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Jurisprudence : Responsabilité

vendredi 11 février 2011
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Cour d’appel de Paris Pôle 1, chambre 2 Arrêt du 19 janvier 2011

Yvan B / ADMD

responsabilité

FAITS

L’Association pour le droit de mourir dans la dignité – ADMD – a pour Président M. R., M. B. étant un adhérent.

L’article 4-1-1 des statuts précise qu’une assemblée générale peut être convoquée “sur la demande du dixième des adhérents”.

Par acte du 8 mars 2010, M. B. assignait l’ADMD devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris pour obtenir :
– “la communication du fichier informatique comportant la liste des adhérents de I’ADMD avec toutes leurs coordonnées ;
– à défaut, la publication de son projet de statuts avec un appel à la signature de soutien à la convocation d’une assemblée générale extraordinaire où il serait présenté ;
– la communication, à défaut, du projet de statuts et de l’appel à soutien dans la revue trimestrielle de l’Association ;
– la nullité de l’interdiction faite de poster des commentaires sur le blog ;
– la condamnation de l’ADMD à lui verser un euro à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
– la condamnation de l’ADMD au paiement d’une indemnité de 1500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile”.

Par ordonnance contradictoire entreprise du 12 avril 2010, ce juge disait n’y avoir lieu à référé et condamnait M. B. à payer 700 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Le 10 mai 2010, M. B. interjetait appel.

L’ordonnance de clôture était rendue le 8 décembre 2010.

PRÉTENTIONS ET MOYENS de M. B.

Par dernières conclusions en date du 6 décembre 2010, auxquelles il convient de se reporter, M. B. expose :
– avoir vainement réclamé l’application de l’article 4-1-1 susvisé depuis juin 2008 ;
– avoir tout aussi vainement réclamé de pouvoir déposer un article sur le « blog » ;
– qu’une réforme envisage de supprimer l’article 4-1-1 ;
– que l’urgence à statuer est patente ;
– qu’il faut faire cesser d’urgence le trouble particulièrement illicite ;
– que le différend est évident ;
– qu’il n’y a pas de contestation sérieuse puisque la copie du fichier informatique des adhérents pourrait lui être transmise expurgée des données autres que celles qui lui sont utiles ;
– qu’il appartient à la Cour de préciser les mesures provisoires telle que la mise à sa disposition d’une double page dans la revue de l’ADMD ;
– qu’il y a un risque de dommage imminent ;
– que méconnaître les statuts est “bien manifestement illicite” ;
– en résumé, que le fait par l’ADMD de bloquer par son silence persistant depuis 3 ans l’application de l’article 4-1-4 des statuts, constitue une “voie de fait”, un “trouble manifestement illicite” et qu’il en est de même pour “l’utilisation de publier son article sur le blog de ladite ADMD », et du refus de lui ouvrir les pages de la revue de ladite ADMD.

Il demande :
– “de dire et juger :
* que depuis juin 2008, M. Yvan B. a été régulièrement privé de son droit de tenter de convoquer une assemblée générale extraordinaire avec le soutien de 10 % des membres pour y présenter un projet de statuts ;
* qu’il appartient bien au juge des référés de faire cesser une voie de fait ;
* que les statuts doivent être d’abord respectés par les dirigeants qui les élaborent ;
* que l’ADMD doit communiquer à M. Yvan B. le fichier informatique de la liste des adhérents avec adresses postales, téléphones et mails dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l’arrêt à intervenir et ce, sous astreinte de 20 € par jour de retard ;
* subsidiairement, d’ordonner la présentation du projet de statut et l’appel à soutien dans la revue trimestrielle dans les conditions ci-dessus exposées ;
– de constater que M. Yvan B. subit depuis le 27 novembre 2009, une sanction à durée indéterminée, “l’interdiction permanente de publier dans le blog” prise au mépris du respect des droits de la défense ;
– d’ordonner la main-levée de cette sanction ;
– subsidiairement, d’ordonner la suspension de l’interdiction de publier dans le blog jusqu’à régularisation de la procédure d’interdiction ;
– de condamner l’ADMD à verser à M. Yvan B. la somme de 1 euro en réparation de son préjudice moral ;
– de condamner l’ADMD à verser à M. Yvan B. la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile”.

Cette partie entend bénéficier des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DE L’ADMD

Par dernières conclusions en date du 30 novembre 2011, auxquelles il convient de se reporter, I’ADMD soutient :
– que l’article 4-1-1 se trouve toujours dans les statuts ;
– que chaque année, une assemblée générale permet à chacun d’être entendu ;
– que le projet de M. B. sera soumis à l’assemblée générale extraordinaire ;
– que le fichier adhérent est un fichier privé ne pouvant être communiqué sous peine de violer l’article 9 du Code civil ;
– qu’il n’est pas besoin d’une décision de justice pour se procurer les statuts ;
– que le “modérateur” du blog de l’Association a justement refusé d’y intégrer la communication de M. B. qui contenait des propos diffamatoires ;
– qu’aucune des conditions exigées par les différents cas de référés n’existe.

Elle conclut au débouté de M. B. à qui elle demande 3000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Cette partie entendra bénéficier des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

DISCUSSION

Considérant que parmi les nombreux fondements juridiques invoqués par M. B., certains sont totalement inopérants, telle la “voie de fait”, qui est un acte de l’administration insusceptible de se rattacher aux pouvoirs de celle-ci et qui est donc une notion totalement étrangère au présent litige, ou celui de l’article 808 du Code de procédure civile dernier membre de phrase, alors que les autres sont affublés de conditions que la loi n’impose pas ; qu’il y a donc lieu d’examiner le litige au vu de l’article 808 du Code de procédure civile (et non pas 848, le litige relevant du juge du tribunal de grande instance et non pas du tribunal d’instance) qui exige l’urgence, et l’absence de contestation sérieuse, et l’article 809 alinéa 2 du même code, qui se dispense de ces deux conditions ;

Considérant que si le défaut d’urgence ne peut se déduire de la seule ancienneté de la situation critiquée, ledit défaut est démontré, lorsque c’est la volontaire passivité de l’intéressé qui, en attendant le dernier moment pour agir, a lui-même créé une situation d’urgence ; que tel est manifestement le cas de la présente espèce, puisque M. B. reconnaît lui-même avoir formulé ses demandes auprès de l’Association depuis 2008, sans d’ailleurs justifier avoir utilisé les voies contractuelles du règlement de l’Association pour y parvenir ; que M. B. ne démontre pas avoir – avant l’instance – demandé à l’Association la liste des adhérents expurgée de toutes données autre que celles utiles à une convocation à une assemblée ; qu’à aucun moment, il ne démontre un fonctionnement abusif à son égard des institutions de l’Association, que ce soit pour le refus de la parution d’un article dans le blog de l’Association, et/ou dans la revue de ladite Association ; que la preuve d’un trouble manifestement illicite n’est pas rapportée ; que pour ces raisons, et celles non contraires du premier juge, il y a lieu de confirmer en tous points la décision de celui-ci ;

Considérant qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de l’ADMD les frais non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu de lui accorder à ce titre la somme visée dans le dispositif ;

DECISION

Par ces motifs,
. Confirme l’ordonnance entreprise,

Y ajoutant :
. Condamne M. Yvan B. à payer à l’Association pour le droit de mourir dans la dignité – ADMD 1500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

. Condamne M. Yvan B. aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés selon les dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

La cour : M. Marcel Foulon (président), M. Renaud Blanquart et Mme Michèle Graff-Daudret (conseillers)

Avocats : SCP Barnabé – Chardin – Cheviller, Me Guillaume Rolland

 
 

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* Nous portons l'attention de nos lecteurs sur les possibilités d'homonymies particuliérement lorsque les décisions ne comportent pas le prénom des personnes.