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Jurisprudence : E-commerce

jeudi 02 avril 2009
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Cour de cassation Chambre commerciale Arrêt du 24 mars 2009

Epoux F-L. / LCL Le Crédit Lyonnais

carte bancaire - e-commerce - mandat - paiement

DISCUSSION

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche, qui est recevable :

Vu l’article 1134 du code civil ;

Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort et les productions, que, M. et Mme F-L…, titulaires d’un compte joint dans les livres de LCL le Crédit Lyonnais (la banque), ont souhaité procéder à une réservation dans un hôtel, ont communiqué sur le site internet le numéro de la carte bancaire de Mme F-L… ; qu’ils n’ont pas donné suite à leur projet ; que leur compte a été ultérieurement débité à l’initiative de l’hôtel d’une somme de 780 euros à titre de pénalité, dont ils ont réclamé le remboursement à la banque ;

Attendu que pour rejeter la demande de M. et Mme F-L…, le jugement retient que le numéro de la carte de crédit, sa date de validité et le cryptogramme visuel à trois chiffres ont été communiqués volontairement sur le site internet de l’hôtel par Mme F-L…, que la communication par le titulaire de la carte autorisait la banque, au vu de ces données transmises par le commerçant à payer et à débiter le compte ;

Attendu qu’en se déterminant par de tels motifs impropres à établir que Mme F-L…, qui n’avait communiqué à distance les données figurant sur sa carte bancaire que pour garantir la réservation d’une chambre d’hôtel, sur un formulaire précisant que cette communication ne donnerait lieu à aucun débit, avait donné un mandat de payer, et qu’à défaut d’un tel mandat, la banque était tenue de restituer la somme débitée, la juridiction de proximité a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

DECISION

Par ces motifs, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

. Casse et annule, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 10 octobre 2007, entre les parties, par la juridiction de proximité de Paris 2e ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant la juridiction de proximité de Paris 1er ;

. Condamne la société LCL Crédit lyonnais aux dépens ;

. Vu l’article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à M. et Mme F-L… la somme globale de 2500 euros et rejette sa demande ;

. Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour les époux F-L…

Le moyen fait grief au jugement attaqué, rendu en premier et dernier ressort, d’avoir débouté les époux F-L… de leurs demandes tendant à la condamnation de la banque LCL Le Crédit Lyonnais à leur payer la somme de 780 euros à titre de remboursement d’un débit de carte bancaire contesté ainsi que celle de 500 euros à titre de dommages-intérêts,

Aux motifs qu’aux termes de l’article L 132-2 du code monétaire et financier, l’ordre ou l’engagement de payer donné au moyen d’une carte de paiement est, sauf utilisation frauduleuse, irrévocable ; en l’espèce, il est constant que le 14 mars 2005, Fabienne F-L… a communiqué sur le site internet Venere.com le numéro de sa carte de crédit, sa date de validité et le cryptogramme visuel à trois chiffres indiqué au verso de sa carte ; les données n’ont pas été obtenues frauduleusement par l’hôtel, mais communiquées volontairement par la titulaire, sous sa seule responsabilité ; la communication de ces données par la titulaire de la carte autorise la Banque, au seul vu de ces données transmises par le commerçant, à payer et à débiter le compte du montant autorisé ;
dès lors, il n’appartenait pas au Crédit Lyonnais de s’immiscer dans un litige relatif à l’exécution des conditions de réservation d’une chambre d’hôtel en réclamant la preuve que l’acceptation de la demande de réservation avait été communiquée à Fabienne F-L… ; par contre, suite à leur décision de réserver dans un autre hôtel, il appartenait aux époux F-L…, qui avaient communiqué les données de leur carte bancaire, de s’assurer auprès de l’hôtel que celles-ci ne seraient pas utilisées, en ne le faisant pas, ils ont fait preuve de négligence ; eu égard à ce qui précède, la réclamation des époux F-L… tendant à engager la responsabilité contractuelle du Crédit Lyonnais n’est pas justifiée,

Alors, d’une part, qu’il ne peut y avoir ordre ou engagement de payer irrévocable, au sens de l’article L 132-2 alinéa 1 du code monétaire et financier, lorsque le paiement est effectué sans utilisation physique de la carte et saisie du code confidentiel ou signature d’une facturette ; qu’en se prononçant de la sorte, au sujet d’un paiement effectué à distance, sur un site internet, par simple communication du numéro de la carte, de sa date de validité et du cryptogramme à trois chiffres indiqué au verso, le Juge de proximité a violé l’article L 132-2 alinéa 1 du code monétaire et financier, par fausse application,

Alors, d’autre part, qu’en relevant qu’« il est constant que le 14 mars 2005, Fabienne F-L… a communiqué sur le site internet Venere.com le numéro de sa carte de crédit, sa date de validité et le cryptogramme visuel à trois chiffres indiqué au verso de sa carte », le Juge de proximité s’est référé au formulaire de réservation en ligne, qui indique effectivement notamment, dans une rubrique intitulée « Carte de crédit » : « Carte : Visa. Nom du titulaire : Fabienne F-L…. Numéro : ************6697. Valable jusqu’au : 09-05. Code de sécurité : 493 », mais en précisant, cependant, aussitôt : « Aucun Débit ! Les données de la carte de crédit (sont) nécessaires uniquement pour garantir votre réservation » ; qu’en considérant, dès lors, que « la communication de ces données par la titulaire de la carte autorise la Banque, au seul vu de ces données transmises par le commerçant, à payer et à débiter le compte du montant autorisé », le Juge de proximité a violé l’article 1134 du code civil,

Alors, de troisième part, que si l’ordre ou l’engagement de payer donné au moyen d’une carte de paiement est irrévocable, il peut cependant être fait opposition au paiement en cas notamment d’utilisation frauduleuse de la carte ou des données liées à son utilisation ; qu’en retenant, à l’appui de sa décision, que « les données n’ont pas été obtenues frauduleusement par l’hôtel, mais communiquées volontairement par la titulaire, sous sa seule responsabilité », cependant que le formulaire de réservation en ligne auquel il s’est référé, s’il indique, certes, dans une rubrique intitulée « Carte de crédit» : « Carte : Visa. Nom du titulaire : Fabienne F-L…. Numéro : ************6697. Valable jusqu’au : 09-05. Code de sécurité : 493 », précise aussitôt : «Aucun Débit! Les données de la carte de crédit (sont) nécessaires uniquement pour garantir votre réservation », sans rechercher, dès lors, si les données liées à l’utilisation de la carte bancaire de Madame F-L…, n’avaient pas été utilisées à d’autres fins que celle pour laquelle elles avaient été communiquées, et, partant, n’avaient pas donné lieu à une utilisation frauduleuse de la part du commerçant, le Juge de proximité a privé sa décision de base légale au regard de l’article L 132-2 alinéa 2 du code monétaire et financier,

Alors, de quatrième part, que les conditions générales du contrat carte Visa premier applicables à la carte bancaire considérée précisent, dans un paragraphe intitulé « Réclamations», que « Le Crédit Lyonnais s’engage à faire diligence auprès de tout correspondant afin que celui-ci communique les pièces relatives à l’opération contestée », engagement qui, selon les époux F-L…, n’avait pas été respecté par la Banque ; qu’en considérant qu’« il n’appartenait pas au Crédit Lyonnais de s’immiscer dans un litige relatif à l’exécution des conditions de réservation d’une chambre d’hôtel en réclamant la preuve que l’acceptation de la demande de réservation avait été communiquée à Fabienne F-L… », le Juge de proximité a violé l’article 1134 du code civil,

Alors, de cinquième part, que les conditions générales du contrat carte Visa premier applicables à la carte bancaire considérée indiquent également, dans le paragraphe intitulé « Réclamations », que « Le titulaire de la carte sera remboursé… d’une manière générale dans tous les cas de réclamation justifiée » ; qu’en ne recherchant pas, ainsi qu’il y était invité, si la réclamation formulée par les époux F-L… était justifiée, le Juge de proximité a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1134 du code civil,

Alors, de sixième part, que, bien plus, les conditions générales du contrat carte Visa premier applicables à la carte bancaire considérée indiquent encore, dans le paragraphe intitulé « Réclamations », que « Le titulaire de la carte sera remboursé… en cas de contestation de bonne foi d’un débit lié à des achats à distance n’impliquant pas l’utilisation physique de la carte » ;
qu’en ne recherchant pas, ainsi qu’il y était invité, si la contestation des époux F-L…, liée à un achat à distance, était émise de bonne foi, le Juge de proximité a derechef privé sa décision de base légale au regard de l’article 1134 du code civil, Et alors, enfin, que selon l’article L 132-4 du code monétaire et financier, dans le cas où le paiement contesté a été effectué frauduleusement, à distance, sans utilisation physique de sa carte, si le titulaire de celle-ci conteste par écrit avoir effectué un paiement ou un retrait, les sommes contestées lui sont recréditées sur son compte par l’émetteur de la carte ou restituées, sans frais, au plus tard dans le délai d’un mois à compter de la réception de la contestation ;
qu’en se prononçant de la sorte, au sujet d’un paiement effectué à distance, sans utilisation physique de la carte, par simple communication, sur un site internet, du numéro de la carte, de sa date de validité et du cryptogramme à trois chiffres indiqué au verso, ayant donné lieu à contestation de la part du titulaire de la carte, dont la Banque était dès lors tenue de recréditer le compte, le Juge de proximité a violé l’article L 132-4 du code monétaire et financier.

La Cour : Mme Favre (président),

Avocats : SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky

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