Jurisprudence : E-commerce
Tribunal de commerce de Paris, ordonnance de référé du 25 novembre 2016
Viaticum / American Airlines Inc
astreinte - e-commerce - flux de données - interruption du flux de données - référé - résiliation du contrat - rétablissement des relations commerciales - rupture brutale des relations commerciales
Pour les faits relatés dans son acte introductif d’instance délivré après une autorisation d’assigner d’heure à heure par ordonnance du président du tribunal de commerce de Paris le 2 novembre 2016 et selon acte extra judiciaire du 7 novembre suivant, la SA Viaticum a invité la SC American Airlines Inc à comparaître devant le juge des référés le 9 novembre 2016 pour :
Vu les articles 872 et 873 du Code de procédure civile,
SUR L’URGENCE
Dire et juger qu’il y a urgence à rétablir le flux de données relatifs à la compagnie American Airlines au profit de la société Viaticum,
Condamner la société American Airlines à rétablir sous astreinte de 1000 euros par jour de retard, à compter de la signification de la présente ordonnance, le flux des données au profit de la société Viaticum.
Condamner la société American Airlines sous astreinte de 1000 euros par jour de retard à ne pas supprimer son flux de données en cas de rétablissement des publicités de la société Viaticum dans les comparateurs de prix
SUR LE TROUBLE MANIFESTEMENT ILLICITE
Dire et juger que la suppression par la société American Airlines du flux des données au profit de la société Viaticum constitue un trouble manifestement illicite en raison de la rupture brutale de la relation commerciale établie et une tentative de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.
Condamner la société American Airlines à rétablir sous astreinte de 1000 euros par jour de retard, à compter de la signification de la présente Ordonnance, le flux des données au profit de la société Viaticum, et de son site Internet « Bourse des Vols ».
Condamner la société American Airlines sous astreinte de 1000 euros par jour de retard à ne pas supprimer son flux de données en cas de rétablissement des publicités de la société Viaticum dans les comparateurs de prix.
Condamner la société American Airlines à verser à la société Viaticum la somme de 20 000 euros à titre de provision.
Condamner la société American Airlines à verser aux demanderesses la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
L’affaire a été renvoyée à l’audience du 16 novembre 2016.
La SC American Airlines Inc se présente et dépose des conclusions motivées par lesquelles elle nous demande de :
Vu les articles 872 et 873 du Code de Procédure Civile,
Vu l’existence d’une contestation sérieuse.
Constater l’existence d’une contestation sérieuse,
Dire n’y avoir lieu à référé
Par conséquent,
Débouter la demanderesse de l’ensemble de ses demandes,
Condamner la demanderesse à lui régler la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux entiers dépens.
Après avoir entendu les conseils des parties en leurs explications et observations, nous avons remis le prononcé de notre ordonnance, par mise à disposition au greffe, le vendredi 25 novembre 2016
Les notes en délibéré successives adressées par les parties, non sollicitées, seront écartées.
DISCUSSION
Viaticum est un agent de voyages, accrédité IATA, qui distribue des billets d’avion, notamment pour le compte de la compagnie American Airlines depuis une vingtaine d’années.
Lui reprochant de ne pas respecter ses instructions, ce que conteste formellement Viaticum, American Airlines a résilié le contrat la liant à Viaticum.
Il n’appartient pas au juge des référés de se prononcer sur le bien-fondé de cette rupture, mais nous devons, cependant, observer qu’American Airlines n’invoque pas l’existence d’une clause résolutoire dans le contrat qui lie les parties et que si la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, lorsqu’une partie ne respecte pas ses engagements, il n’en reste pas moins, aux termes de l’article 1184 ancien du code civil, que la résolution doit être demandée en justice. Or, dans l’état actuel des choses, aucune décision de ce type n’est intervenue.
Nous relevons, par ailleurs, que l’arrêt brutal des relations entre American Airlines et Viaticum place cette dernière dans une situation difficile, pouvant mettre en cause sa survie.
En conséquence, en application de l’article 873 alinéa 1 du code de procédure civile, et pour prévenir le dommage imminent que subirait Viaticum, nous ordonnerons le rétablissement des relations dans les conditions fixées au dispositif ci-dessous, jusqu’à ce que le juge du fond ait statué sur la rupture des relations.
Viaticum demande encore que lui soit attribuée une somme de 20 000 € en réparation du préjudice qu’elle a subi, mais, en l’absence de tout élément évident sur la faute alléguée d’American Airlines, nous dirons qu’il n’y a lieu à référé.
Viaticum a dû, pour faire valoir ses droits, exposer des frais irrépétibles qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge et nous condamnerons donc American Airlines à lui verser la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
DÉCISION
Par ordonnance contradictoire et en premier ressort, nous :
Ordonnons à American Airlines, sous astreinte de 1 000 € par jour de retard à compter du 4e jour suivant la signification de notre ordonnance, de rétablir les relations commerciales avec Viaticum, notamment le flux de données électroniques, et de les maintenir jusqu’au prononcé du jugement au fond dans l’instance ci-dessous, sous astreinte de 1 000 € par jour en cas d’interruption, étant entendu que ces astreintes sont prononcées pour une durée de
60 jours, au-delà de laquelle il sera fait droit à nouveau,
Ordonnons à Viaticum d’assigner American Airlines au fond et à bref délai sur la rupture de leurs relations avant le 15 décembre 2016,
Disons que notre ordonnance sera immédiatement caduque de plein droit si l’assignation à bref délai visée ci-dessus n’a pas été délivrée au 15 décembre 2016 ou, si l’instance ayant été introduite, Viaticum ne respectait pas les règles propres aux procédures à bref délai (notamment si elle demandait un renvoi),
Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande de dommages-intérêts,
Condamnons American Airlines à payer la somme de 1 500 € à Viaticum en application de l’article 700 du code de procédure civile,
Déboutons les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
Condamnons en outre la SC American Airlines Inc, société de droit étranger, immatriculée au RCS de Bobigny sous le n° 780 095 493 aux dépens de l’instance.
Le Tribunal : Michel Hémonnot (président) et Renaud Dragon (greffier)
Avocats : Me Arnaud Dimeglio, Me Frédéric Pradelles
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