Jurisprudence : Jurisprudences
Tribunal de commerce de Paris, 4ème ch., jugement du 12 juillet 2018
Easyjet, XL Airways et Aigle Azur / Flightright
avocats - exercice illégal du droit - procédure judiciaire - site internet - transport aérien indeminisation
La société Easyjet Airline Company Limited, ci-après dénommée Easy Jet est une compagnie aérienne britannique.
La société XL Airways France, ci-après dénommée XL Airways est une compagnie aérienne française.
La société Aigle Azur est une compagnie aérienne française.
Dans le cadre du transport aérien de passagers, le règlement (CE) 261/2004 accorde des droits aux passagers, en partance d’un aéroport situé sur le territoire d’un Etat membre ou à destination d’un aéroport situé sur le territoire d’un Etat membre qui sont confrontés à un refus d’embarquement ou dont leur vol a été annulé.
Ledit règlement prévoit notamment le versement d’une indemnisation à ces passagers par les compagnies aériennes.
Par exception, le règlement en question prévoit que le transporteur aérien n’est pas tenu de verser une telle indemnisation s’il est en mesure de prouver que l’annulation ou le retard est dû à des circonstances extraordinaires qui n’auraient pas pu être évitées même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises.
En cas de difficultés pour le passager à obtenir le remboursement au titre du règlement directement auprès des compagnies aériennes des procédures amiables et gratuites sont à sa disposition de ce dernier.
En parallèle à ces procédures amiables et gratuites des sociétés proposent une activité relative au recouvrement des indemnités de retard aux passagers via des sites internet développés pour la cause.
Flightright société de droit allemand intervient en cette qualité et propose aux passagers un certain nombre de services.
Dans le cadre de son activité Flightright a initié et géré un nombre significatifs de dossiers et de procédures judiciaires d’après les demanderesses et à leur encontre, ce que se défend Flightright.
Les demanderesses contestent les conditions d’exercice du droit sur le sol français par Flightright et estiment illégale son activité. Ce que conteste Flightright.
C’est dans ces conditions que le tribunal de céans a été saisi.
LA PROCÉDURE
Par acte d’accomplissement des formalités de l’article 4-3 du règlement (CE) N°1393-2007 du 13 novembre 2007 du Conseil de l’Europe en date du 17 février 2017, Easy Jet, XL Airways France et Aigle Azur assignent Flightright Gmbh à bref délai devant le tribunal de céans.
Les parties ont été informées et ont accepté que, conformément aux dispositions de l’article 446-2 du code de procédure civile, seules leurs dernières écritures récapitulatives seront retenues.
A l’audience du 22 novembre 2017 Easy Jet XL Airways ET Aigle Azur demandent au tribunal de :
– Juger que le tribunal de commerce de Paris est compétent pour juger du présent litige ;
– Juger que les sociétés Aigle Azur, Easyjet et XL Airways disposent d’un intérêt à agir ;
– Condamner Flightright à payer à Easy Jet la somme de 1 euro au titre du préjudice d’image subi et à la somme de 600.000 euros au titre du préjudice économique subi ;
– Condamner Flightright à payer à Aigle Azur la somme de 1 euros au titre du préjudice d’image subi et des dommages et intérêts à hauteur de 80.000 euros ;
– Condamner Flightright à payer à XL Airways la somme d’un euro au titre de préjudice d’image et la somme de 6.546 euros au titre du préjudice économique subi ;
– Ordonner la cessation d’actes constituant un exercice illégal du droit et ce sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée et de 10.000 euros par jour de retard dans le délai de sept jours après prononcé du jugement à intervenir, lesdites astreintes devant être liquidées par le tribunal de céans ;
– ordonner la cessation d’actes de démarchage juridique et ce sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée et de 10.000 euros par jour de retard dans le délai de sept jours après le prononcé du jugement à intervenir, lesdites astreintes devant être liquidées par le tribunal de céans ;
– ordonner la cessation d’actes de dénigrement à l’encontre des demanderesses et ce sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée et de 10.000 euros par jour de retard dans le délai de sept jours après le prononcé du jugement à intervenir, lesdites astreintes devant être liquidées par le tribunal de céans ;
– ordonner la cessation d’actes constitutifs du délit de tentative d’escroquerie ou du délit d’escroquerie au jugement et ce sous astreinte de 1.000 euros par jour par infraction constatée et de 10.000 euros par jour de retard dans le délai de sept jours après le prononcé du jugement à intervenir, lesdites astreintes devant être liquidées par le tribunal de céans ;
– Ordonner la mise en conformité du site internet www.flightright.fr ou tout autre site exploité par Flightright sur le territoire français ayant le même objet avec l’article L.111-7-2 du code de la consommation et la cessation de toute pratique commerciale trompeuse et ce sous astreinte de 1.000 euros par infraction et de 10.000 euros par jour de retard dans le délai de sept jours après le prononcé du jugement à intervenir lesdites astreintes devant être liquidées par le tribunal de céans ;
– ordonner la mise en conformité du site internet www.flightright.fr avec les dispositions relatives à la protection des données personnelles et ce sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée et de 10.000 euros par jour de retard dans le délai de sept jours après le prononcé du jugement a intervenir, lesdites astreintes devant être liquidées par le tribunal de céans ;
– ordonner la mise en conformité du site internet www.flightright.fr avec les dispositions relatives a l’activité de recouvrement de créances et ce sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée et de 10.000 euros par jour de retard dans le délai de sept jours après le prononcé du jugement à intervenir, lesdites astreintes devant être liquidées par le tribunal de céans ;
– Ordonner la mise en conformité du site internet www.flightright.fr ou tout autre site exploité par Flightright sur le territoire français ayant le même objet de ses conditions générales aux dispositions sur la médiation et ce sous astreinte de 1.000 euros par infraction et de 10.000 euros par jour de retard dans le délai de sept jours après le prononcé du jugement à intervenir lesdites astreintes devant être liquidées par le tribunal de céans ;
– Ordonner la mise en conformité du site internet www.fliqhtriqht.fr ou tout autre site exploité par Flightright sur le territoire français ayant le même objet de ses conditions générales aux dispositions sur les clauses abusives et ce sous astreinte de 1.000 euros par infraction et de 10.000 euros par jour de retard dans le délai de sept jours après le prononcé du jugement à intervenir lesdites astreintes devant être liquidées par le tribunal de céans ;
– ordonner la publication de la décision de la décision à intervenir dans trois journaux ou périodiques au choix des demanderesses et aux frais avancés de Flightright elce dans la limite de 5.000 euros HT par publication
-Ordonner la publication de la décision à intervenir sur la page d’accueil du site internet (https://www.flighlright.fr) ou toute autre page d’accueil du site commercial de Flightright si celle-ci devait être modifiée. La publication devra être maintenue pendant un mois sur le site et ne pourra pas être écrite dans une police inférieure à ARIAL 8,5 ;
– ordonner l’envoi de la décision intégrale à intervenir aux différents clients de Flightright et ce sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard dans le délai de quarante-huit heures après le prononcé du jugement a intervenir ; lesdites astreintes devant
être liquidées par le Président du tribunal de céans ;
– rejeter la demande de dommages et intérêts de Flightright au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile ;
– condamner Flightright à payer à chacune des demanderesses la somme de 10.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir ;
La condamner en tous les dépens.
A l’audience du 22 novembre 2017, Flightright demande au tribunal de :
In limine litis,
– Déclarer les juridictions françaises territorialement incompétentes au profit des juridictions allemandes territorialement compétentes ;
– Se dessaisir et renvoyer l’affaire devant les juridictions compétentes allemandes territorialement compétentes ;
Subsidiairement,
– déclarer le tribunal de commerce de Paris territorialement incompétent au profit du tribunal de commerce de Bobigny et d’Evry pour connaître respectivement, des demandes des Sociétés XL Airways et Aigle Azur ;
– se dessaisir et renvoyer l’affaire devant le tribunal de commerce de Bobigny et d’Evry pour connaître, respectivement, des demandes des sociétés XL Airways et Aigle Azur ;
– déclarer le tribunal de commerce de Paris territorialement incompétent au profit des juridictions territorialement compétentes du Royaume-Uni pour connaître des demandes de Easy Jet ;
– se dessaisir et renvoyer l’affaire devant les juridictions territorialement compétentes du Royaume-Uni pour connaître des demandes de Easy Jet ;
Subsidiairement et sur le fond,
– Rejeter des débats le PV de constat d’huissier dressé le 3 mai 2017 (pièce adverse N°69) comme constituant une preuve illicite ;
– Dire et juger Easyjet, XL Airways et Aigle Azur irrecevables en leur action pour défaut de droit à agir ;
– Débouter Easy Jet, XL Airways et Aigle Azur de toutes leurs demandes fins et prétentions comme irrecevables et à tout le moins mal fondées ;
– Constater le caractère abusif de l’action engagée par Easy Jet, XL Airways et Aigle Azur ;
– Condamner Easy Jet XL Airways et Aigle Azur chacune au paiement de la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile ;
– Juger ce que de droit sur le principe et le montant d’une amende civile ;
En tout état de cause,
– Condamner Easy Jet, XL Airways et Aigle Azur chacune au paiement de la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Les condamner en tous les dépens.
Les parties sont convoquées à l’audience du 22 novembre 2017 à laquelle elles se présentent par leur conseil respectif.
Après avoir entendu les parties en leurs explications et observations, à son audience du 22 novembre 2017, le juge chargé d’instruire l’affaire clôt les débats, met l’affaire en délibéré et dit que le jugement sera prononcé le 25 janvier 2018, date reportée au 22 février 2018 et finalement au 12 juillet 2018 conformément à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
MOYENS DES PARTIES :
Après avoir pris connaissance de tous les moyens et arguments développés par les parties, tant dans leurs plaidoiries que dans leurs écritures, appliquant la disposition de l’article 455 du Code de procédure civile, le tribunal les résumera de la façon suivante :
Easyjet, XL Airways et AIGNE Azur exposent que :
Vu l’article 1240 du code civil,
Vu les articles 31, 32-1, 42 et 700 du code de procédure civile,
Vu le règlement N°1215/2012 du 12 décembre 2012,
Vu la Directive N°2000/31/CE du 8 juin 2000,
Vu la Directive N°’2006/123/CE du 12 décembre 2006,
Vu l’article 14 de la loi du 21 juin 2004 sur la confiance dans l’économie numérique,
Vu les articles R.124-1 à R.124-7 du code de procédures civiles d’exécution,
Vu la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques et le décret N°72_785 du 25 août 1972,
Vu la loi N’78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés,
Vu les articles L.111-7-2, L.121-1, L.121-2, L.121-4, L.132-1 et L.132-2 du code de la consommation,
– Elles sont recevables et bien fondées en leurs demandes ;
– Le tribunal de commerce de Paris est compétent pour juger du présent litige ;
– Elles disposent d’un intérêt à agir ;
– Flightright exerce un démarchage juridique illégale sur le territoire français ;
– Flightright ne respecte pas les obligations qui lui incombent dans le cadre de l’exercice d’une activité de recouvrement de créances ;
– Les pratiques mises en œuvre par Flightright relèvent de la tentative d’escroquerie au jugement et de l’escroquerie au jugement ;
– Les pratiques mises en œuvre par Flightright sont déloyales et trompeuses ;
– Flightright recourt à l’emploi de clauses abusives contraires à l’article L.132-1 du code de la consommation ;
– Flightright ne respecte pas ses obligations en matière d’avis des consommateurs sur son site ;
– L’exploitation du site internet par Flightright actuellement à l’adresse www.flightright.fr n’est pas conforme aux dispositions relatives à la protection des données personnelles ;
– Flightright a commis des actes de dénigrements à l’encontre des demanderesses ;
– Chacun des manquements est de nature à engager la responsabilité délictuelle de Flightright vis-à-vis des demanderesses ;
– Flightright a pris acte de la réalité de certains de ces manquements en changeant certaines pratiques.
Flightright soutient que :
Vu les articles 31, 42 et 46 du code de procédure civile,
Vu le règlement UE N°1215/2012 du 12 décembre 2012 dit Bruxelles 1bis,
Vu l’article 7.2 du règlement Bruxelles 1bis,
Vu les articles 16 et 17.5 de la Directive Services 2006/123/CE,
Vu l’application de la Directive 2000/31/CE sur le commerce électronique,
Vu la Directive 77/249/CEE sur l’activité des avocats.
– Le tribunal de commerce de Paris est territorialement incompétent ;
– Elle est une société de droit allemand, enregistrée et établie en Allemagne ;
– Elle n’a pas d’établissement en France ;
– Son site internet est hébergé en Allemagne ;
– Les mises en demeurent partent d’Allemagne ;
– Aucune vente, aucune livraison ne sont réalisées sur le territoire français ;
– Les paiements sont adressés en Allemagne ;
– La communication réalisée sur le sol français est son unique action et ne peut constituer une faute ;
– Les requérantes n’ont pas fait application du principe général gouvernant la compétence territoriale dans l’ordre interne comme dans l’ordre international à savoir le lieu ou demeure le défenseur ;
– Il n’existe aucun facteur de rattachement qui justifie la compétence du tribunal de commerce de Paris ;
– Au sens tiré de l’article 7.2 du règlement Bruxelles 1bis il a été démontré qu’il n’existe nulle part en France de lieu où l’on puisse constater la réalisation des faits critiqués et allégués de faute ;
– XL Airways a son siège social à Tremblay en France (93) de la sorte seul le tribunal de Bobigny serait territorialement compétent à raison du lieu où le dommage a été subi ;
– Aigle Azur a son siège social à Paray Vieille Poste (91) de la sorte seul le tribunal de commerce d’Evry serait territorialement compétent ; Easyjet a son siège social au Royaume Uni ;
– Les juridictions françaises sont territorialement incompétentes ;
– Le fait que le site édité par Flightright soit nommé en « .fr » ne constitue pas à lui seul une circonstance suffisante pour estimer un rattachement « suffisant » au sens donné par la jurisprudence ;
– L’action engagée par les demanderesses est irrecevable pour défaut de droit d’agir ;
– Leur action est irrecevable et mal fondée en ce qu’elle se heurte aux principes du droit européen ;
– Elles ne justifient d’aucun préjudice ;
– Les demandes des requérantes sont irrecevables ;
– Elle ne fournit aucune prestation intellectuelle individualisée à aucune étape du service qu’elle fournit ;
– Flightright rend un service d’information via Je calculateur d’indemnisation ;
– Flightright ne se livre à aucune analyse juridique ;
– Elle n’est pas partie aux différentes procédures engagées par les clients des compagnies aériennes ;
– Seul l’avocat qui représente les passagers plaide devant les juridictions saisies ;
– Elle respecte la réglementation applicable aux sociétés de recouvrement de créances ;
DISCUSSION
Sur la compétence du tribunal de commerce de Paris et des juridictions françaises :
– Attendu que les parties sont domiciliée sur le territoire de l’Union Européenne, le présent litige est régi par le règlement (UE) N°1215/2012 du 12 décembre 2012 dit Bruxelles 1 Bis concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, ce que ne contestent pas les parties ;
– Attendu que Flightright est une société de droit allemand, que les parties, qui ne le contestent pas, n’établissent pas qu’elle disposerait d’établissements secondaires inscrits au registre du commerce et des sociétés ;
– Attendu que l’article 7.2 dudit Règlement précise qu’en matière délictuelle ou quasi délictuelle, « il est possible d’agir devant les tribunaux de l’Etat dans lequel est domicilié le défendeur mais aussi devant le tribunal où le fait dommageable s’est
produit ou risque de se produire… » ;
– Attendu que le site internet www.flightright.fr est accessible depuis , notamment en Europe et au moyen de tout navigateur, qu’il est hébergé en Allemagne, (pièce N°16 du défendeur) ce que ne contestent pas les parties ;
– Attendu que Flightright est inscrite en tant qu’agence de recouvrement amiable en Allemagne, qu’elle est inscrite au registre allemand des services juridiques, sous le numéro de registre 3712 E-6.76 et qu’elle exerce sous l’autorité de la Haute Cour Régionale de Brandenburg, ce que ne contestent pas les parties ;
– Attendu que la rémunération de ses activités est payée en Allemagne, que les fonds versés par les compagnies aériennes sont consignés sur un compte bancaire de ta Deutsche Bank en Allemagne (pièce N° 13 du défendeur) ;
– Attendu qu’aucun produit ou service n’est vendu ou livré en France, que les mises en demeure sont éditées en Allemagne (pièces N° 26 à 28 du défendeur) ;
– Attendu que les actions judiciaires sont engagées par un avocat mandaté par le voyageur (pièces N’17 des demanderesses et 29, 29 bis et 30) ;
– Attendu que le fait que le site Flightright soit nommé « .fr » ne constitue pas à lui seul une circonstance suffisante pour constituer un critère suffisant de rattachement ;
– Mais attendu qu’il s’agit d’un site destiné aux consommateurs français, rédigé en français et permettant aux consommateurs français d’avoir recours aux services de Flightright pour l’ensemble des vols réalisés depuis le territoire français ; Attendu qu’en matière de responsabilité civile délictuelle, le Règlement (CE) n° 86412007 du Parlement Européen et du Conseil du 11 juillet 2007 sur la loi applicable aux obligations non contractuelles dispose que : « sauf dispositions contraires du présent règlement, la loi applicable â une obligation non contractuelle résultant d’un fait dommageable est celle du pays où le dommage survient, quel que soit le pays où le fait générateur du dommage se produit et quels que soient le ou les pays dans lesquels des conséquences indirectes de ce fait surviennent » ;
– Attendu que deux procès-verbaux de constat d’huissier (pièce N°11 et 69 des demanderesses) ont été dressés les 28 octobre 2016 et 3 mai 2017 à la requête de Easyjet, Huissier de justice associé près le Tribunal de Grande Instance de Paris, que ces constats ont été procédés en l’étude située à Paris, qu’ils portent sur la teneur du site internet de Flightright ;
En conséquence, le Tribunal de céans retient que le fait dommageable a été constaté en France et plus précisément à Paris, qu’à ce titre, les juridictions françaises sont compétentes et il dira qu’il est territorialement compétent et déboutera Flightright de sa demande d’incompétence dudit tribunal et des juridictions françaises.
Sur l’intérêt à agir des demanderesses et leur préjudice :
– Attendu que l’article 31 du code de procédure civile dispose que : « l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention ou pour défendre un intérêt déterminé » ;
– Attendu que l’intérêt à agir des demanderesses est caractérisé par les dommages qu’elles estiment subir du fait de l’activité qu’elles prétendent illicites de Flightright ;
– Attendu que l’intérêt à agir doit tendre à la réalisation d’un droit ou d’une prérogative personnels ou subjectifs, que son caractère est lié à l’atteinte à un droit et constitue une réponse à cette atteinte ;
– Attendu que les décisions rendues par les juridictions de Toulouse le 23 mai 2017 et d’Ivry sur Seine le 30 juin 2017 ne viennent pas constater le prétendu intérêt à agir des demanderesses contrairement à ce qu’elles prétendent, mais que ces juridictions ont accordé un sursis à statuer dans l’attente du jugement à intervenir, que dans ces décisions Flightright n’est pas partie à l’instance, que seuls les passagers ayant subi un retard d’avion et Easyjet étaient parties à l’instance ;
– Attendu que juridiquement la responsabilité civile est l’obligation de réparer le dommage causé à autrui dont un intérêt légitime a été lésé ; qu’il n’y a pas de responsabilité civile sans préjudice à réparer ;
– Attendu que le dommage dont les demanderesses font état n’est que la conséquence de l’obligation légale qui s’impose à elles ; Qu’à ce titre, être tenu d’exécuter les prescriptions du Règlement (UE) 26112004 ne constitue pas un préjudice réparable ;
– Attendu qu’à ce litre la diffusion d’informations et l’assistance, fournies aux usagers au travers du site www.flightright.fr sont limitées et sans caractère illégal établi puisque que les actions en justice ne sont pas engagées par Flightright mais par les usagers que celle-ci ne fournit aucune analyse ni conseil juridique, Flightright n’intervenant qu’en cas de succès pour percevoir une commission, qu’il apparait que ce processus n’est pas constitutif d’un dommage ; Que ce service à destination des consommateurs victimes de retards ou d’annulations de vols sur les indemnisations auxquels ils pourraient prétendre à travers ce Règlement (UE) ne s’apparente pas à un dommage au sens de la responsabilité civile et ne peut s’apparenter à un préjudice ;
En conséquence, le tribunal dira que les demanderesses qui ne subissent pas de dommages, dira, sont dépourvues d’intérêt et de droit d’agir et que leur action est en conséquence irrecevable et les déboutera donc de leurs demandes.
Sur l’article 700 du Code de procédure civile et les dépens :
Attendu que pour faire reconnaître ses droits, Flightright a dû engager des frais non compris dans les dépens, qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge.
le tribunal condamnera Easyjet, XL Airways et Aigle Azur à verser chacune la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et déboutera pour le surplus.
Sur l’exécution provisoire :
Attendu que la solution donnée au litige ne justifie pas l’exécution provisoire ; qu’il n’y a donc pas eu lieu de l’ordonner ;
Sur les dépens :
Attendu enfin, que les demanderesses succombent, Easyjet, XL Airways et Aigle Azur seront condamnées aux dépens de l’instance.
Sans qu’il y a lieu d’examiner les autres moyens ou prétentions inopérants ou mal fondés, le tribunal statuera comme suit :
DÉCISION
Le tribunal statuant publiquement par un jugement contradictoire et en premier ressort :
– Déboute Flightright de sa demande d’incompétence des juridictions françaises et du tribunal de commerce de Paris,
– Se déclare compétent,
– dit que les sociétés Easy Jet, XL Airways et Aigle Azur n’ont ni intérêt ni droit à agir,
– Condamne les sociétés Easyjet, XLAirways et Aigle Azur chacune à verser la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, déboutant pour le surplus,
– Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
– Condamne les sociétés Easyjet, XL Airways et Aigle Azur aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 122,83 € dont 20,26 € de TVA.
En application des dispositions de l’article 871 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 novembre 2017, en audience publique, devant M. Jean-Luc Pegat-Toquet, juge chargé d’instruire l’affaire, les représentants des parties ne s’y étant pas opposés.
Ce juge a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré du tribunal, composé de : M. Jean Pierre Elguedj, M. Jean-Luc Pegat-Toquet et M. Olivier Dubois.
Délibéré le 27 juin 2018 par les mêmes juges.
Dit que le présent jugement est prononcé par sa mise à disposition au greffe de ce tribunal, les parties en ayant été préalablement avisées lors des débats dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Le Tribunal : Jean Pierre Elguedj (président), Jean-Luc Pegat-Toquet (juge) et Olivier Dubois, Laurence Baali (greffier)
Avocats : Me Thierry Titane, Me Matthieu Dary, Me Laëtitia Lisimachi, Me Stéphane Coulaux, Me Nicole Delay-Peuch
Source : Legalis.net
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