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Jurisprudence : E-commerce

mardi 09 janvier 2007
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Tribunal de grande instance de Nanterre 6ème chambre Jugement du 15 décembre 2006

UFC Que Choisir / Sony

e-commerce

FAITS

Ayant constaté l’existence de pratiques estimées préjudiciables à la collectivité des consommateurs sur le marché du téléchargement payant de la musique en ligne analysées en des agissements de tromperie et de subordination de vente au sens des articles L 213-1 et L 122-1 du code de la consommation, l’association Union Fédérale des Consommateurs – Que Choisir, par abréviation et ci-après UFC Que Choisir, a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Nanterre la société anonyme Sony France et la société de droit étranger Sony United Kingdom Ltd, par abréviation et ci-après Sony France et Sony United Kingdom Ltd, par actes des 10 et 18 février 2005 à l’effet de voir enjoindre, sous exécution provisoire et avec insertion d’un communiqué judiciaire, de : – cesser d’utiliser des mesures techniques de protection incompatibles avec les baladeurs numériques autres que ceux de la marque Sony dans les 8 jours de la signification de cette décision sous astreinte de 10 000 € par jour de retard – et dans le même délai, de faire figurer une mention sur son site internet ainsi que sur les emballages des baladeurs numériques de la gamme commercialisée par elle, informant le consommateur de la restriction d’usage affectant ce matériel qui ne permet pas l’écoute de fichiers musicaux téléchargés à partir de n’importe quel site légal de téléchargement.

L’association requérante sollicite encore la condamnation des défenderesses au paiement de 30 000 € en réparation du préjudice subi par l’intérêt collectif des consommateurs outre 4000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du ncpc et les entiers dépens.

La clôture de l’instruction est intervenue le 16 octobre 2006.

PRETENTIONS ET MOYENS

Vu les conclusions récapitulatives signifiées le 21 juillet 2006 et déposées au greffe le 25 juillet suivant, par lesquelles UFC Que Choisir prie le tribunal de :
– vu les articles L 421-1, L 421-2, L 213-1, L 122-1 et L 111-1 du code de la consommation,
– vu les articles 1353, 1604 et 1641 du code civil,
– déclarer l’UFC Que Choisir recevable et bien fondée en ses demandes,
– constater que les œuvres musicales commercialisées en ligne sur le site internet http://www.connect-europe.com ne peuvent être lues par les baladeurs numériques mis sur le marché à l’exception des baladeurs commercialisés par la société Sony France,
– constater que la société Sony United Kingdom Ltd n’informe pas suffisamment les consommateurs de cette restriction d’usage,
– dire et juger que cette absence d’information loyale et complète constitue une tromperie sur les qualités substantielles et l’aptitude à l’emploi des fichiers musicaux vendus,
– constater que le baladeur numérique NW HD1 commercialisé par la société Sony France ne permet pas l’écoute des œuvres musicales téléchargées depuis les sites de téléchargement légaux accessibles en France autres que le site Connect,
– constater que la société Sony France n’informe pas les consommateurs sur cette restriction d’usage du produit,
– dire et juger que cette absence d’information constitue une tromperie sur les qualités substantielles et l’aptitude à l’emploi du produit vendu,
– constater que l’écoute, sur un lecteur portable, des fichiers musicaux vendus sur le site internet géré par la société Sony United Kingdom Ltd n’est possible qu’avec les baladeurs numériques commercialisés par la société Sony France,
– dire et juger que ces agissements constituent une vente liée au sens de l’article L 122-1 du code de la consommation,
– enjoindre à la société Sony United Kingdom Ltd, sous astreinte de 10 000 € par jour de retard, une fois expiré un délai de 8 jours à compter de la signification de la décision à intervenir, de cesser d’utiliser des mesures techniques de protection incompatibles avec les baladeurs numériques autres que ceux de la marque Sony,
– faire injonction à la société Sony France de faire figurer dans le même délai, une mention informative, sur les emballages des baladeurs numériques de la gamme Net WM qu’elle commercialise et sur son site internet, indiquant que ses baladeurs numériques ne permettent pas l’écoute des fichiers musicaux téléchargés depuis l’ensemble des sites de téléchargement légaux à l’exception des fichiers commercialisés sur le site Connect,
– ordonner une diffusion d’un communiqué judiciaire dans des conditions satisfaisantes, c’est-à-dire sur la page d’accueil du site internet http://www.connect-europe.com et dont le texte pourrait être le suivant :
Par décision en date du…, le tribunal de grande instance de Nanterre a constaté, à la requête de l’UFC Que Choisir, que la société Sony France a commis le délit de tromperie sur les qualités substantielles et l’aptitude à l’emploi des baladeurs numériques de marque Sony en n’informant pas explicitement les consommateurs de l’impossibilité pour les baladeurs NW HD1 de permettre l’écoute des œuvres musicales téléchargées depuis les sites de téléchargement légaux à l’exception du site http://www.connect-europe.com.
En conséquence, le tribunal a enjoint à la société Sony France de faire figurer sur les emballages des baladeurs numériques de la gamme Net WM qu’elle commercialise et sur son site internet, une mention informative alertant le consommateur sur cette restriction d’usage.
A la requête de l’UFC Que Choisir, le tribunal a en outre enjoint à la société Sony United Kingdom Ltd exploitant le site internet Connect de cesser d’utiliser des mesures techniques de protection intégrées aux œuvres musicales commercialisées en ligne, empêchant la lecture de ces œuvres sur l’ensemble des baladeurs numériques existant sur le marché à l’exception des baladeurs numériques de marque Sony.
Le présent communiqué est diffusé pour informer les consommateurs. »
– dire et juger que cette insertion devra figurer, une fois expiré un délai de 8 jours à compter de la signification de la décision, pendant une durée de trois mois, à peine de même astreinte de 10 000 € par jour pour tout manquement constaté,
– condamner conjointement et solidairement les sociétés Sony United Kingdom Ltd et Sony France à payer à l’UFC Que Choisir la somme de 30 000 € en réparation du préjudice indûment porté à la collectivité des consommateurs,
– condamner conjointement et solidairement les sociétés Sony United Kingdom Ltd et Sony France à payer à l’UFC Que Choisir la somme de 4000 € au titre de l’article 700 du ncpc ainsi qu’aux entiers dépens,
– ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir,
– en tout état de cause, débouter les sociétés Sony United Kingdom Ltd et Sony France de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

Vu les conclusions récapitulatives signifiées le 1er septembre 2006 et déposées au greffe le même jour, selon lesquelles Sony France et Sony United Kingdom Ltd prient le tribunal de :
– vu la directive n°2001/29/CE du 22 mai 2001 et la loi transposition n°2006-961 du 1er août 2006,
– vu les articles L 213-1 et L 122-1 du code de la consommation,
– vu les articles 65 et suivants du ncpc,
– constater que les différences des formats de compression et des mesures techniques de protection sur le marché de la musique numérique sont parfaitement licites,
– constater que l’interopérabilité entre les fichiers musicaux proposés au téléchargement légal et les baladeurs numériques existant sur le marché n’est pas une donnée du marché à l’heure actuelle,
– sur les infractions de tromperie,
– dire et juger l’article L 213-1 du code de la consommation inapplicable aux faits reprochés à la société Sony United Kingdom Ltd, ne portant ni sur un produit, ni sur une marchandise, au sens des dispositions de cet article,
– rejeter, pour ce premier motif, les demandes de l’UFC Que Choisir formées de ce chef à l’encontre de la société Sony United Kingdom Ltd,
– pour le reste,
– constater que le consommateur désireux de télécharger un fichier musical sur le site Connect est dûment informé des modalités d’utilisation de ce fichier, notamment par le document intitulé « Conditions générales et contrat de licence utilisateur final de Connect »;
– dire et juger en toute état de cause, que l’impossibilité d’écouter sur tout baladeur numérique du marché les œuvres musicales téléchargées sur le site Connect n’affecte ni l’aptitude à l’emploi, ni une qualité substantielle de ces fichiers,
– constater en outre que l’élément intentionnel de l’infraction n’est pas caractérisé en l’espèce dans le chef de la société Sony United Kingdom Ltd,
– débouter en conséquence l’UFC Que Choisir de ses demandes tirées d’une prétendue tromperie de la société Sony United Kingdom Ltd,
– constater que l’information du consommateur désireux d’acheter un baladeur numérique NW HD1 est assurée sur l’emballage de ce baladeur par la mention de la liste de formats de compression que le baladeur peut lire ou avec lesquels il est compatible,
– dire et juger, en tout état de cause, que l’incapacité des baladeurs NW HD1 à lire des fichiers musicaux compressés selon un autre format protégé n’affecte ni l’aptitude à l’emploi, ni une qualité substantielle du baladeur,
– constater en outre que l’élément intentionnel de l’infraction n’est pas caractérisé en l’espèce dans le chef de la société Sony France,
– en conséquence, débouter l’UFC Que Choisir de ses demandes sur ce point,
– rejeter, de même, sa demande tendant à voir enjoindre à la société Sony France d’apposer une mention informative sur ses baladeurs NW HD1, qui ne sont plus commercialisés,
– déclarer irrecevables en ce qu’elles modifient l’objet de sa demande initiale et en tout cas mal fondées ses demandes additionnelles tendant à voir enjoindre à la société Sony France d’apposer une mention informative sur ses baladeurs de la gamme Net WM sur son site internet,
– sur l’infraction de subordination de vente,
– dire et juger l’article L 122-1 du code de la consommation inapplicable aux faits reprochés à la société Sony United Kingdom Ltd, ne portant ni sur la vente d’un produit, ni sur la prestation de service, au sens des dispositions de cet article,
– rejeter, pour ce premier motif, les demandes de l’UFC Que Choisir formées de ce chef à l’encontre de la société Sony United Kingdom Ltd,
– pour le reste,
– constater que la société Sony United Kingdom Ltd ne subordonne aucunement le téléchargement d’un fichier musical sur le site Connect à l’achat préalable ou concomitant d’un baladeur de marque Sony,
– dire et juger, par conséquent, que l’infraction de subordination de vente ou de prestation n’est pas constituée dans le chef de la société Sony United Kingdom Ltd,
– débouter, par conséquent, l’UFC Que Choisir de ses demandes sur ce point,
– constater que l’UFC Que Choisir tente de faire prononcer par le tribunal une injonction de cesser d’utiliser les mesures techniques de protection développées en toute légalité par la société Sony United Kingdom Ltd, alors que celles-ci sont nécessaires à la protection des auteurs et consacrées par la directive européenne n°2001/29/CE du 22 mai 2001 et la loi française de transposition,
– débouter, par conséquent, l’UFC Que Choisir de sa demande tendant à voir enjoindre à la société Sony United Kingdom Ltd de cesser d’utiliser des mesures techniques de protection spécifiques,
– rejeter ses demandes de dommages-intérêts, de publications et de condamnation sur le fondement de l’article 700 du ncpc,
– en tout état de cause,
– condamner l’UFC Que Choisir à payer à chacune des concluantes la somme de 5000 € au titre des dispositions de l’article 700 du ncpc,
– la condamner aux entiers dépens.

Le tribunal renvoie aux écritures des parties par application des dispositions des articles 455 et 753 du ncpc pour un exposé plus amplement détaillé de leur argumentation, dont l’essentiel sera repris à l’occasion de l’examen des moyens et des prétentions qui y sont articulés.

DISCUSSION

Ce litige a été introduit par une association dont il n’est pas discuté qu’elle est agréée pour défendre les consommateurs.

L’action est fondée sur les articles L 421-1 et 421-2 du code de la consommation aux termes desquels, une association agréée peut agir devant la juridiction civile en vue de voir enjoindre au défendeur, le cas échéant sous astreinte, toute mesure destinée à faire cesser des agissements constitutifs d’infractions pénales lésant l’intérêt collectif des consommateurs, accessoirement à une demande de réparation du préjudice direct ou indirect porté à ce dernier.

L’article L 421-1 du code de la consommation énonce en effet que : « Les associations régulièrement déclarées ayant pour objet statutaire explicite la défense des intérêts de consommateurs peuvent, si elles ont été agréées à cette fin, exercer les droits reconnus à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect collectif des consommateurs ».

L’article L 421-2 du même code édicte pour sa part que : « Les associations de consommateurs mentionnées à l’article L 421-1 et agissant dans les conditions précisées à cet article peuvent demander à la juridiction civile, statuant sur l’action civile, ou à la juridiction répressive, statuant sur l’action civile, d’ordonner au défenseur (défendeur) ou au prévenu, le cas échéant sous astreinte, toute mesure destinée à faire cesser des agissements illicites ou à supprimer dans le contrat ou le type de contrat proposé aux consommateurs une clause illicite ».

En l’espèce, il doit être précisément jugé du bien ou mal fondé du grief de tromperie institué par l’article L 213-1 du code de la consommation qu’UFC Que Choisir impute à Sony United Kingdom Ltd, exploitante de la plate-forme payante de téléchargement de musique en ligne dénommée Connect (http://www.connect-europe.com), ainsi qu’à Sony France appartenant au même groupe de sociétés, chargée de la distribution sur le marché français de baladeurs numériques dédiés (NW HD1 et aujourd’hui net WM – Network Walkman), seuls capables de lire les fichiers musicaux, téléchargés depuis le site de la première.

Il doit être également statué sur l’existence de pratiques de subordination de vente ou vente liée au sens de l’article L 122-1 du code de la consommation, qui selon la requérante, seraient mises en œuvre par Sony United Kingdom Ltd.

La possibilité de qualification pénale des actes incriminés étant établie, la demande est recevable.

1 – Généralités

Dans un souci de clarté spécifique à ce litige, le tribunal entend préciser le cadre juridique avant de procéder à la présentation des parties incriminées et au rappel des caractéristiques essentielles du secteur économique litigieux.

A – les parties du litige

L’UFC Que Choisir est une des plus importantes associations de consommateurs en France ; agréée pour la défense des consommateurs, elle veille précisément à ce que les produits offerts à la vente répondent aux attentes légitimes de ces derniers et dispose à cette fin d’une équipe d’ingénieurs qui réalisent régulièrement les tests nécessaires.

Sony France, filiale de la société japonaise Sony, commercialise en France différents types de matériels, notamment les lecteurs Net WM – Network Walkman et antérieurement, les baladeurs numériques NW HD1.

Sony United Kingdom, filiale du groupe Sony en Grande Bretagne en charge de l’exploitation du site internet « Sony Connect », propose au consommateur français le téléchargement payant de fichiers musicaux sous format Atrac 3 ; elle ne commercialise aucun baladeur sur le territoire français.

B – le secteur économique concerné

Il est constant, au vu des écritures de chaque partie et de l’ensemble des éléments fournis aux débats, soumis à l’appréciation du tribunal, que :
– le marché du téléchargement payant de musique en ligne est un marché naissant : s’il représente actuellement une faible partie du marché global de la musique (0,1% en 2004), il est prévu une forte croissance de ce secteur dans les prochaines années. Selon les prévisions les plus optimistes, dont celles du cabinet Jupiter Research, la musique numérique sur internet pourrait ainsi représenter en 2008, 5% des recettes du marché de la musique en Europe (cf. décision du conseil de la concurrence n°04-D-54 du 9 novembre 2004, p.1),
– la musique téléchargée est destinée à être transférée puis écoutée sur un ordinateur, à permettre au consommateur de graver ses propres CD, à être stockée et gérée sur l’ordinateur et enfin, à être transférée sur un baladeur numérique,
– la circulation des œuvres musicales téléchargées doit faire l’objet d’une compression selon divers formats pour en permettre le stockage et la circulation par internet,
– les techniques de compression utilisées sont le fruit de choix technologiques et qualitatifs ; elles permettent une restitution auditive de qualité variable, selon le format et le taux de compression adoptés : la Sony United Kingdom Ltd a ainsi développé, à l’occasion de la mise en place de son site Connect offrant plus d’un million de titres, un format de compression dénommé Atrac 3, et dans sa forme la plus récente, Atrac 3 + ; les principaux concurrents de ce format sont Microsoft et Apple avec WMA (protégé) et AAC,
– la mise à disposition des fichiers musicaux en ligne sur les sites légaux de téléchargement doit s’effectuer dans un cadre contractuel propre au respect des droits d’auteur et voisins ; ils sont ainsi dotés de mécanismes techniques de protection des droits d’auteur et voisins dits DRM (Digital Rights Management) associés à un format de compression. Ces mécanismes, développés en regard des dispositions de la directive européenne n°2001/29/CE du 22 mai 2001, transposée en droit français par la loi n°2006-961 du 1er août 2006, restreignent le champ d’utilisation des œuvres en deçà du périmètre du réseau domestique, lequel correspond au périmètre de la copie privée, et ce conformément aux droits négociés entre le producteur – la « maison de disques » – et le distributeur (la plate-forme de téléchargement),
– le silence conservé par la directive précitée sur les conditions de mise au point des mesures techniques de protection a mis les opérateurs concernés en présence d’un choix, soit coopérer techniquement pour développer une mesure technique de protection commune soit développer, de manière autonome, une mesure technique de protection spécifique à chaque offre de musique en ligne : les opérateurs ont choisi la seconde branche de cette alternative, ce qui a pour effet de limiter l’interopérabilité entre fichiers musicaux vendus en ligne et le matériel d’écoute par ailleurs commercialisé (baladeurs numériques),
– les formats de compressions MP3 (Mpeg 1 layer 3), WMA (non protégé) et WAV, utilisés dans le cadre des échanges dits Peer to Peer, ne sont assortis d’aucune mesure technique de protection de droits d’auteur et sont donc audibles par la plupart des appareils mis sur le marché,
– le format MP3 tend à devenir le format universel de compression de la musique dont il permet une distribution simple et efficace en ligne,
– il existe depuis juin 2006 des sites légaux de musique en ligne sans mesure technique de protection et donc lisible sur la plupart des baladeurs numériques du marché (plate forme Starzik).

C – le cadre juridique applicable

Les textes pertinents régissant la matière litigieuse sont les suivants :

L’article L 111-1 du code de la consommation : « Tout professionnel vendeur de biens ou prestataire de services doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service. »,

L’article L 213-1 du code de la consommation : « Est puni d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 37 500 € ou de l’une de ces deux peines seulement, qu’il soit ou non partie au contrat, quiconque aura trompé ou tenté de tromper le contractant, par quelque moyen ou procédé que ce soit, même par l’intermédiaire d’un tiers :
1° – sur la nature, l’espèce, l’origine, les qualités substantielles, la composition ou la teneur en principe utiles, de toute marchandise,
2° – soit sur la quantité des choses livrées, ou sur leur identité par la livraison d’une marchandise autre que la chose déterminée qui a fait l’objet d’un contrat,
3° – soit sur l’aptitude à l’emploi, les risques inhérents à l’utilisation du produit, les contrôles effectués, les modes d’emploi ou les précautions à prendre. »,

L’article L 122-1 du code de la consommation : « Il est interdit de (…) subordonner la vente d’un produit à l’achat d’une quantité imposée ou à l’achat concomitant d’un autre produit ou autre service, ainsi que de subordonner la prestation d’un service à celle d’un autre service ou à l’achat d’un produit (…) » précision étant faite que cette infraction se trouve pénalement sanctionnée par les dispositions de l’article R.121-13 du code de la consommation aux termes desquels : « Sont punis des peines d’amende prévues pour les contraventions de 5ème classe : (…) 2 « Les …. subordinations à conditions de ventes ou de prestations de services interdits par l’article L 122-1… »,

La directive 2001/29/CE du parlement européen et du conseil du 22 mai 2001 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information (Journal officiel n°L 167 du 22/06/2001 p.0010-0019),

• considérant 54 du préambule : « (…) Dans le cadre d’un environnement où les réseaux occupent une place de plus en plus grande, les différences existant entre les mesures techniques pourraient aboutir, au sein de la communauté à une incompatibilité des systèmes. La compatibilité et l’interopérabilité des différents systèmes doivent être encouragées. Il serait très souhaitable que soit encouragée la mise au point de systèmes universels. »,
• article 6.1 : « Les Etats membres prévoient une protection juridique appropriée contre le contournement de toutes mesures techniques efficaces (…). On entend par « mesures techniques » toute technologie, dispositif ou composant, qui (…) est destiné à empêché ou à limiter, en ce qui concerne les œuvres ou autres objets protégés, les actes non autorisés par le titulaire d’un droit d’auteur ou d’un droit voisin du droit d’auteur (…). Les mesures techniques sont réputées efficaces lorsque l’utilisation d’une œuvre protégée (…) est contrôlée par les titulaires du droit grâce à l’application d’un code d’accès ou d’un procédé de protection (…),
• article 6.3 : « …on entend par « mesures techniques » toute technologie, dispositif ou composant qui dans le cadre normal de son fonctionnement, est destiné à empêcher ou à limiter, en ce qui concerne les œuvres ou autres objets protégés, les actes non autorisés par le titulaire d’un droit d’auteur ou d’un droit voisin du droit d’auteur prévu par la loi, ou du droit sui generis prévu au chapitre III de la directive 96/9/CE. Les mesures techniques sont réputées efficaces lorsque l’utilisation d’une œuvre protégée, ou celle d’un autre objet protégé, est contrôlée par les titulaires du droit grâce à l’application d’un code d’accès ou d’un procédé de protection, tel que le cryptage, le brouillage ou toute autre transformation de l’œuvre ou de l’objet protégé ou d’un mécanisme de contrôle de copie qui atteint cet objet de protection. »,

• article 8.1 : « Les Etats membres prévoient des sanctions et des voies de recours appropriées contre les atteintes aux droits et obligations prévus par la directive et prennent toutes les mesures nécessaires pour en garantir l’application. Ces sanctions sont efficaces, proportionnées et dissuasives. »,

La loi n°2006-961 du 1er août 2006 transposant cette directive en droit français :

• article L 331-5 du code de la propriété intellectuelle : « Les mesures techniques efficaces destinées à empêcher ou à limiter les utilisations non autorisées par les titulaires du droit d’auteur (…) d’une œuvre (…) sont protégées dans les conditions prévues au présent titre (…). Les mesures techniques ne doivent pas avoir pour effet d’empêcher la mise en œuvre effective de l’interopérabilité, dans le respect du droit d’auteur. Les fournisseurs de mesures techniques donnent l’accès aux informations essentielles à l’interopérabilité dans les conditions définies aux articles L 331-6 et L 331-7. »,
• article L 335-3-1 du code de la propriété intellectuelle : « Est puni de 3750 € d’amende le fait de porter atteinte sciemment, à des fins autres que la recherche, à une mesure technique efficace telle que définie à l’article L 331-5, afin d’altérer la protection d’une œuvre par un décodage, un décryptage, ou tout autre intervention personnelle destinée à contourner, neutraliser ou supprimer un mécanisme de protection ou de contrôle (…). »,

• article L 331-7 du code de la propriété intellectuelle : « Tout éditeur de logiciel, tout fabricant de système technique et tout exploitant de service, peut en cas de refus d’accès aux informations essentielles à l’interopérabilité, demander à l’autorité de régulation des mesures techniques de garantir l’interopérabilité des systèmes et des services existants, dans le respect des droits des parties, et d’obtenir du titulaire des droits sur la mesure technique les informations essentielles à cette interopérabilité… »,

En tout état de cause, aucune disposition légale ou réglementaire n’impose une interopérabilité totale entre les fichiers musicaux et les baladeurs numériques : les mesures techniques de protection sont autorisées par la loi sous certaines conditions dans le souci de préserver un équilibre entre le droit des ayant droits d’instaurer des mesures techniques de protection sur les œuvres qu’ils commercialisent et la faculté du consommateur à réaliser des copies privées des œuvres.

2 – Au fond

A – sur la caractérisation des agissements illicites de tromperie et de subordination de ventes

– sur les délits de tromperie

La requérante fait principalement grief aux défenderesses de s’abstenir de préciser clairement la double restriction d’usage affectant la circulation des œuvres musicales téléchargées à partir du site légal Connect et de fait, d’induire le consommateur en erreur sur les qualités substantielles du service et du produit qu’il achète. Elle précise que les mesures techniques de protection des droits intégrées aux œuvres musicales commercialisées en ligne par Sony United Kingdom Ltd n’en autorisent pas le transfert, et l’écoute sur l’ensemble des baladeurs numériques existant sur le marché et qu’à l’inverse, les baladeurs numériques mis en vente par Sony France ne permettent pas de lire les œuvres musicales téléchargées depuis n’importe quelle plate-forme de téléchargement.
Elle ajoute pouvoir affirmer, après vérification des mentions portées sur les emballages et modes d’emploi du baladeur commercialisé par Sony France, que si les formats de compression compatibles y sont précisés, il n’en est pas de même des mesures de protection des œuvres propres à chaque plate-forme de téléchargement et des restrictions d’usage qui en découlent. Elle observe enfin que la construction complexe du site internet Connect n’informe pas davantage ce même consommateur du fait que les œuvres téléchargées en ligne à partir de ce site ne peuvent être écoutées que par des baladeurs numériques appartenant à la gamme Sony.

Les sociétés défenderesses s’opposent aux demandes dirigées contre elles en observant que celles-ci tendent en réalité, sous couvert d’une meilleure information du consommateur, à obtenir en justice le respect d’une obligation d’interopérabilité entre les plates-formes musicales et les lecteurs de musique numérique de toutes marques ; elles soulignent que cette interopérabilité totale n’existe aujourd’hui ni en droit ni en fait et qu’il n’appartient pas à l’autorité judiciaire de se prononcer sur ce point.

Elles écartent en premier lieu l’application au cas d’espèce des dispositions de l’article L 213-1 du code de la consommation, en soutenant que ce litige ne concerne pas des marchandises et donc des biens mobiliers corporels susceptibles de préhension mais uniquement la concession d’une licence sur un droit incorporel – une œuvre musicale.

S’il est vrai qu’en droit l’infraction de tromperie s’applique aux choses mobilières qui se comptent, se pèsent et se mesurent, ce qui exclut par hypothèse l’application des dispositions précitées aux contrats relatifs à des biens incorporels tels les droits d’auteur, ou encore un brevet d’invention, elle concerne également les prestations de service, par application des dispositions combinées des articles L 216-1 et L 213-1 du code de la consommation.

En l’espèce, le contrat formé entre le consommateur et Sony United Kingdom Ltd ne porte nullement, au vu des stipulations des articles 8 et 10 des conditions générales et du contrat de licence utilisateur final de Connect, sur une licence de droits intellectuels mais sur la fourniture d’un fichier musical conférant un strict droit d’usage au contractant : cette mise à disposition matérielle de fichiers musicaux est une prestation au sens des dispositions légales susvisées, le contrat de prestation de services ayant toujours et d’abord pour objet une activité réalisée par un professionnel pour le compte d’un contractant, ici le consommateur, sans nécessairement porter sur l’échange d’un bien ou d’un produit.

Pour ces raisons, le moyen de défense tiré de l’inapplicabilité des dispositions légales précitées sera écarté.

Les sociétés défenderesses contestent en second lieu les agissements illicites qui leur sont reprochés et imputés : elles relèvent que l’information fournie aux consommateurs sur l’emballage du baladeur NW HD1 comme dans les clauses du contrat conclu par les internautes téléchargeant des fichiers musicaux à partir du site Connect est suffisante, claire et accessible.

Le délit de tromperie exige la caractérisation d’un élément matériel et d’un élément intentionnel défini comme étant la volonté d’induire le consommateur en erreur, laquelle s’apprécie au demeurant différemment selon que la personne incriminée est un simple particulier ou comme dans les circonstances propres à la présente espèce, un professionnel.

L’analyse attentive de l’ensemble des éléments versés aux débats ne permet pas de considérer que Sony United Kingdom Ltd, exploitante du site de téléchargement Connect et Sony France, ayant commercialisé en France les baladeurs numériques NW HD1 et y commercialisant actuellement les baladeurs Net WM-Network Walkman, respectent l’une et l’autre ces prescriptions légales en délivrant à leur contractant une information claire, précise et immédiatement accessible sur l’impact réel des mesures de protection intégrées aux œuvres musicales commercialisées et aux baladeurs numériques dédiés distribués sur le territoire national.

L’article 3.3 des conditions générales du contrat de licence utilisateur final de Connect stipule en effet que : « Il vous incombe de vérifier que votre système répond à la configuration requise pour recevoir et utiliser la musique Connect (et exercer les droits y afférents en vertu des présentes conditions) avant de passer votre commande. La dernière configuration requise en vigueur se trouve dans notre rubrique FAQ (cliquez ici : http://www.connect-europe.com/support) et peut être consultée durant le processus d’inscription à Connect en cliquant sur le lien « Configuration requise » (voir la boite de dialogue important ! « à droite de la fenêtre ») ».

Si le consommateur semble, au vu de ces indications, avisé de l’existence d’un système de protection et de l’éventuelle incompatibilité de la prestation acquise avec certains supports, force est de dire que cette information, au demeurant très allusive, est de surcroît d’un accès indirect puisqu’elle oblige le consommateur à consulter un lien (http://www.connect-europe.com/support) ; le prestataire de service incriminé se prive de facto de la preuve qui lui incombe du fait de sa qualité de professionnel, de ce qu’il a personnellement et directement satisfait à l’obligation d’information pesant sur lui et qui porte sur les caractéristiques essentielles du service convoité par le consommateur.

L’article 5.2 de ces mêmes conditions générales ne mentionne pas davantage, de façon expresse et précise, que le fichier de compression Atrac ne peut être décrypté que par les baladeurs de marque Sony : « La musique Connect sera téléchargée uniquement au format numérique compressé Atrac open MG audio » (.oma) dans lequel la musique Connect est dotée d’une technologie de protection des droits d’auteur et de gestion des droits numériques. Atrac est l’acronyme de « Adaptive transfrom acoustic coding », une technologie de compression développée par Sony pour réduire la taille des fichiers audio ».

L’article 8 intitulé « copie sur des lecteurs portables » ne le précise pas non plus : « En utilisant le logiciel SonicStage sur votre ordinateur, vous pouvez copier une piste, depuis tout ordinateur sur lequel a été téléchargée ou copiée conformément aux dispositions susmentionnées sur un support numérique amovible (tel qu’un lecteur HI-MD, MiniDisc ou Memory Stick) ou sur la mémoire fixe (intégrée) d’un lecteur portable, sous réserve que ces derniers soient compatibles avec la technologie de protection des droits d’auteur Open MG/Magic Gate. Vous trouverez des informations complémentaire, notamment des exemples de lecteurs et de supports compatibles dans notre rubrique « FAQ » (cliquez ici : http://www.connect-europe.com/support). Nous ne pouvons cependant garantir la compatibilité de votre lecteur avec le logiciel SonicStage ou Connect et vous recommandons donc de vérifier les spécifications et la compatibilité dudit lecteur avant toute commande de musique Connect. Vous êtes autorisés à copier des pistes, conformément aux dispositions susmentionnées sur 3 lecteurs de ce type au maximum. Cependant la plupart des fournisseurs de musique Connect (c’est-à-dire les artistes et les sociétés ayant effectués l’enregistrement) autorisent un nombre de copies plus élevé pour leurs pistes. Lesdites limites sont décrites dans notre rubrique FAQ (cliquez ici : http://www.connect-europe.com/support). Dans de telles circonstances, vous êtes autorisés à copier la piste susmentionnée, dans la limite définie, cette dernière état incluse dans les présentes conditions ».

Cette dernière clause ne peut en rien être analysée comme constituant une clause claire et compréhensible au sens de l’article L 111-1 du code de la consommation puisqu’elle ne délivre pas d’information directe sur le matériel compatible et laisse parallèlement entendre que les lecteurs et supports qui y sont visés sont de simples exemples et non la liste limitative de produits compatibles.

Enfin, les modes d’emploi accompagnant les baladeurs numériques commercialisés en France n’apparaissent pas mentionner clairement et précisément, de manière aisément compréhensible, leur aptitude à ne lire que les fichiers musicaux téléchargés à partir du site Connect puisqu’ils se contentent de mentionner les formats compatibles avec l’écoute de ces fichiers (Atrac 3, Atrac 3+, WMA et WAV) : cette dernière mention n’est pas de nature à mettre le consommateur en mesure de saisir que cette restriction d’usage implique la lecture des seuls fichiers pouvant être téléchargés à partir de Connect, sans permettre l’accès aux autres sites légaux existants.

Il s’évince de ces diverses constatations que le fait pour Sony United Kingdom Ltd de ne pas indiquer clairement et de façon explicite dans son contrat que les fichiers musicaux téléchargés à partir du site Connect ne peuvent être lus que par les baladeurs numériques dédiés de marque Sony comme, le fait pour Sony France de ne pas clairement et explicitement informer le consommateur que les baladeurs numériques commercialisés par elle ne peuvent lire que les fichiers musicaux téléchargés sur le seul site légal Connect, caractérisent l’un et l’autre du chef respectif de chacune de ces sociétés, l’élément matériel du délit de tromperie sur une caractéristique essentielle de la prestation fournie ou du produit acheté et subséquemment sur l’aptitude à l’emploi de ces différents vecteurs.

Du fait de leur qualité de professionnels avertis, Sony United Kingdom Ltd et la société Sony France apparaissent, dans les circonstances de cette espèce, devoir se voir imputer une réticence dolosive révélatrice de leur mauvaise foi, le consommateur n’apparaissant manifestement pas, au vu des éléments ci-dessus, être mis en mesure d’élaborer exactement et en toute connaissance de cause sa volonté d’acheter ou de ne pas acheter la prestation ou le produit qu’il convoite.

L’élément matériel comme l’élément intentionnel du délit de tromperie apparaissent établis.

– sur la contravention de subordination de vente

Sony United Kingdom Ltd, seule concernée par cette allégation, entend voir écarter l’application de l’article L 122-1 du code de la consommation instituant cette contravention au motif que ce litige porte sur une licence d’usage d’œuvres d’auteur et donc selon elle, sur des droits incorporels ne pouvant être assimilés à la vente d’un produit ou à une prestation d’un service au sens des dispositions légales incriminées.

Il a déjà dit ci-avant que le contrat formé entre le consommateur et Sony United Kingdom Ltd ne porte nullement sur une licence de droits intellectuels mais sur la fournitures d’un fichier musical conférant un strict droit d’usage au contractant, ce droit d’usage étant assimilé à une prestation de services.

L’article L 122-1 du code de la consommation visant expressément les cas de subordination de vente de produits ou de prestations de services, le moyen de défense tiré de son inapplicabilité dans le cadre de cette espèce est inopérant.

En tout état de cause, s’agissant d’une contravention, l’élément intentionnel de cette infraction importe peu.

La requérante motive sa réclamation en observant que la mise en place de mesures de protection spécifiques aux œuvres musicales présentes sur le site Connect et la commercialisation par Sony France d’une gamme de baladeurs numériques capables de décoder ces seules mesures de protection, revient en réalité à subordonner l’achat de fichiers musicaux figurant sur le site incriminé à l’achat d’un baladeur numérique de marque Sony, ce qui est de nature à caractériser l’existence d’une vente liée au sens des dispositions précitées.

La double restriction d’usage affectant les prestations de chaque défenderesse conduit Sony United Kingdom Ltd à contraindre à la souscription de deux contrats proposés de fait comme étant dépendants l’un de l’autre : l’exécution d’une prestation de services (la mise à disposition de fichiers musicaux à partir du site numérique Sony) dès lors que le consommateur souhaite pouvoir lire les fichiers musicaux qu’il télécharge à partir de Connect sur un baladeur.

L’incrimination de subordination de vente est de ce seul chef établie.

B – sur les demandes de réparation et d’injonction

– sur les dommages-intérêts

UFC Que Choisir apparaît avoir exercé une action associationnelle dans l’intérêt collectif des consommateurs victimes d’agissements illicites constitutifs d’infractions pénales.

Compte tenu de ces éléments, le tribunal estime pouvoir faire droit à la demande de dommages-intérêts pour 10 000 €.

– sur la cessation des agissements incriminés par voie d’injonction

Les infractions de tromperie et de subordination de vente étant établies, UFC Que Choisir est subséquemment en droit d’en obtenir leur cessation par voie d’injonction dans les termes du dispositif ci-après, précision étant faite que la mention informative à porter sur les emballages des baladeurs numériques commercialisés par Sony France concerne non plus le baladeur NW HD1 mais ceux qui sont commercialisés aujourd’hui et dont il n’est pas discuté qu’ils sont affectés des mêmes défauts, à savoir les baladeurs numériques de la gamme Net WM.

La réactualisation de cette partie de demande à l’occasion des dernières écritures de la requérante n’est pas en effet de nature à rendre celles-ci irrecevables.

Il n’apparaît pas en revanche fondé d’enjoindre aux défenderesses de cesser d’utiliser des mesures techniques de protection incompatibles avec les baladeurs numériques autres que ceux de la marque Sony, l’autorité judiciaire n’ayant pas à se faire juge de la licéité de mesures de cette nature et ce d’autant, que rien n’interdit de commercialiser un produit ou une prestation de service avec une mesure technique de protection à condition que le consommateur acheteur en soit clairement et loyalement prévenu.

– sur la demande de publication

La publication d’un communiqué judiciaire en page d’accueil du site internet de la société anonyme Sony France apparaît nécessaire pour permettre à la présente décision de produire son plein effet en assurant une information générale des consommateurs dans les termes du dispositif ci-après.

Il apparaît pour les mêmes raisons nécessaire d’ordonner la publication à la charge de la société de droit étranger Sony United Kingdom Ltd du dispositif de cette décision en page d’accueil du site internet http://www.connect-europe.com dans les termes et conditions visées au dispositif de ce jugement.

– sur la demande d’astreinte

L’importance et la portée de cette décision sur un marché naissant en expansion relativement rapide justifie le prononcé d’une astreinte de 1000 € par jour de retard conformément au dispositif ci-après, tant pour ce qui concerne l’injonction de cessation précitée que pour ce qui concerne la publication d’un communiqué judiciaire.

– sur l’article 700 du ncpc

L’équité commande de condamner in solidum Sony United Kingdom Ltd et Sony France à verser à UFC Que Choisir une indemnité de 3000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du ncpc.

Les défenderesses seront en revanche déboutées de leurs demandes formées à ce titre, sur le même fondement juridique.

– les dépens

Les sociétés défenderesses qui succombent à titre principal seront condamnées in solidum aux entiers dépens de la présente instance.

– l’exécution provisoire

Les circonstances de l’espèce justifient encore le prononcé de l’exécution provisoire de cette décision, au demeurant compatible avec la nature de l’affaire.

DECISION

Statuant en audience publique, par décision contradictoire et en premier ressort,

. Déclare l’association UFC Que Choisir recevable et bien fondée,

. Enjoint à la société Sony France de faire figurer dans les 15 jours de la signification de cette décision, sous astreinte de 1000 € par jour de retard et pour tout manquement constaté, pendant 3 mois, sur les emballages des baladeurs numériques de la gamme Net WM qu’elle commercialise, une mention informative indiquant que ces baladeurs numériques permettent l’écoute de fichiers musicaux commercialisés, téléchargés à partir du seul site légal Connect,

. Enjoint à la société Sony France de diffuser dans les 8 jours de la signification de cette décision, sous astreinte de 1000 € par jour de retard pendant 3 mois, un communiqué judiciaire sur la page d’accueil de son site internet, en lettres d’un demi centimètre de hauteur, dont les termes seront les suivants :

« Par décision du 15 décembre 2006, le tribunal de grande instance de Nanterre a jugé à la requête de l’UFC Que Choisir, que la société Sony France a commis le délit de tromperie sur les qualités substantielles et l’aptitude à l’emploi des baladeurs numériques de marque Sony en n’informant pas explicitement les consommateurs de ce que les baladeurs NW HD1 ne permettaient l’écoute des œuvres musicales téléchargées depuis le site légal Connect -http://www.connect-europe.com- que sur le baladeur numérique Sony. En conséquence, le tribunal a enjoint à la société Sony France de faire figurer sur les emballages des baladeurs numériques de la gamme Net WM qu’elle commercialise et sur son site internet, une mention informative alertant le consommateur sur cette restriction d’usage. Le présent communiqué est diffusé pour informer les consommateurs. »,

. Enjoint à la société de droit étranger Sony United Kingdom Ltd d’assurer la mise en ligne du dispositif de ce jugement pendant 3 mois, dans les deux jours de la publication du communiqué judiciaire dont le jour devra lui être préalablement communiqué par la société Sony France, sous astreinte de 1000 € par jour de retard pendant 3 mois,

. Condamne in solidum la société Sony United Kingdom Ltd d’une part et la société Sony France d’autre part à payer à l’association UFC Que Choisir 10 000 € à titre de dommages-intérêts,

. Condamne in solidum la société Sony United Kingdom Ltd et la société Sony France à verser à l’association UFC Que Choisir 3000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du ncpc,

. Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

. Condamne in solidum la société Sony United Kingdom Ltd et la société Sony France aux entiers dépens de la présente instance,

. Ordonne l’exécution provisoire de cette décision.

Le tribunal : Mme Sylvie Meslin (président), M. Laurent Najem et Mme Delphine Avel (juges)

Avocats : Me Jérôme Franck, Me Mary Claude Mitchell

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* Nous portons l'attention de nos lecteurs sur les possibilités d'homonymies particuliérement lorsque les décisions ne comportent pas le prénom des personnes.