Jurisprudence : Jurisprudences
Cour d’appel d’Amiens, Ch. Eco., arrêt du 6 février 2025
Optimise Car & Location Automobile Négoce Import Export 02 / Be Ware Informatique
constat de commissaire de justice - Contrat de développement - dysfonctionnements - norme Afnor - site internet - validité
Le 11 juillet 2019, la SARL Be Ware Informatique, spécialiste dans la conception de sites internet, a établi un devis de 17.826 euros (hors maintenance et hébergement du site) portant sur la refonte du site internet www.lanie.fr de la SAS Location Automobile Negoce Import Export 02 situé à St-Quentin (ci-après » société Lanie 02 « ) qui a deux établissements à St-Quentin ayant pour activité principale le négoce et la location d’engins motorisés.
Il s’agissait d’un devis de création d’une application permettant de gérer plusieurs vitrines de présentation de catalogue de véhicules, les prestations fournies étant classées dans les rubriques suivantes : base du projet, partie Front (notamment gestion du multisite : vitrine import, vitrine Kia et vitrine Mitsubishi), et espace administration.
La facture de 17.603,40 euros se rapportant à ce contrat, émise le 24 novembre 2020, a été entièrement réglée début 2021, prenant en compte, outre la TVA, la réalisation technique et fonctionnelle du site lanie.fr pour 14855 euros HT, 715 euros HT de surcoût constitué par le développement de l’API banque BNP au lieu de CIC, 1105 euros HT de module Newsletter générateur HTML à la suite du changement de décision client, aussitôt remisés en totalité, et 585 euros d’ajout de fonctionnalités dans le module Blog, déduction faite d’un premier acompte de 1485 euros.
Un contrat d’hébergement et de maintenance du site Lanie.fr, comprenant la location du serveur et sa maintenance et la maintenance du site lanie.fr a été souscrit par la société Lanie 02 le 10 décembre 2020 pour une prise d’effet le 22 décembre 2020, moyennant un coût annuel de 1536 euros. Il y était précisé : » Pour vous remercier de votre confiance, nous vous avons offert l’hébergement du site Lanie V1 le temps de la sortie du Lanie V2. La maintenance du site sera offerte pendant 1 an « .
Parallèlement le 19 novembre 2019 la société Be Ware Informatique a émis un devis pour un total de 15015 euros HT soit 18018 TTC pour la réalisation d’un site e-commerce de vente de housses auto et moto et autres accessoires pour la SAS Optimise Car, société située à Jaux (60) créée par Monsieur L. M., également dirigeant de la SAS Lanie 02, dont l’établissement situé à Jaux à compter du 19 mai 2020 a pour activité la location de véhicules particuliers ou utilitaires de courte et longue durée, la gestion de parc automobile, la gestion administrative des cartes grises, négoce de véhicules neuf et d’occasion ainsi que tous accessoires s’y rapportant.
Trois phases étaient prévues dans l’offre commerciale de base : phase 1 (démarrage du projet, réalisation technique et fonctionnelle et réalisation partie administrateur) pour 9984 euros, phase 2 (mise en place du paiement en ligne, cartes cadeaux, interface client, interface revendeur, réalisation partie administrateur) moyennant 8043 euros et phase 3 de mise en place des fonctionnalités (proposition : » que des tests soient effectués pour incorporer les différentes marketplaces qui seront pertinents par rapport aux produits « )
La société Optimise Car a réglé la totalité du prix des deux premières phases à la commande.
Une facture de 18018 euros s’y rapportant a été émise le 6 décembre 2019 distinguant les deux phases.
Un contrat d’hébergement et de maintenance du site Optimise Car, comprenant la location du serveur et sa maintenance (mutualisé avec Lanie.fr) et la maintenance du site Optimise Car, a été souscrit par la société Optimise Car le 10 décembre 2020 pour une prise d’effet le 22 décembre 2020, moyennant un coût annuel de 552 euros. Il y était précisé : » La maintenance du site sera offerte pendant 1 an. Les conditions tarifaires exceptionnelles pour Optimise Car sont conditionnées à l’exécution des paiements dus pour le contrat de maintenance, d’hébergement et toute autre facture en cours pour Lanie.fr. Seule la mutualisation de vos deux sites Lanie.fr et Optimisecar.fr à partir de l’application Lanie a permis en effet la mise en place de ces tarifs préférentiels (…) « .
Des modifications sont intervenues courant décembre 2020 à la suite de la réclamation des deux sociétés qui avaient fait dresser un procès-verbal de constat le 30 novembre 2020, suivi d’une sommation de restituer 18.018 euros délivrée le 4 décembre 2020.
Les deux sites internet ont été définitivement mis en ligne le 22 décembre 2020.
Des correctifs ajouts et modifications ont été apportés au début de l’année 2021. Cependant les sociétés Optimise Car et Lanie 02 se plaignant de nouveaux problèmes de fonctionnalités des sites ont fait adresser par leur conseil un courrier recommandé reçu par la société Be Ware Informatique le 21 avril 2021 dans lequel elles listent des manques et dysfonctionnements sur les deux sites en sollicitant le remboursement de la somme de 18.018 euros.
La société Be Ware Informatique a fait répondre par son conseil, par lettre officielle du 30 avril 2021, que les réclamations remontant à décembre 2020 ont fait l’objet d’explications sur site, que les parties sont parvenues à un accord au terme duquel toutes les factures ont été réglées et que ce règlement vaut réception. Elle y indique que les deux entreprises automobiles revendiquent en réalité des prestations nouvelles non prévues au contrat, certaines ayant été quand même réalisées gracieusement d’autres pouvant être envisagées. Elle y précise que les sociétés ne pouvaient se plaindre de modifications qu’elles avaient sollicitées. Elle conteste l’impropriété des sites à leur usage compte tenu de l’utilisation quotidienne et en hausse des sites par les internautes, et rappelant que les sociétés avaient décidé des fonctionnalités du site et réglé les factures après avoir testé et validé les ajustements demandés.
La SAS Optimise Car et la SAS Lanie 02 ont fait dresser un nouveau procès-verbal par huissier de justice le 2 juillet 2021, se plaignant de la persistance de certains problèmes dans le fonctionnement des sites.
Elles ont fait assigner la SARL Be Ware Informatique devant le tribunal de commerce de Saint-Quentin par assignation en date du 29 octobre 2021, demandant au tribunal de prononcer la résolution des contrats de prestations informatiques, et en conséquence de condamner la SARL Be Ware Informatique au remboursement des sommes versées au titre desdits contrats, ainsi que 100.000 euros à chacune des demanderesses en réparation du préjudice d’exploitation.
En réponse, la SARL Be Ware Informatique demandait au tribunal de débouter les demanderesses de l’ensemble de leurs demandes, de prononcer la résiliation des contrats d’hébergement et de maintenance des deux sites internet, et de les condamner au paiement des factures d’hébergement et de maintenance des sites durant la période allant du 22 décembre 2021 au 21 décembre 2022, et de dommages et intérêts au titre d’un gain manqué.
Par jugement en date du 23 juin 2023, le tribunal de commerce de Saint-Quentin :
-Dit et juge que la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car ne rapportent pas la preuve que la SARL Be Ware Informatique aurait manqué à son obligation de délivrance conforme ;
-Déboute la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car de leur demande de résolution du contrat ;
-Prononce la résiliation des contrats d’hébergement et de maintenance des sites internet de la SAS Lanie 02 et de la SAS Optimise Car à leurs torts exclusifs ;
-Condamne la SAS Lanie 02 à payer à la SARL Be Ware Informatique une somme de 1.536 euros TTC au titre des factures impayées du contrat d’hébergement et de maintenance pour l’année 2021/2022 ;
-Condamne la SAS Optimise Car à payer à la SARL Be Ware Informatique une somme de 552 euros TTC au titre des factures impayées au titre du contrat d’hébergement et de maintenance pour l’année 2021/2022 ;
-Dit et juge mal fondée la demande de résolution de la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car en ce qu’elles n’ont pas mis en demeure la SARL Be Ware Informatique préalablement à leur décision et elles ne justifient pas de la gravité des manquements qu’elles allèguent ;
-Déboute la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car de l’intégralité de leurs demandes en ce qu’elles ne justifient ni du principe, ni du montant du préjudice qu’elles allèguent avoir subi ;
-Condamne solidairement la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car à payer à la SARL Be Ware Informatique une somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
-Condamne la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car aux entiers dépens, dont frais de greffe liquidés à la somme de 80,30 euros.
Par une déclaration en date du 5 juillet 2023, la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car ont interjeté appel limité du jugement en ce qu’il a :
-Dit et jugé qu’elles ne rapportaient pas la preuve que la SARL Be Ware Informatique aurait manqué à son obligation de délivrance conforme ;
-Les a déboutées de leur demande de résolution du contrat ;
-Prononcé la résiliation des contrats d’hébergement et de maintenance des sites internet de la SAS Lanie 02 et de la SAS Optimise Car à leurs torts exclusifs ;
-Condamné la SAS Lanie 02 à payer à la SARL Be Ware Informatique une somme de 1.536 euros TTC au titre des factures impayées pour l’année 2021/2022 ;
-Condamné la SAS Optimise Car à payer à la SARL Be Ware Informatique une somme de 552 euros TTC au titre des factures impayées pour l’année 2021/2022 ;
-Dit et jugé mal fondées leur demande de résolution en ce qu’elles n’ont pas mis en demeure la SARL Be Ware Informatique préalablement à leur décision et elles ne justifient pas de la gravité des manquements qu’elles allèguent ;
-Les a déboutées de l’intégralité de leurs demandes en ce qu’elles ne justifient ni du principe, ni du montant du préjudice qu’elles allèguent avoir subi ;
-Les a condamnées solidairement à payer à la SARL Be Ware Informatique une somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, dont frais de greffe liquidés à la somme de 80,30 euros.
Dans leurs dernières conclusions en date du 21 mars 2024, la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car demandent à la cour, au visa des articles 9 du code de procédure civile, 1104, 1224 et suivants, 1231 et suivants du code civil :
A titre liminaire :
-De rejeter la demande de nullité des constats d’huissier produits par la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car ;
-De prononcer la nullité du procès-verbal de constat établi à la demande de la SARL Be Ware Informatique le 20 janvier 2022 et de l’écarter.
A titre principal :
-De prononcer la nullité du jugement du tribunal de commerce de Saint-Quentin du 23 juin 2023 en l’ensemble de ses dispositions.
Subsidiairement :
-D’infirmer le jugement du tribunal de commerce de Saint-Quentin du 23 juin 2023 en l’ensemble de ses dispositions.
En tout état de cause, statuant de nouveau :
-De prononcer la résolution des contrats de prestations informatiques liant la SARL Be Ware Informatique et la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car.
En conséquence :
-De condamner la SARL Be Ware Informatique à verser à la SAS Optimise Car la somme de 18.876 euros TTC en remboursement des sommes versées ;
-De condamner la SARL Be Ware Informatique à verser à la SAS Optimise Car la somme de 29.860,92 euros TTC en remboursement des sommes versées ;
-D’enjoindre la SARL Be Ware Informatique à fournir à la SAS Optimise Car un avoir de ladite facture du 6 décembre 2019, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir ;
-De condamner la SARL Be Ware Informatique à verser à la SAS Optimise Car la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice d’exploitation subi du fait de l’absence de site internet exploitable ;
-De condamner la SARL Be Ware Informatique à verser à la SAS Lanie 02 la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du trouble d’exploitation subi du fait de l’absence de site internet exploitable ;
-D’ordonner la capitalisation des intérêts ;
-De dire que les sommes produiront intérêts à compter du 14 avril 2021, date de mise en demeure ;
-De dire que les intérêts courront au taux d’intérêt appliqué par la BCEA sur l’opération de refinancement la plus récente majorée de dix points de pourcentage, en application des dispositions de l’article L.441-6 alinéa 12 du code de commerce ;
-De débouter la SARL Be Ware Informatique de son appel incident ainsi que de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions plus amples et contraires ;
-De condamner la SARL Be Ware Informatique à verser aux concluantes, chacune, la somme de 10.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
-De condamner la SARL Be Ware Informatique aux entiers dépens de première instance et d’appel, ce qui comprendra les frais de procès-verbaux de constat de commissaire de justice du 30 novembre 2020 et du 2 juillet 2021, ainsi que les frais de greffe du tribunal de commerce de Saint-Quentin ;
-D’ordonner la distraction des dépens de la procédure d’appel au profit de la SELARL Doré-Tany-Benitah selon les dispositions de l’article 699 du code de commerce.
Dans son deuxième jeu de conclusions en date du 12 juin 2024 portant appel incident, la SARL Be Ware Informatique demande à la cour d’appel d’Amiens :
A titre liminaire :
-D’infirmer le jugement de première instance et d’écarter les constats d’huissier produits aux débats par la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car en ce qu’ils sont entachés de nullité et dénués de toute force probante ;
-De débouter la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car de leur demande de voir prononcer la nullité du constat d’huissier que la SARL Be Ware Informatique a fait établir le 20 janvier 2022.
A titre principal :
-De confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a jugé que la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car ne rapportaient pas la preuve que la SARL Be Ware Informatique aurait manqué à son obligation de délivrance conforme ;
-De confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a jugé que la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car de leur demande de résolution du contrat ;
-De débouter la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car de leur demande d’infirmation et d’annulation du jugement de première instance ;
-De confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a prononcé la résiliation des contrats d’hébergement et de maintenance des sites internet de la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car à leurs torts exclusifs ;
-De confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a condamné la SAS Lanie 02 à payer à la SARL Be Ware Informatique une somme de 1.536 euros TTC au titre des factures impayées pour l’année 2021/2022 ;
-De confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a condamné la SAS Optimise Car à payer à la SARL Be Ware Informatique une somme de 552 euros TTC au titre des factures impayées pour l’année 2021/2022 ;
-D’infirmer le jugement de première instance en ce qu’il n’a pas statué sur les demandes de condamnation supplémentaires de la SARL Be Ware Informatique.
Et statuant à nouveau :
-De condamner la SAS Lanie 02 à payer à la SARL Be Ware Informatique une somme complémentaire en cause d’appel de 9.216 euros TTC au titre d’un gain manqué ;
-De condamner la SAS Optimise Car à payer à la SARL Be Ware Informatique une somme complémentaire en cause d’appel de 3.312 euros TTC au titre d’un gain manqué.
A titre subsidiaire :
-De confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a jugé mal fondées la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car de leur demande de résolution en ce qu’elles n’ont pas mis en demeure la SARL Be Ware Informatique préalablement à leur décision et elles ne justifient pas de la gravité des manquements qu’elles allèguent ;
-De confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a débouté la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car de leur demande de résolution.
A titre infiniment subsidiaire :
-De confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a débouté la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car de l’intégralité de leurs demandes en ce qu’elles ne justifient ni du principe, ni du montant du préjudice qu’elles allèguent avoir subi.
En tout état de cause :
-De condamner solidairement la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car à payer à la SARL Be Ware Informatique une somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
-De condamner la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car aux entiers dépens d’instance.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 octobre 2024.
DISCUSSION :
Sur la demande d’annulation du jugement :
La SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car excipent de la nullité du jugement attaqué en application de l’article 7 du code de procédure civile, arguant que le premier juge a fondé sa décision sur le résultat d’investigations personnelles en procédant au relevé de données du système d’analyse Google Analytics alors que la fréquentation des sites n’était pas dans le débat.
La SARL Be Ware Informatique réplique que les statistiques de consultation des sites internet avaient bien été produits aux débats de première instance, et que le tribunal a simplement commis une erreur matérielle en évoquant Google Analytics alors que ces statistiques ont pour origine » Matomo « , de sorte qu’il s’est fondé uniquement sur les pièces contradictoirement produites aux débats.
La cour rappelle que selon l’article 7 du code de procédure civile, » Le juge ne peut fonder sa décision sur les faits qui ne sont pas dans le débat. Parmi les éléments du débat, le juge peut prendre en considération même les faits que les parties n’auraient pas spécialement invoqués au soutien de leurs prétentions. »
La cour constate que le premier juge a ainsi motivé sa décision :
» Attendu qu’avec le système d’analyse Google analytics sans intervention d’experts, il est démontré que les sites ont générés (sic) les résultats suivants : 13000 visites pour Optimise Car et 43000 visites pour Lanie 02. Il y a eu 158 contacts, 50 demandes de devis et 35 commandes. Cela atteste du fonctionnement du site. »
Si le tribunal s’est trompé concernant la source des chiffres de fréquentation des sites, cependant l’ensemble de ces données se retrouvaient bien dans le débat puisqu’elles étaient issues de deux documents statistiques extraits du système d’analyse Matomo qui ont été produits en première instance. Par ailleurs il ne ressort pas de sa motivation que les premiers juges ont consulté eux-mêmes le système d’analyse Google analytics pour en tirer les statistiques qu’ils énoncent.
Dès lors il n’y a pas lieu d’annuler le jugement entrepris.
Sur la demande d’annulation des constats d’huissier :
La SARL Be Ware Informatique demande à la cour que soient écartés des débats les constats d’huissier établis le 30 novembre 2020 et 2 juillet 2021 à l’initiative de la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car, d’une part car l’huissier n’a pas respecté les conditions techniques propres à garantir la fiabilité et le caractère probant de ces constats, définies par la norme AFNOR NF Z 67-147 du 11 septembre 2010, et d’autre part car les huissiers ne se sont pas limités à procéder à des constatations purement matérielles.
Elle reproche aux huissiers de ne pas avoir décrit l’ensemble des éléments relatifs au fournisseur d’accès à internet ou le matériel informatique utilisé, ne pas avoir précisé le paramétrage de définition de l’écran et synchronisé la date et l’horloge de l’ordinateur, et ne pas avoir paramétré les fichiers temporaires et l’historique pour que le navigateur vérifie que la version de la page la plus récente soit affichée.
De plus, par application de l’article 1er de l’ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers, ces derniers doivent effectuer » des constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les conséquences de fait ou de droit qui peuvent en résulter « , ce qu’ils n’ont pas fait en l’espèce.
Partant, elle estime que constats sont entachés de nullité et sont dénués de toute force probante et qu’en tout état de cause ils ne font état d’aucun dysfonctionnement ou non-conformité majeurs qui lui seraient imputables et qui n’auraient pas été corrigés dans un délai raisonnable.
Elle conclut en affirmant que le constat qu’elle produit en réponse n’est pas le fruit d’une mise en scène et que l’huissier instrumentaire a respecté les mesures techniques préalables permettant de garantir la fiabilité de ses constatations.
La SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car rétorquent que la norme Afnor invoquée au demeurant non produite au débat n’est ni une loi ni une disposition règlementaire et ajoutent que les constats qu’elles produisent sont totalement conformes à ladite norme.
Elles soulèvent en retour, pour la première fois en appel, la nullité du procès-verbal de constat du 20 janvier 2022 établi à la demande de la société Be Ware Informatique, faisant valoir qu’il est le fruit d’une mise en scène orchestrée par cette dernière ayant pour but de démontrer que les dysfonctionnements ont disparu, alors que l’huissier a établi son procès-verbal de constat en lien, en visio sur teams, avec la responsable projet de la société Be Ware Informatique, qui après avoir feint de rechercher les sites internet des sociétés Lanie 02 et Optimise Car par le moteur de recherche Google, s’est ensuite connecté sur l’intranet grâce aux codes d’administration de l’interlocuteur de la société Be Ware Informatique, sans qu’il soit nullement démontré que cet intranet est également accessible aux sociétés Lanie 02 et Optimise
Car, en suivant les instructions données par Be Ware Informatique pour feindre de constater que les sites seraient parfaitement fonctionnels.
La cour rappelle que les preuves doivent avoir été recueillies loyalement et qu’il ressort de l’article 1er de l’ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers de justice applicable jusqu’au 31 décembre 2021, et de l’article 1er de l’ordonnance 2016-728 du 2 juin 2016 relative au statut des commissaires de justice applicable à compter du 1er janvier 2022, qu’ » Ils peuvent, commis par justice ou à la requête de particuliers, effectuer des constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les conséquences de fait ou de droit qui peuvent en résulter. Sauf en matière pénale où elles n’ont valeur de simples renseignements, ces constatations font foi jusqu’à preuve contraire. »
Au sens de cet article, est une constatation purement matérielle toute situation personnellement constatée par l’huissier de justice au moyen de ses sens, en sa qualité de tiers neutre, indépendant et impartial.
Pour sécuriser le caractère probatoire des constats sur internet la norme AFNOR NF Z 67-147 du 11 septembre 2010 décrit le mode opératoire de l’établissement de constat sur Internet effectué par huissier de justice, à savoir la description précise du matériel utilisé, la mention de l’adresse IP de connexion, la désactivation de la connexion par serveur Proxy et la suppression de l’ensemble des fichiers temporaires stockés sur l’ordinateur ayant servi aux opérations de constat, et exige que le constat contienne une copie du code source de la page depuis lequel est réalisé le constat.
Cette norme, qui n’a pas de caractère règlementaire, constitue toutefois un recueil de bonnes pratiques des huissiers.
*Sur la demande de nullité du constat du 22 janvier 2022 produit par la société Be Ware Informatique :
Ce constat a été réalisé par Fabienne Laval, huissier de justice, qui a fait des constatations en présence de Mme Dehove responsable projet, en communication Teams, ce qui signifie que cette dernière a assisté, à distance grâce au système de visio-conférence, aux opérations de l’huissier.
L’huissier a réalisé, au moyen d’un ordinateur connecté au serveur informatique de l’étude, des constatations purement matérielles relatives aux deux sites, d’une part leur visibilité et leur fonctionnement côté public en utilisant le moteur de recherche Google et d’autre part leur fonctionnement du côté administration du site (intranet) en y accédant avec l’identifiant et les codes d’accès que Mme Dehove lui a communiqués.
L’huissier a sécurisé son constat internet en indiquant la description précise du matériel utilisé, la mention de l’adresse IP de connexion, la désactivation de la connexion par serveur Proxy et la suppression de l’ensemble des fichiers temporaires stockés sur l’ordinateur ayant servi aux opérations de constat, ainsi qu’en adjoignant une copie du code source de la page depuis laquelle est réalisé le constat.
Il n’est pas prouvé que le constat serait le fruit d’un montage, l’huissier n’indiquant à aucun moment que l’ordinateur utilisé était contrôlé par une tierce personne.
Dès lors, il n’y a pas lieu d’annuler ce constat qui ne souffre d’aucune irrégularité et qui fait foi, jusqu’à preuve contraire, des constats purement matériels réalisés par l’huissier sur la visibilité et le fonctionnement des deux sites côté public et leur fonctionnement côté administration du site lorsqu’on y accède grâce aux codes d’accès détenus par Mme Dehove.
La cour en appréciera la portée dans le cadre des demandes au fond.
*Sur la demande de nullité des constats produits par les sociétés Optimise Car et Lanie 02 des 30 novembre 2020 et 2 juillet 2021 :
Le premier juge n’a pas répondu à la demande de la société Be Ware Informatique de voir écarter ces deux constats.
Le constat du 30 novembre 2020 :
Ce constat a été établi par huissier de justice, au siège de la société Lanie 02, en présence de L. M. représentant de la société Lanie 02 et R. R., représentant la société Optimise Car.
L’huissier a recueilli les doléances des requérants qui se plaignent du fait qu’en raison de la crise sanitaire M. R. a accepté de repousser le délai de livraison au 26 novembre 2020 mais que les sites ne sont toujours pas opérationnels et ne répondent pas à leurs attentes. Ils lui déclarent que ne pouvant utiliser les sites depuis le mois de mai ils subissent une importante perte d’exploitation et lui demandent de réclamer le montant de la facture réglée en décembre 2019 soit 18018 euros.
Elle constate, concernant le site optimise-car.fr qu’en tapant sur internet » Optimise Car » aucun site n’apparaît mais que le domaine » optimise-car.fr » est enregistré.
Elle ajoute que M. R. lui remet deux copies d’écran du site » Optimise Car » qu’il indique ne pas répondre à leurs attentes.
Elle constate que M. M. consulte devant elle le site actuel et le site en construction de la société Lanie 02 et réalise des copies écran » lesquelles parlent d’elles-mêmes ».
La cour estime que le simple fait que le constat ne soit pas conforme à la norme AFNOR susvisée ne constitue pas une irrégularité entraînant sa nullité du constat.
Le constat du 2 juillet 2021 :
Ce constat a été établi par Christophe Marque, huissier de justice, qui s’est rendu au siège de la société Lanie 02, en présence de L. M. et R. R., responsable d’exploitation pour Optimise Car.
L’huissier a fait des constats relatifs aux manques ou insuffisances des fonctionnalités du site lanie.fr dont se plaignent les requérants concernant les points suivants :
-absence de présentation commerciale dans la forme du mail d’une demande de devis
-manque à côté de chacune des 4 agences répertoriées en page d’accueil, du logo des marques que chacune commercialise,
-impossibilité dans le cadre de la maintenance d’ajouter une balise HTML dans le header de la page d’accueil,
-choix des polices depuis la page d’administration est limité à 19 styles utilisées en traitement de texte de base,
-la fonction système étoiles avec le nombre de votes sur les avis clients Google n’existe pas,
-les photos des cartes repérant les quatre agences sont coupées en grande partie par un cadre blanc,
-aucune fonction alerte n’existe pour avertir un visiteur d’un réapprovisionnement, d’un véhicule spécial,
-absence d’outil de trafic, référencement, pas d’indicateurs de rédaction SAO,
-absence de BOT ou de messagerie instantanée à l’instar d’autres sites internet,
-absence de vidéo à 360° des véhicules,
-absence d’indication de distance des véhicules proposés par rapport aux clients,
-pas d’acceptation par les internautes de la RGPD,
-les hyperliens de téléphonie ne sont pas fonctionnels,
-la société Lanie 02 souhaite que l’on puisse choisir qu’une seule marque à la fois alors que sur la page d’accueil du site il est possible de sélectionner plusieurs marques de véhicules.
Concernant le site optimisecar.fr, M. R. lui a déclaré que les dysfonctionnements et insuffisances précédemment constatés sont résolus mais qu’il rencontre un problème dans le logiciel de facturation conçu par Be Ware Informatique une facture présentée, du 25 juin 2021, payée par carte bancaire depuis le site, qui comprend une réduction de 50 euros au titre d’une carte cadeau, comportant des erreurs.
La cour estime que le simple fait que le constat ne soit pas conforme à la norme AFNOR AFNOR NF Z 67-147 du 11 septembre 2010 susvisée ne constitue pas une irrégularité entraînant la nullité du constat.
Par ailleurs, les deux huissiers n’ont pas donné leur avis sur les conséquences de fait ou de droit qui pouvaient résulter de leurs constats. La société Be Ware Informatique se verra donc déboutée de ses demandes de nullité des deux constats produits par les sociétés Lanie 02 et Optimise Car. La cour en appréciera la portée dans le cadre des demandes au fond.
Sur la demande de résolution des contrats de fourniture de sites internet et des contrats de maintenance :
La SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car demandent que la résolution des contrats soit prononcée en application des articles 1226 et suivants du code civil. Les appelantes se fondent sur les deux procès-verbaux qu’elles ont fait dresser par huissier et sur les mails échangés pour démontrer la grave inexécution des obligations contractuelles de la SARL Be Ware Informatique, et notamment de son obligation de délivrance conforme au titre de l’article 1353 du code civil, les sites n’étant selon elles toujours pas exploitables.
La SARL Be Ware Informatique réplique que les sociétés Lanie 02 et Optimise Car ont accepté la mise en ligne des sites Internet au mois de décembre 2020, reconnaissant ainsi qu’ils étaient fonctionnels et aptes à répondre à leurs besoins, en attestent les fréquentations des sites, les demandes de contact, de devis et les commandes. Par ailleurs les clientes ont invoqué des griefs qui ne sont que des prestations non comprises au contrat ou qui n’étaient pas des dysfonctionnements majeurs et qui ont été rapidement résolus. Elle indique que de ce fait les sociétés n’apportent pas la preuve de la prétendue inexécution contractuelle, et n’a d’ailleurs pas adressé de courrier de mise en demeure préalablement à la décision de résolution. Elle demande ainsi à ce que soit confirmé le jugement ayant prononcé la résiliation des contrats aux torts exclusifs des appelantes qui n’ont pas réglé les factures de maintenance, en l’absence de tout manquement de sa part à ses obligations de délivrance conforme.
La cour rappelle qu’aux termes des articles 1227 à 1230 du code civil, en cas d’inexécution du contrat,
-la résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice,
-le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution du contrat ou ordonner l’exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts,
-la résolution met fin au contrat. La résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l’assignation en justice. Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l’exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l’intégralité de ce qu’elles se sont procuré l’une à l’autre. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat, il n’y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas la résolution est qualifiée de résiliation,
-la résolution n’affecte ni les clauses relatives au règlement des différends, ni celles destinées à produire effet même en cas de résolution, telles les clauses de confidentialité et de non-concurrence.
Seule la résolution unilatérale exige une mise en demeure préalable, pas la résolution demandée en justice. Le juge ne peut prononcer la résolution du contrat que lorsque l’inexécution est suffisamment grave.
La cour constate que les deux sociétés clientes fondent leur demande de résolution sur les deux constats qu’elles produisent ainsi que les mails échangés entre le 5 janvier et le 24 février 2021.
Or ces deux constats sont insuffisants à rapporter la preuve des manquements graves de la société Be Ware Informatique qu’elles invoquent à savoir le fait que les deux sites seraient inexploitables depuis leur livraison définitive.
En effet le premier constat, dans lequel l’huissier se borne à recueillir les doléances les clientes et les copies d’écran réalisées par ces dernières des sites en construction, est antérieur à la livraison définitive des sites par la société Be Ware Informatique et ne saurait donc fait la preuve de dysfonctionnements postérieurs.
Le second constat qu’elles produisent ne fait pas état de dysfonctionnements majeurs qui rendraient les sites inexploitables. Au demeurant concernant le site optimise-car.fr les sociétés ne se plaignent plus que d’un problème de facturation indiquant que tous les autres problèmes ont été résolus.
De plus ce constat est contredit par celui produit par la société Be Ware Informatique qui fait état du parfait fonctionnement des deux sites tant côté public que côté administrateur étant précisé pour cette seconde partie que les deux sociétés n’invoquent pas une limitation de leurs droits d’accès au back office ou de demande d’ouverture de droits d’accès à certaines fonctionnalités du back office qui leur aurait été refusée.
Le constat du 2 juillet 2021 est également contredit par la note technique datée du 26 janvier 2022 de la société GM Consultant conseil versée aux débats par la société Be Ware Informatique qui rappelle que la société Be Ware Informatique a développé des sites internet et de gestion pour les sociétés Lanie et Optimise Car qui n’ont pas fourni de cahiers des charges et qui conclut son rapport en indiquant :
-les projets ont été développés conformément aux devis émis par la société Be Ware Informatique et aux maquettes validées par les clientes. Les sites ont été livrés, testés au cours d’une phase de recette par les deux clientes puis mis en ligne à leur demande après validation ;
-les griefs techniques sont totalement infondés et font quasi-exclusivement référence à des demandes hors périmètre contractuel,
-les sites ont été développés par Be ware conformément à ses engagements et sont parfaitement fonctionnels, en effet les statistiques versées permettent de dénombrer respectivement plus de 13000 et 43000 visites sur les sites Optimise Car et Lanie en 2021 ainsi que 158 demandes de contact, 50 demandes de devis et 35 commandes, qui ont nécessairement permis de générer du chiffre d’affaires pour ces sociétés.
Il ressort plus précisément de ce rapport qu’après étude des échanges de mails les deux sites ont été mis en ligne le 22 décembre 2020 après accord des clientes après une phase de recette qui a donné lieu à des correctifs par la société Be Ware. Les sociétés font valoir que cette analyse ne se fonde que sur des mails isolés et équivoques. Cependant la cour considère que l’accord des sociétés pour la mise en ligne au public à compter du 22 décembre 2020 est suffisamment démontrée par les mails échangés qui ne sont pas équivoques, ce consentement étant renforcé par le fait que les clientes ont accepté de conclure un contrat de maintenance et d’hébergement à compter de cette date.
A partir de cette livraison, elles ne pouvaient donc pas exiger de modifications des fonctionnalités résultant de la conception des sites mais seulement la correction des dysfonctionnements éventuels.
Or il ressort de l’étude technique que les griefs invoqués par les deux sociétés lors du constat d’huissier du 2 juillet 2021 et qui sont repris dans le courrier de mise en demeure, soit ne sont pas fondés car correspondent à des demandes de fonctionnalités nouvelles pour ce qui concerne la plupart des griefs, soit ne sont pas fondés car les fonctionnalités étaient conformes avant mise en ligne ou bien encore ont été corrigées comme le montre le constat d’huissier dressé à la demande de la société Be Ware (erreur de facturation qui est une erreur dans l’affichage-et non la facturation- des montants récapitulatifs du prix dans la facture) soit enfin constitue un grief particulièrement mineur (photos des agences tronquées) qui ne s’est pas reproduit étant lié à la configuration de tests.
La cour constate que cette analyse n’est pas sérieusement combattue par les deux sociétés.
Aucun manquement par la société Be Ware à ses obligations essentielles découlant des contrats de création des sites n’étant démontré, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté les sociétés Lanie et Optimise Car de leur demande de résolution des contrats.
Sur la demande en paiement des prestations de maintenance et d’hébergement au titre de l’année 2021/2022 et sur la résiliation des contrats de maintenance et d’hébergement :
C’est à juste titre qu’en exécution du contrat le premier juge a condamné la société Lanie à régler à la société informatique la facture de 1536 euros émise le 1er décembre 2021 au titre de l’hébergement et de la maintenance du site Lanie.fr du 22 décembre 2021 au 21 décembre 2022 et a condamné la société Optimise Car payer la facture de 552 euros émise le 1er décembre 2021 au titre de l’hébergement et de la maintenance du site Optimise.car du 22 décembre 2021 au 21 décembre 2022.
Le fait de ne pas régler les prestations de maintenance et d’hébergement constitue une violation grave des contrats et justifie, comme l’a fait le premier juge, de prononcer la résiliation des contrats de maintenance et d’hébergement des deux sites aux torts exclusifs des deux clientes.
Sur la demande de dommages et intérêts de la société Be Ware Informatique :
La SARL Be Ware Informatique demande à la cour des dommages et intérêts complémentaires au titre d’un gain manqué dans la mesure où si l’appelant n’avait pas prononcé la rupture abusive des relations contractuelles, elle aurait facturé pendant une durée d’au-moins six ans des prestations d’hébergement et de maintenance des sites Internet, soit 9.216 euros TTC pour la société Lanie 02 et 3.312 euros TTC concernant Optimise Car.
La SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car s’y opposent au motif que cette demande est nouvelle en appel et que l’intimé ne saurait prétendre à une perte de gain qui ne repose sur aucune obligation contractuelle.
La cour constate que les sociétés Lanie 02 et Optimise Car ne soulèvent pas l’irrecevabilité de ces demandes et qu’en tout état de cause ces prétentions ont bien été présentées devant le premier juge qui a omis de statuer. La cour doit en conséquence en examiner le bien-fondé.
La cour rappelle qu’aux termes de l’article 1231-2 du code civil les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé ; qu’il ressort de l’article 1231-3 que le débiteur n’est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qui pouvaient être prévus lors de la conclusion du contrat, sauf lorsque l’inexécution est due à une faute lourde ou dolosive et l’article 1231-4 dispose que dans le cas même où l’inexécution du contrat résulte d’une faute lourde ou dolosive, les dommages et intérêts ne comprennent que ce qui est une suite immédiate et directe de l’inexécution.
Les contrats d’hébergement et de maintenance comprenant la mise à jour des deux sites internet prévoient que leur durée est d’un an, renouvelable par tacite reconduction pour une durée d’un an sauf dénonciation par lettre recommandée au plus tard deux mois avant la date anniversaire du contrat.
La société Be Ware Informatique ne démontre donc pas avoir été privée d’un gain durant 6 ans, le préjudice qu’elle invoque, à savoir la perte de chance de voir continuer le contrat après sa résiliation, étant hypothétique dès lors qu’il pouvait être résilié tous les ans sans motif moyennant un préavis de deux mois.
Ses demandes seront donc rejetées, étant observé qu’elle n’a pas sollicité le paiement de prestations de maintenance et d’hébergement qu’elle aurait exécutées à compter du 22 décembre 2022 jusqu’au prononcé de la résiliation du contrat.
Sur la demande de dommages et intérêts des sociétés Lanie 02 et Optimise Car :
Les deux sociétés font valoir que le caractère inexploitable des sites les empêche de poursuivre leur activité principale du fait des manquements de la SARL Be Ware Informatique, ce qui lui cause un préjudice certain.
La société Be Ware réplique que l’appelant ne justifie ni du principe, ni du montant de sa réclamation financière, ni encore du caractère actuel, direct et certain du préjudice d’exploitation allégué. Elle invoque à cet égard l’article 1229 alinéa 3 du code civil afin de considérer que l’appelant ne peut demander le remboursement des sommes versées dans la mesure où les sites internet sont fonctionnels.
Aucun manquement de la société Be Ware Informatique n’étant retenu par la cour, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté les sociétés de leur demande de dommages et intérêts.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :
Les appelantes succombant à l’instance seront condamnées à en supporter les dépens et frais hors dépens en appel.
Le jugement sera confirmé de ces chefs.
DECISION
La cour, statuant contradictoirement et par arrêt rendu publiquement par mise à disposition au greffe,
Déboute les SAS Lanie 02 et Optimise Car de leur demande d’annulation du jugement entrepris,
Les déboute de leur demande d’annulation du constat du 22 janvier 2022 produit par la SARL Be Ware Informatique,
Déboute la SARL Be Ware Informatique de ses demandes d’annulation des constats d’huissier des 30 novembre 2020 et 2 juillet 2021 produits par la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute la SARL Be Ware Informatique de ses demandes de dommages et intérêts au titre d’un gain manqué,
Condamne in solidum la SAS Lanie 02 et la SAS Optimise Car à payer à la SARL Be Ware Informatique une somme de 7.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Les condamne in solidum aux dépens d’instance.
La Cour : Odile Grévin (présidente de chambre), Florence Mathieu (présidente de chambre), Valérie Dubaele (conseillère), Diénéba Koné (greffière)
Avocats : Me Sarah Delval, Me Imad Tany, Me Amandine Gaubour, Me Nicolas Herzog
Source : Legalis.net
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