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Jurisprudence : Droit d'auteur

mardi 11 février 2003
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Tribunal de Grande Instance de Paris Ordonnance de référé du 11 février 2003

Yann Lazou / Association Party Time, Kamal R., Alexandre P.

agent assermenté - constat - contrat - diffusion - droit d'auteur - publication - reproduction

Nous, président,

Vu l’exploit introductif d’instance en date du 6 janvier 2003,

Vu les conclusions respectives des parties,

Après avoir entendu les conseils des parties en leurs observations orales ;

La discussion

Attendu que M. Yann Lazou affirme être l’auteur de deux dessins originaux réalisés au mois d’octobre 1998 ;

Que le premier dessin représente un personnage vêtu d’un costume marron clair, chaussé de baskets, parlant dans un micro, dans une pose de chanteur, avec une tête plus volumineuse en proportion que le reste de son corps, de grands yeux marrons, une arcade sourcilière soulignée et les pommettes saillantes ; que la signature Lazoo figure à droite du pied gauche de ce personnage ;

Que le deuxième dessin représente une jeune femme noire vêtue d’un bikini de couleur dorée et d’escarpin assortis, le buste en avant, les mains posées sur les cuisses, en train de danser, les cheveux plaqués avec trois boucles lui revenant sur le front et portant trois anneaux à l’oreille droite ainsi qu’un bijou dans le nez ; que la signature Lazoo figure à gauche de l’illustration ;

Que ces dessins ont été publiés au mois de décembre 1998 dans le magazine l’Affiche, mensuel édité par les Editions Larivière avec l’autorisation de M. Yann Lazou ; qu’il s’agissait alors d’illustrer les articles intitulés « Les intégrés » et « 1998-1999 L’enfer gangster » ;

Attendu que M. Yann Lazou s’est aperçu que des phonogrammes ainsi que des cassettes audio reproduisaient servilement, au recto de leurs pochettes, les deux dessins ; qu’une pleine page de publicité comportant la reproduction de ces dessins avait été publiée dans le magazine L’Affiche ;

Qu’il s’est avéré que l’Association Party Time commercialise les phonogrammes et cassettes audio dont l’auteur est M. Alexandre P. alias DJ Xela ;

Qu’un constat de l’Agence pour la Protection des Programmes (APP), les 18 et 19 décembre 2002, confirmait ces faits et révélait que le site internet de l’association comportait la reproduction de quatre pochettes de cassettes audio présentant des illustrations identiques et quatre nouvelles pochettes de disques vinyles présentant également des illustrations identiques ;

Attendu que les défendeurs ne contestent pas que M. Yann Lazou est l’auteur des deux dessins ;

Qu’ils ne contestent pas avoir commercialisé les dits dessins sans l’autorisation de leur auteur ;

Que l’Association Party Time affirme avoir acquis les deux dessins auprès de la société Biggraf il y a plusieurs années et avoir agi de bonne foi ;

Que, devant les droits de M. Yann Lazou qu’elle ne conteste pas, elle propose de procéder à la suppression de l’ensemble des pages accessibles sur internet et reproduisant les dessins en cause et d’autre part de stopper la diffusion des autres supports portant les mêmes dessins ;

Qu’il n’y a donc selon elle aucun trouble illicite ;

Attendu qu’aux termes de l’article L 122-4 du code de la propriété intellectuelle « toute représentation intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droits ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque  » ;

Attendu qu’aux termes de l’article 809 alinéa 1er, le président peut toujours même en présence d’une contestation sérieuse prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ;

Qu’il y a là, contrairement aux allégations des défendeurs, un trouble manifestement illicite qu’il convient de faire cesser, les défendeurs ne justifiant d’aucune autorisation de l’auteur des dessins pour que ces dessins soient publiés et la notion de bonne foi étant inopérante en l’espèce ;

Qu’il convient de donner acte aux défendeurs de ce qu’ils s’engagent à cesser toute diffusion ou commercialisation des supports comprenant les dites illustrations et de condamner l’Association Party Time et M. Alexandre P., auteur du disque, en tant que de besoin de cesser toute diffusion ou commercialisation de supports comprenant les dites illustrations, et ce sous astreinte ;

Que par contre, il n’appartient pas au juge des référés de liquider l’astreinte ;

Que M. Kamal R., président de l’Association Party Time, doit être mis hors de cause, en ce qu’il est assigné personnellement ;

Attendu que sur le préjudice de M. Yann Lazou, il convient de renvoyer les parties à se pourvoir au fond, l’Association Party Time et M. Alexandre P. affirmant avoir achetés les dessins à une autre société et l’ensemble des personnes physiques et morales concernées par la présente procédure devant s’expliquer dès lors sur le cheminement et l’usage de ces illustrations depuis leur création jusqu’à la date à laquelle M. Yann Lazou est intervenu pour manifester son opposition ;

Attendu qu’il sera fait droit à la demande de publication du dispositif de la présente décision dans deux journaux au choix, du demandeur ;

Que, par contre, la demande de publication pendant 6 mois sur la page internet n’est pas justifiée ;

Attendu qu’il y a lieu à exécution provisoire de la présente décision ;

Attendu qu’il apparaît inéquitable de laisser à la charge de M. Yann Lazou les frais irrépétibles qu’il a exposés ;

Que l’Association Party Time et M. Alexandre P. doivent être condamnés solidairement à lui payer la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du ncpc ;

Attendu que l’Association Party Time et M. Alexandre P., parties succombantes doivent les dépens.

La décision

Statuant, en premier ressort, par ordonnance contradictoire,

. Mettons hors de cause M. Kamal R.

. Ordonnons à l’Association Party Time et à M. Alexandre P. de supprimer ou faire procéder à la suppression de l’ensemble des pages accessibles sur internet reproduisant les dessins en cause et/ou permettant la diffusion des produits et/ou documents reproduisant les dessins en cause et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de la présente ordonnance.

. Interdisons à l’Association Party Time et à M. Alexandre P. de reproduire, éditer, diffuser et ou commercialiser, par quelque moyen que ce soit, tout produit et/ou document comportant la reproduction des dessins en cause et ce sous astreinte de 500 euros par infraction constatée à compter de la signification de la présente ordonnance.

. Autorisons M. Yann Lazou à faire publier le dispositif de la présente ordonnance dans deux magazines de son choix, aux frais de l’Association Party Time et de M. Alexandre P., sans que le coût de chaque insertion excède 3000 euros par insertion.

. Renvoyons les parties à mieux se pourvoir sur le montant du préjudice de M. Yann Lazou.

. Disons que l’ordonnance est exécutoire par provision.

. Condamnons l’Association Party Time et M. Alexandre P. solidairement à payer à M. Yann Lazou la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du ncpc.

. Déboutons les parties de leurs autres demandes.

. Condamnons l’Association Party Time et M. Alexandre P. aux dépens.

Le tribunal : Mme Apelle( vice-président)

Avocats : Me Moyne, Me Pasquet Marinacce

Notre présentation de la décision

 
 

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