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Jurisprudence : E-commerce

vendredi 06 mars 2009
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Tribunal de grande instance de Paris Ordonnance de référé 23 juillet 2007

Y Eyes / Bruno H.

e-commerce

FAITS ET PROCEDURE

Par assignation du 4 juillet 2007, la société Y Eyes demandant de constater :
– qu’en enregistrant le nom de domaine « Y-Eyes » et en le modifiant à son nom propre le 10 mai 2007, Monsieur Bruno H. a commis un acte d’usurpation de nom commercial et de contrefaçon de marque E Eyes exploitée par la requérante au jour de la réservation litigieuse et déposée par celle-ci auprès de l’Inpi,
– que le chantage opéré par Monsieur Bruno H. afin de transférer le nom de domaine « Y Eyes » au profit de la société E Eyes est constitutif d’un « cybersquattage » et d’une faute,
– l’existence de dommages matériel et commercial au préjudice de la société Y Eyes par Monsieur Bruno H.

En conséquence :
– Ordonner à Monsieur Bruno H. de transférer à ses frais et au profit de la société Y Eyes le nom de domaine « E-Eyes » dans un délai de cinq jours à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir et sous astreinte de 1000 € par jour de retard, commençant à courir à l’expiration du délai imparti,
– condamner Monsieur Bruno H. à payer à la société Y Eyes la somme de :

* 4639,16 € au titre de frais de catalogues et cartes de visite inutilisables,
* 30 000 € au titre de son préjudice commercial,
– condamner Monsieur Bruno H. à payer à la société Y Eyes la somme de 5382 € sur le fondement de l’article 700 du ncpc,
– condamner Monsieur H. aux dépens.

Par conclusions écrites développées à l’audience Monsieur H. demande de :
– constater l’absence de dommage imminent et de trouble manifestement illicite,
– dire n’y avoir lieu à référé,
– condamner la société Y Eyes à régler à Monsieur H. la somme de 4500 € en application des dispositions de l’article 700 du ncpc et aux dépens.

Subsidiairement :
– Ordonner le transfert au bénéfice de la société Y Eyes du nom de domaine www.y-eyes.com et du compte mail contact@y-eyes.com, sous réserve du paiement de la facture de 1500 €,
– condamner la société Y Eyes à régler à Monsieur H. la somme de 4500 € en application des dispositions de l’article 700 du ncpc et aux dépens.

DISCUSSION

Il n’est pas contesté qu’en mai 2005 Madame A. a demandé à un de ses amis, Monsieur H. :
– l’enregistrement du nom de domaine « Y- Eyes.com » afin de créer un site internet à l’adresse www.y-eyes.com
– l’enregistrement de l’adresse électronique contact@y-eyes.com.

La réservation a été effectuée le 9 mai 2005 par Monsieur H., devenu depuis le mois de décembre 2006 Président de la société First Luxe qui a pour activité « l’installation et la maintenance de portails et de sites internet ».

En avril 2007, Madame A. a souhaité récupérer le nom de domaine www.y-eyes.com et confier le développement de son site à la société Aliorsys.

C’est alors que, selon Madame A., elle n’aurait pu obtenir le transfert amiable du nom de domaine, Monsieur H. n’acceptant ce transfert que contre paiement de la somme de 1500 €, ce qui constitue un acte de « cybersquatting » de sa part alors que, par ailleurs, elle a subi un préjudice certain, ayant édité un catalogue et ratant d’éventuelles commandes, contacts et événements commerciaux, par l’impossibilité de mettre en ligne son site internet.

Sur le « cybersquatting »

Si le « cybersquatting » est constitué par « l’appropriation du nom afin de le revendre au propriétaire abusé », tel n’apparaît pas avoir été le comportement de Monsieur H., qui a toujours reconnu avoir effectué l’enregistrement de domaine pour le compte de Madame A. et qui a manifesté dans ses courriels le désir de le restituer, les 1500 € devant couvrir les frais que la société First Luxe lui a facturé (et qu’il a payé) pour le service rendu. La qualification de «cybersquatting » ne saurait donc être retenue.

Il reste que le nom de domaine appartenant à Madame A., pour la société Y Eyes, Monsieur H. devra opérer le transfert, la société devant par ailleurs avancer la somme de 500 € à titre de provision sur les frais engagés pour son compte.

Sur les préjudices

Il résulte des éléments fournis et des discussions en cours d’audience que des doutes existent quant à la nature des relations ayant existé entre les parties à propos du développement du site et des comportements réciproques qui auraient conduit la société Y Eyes à engager des frais prématurément. Que par ailleurs, le préjudice commercial allégué est éventuel.

Le juge de référé étant « juge de l’évidence » ne pourrait en l’espace, sans apprécier l’intention des parties, évaluer les préjudices subis.

Il n’y a donc pas lieu à référé sur ce point.

Sur les frais irrépétibles

L’équité ne commande pas, en l’état, de faire application de l’article 700 du ncpc.

DECISION

Par ces motifs,

. Ordonnons à Monsieur Bruno H. de transférer au profit de la société Y Eyes le nom de domaine «Y-Eyes » dans un délai de 8 jours à compter de la signification de cette décision ;

. Condamnons la société Y Eyes à payer à Monsieur Bruno H. la somme de 500 € à titre de provision sur les frais engagés pour l’enregistrement et le suivi du nom de domaine ;

. Disons n’y avoir lieu à référé pour le surplus ;

. Disons n’y avoir lieu à application de l’article 700 du ncpc ;

. Rappelons que la présente décision est exécutoire de plein droit ;

. Condamnons Monsieur Bruno H. aux dépens de la présente instance.

Le tribunal : Mme Marie Carmen Merchan de la Pena (président)

Avocats : Me Anthony Bem, Me Héloïse Deliquiet

 
 

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