Jurisprudence : Diffamation
Tribunal de Grande Instance de Paris 17ème chambre Jugement du 29 octobre 2010
Claude O. / Monique T.
diffamation
FAITS ET PROCEDURE
Par exploit d’huissier en date du 25 janvier 2010, Claude O. a fait citer devant ce tribunal (17ème chambre correctionnelle – chambre de la presse), à l’audience du 26 mars 2010, Monique T. pour y répondre du délit de diffamation publique envers particulier, prévu et réprimé par les articles 29 alinéa 1er et 32 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, en qualité d’auteur principal et ce par la mise en ligne, à compter du 7 décembre 2009, de propos que la partie civile considère attentatoires à son honneur et à sa considération.
Le tribunal a fixé à 800 € le montant de la consignation, qui a été versée le 31 mai 2010, et a renvoyé l’affaire aux audiences des 25 juin 2010, pour fixation, et 24 septembre 2010, pour plaider.
A cette date, à l’appel de la cause, le président a constaté que seule la partie civile était présente assistée de son conseil, puis il a donné connaissance de l’acte qui a saisi le tribunal.
En l’absence de comparution de Monique T., constatant que la citation n’a pas été délivrée à la personne de l’intéressée et qu’il n’est pas établi que celle-ci en ait eu connaissance, il y a lieu de statuer par jugement par défaut à son égard, en application des dispositions de l’article 412 du code de procédure pénale.
Le tribunal a ensuite entendu, dans l’ordre prescrit par la loi :
– le conseil de la partie civile qui a développé ses conclusions en sollicitant, avec le bénéfice de l’exécution provisoire, la condamnation de Monique T. à lui verser la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts au titre de son préjudice moral ainsi que celle de 4000 € au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale, outre le coût des rapports du Celog.
– puis, le ministère public en ses réquisitions, tendant à la condamnation de la prévenue.
A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré et les parties ont été informées, conformément aux dispositions de l’article 462, alinéa 2, du code de procédure pénale, que le jugement serait prononcé le 29 octobre 2010.
A cette date, la décision suivante a été rendue.
DISCUSSION
Claude O. expose qu’il est professeur hors classe de l’Education Nationale et, qu’intervenant d’une part en conception mécanique et simulation de maintien de systèmes et d’autre part en génie logiciel à l’université de Valenciennes, il utilise très souvent le réseau internet, où il est très connu.
Le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance d’Avesnes sur Helpe, entérinant l’accord des parents pour que la résidence habituelle des enfants soit fixée chez le père, ayant été suivie d’autres décisions ayant maintenu cette disposition.
Sur les propos poursuivis
Le 7 décembre 2009 sur le blog de Monique T. intitulé “Ma vie massacrée », accessible à l’adresse « maviemassacree.blog……. » a été publié, sous le pseudonyme “Orlane KI”, l’article suivant :
“Aujourd’hui, dans cette note, je vais citer trois noms. Trois douloureux patronymes qu’il m’est pénible d’entendre ou de lire Jacques T. Claude O. et Daniel D.
Chronologiquement, ils sont à l’origine du massacre de ma vie mais les deux premiers sont encore très actifs aujourd’hui.
(…)
Claude O., le géniteur de mes jumelles, s’est servi de moi : pour lui je n‘ai été qu‘une mère-porteuse. Il faisait intrusion chez moi la nuit ou en plein jour et me battait comme le malade mental qu‘il est réellement? Ce même malade a obtenu la garde de mes filles et c’est là que Daniel D., un autre “déréglé du cerveau » a sa grande part de responsabilité.
Toujours sous le pseudonyme “Orlane KI », Monique T. a diffusé sur son profil public Facebook à l’adresse http://facebook.com/….search “, les propos suivants :
* 7 décembre, à 14 h11 : “Il y a 21 ans ½, jai été mère porteuse sans le savoir… Aujourd’hui j’enlève le mot de “mère“, je ne suis plus que “porteuse“… ce vénéré Claude O., dont personne ne se doute qu’il battait sa propre mère est une saloperie de la pire espèce…”,
* 7 décembre à 19 h 17 : “ Le détail de leurs actes fera l’objet de certains chapitres, des dossiers officiels (ceux du procès que Claude O. m’a fait pour me voler mes filles grâce à de faux témoignages) paraitront en annexe de cet ouvrage pour lequel je n‘aurai aucun mal à trouver un éditeur »,
* 7 décembre, à 23 h 54 : “La forme en commun avec Claude O., l’homme qui m’a volé mes filles… alors que moi, comme cette éléphante, j’ai donné la vie dans la douleur, le sang… l’émotion… »
* 8 décembre, à 13 h 58 : “Mais que Claude O. est un salopard qui battait sa propre mère, ce n‘est pas un scoop ! TOUT son village de M. est au courant puisque ce sont ses amis d’enfance qui m‘ont rapporté ce fait…D‘autres bruits courent encore à ce sujet… Je vais prendre soin de les Revérifier avant d’en parler dans mon livre… “,
je venais!”
* 8 décembre à 19 h03 : “ (….) Si je ne dis pas la vérité, je peux être attaquée en justice puisque je cite de VRAIS noms, de VRAIES dates, de VRAIS lieux…
Sur le caractère diffamatoire des propos
Il sera rappelé que l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 définit la diffamation comme “toute allégation au imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne”, le fait imputé étant entendu comme devant être suffisamment précis, détachable du débat d’opinion et distinct du jugement de valeur pour pouvoir, le cas échéant, faire aisément l’objet d’une preuve et d’un débat contradictoire.
Ce délit, qui est caractérisé même si l’imputation est formulée sous forme déguisée ou dubitative ou encore par voie d’insinuation se distingue ainsi de l’injure définie par le même texte comme “toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait », ainsi que l’expression subjective d’une opinion, dont la pertinence peut être librement discutée dans le cadre d’un débat d’idées mais dont la vérité ne saurait être prouvée.
Par ailleurs, le caractère diffamatoire d’une imputation doit s’apprécier en se référant à des considérations objectives, indifférentes à la sensibilité particulière de la personne visée ou aux intentions de l’auteur du propos.
En l’espèce, il est imputé à Claude O. d’avoir exercé des violences physiques sur la mère de ses enfants, Monique T., ainsi que sur sa propre mère, et d’avoir produit de faux témoignages dans le cadre d’une procédure l’ayant opposé à la prévenue.
Ces propos portant atteinte à l’honneur et à la considération de la partie civile, caractérisent une allégation diffamatoire.
Monique T., qui n’a pas offert de prouver la vérité des faits diffamatoires ni invoqué l’excuse de bonne foi, sera déclarée coupable du délit de diffamation et condamnée à une peine d’amende de 1000 € qui sera assortie du sursis simple dont elle peut bénéficier.
Sur l’action civile
Claude O. sera déclaré recevable en sa constitution de partie civile et se verra allouer en réparation du préjudice moral qu’il allègue la somme de 1000 € à titre de dommages et intérêts ainsi que celle de 956,80 € en remboursement des frais des constats établis par le Celog les 14 décembre 2009 et 28 janvier 2010
Monique T. sera également condamnée à payer à Claude O. une somme de 2000 € sur le fondement des dispositions de l’article 475-1 du code de procédure pénale.
DECISION
Le tribunal statuant publiquement, en matière correctionnelle, en premier ressort et par jugement contradictoire à l’égard de Claude O., partie civile et par jugement, par défaut en application de l’article 412 du code de procédure pénale à l’encontre de Monique T., prévenue :
. Déclare Monique T. coupable du délit de diffamation publique envers un particulier, en l’espèce Claude O., faits commis à compter du 7 décembre 2009.
En répression,
. La condamne à une amende délictuelle de 1000 €.
Vu les articles 132-29 à 132-34 du code pénal.
. Dit qu’il sera sursis totalement à l’exécution de cette peine dans les conditions prévues par ces articles.
. Reçoit Claude O. en sa constitution de partie civile.
. Condamne Monique T. à payer à Claude O. la somme de 1000 € à titre de dommages et intérêts au titre de son préjudice moral et celle de 956,80 € pour le préjudice matériel.
. Condamne Monique T. à paver à Claude O. la somme de 2000 € sur le fondement de l’article 475-1 du code de procédure pénale.
Le tribunal : Dominique Lefebvre-Ligneul (vice-président), Anne-Marie Sauteraud (vice-président), Alain Bourla (premier juge)
Avocat : Me Anthony Bem
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