le 15 mars 2006, les deux prévenus étaient cités pour l’audience du 4 avril.

Le 23 mars, Joëlle C.-R. signifiait à M. le procureur de la République, une offre de la vérité du fait diffamatoire comprenant quatre pièces.

En cet état l’affaire a été appelée une première fois à l’audience du 4 avril et renvoyée contradictoirement après relais du 6 juin, au 4 juillet pour examen du fond.

A la première audience du 4 avril, le conseil de la partie civile a déposé deux jeux de conclusions traitant des questions de forme et de fond et a fait notamment valoir (cf. premier jeu de conclusions pages 6 et 7) que « la veille de l’audience il avait eu la surprise de recevoir copie de l’offre de preuve » et qu’à aucun moment la partie civile n’avait été prévenue ». En conséquence, il était demandé au tribunal de prononcer le report du délai de l’article 56 de la loi sur la presse à compter du 3 avril 2006.

Ainsi qu’il a été précisé, le tribunal a renvoyé l’affaire ce 4 avril par un jugement dont l’unique effet juridique consistait en l’interruption de la prescription de l’article 65 de la loi sur la presse.

A été joint au dossier, ultérieurement, et avant le 6 juin un courrier de M. le procureur de la République, daté du 7 avril 2006 mentionnant qu’une contre offre de preuve contraire avait été signifiée par Christophe G. « s’étant substitué à M. le procureur de la République ».

Dans ces circonstances, les débats se sont ouverts le 4 juillet 2006 devant le tribunal correctionnel.

Le conseil des deux prévenus, (qu’il représentait) a, avant toute défense sur le fond déposé des conclusions tendant à la nullité de la procédure et à la constatation de l’irrecevabilité de la plainte.

Il est à cette fin soutenu :

1) le fait pour la partie civile de retenir que le passage attaqué du courrier de Charles C.-R. tendrait à insinuer que Christophe G. serait pédophile n’était pas imputé dans la lettre.

En conséquence, la plainte n’était pas articulée avec la précision exigée par les articles 50 et 53 de la loi sur la presse.

La défense des prévenus précisait s’être trouvée dans l’impossibilité d’exercer les droits de l’article 55 de la loi sur la presse et estimait que le réquisitoire introductif étant « de nul secours pour pallier aux déficiences de l’acte de poursuite » et l’ordonnance de renvoi elle même ne qualifiant pas d’avantage le fait poursuivi, la poursuite était entachée de nullité.

2) les dispositions des articles 88 et 88-1 du code de procédure pénale avait été méconnues en ce que le versement de la consignation avait été effectué par un tiers M. H. qui avait procédé à cette formalité légale et non par Christophe G. plaignant s’étant constitué partie civile.

Faute d’avoir personnellement accompli cette démarche, la plainte de Christophe G. est irrecevable.

En troisième et quatrième part, la défense des deux prévenus concluait en la prescription de l’action à la date du 25 octobre 2004 et en la nullité de la contre offre de preuve.

Le conseil de la partie civile en réplique a fait, pour l’essentiel, valoir que sa plainte avait satisfait aux obligations légales, qu’il était recevable et que l’action engagée n’était pas prescrite.

Par observations orales, il a été invoqué, par le conseil de la partie civile, le défaut d’information de l’existence d’une offre de la vérité du fait diffamatoire comme justificatif de la régularité de la procédure de contre offre de preuve signifiée le 7 avril 2006.

A ce stade du jugement, il incombe pour le tribunal de se prononcer tout d’abord sur la portée des deux exceptions de procédure tendant à la régularité et à la recevabilité de l’action engagée le 2 septembre 2004 puis sur l’exception de prescription de l’action qui, ressortissant au fond du litige doit néanmoins être examiné avant celui de la caractérisation (ou son défaut) des délits car l’examen des questions de prescription est le préliminaire obligé en cette matière.

Sur les exceptions de nullité, d’irrecevabilité de l’action et de prescription

A) En application de l’article 50 de la loi du 29 juillet 1881, il incombe pour la partie civile engageant l’action publique d’articuler et de qualifier les diffamations à raison desquelles la poursuite est intentée.

Au cas d’espèce, la lecture de la plainte déposée par Christophe G. le 2 septembre 2004 rappelle en première part le contexte qui de son point de vue, a entraîné l’expédition le 17 mai d’un courrier à l’adresse de M. le préfet des Hauts de Seine puis décrit dans quelles circonstances il a saisi un huissier aux fins de constatation (cf. D1/3).

Il ressort des constatations de l’huissier mentionnées dans la plainte, que l’écrit en cause est précisément identifié : un courrier adressé par fax le 15 juin 2004 par Charles C.-R. à M. le préfet des Hauts de Seine qui lui a répondu le lendemain. Le courrier faxé à l’autorité préfectorale a été mis en ligne au moins avant le 18 juin (l’huissier ayant instrumenté la veille).

Puis la partie civile énonce (D1/3) :

« Il ressort des constatations (de l’huissier) que « cette lettre relate un différend qui semble opposer la maire à une personne qualifiée dans ce courrier de « journaliste socialiste » ainsi que de « pseudo journaliste » pour lequel « le directeur départemental a reçu instruction… de diligenter une enquête sur le prétendu contrôle d’identité dont le plaignant aurait fait l’objet de la part de la police municipale ». Puis la partie civile poursuit en citant le propos attaqué : « un peu plus loin, il est indiqué, ce n’est pas le provocateur que la police municipale a voulu contrôler mais son appareil photographique. En effet, l’intéressé possède la fâcheuse habitude de photographier les enfants et de les approcher sans les autorisations de leurs parents ». Enfin ces propos tenus dans cette lettre par Charles C.-R. qui en est l’auteur, sont diffamatoires en ce qu’ils tendent à insinuer que Christophe G. serait pédophile ; selon l’analyse de la partie civile qui les qualifie comme étant des propos de nature à porter atteinte à son honneur ou sa considération.

La citation des deux passages de la lettre qui viennent d’être mentionnés et le fait que ces propos soient analysés par la partie civile comme diffamatoires, (l’imputation diffamatoire étant caractérisée) désignent de manière précise les faits pour lesquels la poursuite est engagée.

L’exception de nullité de la défense est sur ce point rejetée car elle procède d’une lecture erronée de la plainte. L’articulation d’une diffamation par insinuation suppose dans l’exposé de l’insinuation une part d’analyse des propos qui ne peut correspondre, au niveau de la retranscription, au mot près, compte tenu de la technique diffamatoire employée, à l’écrit ou au propos incriminé.

Au cas d’espèce, eu égard aux techniques d’exposition et d’articulation employées, l’analyse susvisée de la partie civile n’entache pas sa plainte d’une imprécision dirimante de la poursuite.

Le tribunal fait l’observation dernière, sur ce point de procédure que l’impossibilité pour agir en application de l’article 55 de la loi sur la presse, invoquée par la défense est, concernant Joëlle C.-R., dépourvue de tout fondement ; Joëlle C.-R. ayant utilisé cette voie de droit.

B) Sur l’exception d’irrecevabilité

La lecture du reçu (D15), délivré le 17 septembre 2004 par la régie de ce tribunal, établit que la consignation a été versée par « M. François H. (parti socialiste) »… »P/M. Christophe G. ». Il s’en déduit que c’est pour le compte de la partie civile Christophe G. que la consignation a été acquittée dans le délai fixé par l’ordonnance, par François H. L’emploi de la formule « P/M G. » est explicite. Quoique rédigée sous la forme d’un abrégé, il s’impose que François H. n’a pas agi de sa propre initiative dans une procédure qui ne le concernait pas.

Aucune disposition légale ou conventionnel n’interdisant à celui qui se constitue partie civile auprès de la juridiction d’instruction, la possibilité de donner mandat à un tiers de verser la consignation pour son compte, l’exception d’irrecevabilité soulevée, non fondée en droit, de la défense est rejetée.

C) Sur l’exception de prescription

Compte tenu de la formulation des écritures sur ce point de la défense, le tribunal juge devoir se prononcer.

En page 6 des conclusions déposées, il est conclu en la nullité de la procédure subséquente par rapport à la plainte avec constitution de partie civile qui serait nulle puis énoncé « qu’en toute hypothèse le 25 octobre 2004 la prescription était acquise ».

L’emploi de l’expression « en toute hypothèse » signifie que l’acquisition de la prescription n’est pas invoquée uniquement comme conséquence des exceptions d’irrégularité et d’irrecevabilité déjà appréciées.

L’analyse des conclusions de la défense sur ce point (la nullité de la poursuite) entraîne pour le tribunal un double constat. Les moyens et arguments soulevés sont différents de ceux soumis en leur temps à l’appréciation de la chambre d’instruction de la cour d’appel de Versailles. Il n’est ainsi pas conclu à propos du défaut de visa du texte adéquat ou de l’absence de domiciliation dans le ressort du présent tribunal.

La nullité de la procédure (cf. dispositif des conclusions) est cantonnée à la plainte et non aux actes de procédure comme le réquisitoire introductif et l’ordonnance de renvoi au sujet desquels il est seulement allégué un défaut de précision sans formulation d’une demande précise d’annulation de ces deux actes.

En conséquence, le tribunal se prononce sur les demandes telles précédemment synthétisées (cf. supra pages 6 et 7 du jugement) et rappelle que le seul acte dont l’annulation est précisément demandée dans le dispositif est la plainte avec constitution de partie civile, demande au sujet de laquelle, le tribunal vient de se prononcer.

Concernant l’exception de prescription, le tribunal retient, que selon le constat d’huissier, la première mise en ligne n’est pas antérieure au 16 juin 2004.

Selon ce constat, la lettre de Charles C.-R. figure à la rubrique « sécurité d’abord » ; cette dernière étant datée du 16 juin (cf. constat). L’examen du « portail » établit que des textes s’échelonnant dans le temps entre le 3 et le 16 juin ont été alors mis en ligne et parmi eux figure à la date du 16 juin la rubrique « sécurité d’abord ».

Quoique non daté le courrier dont un extrait est attaqué, précède sur le site le courrier de l’autorité préfectorale daté du 16 juin. Le tribunal est donc en présence des données factuelles suffisantes pour retenir que la mise en ligne du courrier de Charles C.-R. est celle affichée sur le portail du site.

Le tribunal rappelle qu’en l’absence de documents probants contraires, le point de départ de la prescription est la date de la première mise en ligne. Reçue le 2 septembre suivant la plainte avec constitution de partie civile a légalement interrompu le délai de prescription de 3 mois.

Ce deuxième délai a été suspendu le 16 septembre 2004 et a repris le 17 septembre suivant, temps du versement de la consignation.

Des actes à nouveau interruptifs et faisant débuter un troisième délai de prescription ayant été pris le 25 octobre, la prescription n’était en droit pas acquise à la date du 26 octobre 2004.

Infondée en fait, l’exception de prescription est en conséquence rejetée.

Sur le fond

La diffamation envers particulier est selon l’article 29 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881 modifiée l’imputation ou l’allégation d’un fait déterminé qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne identifiable.

La diffamation par insinuation est admise en droit comme un procédé diffamatoire tombant sous le coup de la loi.

Selon Christophe G. (la partie civile) le fait d’écrire qu’il « possède la fâcheuse habitude de photographier les enfants et de les approcher sans l’autorisation de leurs parents » est l’insinuation qu’il a des penchants pédophiles. Il est précisé aux écritures de la partie civile que la diffamation a « pris prétexte de l’homosexualité de Christophe G. dont celui-ci ne s’est jamais caché » (cf. conclusion page 10), et que cette diffamation s’inscrit dans le contexte d’un harcèlement dont il est la victime depuis plusieurs années de la part des maires successifs de la ville de Puteaux, et de leur majorité municipale.

L’insinuation d’avoir des penchants pédophiles attente, selon la partie civile, à son honneur, a été commise physiquement et Christophe G. est identifiable.

La défense rétorque que l’extrait du courrier incriminé ne comprend pas d’autres faits précis que celui de photographier des enfants et de les approcher sans l’autorisation des parents. Se fondant sur la définition de la pédophilie proposée par un dictionnaire, la défense en retient qu’il n’a été fait aucune référence de quelque nature que ce fut aux mœurs de Christophe G. et que l’insinuation qu’il prétend discerner dans l’écrit procède non d’une analyse objective du texte mais de sa propre subjectivité qui ne saurait s’imposer devant le tribunal correctionnel.

La défense se propose enfin de faire la preuve du fait que Christophe G. appréhende irrégulièrement l’image d’enfants (cf. conclusion de la défense sur le fond de page 6).

Sur quoi le tribunal

Le sens de l’extrait attaqué doit être défini d’une part eu égard au contenu du courrier et d’autre part selon les éléments extrinsèques du contexte. Ce contexte est constitué des documents et événements concernant Christophe G. auquel Charles C.-R. fait expressément référence dans son écrit.

Ces documents sont au nombre de deux. Le courrier de M. B. adressé le 17 mai au préfet des Hauts de Seine et la réponse de celui-ci le 24 mai 2004.

L’événement concernant directement Christophe G. est ce qui s’est passé le 15 mai 2004.

Selon Christophe G. il a été menacé puis interpellé par la police municipale alors, (ce point figure dans les pièces jointes à son dossier par son conseil), qu' »il s’était contenté de photographier un massif de roses ».

La version contraire donnée par Charles C.-R. consiste à contester avoir en quelque manière menacé Christophe G.

Ces données de contexte précisées, il incombe de définir le sens de l’écrit en cause et d’apprécier le sens et la portée de l’extrait attaqué.

Charles C.-R., dans son courrier, estime devoir faire une distinction dans les activités de Christophe G.

Il écrit que la police municipale n’a pas voulu contrôler « le provocateur » qualité d’évidence attribué par Charles C.-R. à Christophe G. du fait de la manière dont il conduit son activité d’opposant au maire de Puteaux.

Le lecteur du site internet de la ville de Puteaux est donc déterminé à retenir que ce n’est pas à raison de ses activités politiques que Christophe G. a été contrôlé.

La lecture du portail du site confirme d’ailleurs qu’il ne peut s’agir que d’une question de « sécurité » intéressant, compte tenu du mode de communication choisi, (site de la mairie de Puteaux), l’ensemble des habitants de la commune. Cette question de sécurité peut elle concerner, ainsi que le soutient la défense le fait de photographier en public des enfants ? Une réponse négative s’impose car cet événement en droit ne concerne que l’atteinte à l’image d’un mineur, exclusive de toute qualification pénale délictuelle ou criminelle et ne ressortit pas à la sécurité qui concerne la sûreté des biens et des personnes. De plus, l’analyse de la défense ne peut pour le lecteur du texte s’imposer compte tenu tout d’abord de l’incohérence qui résiderait dans le fait de faire contrôler quelqu’un qui ne commet aucun fait redevable d’une action de police administrative ou judiciaire, à l’époque des faits, par la police municipale.

Ensuite à supposer que le sens de l’écrit soit celui proposé par la défense, il doit alors être considéré l’évidente inadéquation qui consiste à s’adresser à l’autorité préfectorale non concernée par d’éventuels manquements civils au droit à l’image d’enfant.

Préoccupé de vouloir démontrer l’inopportunité de la demande d’enquête émanant de l’autorité préfectorale, Charles C.-R. s’est estimé fondé à justifier le contrôle de Christophe G. par le fait qu’il a cette « habitude fâcheuse », celle de « photographier les enfants et les approcher sans l’autorisation de leurs parents ».

Par l’emploi de la conjonction et, Charles C.-R. impute deux faits à Christophe G. : il photographie et approche les enfants. Le tribunal rappelle que les techniques modernes de la photographie rendent possible, de longue date, la prise de photographie à distance.

Eu égard aux éléments intrinsèques et extrinsèques ci-dessus détaillés, à la structuration de l’écrit, à la démarcation effectuée entre les activités politiques et privées de Christophe G., l’expression attaquée est l’équivalent de l’emploi d’une métaphore au surplus de longue date perçue par le public comme significative d’une attirance sexuelle envers les enfants, que l’on dissimule en proclamant son intention simplement de les photographier.

Cette image du pervers captant l’attention des jeunes victimes par ce procédé, est communément répandue dans l’opinion.

Au cas d’espèce c’est la conclusion à laquelle, l’internaute est amené.

L’insinuation ne serait pas caractérisée si l’auteur de l’article s’était borné à seulement mentionner la prise de photographies.

Il est effectivement insinué que Christophe G. devait être contrôlé par la police municipale car il a une appétence pour les enfants qu’il approche sans l’autorisation des parents sous le subterfuge de les photographier.

La recherche d’un contact avec les enfants expliquait les faits et geste de Christophe G., qui devait être contrôlé par la police municipale, fondée à agir selon Charles C.-R. pour vérifier le contenu de son appareil photographique ; une mesure qu’en procédure un agent de police municipale ne peut accomplir en dehors de la caractérisation d’un indice de nature à révéler la commission d’une infraction, qui concerne au cas d’espèce les pratiques pédophiles.

En conséquence, contrairement à l’interprétation de l’extrait du texte proposé par la défense qui se borne à procéder à une analyse de l’extrait sans tenir compte de l’écrit dans son entier des éléments extrinsèques ci-dessus recensés et du sens commun donné à l’expression, dans ce contexte reconstitué, du fait de photographier les enfants et les approcher sans l’autorisation des parents, l’insinuation d’une attirance pour les enfants dissimulée sous le subterfuge de les photographier est diffamatoire et contraire à l’honneur de la personne concernée, car elle est décrite comme recherchant sur la voie publique la compagnie de mineur après avoir surpris leurs consentements et trompé la vigilance de leurs parents.

L’écrit a été adressé au préfet des Hauts de Seine dans des conditions exclusives de la confidentialité : la mise en ligne sur le site internet de la mairie de Puteaux. La diffamation commise envers Christophe G. tiers par rapport au destinataire est publique, au sens de l’article 23 de la loi sur la presse, alors applicable à la communication par internet.

Il incombe pour le tribunal de se prononcer sur la validité et l’incidence de l’offre de la vérité des faits diffamatoires signifiée par Charles C.-R., la régularité de la contre offre de preuve signifiée le 7 avril 2006 par Christophe G. puis, le cas échéant d’apprécier l’excuse de bonne foi qui est invoquée par les deux prévenus.

Sur l’offre de la vérité des faits et la contre offre de preuve

Régulière en la forme, l’offre de la vérité des faits diffamatoires de Joëlle C.-R. qui n’a contrairement à ce qu’elle a prétendu dans son acte pas fait citer de témoin, tend à démontrer que « Christophe G. appréhende régulièrement l’image d’enfants mineurs dans des lieux publics » et que sans autorisation des parents, il les met en ligne sur son site internet.

A cette fin, est produite l’attestation d’un employé communal dénonçant le fait que lors des cérémonies du 11 novembre 2003, Christophe G. a pris la photographie de son fils qu’il a publié sur son blog.

L’exemplaire d’un arrêté municipal, postérieur aux événements du 15 mai 2004, et la reproduction de clichés de groupes de personnes parmi lesquelles figurent des enfants, prises lors des cérémonies du 14 juillet 2002 sont versés aux débats.

Le tribunal rappelle que pour produire le fait exonératoire de la loi, l’offre de la vérité des faits doit être parfaite, complète et corrélative aux imputations diffamatoires dans toute leur portée.

Quoique se rattachant aux mœurs de Christophe G. (un penchant pédophile) le fait diffamatoire peut être prouvé en ce qu’il s’est exercé sur la voie publique et concerne un opposant municipal déclaré à M. le maire de Puteaux et sa politique.

Mais au cas d’espèce, il n’est, en aucune manière, prouvé l’insinuation diffamatoire susvisée.

L’échec dans l’administration de la vérité du fait diffamatoire est patent. Le tribunal retient que le fait de s’approcher puis de photographier les enfants n’est en lui même pas établi au plan matériel. Les photographies ont été prises pour celle qui concerne le fils de l’employé communal à bonne distance (plusieurs dizaines de mètre) et pour des clichés pris le 14 juillet 2004, s’agissant des clichés de groupes, insusceptibles de démontrer le fait que la défense prétend prouver.

Aucun document, nul témoignage autorisant à retenir que Christophe G. « approche » les enfants n’a été versé aux débats.

Aucune autre offre de la vérité des faits n’ayant été signifiée dans le délai légal, le tribunal juge devoir se prononcer, le caractère diffamatoire ayant été précisé et, les caractéristiques de l’offre de preuve de Joëlle C.-R. spécifiées, sur l’excuse de bonne foi qui est invoquée par les deux prévenus.

Il doit auparavant être répondu aux conclusions des prévenus à propos de la nullité de la contre offre de preuve du fait diffamatoire au sujet de laquelle il a pu être appris le 6 juin 2006 qu’à la demande de Christophe G., le ministère public, le 7 avril 2006, avait adressé au bureau des huissiers situé au 1er étage de ce tribunal les pièces d’une contre offre de preuve pour le compte de Christophe G.

Le tribunal rappelle les termes de la loi en cette matière.

Selon l’article 56 de la loi du 29 juillet 1881 modifiée, il est de droit positif que dans les cinq jours suivant la notification de l’offre de preuve de la vérité diffamatoire et au moins trois jours francs avant l’audience, le plaignant ou le ministère public, suivant les cas, est tenu de faire signifier au prévenu au domicile par lui élu les copies des pièces et les noms, professions et demeures des témoins par lesquels il entend faire la preuve du contraire sous peine d’être déchu de son droit.

Au cas d’espèce, dans l’exacte mesure où les prévenus ont été cités à la requête du ministère public, c’est à cette autorité qu’il incombait au reçu de l’offre de la vérité des faits, le 23 mars 2006 de faire connaître à la partie civile l’existence de l’offre de la vérité des faits qui venaient de lui être signifiée et la possibilité légale dont elle disposait, selon l’article 56, dont le libellé vient d’être rappelé, de la loi sur la presse.

Le tribunal fait référence à un courant jurisprudentiel constant dont il résulte que le ministère public a l’obligation, fut-elle implicite, d’aviser utilement la partie civile de la signification de l’offre de preuve.

Au cas d’espèce, le tribunal doit rappeler qu’une première fois appelé à l’audience le 4 avril 2006, ce dossier a fait l’objet d’un premier renvoi au 6 juin 2006 puis d’un second au 4 juillet pour examen sur le fond.

Lors de l’appel de l’affaire pour la première fois le 4 avril 2006, la partie civile par conclusion a demandé que soit prononcé le report du délai de cinq jours de l’article 56 de la loi du 29 juillet 1881 à compter du 3 avril.

Le tribunal est en mesure de constater que l’information due à la partie civile ne lui a pas été délivrée nonobstant la signification régulièrement faite au procureur de la République le 23 mars 2006.

Le tribunal a, afin de sauvegarder le caractère contradictoire de l’instance, renvoyé par jugement à cette audience du 4 avril 2006.

Avant le premier renvoi du 6 juin, un exemplaire de la contre offre de preuve a été adressé à la juridiction. Il a été joint au dossier. Sa lecture établie que le 7 avril, elle a été signifiée à l’étude d’huissier au domicile de laquelle Joëlle C.-R. avait élu domicile.

Ceci étant exposé, le tribunal ne peut juger, nonobstant l’inaction manifeste du ministère public, qu’il a été satisfait aux dispositions de l’article 56 de la loi sur la presse la signification du 7 avril a eu lieu au-delà du délai de cinq jours qui selon la loi doit être calculé à compter du 23 mars.

Il est de droit positif à supposer qu’il soit envisageable pour le juge pénal de la diffamation de méconnaître les dispositions précises de l’article 56, qu’en droit positif, la contre offre de preuve doit être signifiée par le ministère public et non par la partie civile.

Or, au cas d’espèce et ce point est précisément relevé par la défense des prévenus, la contre offre de preuve du 7 avril est irrégulière et entachée de nullité car il est précisément expliqué que Christophe G. agit car « il se substitue à M. le procureur de la République ».

La possibilité pour une partie civile de se substituer à l’autorité mentionnée au texte de l’article 56 n’est pas de droit positif.

En conséquence, le tribunal prononce la déchéance de la contre offre de preuve signifiée au-delà du délai de cinq jours et s’imposant aux parties, sauf réforme législative contraire, et à titre subsidiaire mentionne la nullité ayant consisté pour la partie civile à se substituer, sans droit, à l’autorité devant accomplir cette démarche.

Le tribunal rappelle cependant que si la partie civile n’a pas eu connaissance de l’existence de cette signification, le caractère équitable de l’instance a pu être sauvegardé car à compter du 3 avril soit trois mois avant la date d’examen sur le fond, les pièces signifiées au titre de la preuve de la vérité des faits ont pu faire l’objet des discussions et contestations nécessaires.

De même, les pièces produites au titre de la contre offre de preuve peuvent être invoquées pour la défense de ses intérêts par Christophe G.

Il y a lieu, ce point de procédure ayant été jugé de se prononcer sur l’excuse de bonne foi qui est invoquée par les deux prévenus.

Sur l’excuse de bonne foi

Selon l’article 35 bis de la loi du 29 juillet 1881, toute reproduction ou publication d’une imputation qui a été jugée diffamatoire est réputée faite de mauvaise foi.

Les demandeurs à l’admission de l’excuse de bonne foi ont fait tout d’abord plaider que la constatation que des photographies d’enfants étaient reproduites sur internet, justifiaient la saisine de M. le préfet. Il était ensuite, selon eux, légitime de faire connaître cette démarche à la population.

Les termes employés, s’étant bornés à relater des faits relatifs à un incident avec la police municipale, étaient exclusifs de toute intention de nuire et Charles C.-R. n’étant pas journaliste n’avait pas à se livrer à une enquête contradictoire, s’étant prononcé au vue de rapport qu’il « estimait utile de s’adresser ainsi qu’au préfet ».

En réplique, il est de manière synthétique, conclu par la partie civile (cote 36 de son dossier) que Charles C.-R. et Joëlle C.-R. ont délibérément cherché à lui nuire.

Sur quoi le tribunal

Les faits de la présente espèce doivent être reconstitués de la manière suivante.

Il est constant que depuis plus d’une année, par rapport à la date de la publication ici en cause, Christophe G. a une activité politique d’opposant aux deux derniers maires de la ville de Puteaux, Charles C.-R. puis sa fille Joëlle C.-R. qui lui a succédé.

Au vu des pièces versées aux débats, il doit être constaté que par emploi de son blog et son engagement politique, Christophe G. d’une part et par utilisation des moyens que leur statut d’élu leur procurent et leurs affinités politiques, Charles C.-R. et Joëlle C.-R. d’autre part, échangent des propos polémiques sur les questions et sujets d’intérêt communal.

Le critérium de l’excuse de bonne foi doit donc être apprécié au regard du genre ici en cause, celui de la polémique municipale animée en première part par l’ancien maire, Charles C.-R. de la ville de Puteaux et l’opposant Christophe G., à propos de la gestion de la ville.

Le tribunal doit aussi rappeler que, selon le rédacteur du courrier attaqué, poursuivi au titre de la complicité, il impute à Christophe G. de photographier et d’approcher les enfants à l’insu de leurs parents en raison de son penchant ou de ses tendances pédophiles se manifestant sur la voie publique.

Le tribunal juge que l’insinuation comporte une part de malveillance qui dénote une part d’animosité chez le rédacteur de cette lettre qui met en difficulté son admission au bénéfice de la bonne foi.

Cette part d’animosité serait susceptible de disparaître si on pouvait constater que Christophe G. se livre également à des attaques tendant à mettre en cause la vie privée et ses manifestations sur la voie publique de l’ancien maire Charles C.-R.

La consultation des pièces produites sur ce point fonde le tribunal à répondre par la négative à cette interrogation.

De plus si le droit de la diffamation en matière de polémique dans certaines hypothèses justifie les attaques personnelles, il convient de se prononcer sur la légitimité du but en l’espèce ici poursuivi.

Concernant la légitimité du but, (second critère de la bonne foi), les attaques personnelles peuvent être admises par les juridictions, (les juges de la diffamation) à supposer qu’il n’y a pas eu dénaturation des faits ou que les faits diffamatoires ont pris appui sur des faits suffisamment établis ou vérifiés.

Au cas d’espèce, le tribunal relève en première part :

Les écritures du prévenu proposent un compte rendu faux des faits. Ce n’est pas la mise en ligne sur internet des photographies d’enfants qui est l’objet du courrier adressé à M. le préfet des Hauts de Seine, mais une tentative de démonstration du bien fondé du contrôle d’identité de Christophe G. et du caractère inopportun de la réponse de l’autorité préfectorale faite au responsable départemental du parti politique auquel Christophe G. appartient, révélant qu’une demande d’enquête avait été adressée à la police.

Comme justificatif du bien fondé du contrôle, le tribunal doit relever que Charles C.-R. a avancé la nécessité de contrôler l’appareil photographique de Christophe G. qui avait « la fâcheuse habitude de photographier et d’approcher les enfants sans l’autorisation des parents ».

Le tribunal constate que ce « contrôle » certes médiatisé par Christophe G. et ses relations, pouvait susciter une réponse vive de la part de Charles C.-R., mis en cause comme l’ayant ordonné.

Cependant l’insinuation diffamatoire publiée est une incise dans le corps du texte qui équivaut à une prise à partie de Christophe G. à l’attention tout d’abord de M. le préfet des Hauts de Seine puis des internautes. Cette digression n’est justifiée ni par la défense de l’intérêt général ni par les nécessités d’informer.

Le recours à la technique de l’insinuation (le tribunal le rappelle) en elle-même est un procédé d’écriture peu compatible avec l’admission au bénéfice de l’excuse de bonne foi car il n’y a aucune légitimité à jeter de cette manière l’opprobre sur les mœurs et la morale de la partie civile au prétexte d’informer le préfet de Hauts de Seine à propos de ce que ce dernier a écrit à un tiers, par rapport à Christophe G., M. B.

Le tribunal constate ensuite que cette prise à partie n’est en réalité fondée sur aucun élément subjectif ou objectif.

Le seul fait justifié est que lors de deux fêtes ou événements nationaux, (les cérémonies des 11 novembre 2003 et 14 juillet 2004), Christophe G. a pris quelques photographies, (la plupart à bonne distance) d’enfants et de groupes de personnes. Le défaut manifeste d’élément de nature à permettre la formulation de l’insinuation doit être relevé.

Il détermine le tribunal à juger qu’une absence de légitimité du but est caractérisée à laquelle se rajoute un défaut avéré de documents ou de témoignages pouvant justifier l’insinuation incriminée.

Le but poursuivi discréditait la moralité et les mœurs de Christophe G. auprès du préfet des Hauts de Seine et des personnes consultant le site internet. Les documents pouvant légitimer l’écrit faisant défaut, l’excuse de la bonne foi ne peut être reconnue, aucun des trois premiers critères n’étant rempli, en l’espèce à Charles C.-R.

Le tribunal fait l’observation conclusive que de l’écrit ici en cause et des écrits constituant le contexte on ne peut contrairement à ce que plaide la partie civile établir de relation entre l’homosexualité proclamé de Christophe G. et l’imputation diffamatoire. Aucune mention permettant ce rapprochement ne figure dans les écrits susvisés. Néanmoins demeure constant un défaut manifeste de caractérisation de l’excuse de bonne foi pour les motifs ci-dessus détaillés.

Charles C.-R. est en conséquence déclaré coupable du délit de complicité de diffamation publique qui lui est reproché. Ce délit est établi en tous ses éléments constitutifs.

Responsable du site ayant publié la lettre Joëlle C.-R. avait l’obligation de vérifier le contenu des messages et des textes diffusés.

En l’absence de démonstration qu’un événement équivalent de la force majeure l’a empêché de pouvoir contrôler la mise en ligne de l’écrit de Charles C.-R., Joëlle C.-R. est reconnue coupable comme auteur principal de la diffamation, le droit applicable, à l’époque faisant reposer sur le directeur de la publication du site (un statut non contesté), la responsabilité pénale du fait de mise en ligne.

Sur l’indemnisation due à la partie civile

La nécessaire réparation du préjudice subi par Christophe G. est fixé ainsi qu’il est dit au dispositif étant précisé que la mesure de publication demandée au titre des réparations civiles doivent être limitées à la publication d’un communiqué ; la publication du jugement dans son intégralité étant disproportionnée.

Concernant la demande formulée au titre des frais de procédure, le tribunal tient compte d’une part de l’absence de tout justificatif ou document permettant de chiffrer le montant des sommes exposées et d’autre part du fait avéré qu’au moins au stade du dépôt de la plainte avec constitution de partie civile et celui du versement de la consignation, Christophe G. n’a personnellement exposé aucune somme ou ne démontre pas avoir exposé de frais.

DECISION

Le tribunal statuant publiquement, en matière correctionnelle, en premier ressort, par jugement contradictoire (article 411 du code de procédure pénale) à l’encontre de Joëlle C.-R. et Charles C.-R. prévenus, à l’égard de Christophe G. partie civile ;

Sur l’action publique :

. Rejette les exceptions de nullité, d’incompétence et de prescription soulevées par Joëlle C.-R. et Charles C.-R.,

Vu l’article 56 de la loi du 29 juillet 1881 modifiée,

. Prononce la déchéance pour Christophe G. de signifier une offre de preuve contraire,

. Juge établi le délit de diffamation publique envers Christophe G. commis par Joëlle C.-R.,

. Condamne Joëlle C.-R. à la peine de 2500 € d’amende, en application des articles 32 alinéa 1 et 29 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881 modifiée,

. Juge établi le délit de complicité de diffamation publique envers Christophe G. commis par Charles C.-R.,

. Condamne Charles C.-R. à la peine de 2500 € d’amende en application des articles 32 alinéa 1 et 29 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881 modifiée,

Sur l’action civile :

. Reçoit la constitution de partie civile de Christophe G.,

. Condamne solidairement Joëlle C.-R. et Charles C.-R. à payer la somme de 3000 € à titre de dommages-intérêts à Christophe G.,

. Ordonne la publication du communiqué judiciaire suivant :

– sur le site internet de la ville de Puteaux, 15 jours après l’acquisition du caractère définitif du jugement et sous astreinte de 150 € par jour de retard,
– dans les publications le Parisien Libéré et le Journal du Dimanche, 15 jours après l’acquisition du caractère définitif et sous astreinte de 150 € par jour de retard,

« Par jugement en date du 5 septembre 2006 du tribunal de grande instance de Nanterre, en matière correctionnelle, Joëlle C.-R. directrice de publication du site http://www.mairiedeputeaux.fr et Charles C.-R. ont été condamnés au paiement d’une amende et de dommages-intérêts pour avoir commis au préjudice de Christophe G. les délits de diffamation publique envers particulier (Joëlle C.-R.) et de complicité de diffamation publique envers particulier (Charles C.-R.) pour avoir mis en ligne le 16 juin 2004 un texte, émanant de Charles C.-R. insinuant que Christophe G. avait des penchants pédophiles manifestés sur la voie publique à Puteaux »,

. Dit que la publication sur le site internet aura une durée de deux jours,

. Dit que le coût de chaque parution n’excédera pas la somme de 2000 € hors taxe,

. Condamne Charles C.-R. et Joëlle C.-R., chacun à payer la somme de 750 € au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale,

. Condamne Charles C.-R. et Joëlle C.-R. aux dépens de l’action civile,

. Rejette le surplus des demandes de la partie civile Christophe G.,

. Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire du jugement.

Le tribunal : M. François Reygrobellet (président), Mme Anne Depardon et M. Jacques Pezet (assesseurs)

Avocats : Me Jean Marc Fedida, Me Jean Marcel Nantaf

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