Jurisprudence : Jurisprudences
Tribunal de grande instance de Nanterre, Pôle civil, 1ère ch., jugement du 3 novembre 2016
Salamandra Web / Monsieur X.
activité similaire - antériorité - concurrent - exploitation - marque - nom de domaine - pratiques commerciales trompeuses - redirection - responsabilité civile
La société de droit espagnol Salamandra Web (ci-après Salamandra) est l’éditrice d’un site internet de rencontres accessible à l’adresse www.leboncoup.net dont elle dit avoir acquis le 9 septembre 2010 le nom de domaine « leboncoup.net » réservé dès le 3 décembre 2009.
Elle précise que ce site a été mis en ligne au mois de mai 2011 après avoir été, dans un premier temps, utilisé de manière temporaire pour rediriger l’internaute vers un autre site de rencontres www.envie2chat.com dont elle est aussi la société éditrice, et que la fréquentation du site leboncoup.net n’a cessé de croître depuis sa création.
Cette société est également titulaire de la marque française semi-figurative :
déposée le 29 mai 2013 sous le numéro 13 4 008 186, pour désigner des services relevant des classes 35, 38, 41 et 45.
Cette demande d’enregistrement de marque a fait l’objet d’un retrait partiel inscrit au registre national des marques le 17 octobre 2013 et ne désigne plus que les services relevant de la classe 45 : « agences matrimoniales, à savoir services de rencontres amoureuses et sentimentales via internet ».
Le 22 août 2013, M. X., titulaire de la demande d’enregistrement de marque française verbale « Le bon coup » déposée le 21 mars 2012 sous le numéro 13 3 991 843 pour des services relevant des classes 35, 38 et 45, a formé opposition devant le directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) à l’enregistrement de la marque semi-figurative « Le bon coup » susvisée de la société Salamandra. La marque antérieure opposée n’étant pas enregistrée, le délai pour statuer sur la procédure d’opposition a été suspendu en application des dispositions de l’article L. 712-4 du code de la propriété intellectuelle.
La marque verbale « Le bon coup » numéro 13 3 991 843 de M. X. a été enregistrée avec modification le 28 février 2014 pour les services de « agences de presse et d’information (nouvelles), médiation, services de sécurité pour la protection des biens et des individus, agences matrimoniales, pompes funèbres, services de crémation, agences de surveillance nocturne, surveillance des alarmes anti-intrusion, consultation en matière de sécurité ; ouverture de serrures, location de vêtements ; agences de détectives ».
Par lettre du 8 avril 2014, le directeur général de l’INPI a informé la société Salamandra que du fait de l’enregistrement de la marque antérieure, le délai pour statuer sur l’opposition avait recommencé à courir et lui a imparti un délai de deux mois pour répondre à l’opposition.
La société Salamandra a également pris connaissance de la réservation, le 22 juillet 2011, par M. X. du nom de domaine « le-boncoup.fr » qu’il a ensuite utilisé pour désigner un site qu’elle estime concurrent de celui qu’elle édite.
Considérant que les agissements de M. X. constituaient des actes de concurrence déloyale et parasitaire et des pratiques commerciales déloyales portant atteinte à ses droits antérieurs sur le nom de domaine « leboncoup.net », la société Salamandra a adressé une lettre de mise en demeure à M. X. en date du 21 octobre 2013 sollicitant qu’il retire son opposition, la marque « Le bon coup » numéro 13 3 991 843 et qu’il cesse l’exploitation du nom de domaine éponyme. Cette mise en demeure s’est révélée infructueuse.
C’est dans ces conditions que la société Salamandra a, par acte du 13 mai 2014, fait assigner M. X. devant le tribunal de grande instance de Nanterre sur le fondement des articles 1382 du code civil, L. 120-1 du code de la consommation, L. 711-4, L. 714-3 et L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle, en concurrence déloyale et en nullité de la marque « Le bon coup » numéro 13 3 991 843.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 14 décembre 2015, la société Salamandra demande au visa des articles 1382 du code civil, L. 120-1 du code de la consommation, L. 711-4, L. 714-3 et L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle au tribunal de :
– dire qu’en réservant (le 22 juillet 2011) et en exploitant le nom de domaine « le-boncoup.fr » à compter du mois de décembre 2012 pour héberger un site de rencontres en ligne et proposer des services afférents à cette activité, M. X. a porté atteinte à ses droits antérieurs sur le nom de domaine leboncoup.net réservé le 3 décembre 2009 et exploité sans discontinuer depuis le mois de mai 2011,
– dire que M. X. a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire et s’est livré à des pratiques commerciales déloyales à son encontre engageant sa responsabilité civile,
– dire qu’en déposant la marque française « Le bon coup » n°13 3 991 843 le 21 mars 2013 pour désigner différents services relevant des classes 35, 38 et 45, M. X. a violé ses droits antérieurs sur l’exploitation du nom de domaine leboncoup.net pour exercer une activité de site de rencontres en ligne,
– dire que les circonstances de l’espèce démontrent également que le dépôt de la marque française « Le bon coup » n°13 3 991 843 le 21 mars 2013 par M. X. a été fait en fraude de ses droits,
En conséquence,
– ordonner la radiation du nom de domaine le-boncoup.fr et la fermeture du site www.le-boncoup.fr sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir,
– faire interdiction à M. X. de faire usage du nom de domaine « le-boncoup.fr » pour proposer des services identiques ou similaires à ceux par elle proposés et, ce sous astreinte de 1.500 euros par jour de mise en ligne d’un quelconque contenu accessible grâce à l’exploitation dudit nom de domaine,
– faire interdiction à M. X. de faire usage de la dénomination »Le bon coup » à quel que titre que ce soit et sous quelle que forme que ce soit, directement ou indirectement, et ce sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir,
– dire que le tribunal se réservera la liquidation de l’astreinte,
– condamner M. X. à lui payer la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu’elle a subi,
– prononcer la nullité de l’enregistrement de la marque française « Le bon coup » n°13 3 991 843,
– dire que le jugement à intervenir, une fois qu’il sera devenu définitif, devra être transmis par les soins du greffe, saisi à la requête de la partie la plus diligente, au directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle, pour inscription au registre national des marques, aux frais de M. X.,
– ordonner la publication, aux frais de M. X., du dispositif du jugement à intervenir dans trois revues ou journaux de son choix, dans la limite de 3 000 euros par insertion,
– condamner M. X. à lui payer la somme de 20 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de l’instance,
– ordonner l’exécution provisoire.
Dans ses dernières écritures en date du 9 novembre 2015, M. X. entend voir sur le fondement des articles 1382 du code civil, L. 711-4 et L. 714-3 du code de la propriété intellectuelle :
– débouter la société Salamandra Web de l’intégralité de ses demandes,
– dire recevables et bien fondées ses demandes reconventionnelles formées à l’encontre de la société Salamandra Web.
Y faisant droit,
– dire qu’en déposant le 29 mai 2013 la marque française semi-figurative n°13 4 008 186, pour désigner, après retrait partiel, les services visés en classe 45, la société Salamandra Web a violé ses droits antérieurs sur le nom de domaine le-boncoup.fr et sur la marque française « Le bon coup » n° 13 3 991 843,
En conséquence,
– prononcer la nullité de l’enregistrement de la marque française semi-figurative n° 13 4 008 186,
– dire que le jugement à intervenir, une fois qu’il sera devenu définitif devra être transmis par les soins du greffe saisi à la requête de la partie la plus diligente, au directeur général de l’INPI pour l’inscription au registre national des marques, aux frais de la société Salamandra Web,
– condamner la société Salamandra Web à lui payer les sommes suivantes :
* 10 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par lui du fait de la procédure abusive dont il fait l’objet,
* 7 500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
– condamner la société Salamandra Web aux entiers dépens de l’instance.
DISCUSSION
– Sur l’atteinte aux droits de la société Salamandra sur le nom de domaine « leboncoup.net » par le nom de domaine »le-boncoup.fr »
Il est constant qu’un nom de domaine est un signe distinctif dont l’acquisition ne résulte pas de sa réservation mais de son exploitation effective et non équivoque.
La société Salamandra fait valoir que M. X. a souhaité dès le départ se placer dans le sillage de son site internet leboncoup.net pour tirer indûment profit de son succès en tentant de capter les internautes à la recherche de leboncoup.net pour les rediriger vers le site leboncoup.fr. Elle ajoute que l’opposition engagée par M. X. à l’enregistrement de sa marque semi figurative « Le bon coup » traduit une volonté de s’approprier frauduleusement le signe distinctif qu’elle a exploité antérieurement dans la vie des affaires via l’exploitation du site leboncoup.net qui présente un caractère distinctif et fait l’objet d’une exploitation effective, sérieuse et continue depuis le mois de mai 2011.
M. X. réplique que son site « le-boncoup.fr » a été mis en ligne en février 2012, que le site « leboncoup.net » n’a pas été exploité à compter du mois de mai 2011 comme un nom de domaine mais comme une simple interface permettant d’accéder à de nombreux « sites miroirs » tels enviedechat.com, enviedesexe.com ou cafecoquin.com, c’est-à-dire identiques les uns aux autres afin d’augmenter fictivement le trafic, les inscriptions étant les mêmes d’un site à l’autre, ces différentes désignations n’étant que les interfaces multiples d ‘un seul et même réseau alimenté par une seule et même base de données. Il ajoute que contrairement à ce qu ‘affirme la demanderesse, c’est elle qui fait de la publicité via le site google adwords et qui détourne le trafic à son profit en achetant l’expression « le-boncoup.fr ». Il demande en outre que soit écartée des débats l’attestation de la société Orixa Media (pièce 8 du demandeur) qui ne respecte pas le formalisme de l’article 202 du code de procédure civile, cette société étant le partenaire commercial principal de la demanderesse et de son réseau, cette attestation ne présentent donc aucun gage d’impartialité. Il conteste également les chiffres fournis par la demanderesse qui émanent de données de Google Adwords estimant que ce service de régie publicitaire n’exerce pas d’activité dans le domaine des statistiques de visites des sites internet et ne font pas référence à la fréquentation naturelle mais au trafic artificiel fondé sur des dépenses publicitaires.
S’agissant de la pièce 8 de la demanderesse qui est une attestation de M. Y. co-gérant de la SARL Orixa Media et dont le défendeur sollicite qu’elle soit écartée des débats, il convient de relever que les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile ne sont pas prescrites à peine de nullité et qu’il appartient au juge du fond d’apprécier souverainement si l’attestation non conforme aux exigences de cet article présente des garanties suffisantes pour emporter sa conviction. M. X. affirme que cette attestation ne présente pas de garanties d’impartialité suffisantes, ne mentionnant pas les liens qu’entretient la société Orixa Media avec la demanderesse alors qu’il s’agit de son principal partenaire commercial. Toutefois, s’il est exact qu’aucune indication ne figure dans l’attestation en cause sur les liens entre la société Orixa Media et la société Salamandra, dont cette dernière reconnaît qu’elle est son prestataire, il n’en demeure pas moins que cette irrégularité ne peut être considérée comme constituant l’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public faisant grief à M. X., l’attestation ayant pour objet de citer des chiffres concernant l’activité du site leboncoup.net, données qui ne peuvent émaner que de prestataires et qui sont d’ailleurs discutées par le défendeur.
La pièce 8 de la société Salamandra ne sera donc pas écartée par le tribunal.
Il apparaît des éléments versés aux débats et des explications des parties que :
– le nom de domaine »leboncoup.net » a été réservé le 3 décembre 2009 par la société Salamandra,
– le 5 septembre 2010, la société Salamandra procédait à une déclaration à la CNIL pour : « collecte, traitement et gestion de données des utilisateurs à nos services web et des données des personnes physiques ayant accepté de recevoir des sollicitations commerciales »,
– selon l’attestation en date du 3 mars 2014 de M. Z. gérant de la société Roskov, celle-ci a assuré au cours des années 2010, 2011, 2012 et 2013 la mise en place technique du site leboncoup.net de la société Salamandra, le chiffre d ‘affaires de ce site est passé de 150.000 euros en 2011 à 820.000 euros en 2012, 150.000 euros pour les mois de janvier et février 2013 et qu’ont été enregistrés 37.435 inscrits en 2011, 123548 inscrits en 2012 et 33.500 inscrits pour les mois de janvier et février 2013,
– selon l’attestation en date du 3 mars 2014 de M. Y. co-gérant de la SARL Orixa Media, se référant aux données d’analyse Google adwords pour le site « leboncoup.net », il y a eu 7.312.242 visites et 111.797.891 pages vues entre le 1er juillet 2011 et le 21 mars 2013, 12.716.017 visites et 188.355.729 pages vues entre le 1er juillet 2011 et le 31 janvier 2014, et, sur la période entre mai 2011 et février 2014, la société Salamandra a investi 302.424 $ de campagnes publicitaires sur Google adwords pour « générer un trafic unique qualifié »,
– selon l’attestation en date du 14 mars 2014 de M. F. directeur administratif et financier de la société Neocom Multimedia, via la plate-forme de paiement « billing France » elle a participé sous contrat avec la société Salamandra à la monétisation du site leboncoup.net et il y a eu en 2011 plusieurs milliers de transactions générant 152.147,30 euros de chiffre d’affaires,
– selon procès-verbal dressé par huissier de justice le 4 septembre 2015 à la demande de la société Salamandra, en se connectant à l’adresse URL http:\\… qui donne accès à la base de données « leboncoup », l’huissier instrumentaire a procédé à des captures d’écrans faisant état de 37.151 inscriptions au site « leboncoup.net » en 2011, ces inscriptions débutant en mai 2011 et 119.743 inscriptions en 2012,
– des factures de la société ltema de juillet 2011 à août 2012 ont été adressées à la société Salamandra concernant des prestations d’emailing pour « Le bon coup » notamment,
– la présentation de la première page du site accessible sous le nom leboncoup.net est très similaire à celle des sites 100lendemain, anosdesirs, chatteenligne, clubangela, clubinfideles, mateurstory ainsi que d’autres sites internet qui sont tous des sites de rencontres en ligne comme le site leboncoup.net,
– certains commentaires d’internautes font état à propos du site leboncoup.net d’une « arnaque » considérant notamment que la base de données utilisée par ce site est la même que celle d’autres sites de rencontres et faisant état de difficultés quant aux mises en relations,
– M. X. a quant à lui réservé le nom de domaine « le-boncoup.fr » dès juillet 2011 et l’a exploité pour un site de rencontres en ligne depuis le mois de février 2012, selon ses propres écritures.
Il ressort de l’ensemble de ces éléments que, si comme le reconnaît la société Salamandra dans ses écritures, le site « leboncoup.net » a été utilisé jusqu’au mois de mai 2011 de manière temporaire pour rediriger les internautes vers un autre site de rencontre « envie2chat.com », il est établi que ce site « leboncoup.net » a une existence propre depuis mai 2011 générant un trafic et des flux financiers et pour lequel la demanderesse a investi dans la publicité, les internautes l’identifiant comme tel dans leurs commentaires, ce quand bien-même il aurait une base de données commune et une architecture similaire à d’autres sites édités par la société Salamandra.
Il est donc démontré par la société Salamandra qu ‘elle utilise le nom de domaine leboncoup.net depuis mai 2011, non comme une simple interface, mais pour identifier un site de rencontres en ligne d’ailleurs critiqué comme tel par les internautes. Il convient également de considérer que l’expression « leboncoup » si elle est évocatrice pour l’internaute d’un site proposant des rencontres qui n’ont pas vocation à durer, n’en demeure pas moins arbitraire et ce quand bien même des requêtes « le bon coup » étaient déjà saisies en 2007 sur les sites de recherche par les internautes pour trouver des sites proposant de bonnes affaires.
En conséquence, l’exploitation à compter du mois de février 2012 par M. X. d’un site de rencontres, activité identique, que les annonces soient gratuites ou payantes, à celle du site exploité par la société Salamandra, sous le nom de domaine « le-boncoup.fr », dénomination quasi identique au nom de domaine « leboncoup.net », engendre un risque de confusion entre les deux sites et cause un préjudice à la société demanderesse. M. X. ne peut se prévaloir de l’ignorance dans laquelle il aurait été de l’existence du site « leboncoup.net » lorsqu’il a réservé en juillet 2011 le nom de domaine leboncoup.fr, l’acte fautif retenu n’étant pas la réservation du nom de domaine mais l’exploitation de celui-ci près d’un an après pour une activité identique.
L’atteinte aux droits antérieurs de la société Salamandra sur le nom de domaine leboncoup.net par l’exploitation du site le-boncoup.fr édité par M. X. est constituée.
Cette atteinte constitue une faute susceptible d’engager la responsabilité civile de M. X. sur le fondement de l’article 1382 du code civil.
En revanche, les pratiques commerciales trompeuses au sens de l’article L. 120-1 du code de la consommation également invoquées par la demanderesse ne sont pas sérieusement établies et ne seront pas retenues.
– Sur la nullité de la marque « Le Bon Coup » numéro 13 3 991 843 déposée par M. X.
En application de l’article L. 711-4 du code de la propriété intellectuelle, ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à un nom de domaine exploité antérieurement s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public.
Selon les dispositions de l’article L. 714-3 du même code, est déclaré nul par décision de justice, l’enregistrement d’une marque qui n’est pas conforme aux dispositions des articles L. 711-1 à L. 711-4.
L ‘article L. 712-6 de ce code prévoit que si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d’un tiers, soit en violation d’une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut en revendiquer la propriété en justice.
M. X. a déposé la marque française verbale « Le bon coup » le 21 mars 2012 enregistrée sous le numéro 13 3 991 843 pour désigner les produits et les services suivants: « agences de presse et d’information (nouvelles). médiation, services de sécurité pour la protection des biens et des individus, agences matrimoniales, pompes funèbres, services de crémation, agences de surveillance nocturne, surveillance des alarmes anti-intrusion, consultation en matière de sécurité ; ouverture de serrures, location de vêtements ; agences de détectives » .
Ainsi qu’il a été précédemment démontré, la société Salamandra est quant à elle titulaire du nom de domaine « leboncoup.net » exploité depuis le mois de mai 2011 pour distinguer un site de rencontres sur internet.
Les dénominations en cause « leboncoup.net » et « Le bon coup » présentent de grandes ressemblances visuelles, phonétiques et intellectuelles, ces expressions débutant par les mêmes termes « le bon coup » qui évoquent une bonne affaire, la suppression du préfixe « .net » dans la marque arguée de nullité, usuel dans le domaine de l’internet comme une extension générique, ne faisant pas disparaître les grandes similitudes précédemment relevées.
En ce qui concerne les produits et services désignés dans la marque critiquée, seuls les services d’agences matrimoniales sont similaires au service de rencontres en ligne proposé sous le nom de domaine antérieur, les autres services désignés dans la marque soit « agences de presse et d‘information (nouvelle), médiation, services de sécurité pour la protection des biens et des individus, pompes funèbres, services de crémation, agences de surveillance nocturne, surveillance des alarmes anti-intrusion, consultation en matière de sécurité ; ouverture de serrures, location de vêtements ; agences de détectives » ont une nature et une destination différentes des services de rencontres proposées par la société Salamandra sous la dénomination « leboncoup.net » de sorte qu’aucun risque de confusion dans l’esprit du public n’est établi pour lesdits services.
En conséquence, le dépôt de la marque « Le bon coup » porte atteinte aux droits antérieurs de la société Salamandra sur le nom de domaine « leboncoup.net » uniquement en ce qu’elle désigne les agences matrimoniales.
Sur le dépôt frauduleux, il apparaît des éléments versés au débat que M. X. connaissait l’existence du site »leboncoup.net » exploité depuis mai 2011, lors du dépôt de sa marque « Le bon coup » le 21 mars 2013 et que ce dernier a formé opposition à l’enregistrement de la marque semi figurative « leboncoup » déposée par la société Salamandra le 29 mai 2013.
Néanmoins, il convient de relever que la marque de M. X. a été partiellement annulée pour les services « d’agences matrimoniales » comme portant atteinte aux droits antérieurs de la société Salamandra sur le nom de domaine « leboncoup.net ». Pour les autres services soit : « agences de presse et d’Information (nouvelles), médiation, services de sécurité pour la protection des biens et des individus, pompes funèbre, services de crémation, agences de surveillance nocturne, surveillance des alarmes anti-intrusion, consultation en matière de sécurité ; ouverture de serrures, location de vêtements ; agences de détectives », il ne peut être déduit du dépôt de cette marque une intention de nuire de M. X. aux intérêts de la société Salamandra sauf à considérer que tout dépôt de marque »leboncoup » est frauduleux. En effet, ces services sont différents de l’activité de la demanderesse qui exploite un site pour des services de rencontres en ligne et la marque de M. X. ne peut s’opposer utilement à l’exploitation de ce site en application du principe de spécialité.
L’opposition formée par M. X. à l’enregistrement de la marque « Leboncoup » déposée par la société Salamandra sur le fondement de sa marque antérieure ne caractérise pas plus son intention de nuire, la marque de la société Salamandra étant à l ‘origine et avant de faire l’objet d’un retrait partiel, déposée pour divers services relevant des classes 35, 38 et 45 considérés comme identiques ou similaires à ceux désignés par la marque de M. X.
Le dépôt frauduleux par M. X. de sa marque « Le bon coup » pour les services d‘agences de presse et d’information (nouvelles), médiation, services de sécurité pour la protection des biens et des individus, pompes funèbres, services de crémation, agences de surveillance nocturne, surveillance des alarmes anti-intrusion, consultation en matière de sécurité ; ouverture de serrures, location de vêtements ; agences de détectives » n’est pas caractérisé.
La marque « Le bon coup » déposée le 21 mars 2012 enregistrée sous le numéro 13 3 991 843 sera en conséquence annulée partiellement pour les services de : « agences matrimoniales ».
-Sur les mesures réparatrices
La société Salamandra fait valoir que, malgré ses mises en garde, M. X. a sciemment poursuivi ses agissements fautifs à son encontre en lui occasionnant un préjudice direct réel et certain du fait notamment de la confusion entretenue entre les deux sites et le détournement de milliers d’internautes inscrits sur le site, des coûts de référencement augmentés du fait de l’achat du mot clé « le bon coup » par M. X. pour faire figurer son site en tête de liste, l’utilisation des techniques de référencements occultes visant à référencer dans les premières positions le site du défendeur afin de profiter indûment des investissements et des succès grandissants du site leboncoup.net.
Néanmoins, ainsi que le déclare la demanderesse dans ses écritures, le site le-boncoup.fr fait l’objet d’une exploitation peu importante. En outre, au vu du peu d’élément qu’elle verse au débat qui consiste en une simple copie d’une recherche non datée, la société Salamandra n’établit pas que le référencement du site leboncoup.fr à la suite du site leboncoup.net par la saisie de la requête « leboncoup » sur le site de recherche Google est un référencement dû à l’achat de mots clés par M. X.
Aussi, le préjudice de la société Salamandra n’est pas démontré à hauteur de ses prétentions et sera suffisamment réparé par l’allocation de la somme de 5.000 euros à titre de dommages intérêts.
Sur les autres demandes de la société Salamandra
Au vu de ce qui précède et de l’atteinte portée au nom de domaine « leboncoup.net » de la société Salamandra par l’exploitation du nom de domaine « le-boncoup.fr » de M. X. pour un site de rencontres, la demande d’interdiction à ce dernier d’utiliser le nom de domaine « le-boncoup.fr » en rapport avec des activités de mises en relations d’individus sera accueillie selon les modalités prévues au dispositif.
Il sera également ordonné la radiation du nom de domaine « le-boncoup.fr » réservé par M. X., sans qu’il soit besoin d’assortir cette mesure d’une astreinte.
Ces mesures apparaissent suffisantes pour, d’une part, réparer le dommage subi par la société Salamandra et, d’autre part, faire cesser les agissements fautifs de M. X., sans qu’il soit besoin d’accueillir la mesure de publication d’un communiqué judiciaire sollicitée à titre de réparation complémentaire ou les demandes d’interdiction générale d’utilisation de l’expression « le bon coup » et d’interdiction du site, mesures qui apparaissent disproportionnées par rapport au préjudice démontré.
-Sur les demandes reconventionnelles de M. X.
M. X. sollicite la nullité de la marque semi-figurative « Le bon coup » numéro 13 4 008 186 déposée par la société Salamandra.
Il fait valoir à l’appui de sa demande de nullité de marque la marque antérieure « Le bon coup » dont il est titulaire mais également son nom de domaine « le-boncoup.fr ».
Ainsi qu’il a été précédemment relevé la société Salamandra a déposé le 29 mai 2013 sous le numéro 13 4 008 186 une marque semi-figurative « le bon coup », enregistrée à la suite d’un retrait partiel pour les services suivants : « agences matrimoniales, à savoir services de rencontres amoureuses et sentimentales via internet ».
M. X. a quant à lui déposé la marque française verbale « Le bon coup » le 21 mars 2012 enregistrée sous le numéro 13 3 991 843 pour désigner les produits et les services suivants : « agences de presse et d’information (nouvelles), médiation, services de sécurité pour la protection des biens et des individus, agences matrimoniales, pompes funèbres, services de crémation, agences de surveillance nocturne, surveillance des alarmes anti-intrusion, consultation en matière de sécurité ; ouverture de serrures, location de vêtements ; agences de détectives ».
Outre que M. X. s’abstient de toute démonstration quant aux atteintes qu ‘il prétend subir, il convient de relever qu’il a été précédemment décidé que l’enregistrement de marque dont il est titulaire était partiellement nul pour les services « d’agences matrimoniales » en raison des droits antérieurs dont dispose la société Salamandra sur le nom de domaine « leboncoup.net » utilisé pour distinguer un site de rencontres.
La décision d’annulation ayant un effet absolu, M. X. ne peut se prévaloir de l’enregistrement de sa marque antérieure que pour les services de : « agences de presse et d’information (nouvelles), médiation, services de sécurité pour la protection des biens et des individus, pompes funèbres, services de crémation, agences de surveillance nocturne, surveillance des alarmes anti-intrusion, consultation en matière de sécurité ; ouverture de serrures, location de vêtements ; agences de détectives » dont il a été précédemment décidé qu’ils n’étaient pas similaires aux services de rencontres amoureuses via Internet.
L’atteinte à la marque « Le bon coup » de M. X. par l’enregistrement de la marque « Leboncoup » de la société Salamandra n’est donc pas caractérisée.
De même. M. X. se contente d’affirmer qu’il dispose d’un droit antérieur sur un nom de domaine « le-boncoup.fr » s’abstenant également d’une quelconque démonstration. Ainsi qu’il a été précédemment rappelé, l’antériorité du nom de domaine ne résulte pas de sa réservation ou du contrat d’hébergement. S’il ressort de ce qui précède que M. X. a bien utilisé le nom de domaine précité pour distinguer un site de rencontres, aucun élément n’établit une exploitation effective et non équivoque de ce nom de domaine antérieurement au 29 mai 2013 date du dépôt de la marque de la société Salamandra, les éléments fournis par M. X. à l’appui de ses affirmations selon lesquelles son site serait en ligne depuis février 2012 montrant que ce site n’avait qu’une activité confidentielle voire n’était pas exploité.
M. X. sera en conséquence débouté de sa demande de nullité de la marque numéro 13 4 008 186 dont la société Salamandra est titulaire ainsi que de l’ensemble de ses demandes.
– Sur la demande de M. X. au titre de la procédure abusive
Les prétentions de la société Salamandra ayant partiellement prospéré, la demande de M. X. au titre de la procédure abusive sera rejetée.
– Sur les autres demandes
M. X. qui succombe sera condamné aux dépens.
Il sera alloué à la société Salamandra la somme de 10.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La nature et l’ancienneté du litige justifient le prononcé de l’exécution provisoire pour les condamnations pécuniaires et les mesures d’interdiction.
DÉCISION
Le Tribunal,
– Dit qu’en réservant et en utilisant la dénomination « le-boncoup.fr » à titre de nom domaine pour désigner un site de rencontres en ligne, M. X. a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Salamandra Web,
En conséquence,
– Ordonne la radiation du nom de domaine « le-boncoup.fr » réservé au nom de M. X.,
– Fait interdiction à M. X. de poursuivre de tels agissements, et ce sous astreinte de 1.000 € par infraction constatée passé un délai de quinze jours à compter de la signification du présent jugement,
– Se réserve la liquidation de l’astreinte,
– Condamne M. X. à payer à la société Salamandra Web la somme de 5.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale commis à son encontre,
– Annule partiellement la marque française verbale « Le bon coup » déposée le 21 mars 2012 et enregistrée sous le numéro 13 3 991 843 dont M. X. est titulaire pour désigner les services suivants : « agences matrimoniales »,
– Dit que la présente décision une fois devenue définitive sera, à la demande de la partie la plus diligente, transmise à l’Institut national de la propriété industrielle aux fins d’inscription de celle ci au Registre national des marques,
– Condamne M. X. à payer à la société Salamandra Web la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Déboute la société Salamandra Web du surplus de ses demandes,
– Déboute M. X. de l’ensemble de ses demandes,
– Condamne M. X. aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
– Ordonne l’exécution provisoire pour les condamnations pécuniaires et les mesures d’interdiction.
Le Tribunal : Anne Beauvois (1ère vice-présidente), Estelle Moreau (vice-présidente), Agnès Cochet-Marcade (vice-présidente), Geneviève Cohendy (greffier)
Avocats : Me Gérard Haas, Me Thibault Lentini
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* Nous portons l'attention de nos lecteurs sur les possibilités d'homonymies particuliérement lorsque les décisions ne comportent pas le prénom des personnes.