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Jurisprudence : Responsabilité

lundi 11 septembre 2006
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Cour de Cassation Chambre criminelle 17 mai 2006

M. X., Européenne / Administration des impôts

responsabilité

Statuant sur les pourvois formés par :
– M. X…,
– la société Européenne

contre l’ordonnance n° 2005-21 du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de PARIS, en date du 15 avril 2005, qui a autorisé l’administration des impôts à effectuer des opérations de visite et de saisie de documents en vue de rechercher la preuve d’une fraude fiscale ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire commun aux demandeurs et le mémoire en défense produits ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 16 B du livre des procédures fiscales, ensemble les articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale ;

« en ce que l’ordonnance attaquée a autorisé les visites et saisies sollicitées ;

« aux motifs que toutes les pièces présentées à l’appui de la requête ont une origine apparemment licite et qu’elles peuvent être utilisées pour la motivation de la présente ordonnance ; que, la société Européenne est immatriculée au Mémorial du Luxembourg depuis le 20 décembre 2002; que la société Européenne a pour objet social : toutes les opérations se rapportant directement ou indirectement à la prise de participations sous quelque forme que ce soit, dans toute entreprise, ainsi que l’administration, la gestion, le contrôle et le développement de ces participations ; que lors de sa création, la société Européenne entend satisfaire aux conditions prévues par la loi du 10 août 1915 relatives aux sociétés commerciales luxembourgeoises ;
que depuis le 18 avril 2003, M. X… est président du conseil d’administration et administrateur délégué de la société Européenne ; que le capital de 800 000 euros de la société Européenne résulte de l’apport fait par M. X… et Mme Y… de la totalité des actions de la société OG, sise à Paris 8ème, immatriculée sous le numéro B572 … … ; que la société OG a le même numéro d’immatriculation et le même siège social que la société « I » représentée par son président du conseil d’administration, M. X… ; qu’ainsi la société OG et la société « G » – « I » sont une seule et même personne morale ;
que la société Européenne, présente sur son site Internet http://www.e…com la nature de ses activités ; que selon les indications fournies par le site, la société Européenne « détient en France une activité de leader du désinvestissement des sociétés familiales surcapitalisées » ; que selon les mêmes indications, la société Européenne dispose de capitaux lui permettant d’investir et rechercher de nouveaux clients ; qu’ainsi, la société Européenne apparaît intervenir dans le domaine de l’ingénierie financière et que sa position de leader serait issue de ses activités réalisées en France ;
que la société Européenne mentionne sur son site Internet qu’elle peut être contactée par courrier électronique à l’adresse e….com. ; qu’il apparaît que le site Internet http://www.e…com, de la société Européenne, est enregistré au nom de M. X…, à l’adresse à Paris 16ème, lequel est mentionné comme le contact administratif dudit site ; que la société Européenne a par ailleurs procédé le 30 décembre 2003 à l’immatriculation d’un établissement en France auprès du répertoire Sirène à l’adresse du Paris 16ème avec pour enseigne « M. X… » ; qu’il ressort donc que la société Européenne dispose de coordonnées et moyens de communication en France, à l’adresse de son dirigeant et principal actionnaire M. X… ;

qu’il existe dès lors des présomptions selon lesquelles la société Européenne développe une activité liée à l’ingénierie financière à partir des locaux sis à Paris 16ème ; que M. X…, né à Paris, demeure avec son épouse née Z… Mme Y…, à Paris ;
que les déclarations souscrites au titre des années 2001 à 2003 par les époux M. X… ne font pas apparaître de revenus d’activité non salariée à l’exception d’un bénéfice industriel et commercial non professionnel issu des SC Real et Maxal ; que selon les informations disponibles sur le site Internet www.mecene.fr, M. X… est présenté comme étant un juriste français réputé, spécialisé dans le secteur du désinvestissement et ayant créé le groupe « I » dont l’objet est le conseil dans le désinvestissement de patrimoine ;
que M. X… figure en qualité d’enseigne commerciale de la société luxembourgeoise Européenne, pour l’établissement sis à Paris ; que les moyens de communication par Internet de la société Européenne sont la propriété personnelle de M. X… et sont localisés à son adresse ; qu’il existe dès lors des présomptions selon lesquelles M. X… exerce une activité professionnelle indépendante à titre individuel ou sous couvert de l’appellation société luxembourgeoise Européenne à partir de son domicile parisien ;
que la société Européenne, n’est pas connue fiscalement du centre des impôts de Paris, du centre des impôts de Paris 8ème ni de celui des entreprises étrangères ; que M. X… n’est connu fiscalement ni du centre des impôts de Paris ni du centre des impôts de Paris 8ème pour le dépôt de déclarations relatives à une activité professionnelle indépendante ;

que dès lors, il existe des présomptions selon lesquelles M. X… et/ou la société Européenne se soustrairaient à leurs obligations déclaratives et ainsi ne procèdent pas à la passation régulière de leurs écritures comptables ; que M. X… exerce les fonctions de président du conseil d’administration de la société « I » ; que la société « I », immatriculée à Paris a son siège social à Paris avec pour objet social : gestion d’un portefeuille de titres de participation, assistance aux sociétés de son groupe dans les domaines commercial, administratif, gestion, stratégie de développement, marketing, financier, …acquisition, gestion, administration de tous meubles ou biens immobiliers ;
que la société « S » représentée par son président M. X…, immatriculée à Paris a son siège social à Paris avec pour objet social : toute activité d’immobilier et assurer la gestion de son portefeuille de titres de participations et de placement, la prise d’intérêts ou de participations dans des sociétés exerçant toute activité ;
que la société « I » et la société « S » sont dirigées par le même président, que leurs sièges sociaux sont à la même adresse et qu’au 31 juillet 2003, la société « I » détient 99,99 % du capital de la société « S » ; qu’il existe ainsi des présomptions selon lesquelles la société « I » et la société « S » détiennent dans leurs locaux des documents et supports d’information relatifs à la fraude présumée ;

que seule l’existence de présomptions est requise pour la mise en oeuvre des dispositions de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales ; que dès lors il existe des présomptions selon lesquelles la société Européenne et M. X… dissimuleraient en France leurs activités de conseil et/ou de prestataires de service lié à l’ingénierie financière, soit directement soit indirectement sous couvert d’entités et ne procéderaient pas à la passation régulière de leurs écritures comptables ;
qu’ainsi tous deux se seraient soustraits et se soustrairaient à l’établissement et au paiement de l’impôt sur les sociétés, de l’impôt sur le revenu (catégories des bénéfices industriels et commerciaux – BIC, des bénéfices non commerciaux – BNC) et de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts (articles 54 et 209.1 pour l’impôt sur les sociétés, 54 pour les BIC, 99 pour les BNC et 286 pour la TVA) ;

« 1 / alors que le juge des libertés, saisi d’une demande d’autorisation de perquisitions sur le fondement de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales, doit vérifier concrètement que les éléments d’information qui lui sont présentés font effectivement présumer les infractions alléguées ; qu’il ne pouvait ainsi déduire des seules circonstances selon lesquelles la société Européenne serait détenue par M. X… et disposerait en France d’un établissement et d’un site internet, qu’il existerait des présomptions selon lesquelles la société Européenne et M. X… dissimuleraient en France leurs activités de conseil et/ou de prestataires de service lié à l’ingénierie financière, sans rechercher ni préciser de quels moyens humains et matériels la société Européenne disposerait à Luxembourg pour exercer effectivement sur le territoire de cet Etat l’activité antérieurement exercée en France par la société « I » ;

2 / alors que l’administration fiscale est tenue d’une obligation de loyauté dans l’établissement des présomptions ;

qu’elle doit ainsi produire, à l’appui de la requête, tous les éléments d’information en sa possession et mettre en oeuvre tous les moyens dont elle dispose pour obtenir de tels éléments ; que l’administration fiscale, qui pouvait obtenir, au moyen d’une demande d’assistance administrative internationale, tous les renseignements relatifs au moyens humains et matériels dont disposait la société Européenne sur le territoire luxembourgeois, ne pouvait demander l’autorisation de perquisitionner les locaux français de cette société sans solliciter et produire au préalable ces éléments » ;

Attendu que, d’une part, aucun texte ne subordonne la saisine de l’autorité judiciaire par l’administration fiscale, pour l’application des dispositions de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales, au recours préalable à d’autres procédures, telle une demande d’assistance administrative internationale ;

Attendu que, d’autre part, le juge, s’étant référé, en les analysant, aux éléments d’information fournis par l’Administration, a souverainement apprécié l’existence des présomptions d’agissements frauduleux justifiant la mesure autorisée ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l’ordonnance est régulière en la forme ;

DECISION

. Rejette les pourvois ;

La Cour : M. Cotte (président), Mme Desgrange (conseiller rapporteur), M. Challe (conseiller de la chambre) ;

Avocats : SCP Piwnica et Molinie et de Me Foussard

 
 

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* Nous portons l'attention de nos lecteurs sur les possibilités d'homonymies particuliérement lorsque les décisions ne comportent pas le prénom des personnes.