Jurisprudence : Marques
Tribunal de grande instance de Paris 3ème chambre, 1ère section Jugement du 28 juin 2006
Bdpme / Richard A.
dénomination sociale - marques - nom commercial - nom de domaine - parisitisme - site internet
FAITS ET PROCEDURE
Par acte du 18 septembre 2003, la société Banque du développement des PME, a fait assigner Richard A. devant ce tribunal en cessation d’agissements déloyaux et parasitaires résultant de l’enregistrement et de l’exploitation du nom de domaine www.bdpme.biz par usurpation de son sigle social Bdpme, de son nom commercial Bdpme et de son nom de domaine www.bdpme.fr en revendication de la marque française Bdpme n°03 223 100 déposée par le défendeur en fraude de ses droits ainsi qu’en transfert à son profit des noms de domaine www.bdpme.biz et www.bdpme.tm.fr enregistrés par le défendeur.
Dans ses dernières écritures signifiées le 29 avril 2005, la société Banque du développement des PME a demandé à la juridiction saisie de :
Vu l’article 8 de la Convention d’Union de Paris,
Vu l’article 1382 du code civil,
Vu l’article L 712-6 du code de la propriété intellectuelle,
Vu la charte de nommage de l’Afnic,
– dire et juger que Richard A., en enregistrant auprès de NeuLevel la dénomination « bdpme » à titre de nom de domaine dans l’extension « .biz » et en exploitant le site internet « bdpme.biz », a commis des actes d’usurpation de sigle social, de nom commercial et de nom de domaine et s’est rendu coupable de comportements parasitaires au préjudice de la société Banque du développement des PME,
En conséquence,
– faire interdiction à Richard A. de poursuivre ces agissements et notamment de procéder à tout nouvel enregistrement de nom de domaine comportant la dénomination « bdpme » ou une dénomination de nature à prêter confusion avec celle-ci, ce sous astreinte de 2000 € par infraction constatée à compter de la signification du jugement à intervenir,
– ordonner le transfert au profit de la société Banque du développement des PME du nom de domaine « bdpme.biz » aux frais exclusifs de Richard A. sous astreinte de 2000 € par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir,
– faire interdiction à Richard A. d’utiliser la dénomination « Bdpme » à quelque titre que ce soit, de quelque manière que ce soit et sous quelque forme que ce soit, sous astreinte de 2000 € par infraction commise à compter de la signification du jugement à intervenir,
– en particulier, enjoindre à Richard A. de supprimer la mention « Bdpme », sous la rubrique nom commercial, de l’extrait Kbis portant le numéro RCS de Paris 271 057 230, sous astreinte de 2000 € par infraction commise à compter de la signification du jugement à intervenir,
– condamner Richard A. à verser à la société Banque du développement des PME la somme de 30 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant des atteintes portées à son sigle social, son nom commercial et nom de domaine et des agissements parasitaires,
– dire et juger que les allégations contenues sur les pages personnelles intitulées « Communiqué du 2/07/2004 : http://www.bdmpe.fr contre http://www.bdmpe.tm.fr du site « rc….site.voila.fr » comportent des propos dénigrants et inexacts à l’encontre de la société Banque du développement des PME,
En conséquence,
– ordonner la suppression des pages personnelles intitulées « Communiqué du 2/07/2004 : http://www.bdmpe.fr contre http://www.bdmpe.tm.fr du site « rc….site.voila.fr », sous astreinte de 2000 € par infraction commise à compter de la signification du jugement à intervenir,
– condamner Richard A. à verser à la société Banque du développement des PME la somme de 15 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice de dénigrement,
– dire et juger recevable l’action en revendication de la société Banque du développement des PME à l’encontre de Richard A.,
– constater que le dépôt de la marque Bdpme sous le n°033 223 100 a été effectué par Richard A. en fraude des droits de la société Banque du développement des PME, et que ce dépôt et son exploitation par Richard A. portent atteinte aux droits de la société Banque du développement des PME sur son sigle social, son nom commercial et son nom de domaine,
En conséquence,
– ordonner au profit de la société Banque du développement des PME le transfert et sa publicité au Registre National des marques de la propriété de la demande d’enregistrement de marque française n°03 223 100 aux frais exclusifs de Richard A. sous astreinte de 2000 € par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir,
– ordonner le transfert au profit de la société Banque du développement des PME du nom de domaine » bdpme.tm.fr » aux frais exclusifs de Richard A. sous astreinte de 2000 € par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir,
– condamner Richard A. à verser à la société Banque du développement des PME la somme de 15 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant du caractère frauduleux du dépôt n°033 223 100,
– dire et juger mal fondée la demande reconventionnelle de Richard A. en dommages-intérêts pour procédure abusive,
En conséquence,
– débouter Richard A. de l’ensemble de ses moyens, fins et prétentions,
– autoriser la société Banque du développement des PME à faire publier tout ou partie du dispositif du jugement à intervenir dans trois journaux ou revues de son choix, aux frais de Richard A., à hauteur d’un coût total d’insertion de 5000 € HT,
– ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir, nonobstant appel et sans constitution de garantie,
– condamner Richard A. à verser à la société Banque du développement des PME la somme de 5000 € au titre de l’article 700 du ncpc,
– le condamner aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions du 15 juin 2005, Richard A. a demandé au tribunal de :
Sur les prétendus actes de concurrence déloyale et les agissements parasitaires commis par Richard A.,
Vu les pièces versées aux débats,
Vu l’article 1382 du code civil,
– dire et juger que Richard A., en enregistrant le nom de domaine « bdpme.biz » et en faisant inscrire sur l’extrait Kbis portant le numéro RCS Paris 271 057 230 sous la rubrique nom commercial la mention « Bdpme : Business Développement PME », n’a commis aucun acte d’usurpation de sigle social, de nom commercial et de nom de domaine,
– dire et juger que Richard A., en enregistrant le nom de domaine » bdpme.biz » et en faisant inscrire sur l’extrait Kbis portant le numéro RCS Paris 271 057 230 sous la rubrique nom commercial la mention « Bdpme : Business Développement PME », n’a commis aucun acte de parasitisme ou de concurrence déloyale,
– en conséquence, débouter la société Banque du développement des PME de l’ensemble de ses moyens, fins et prétentions,
Sur la revendication de la demande de marque française n° 033 223 100,
Vu les pièces versées aux débats,
Vu l’article L 712-6 du code de la propriété intellectuelle,
Vu l’article 1382 du code civil,
– dire et juger irrecevable l’action en revendication de la société Banque du développement des PME à l’encontre de Richard A.,
– constater que le dépôt de la marque « Bdpme » sous le n°033 223 100 n’a pas été effectué en fraude des droits de la société Banque du développement des PME et que son exploitation par Richard A. ne porte aucune atteinte aux droits de la société Banque du développement des PME,
– en conséquence, débouter la société Banque du développement des PME de l’ensemble de ses moyens, fins et prétentions,
A titre reconventionnel, sur le préjudice subi par Richard A. et sur les dommages et intérêts pour procédure abusive,
Vu les pièces versées aux débats,
Vu l’article 32-1 du ncpc,
Vu l’article 1382 du code civil,
– dire et juger la présente procédure abusive,
– condamner la société Banque du développement des PME à verser à Richard A. la somme de 70 000 € de dommages-intérêts pour procédure abusive,
– ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir, nonobstant appel et sans constitution de garantie,
Sur l’article 700 du ncpc,
Vu l’article 700 du ncpc,
– condamner la société Banque du développement des PME à verser à Richard A. la somme de 5000 € au titre de l’article 700 du ncpc,
– la condamner aux entiers dépens.
DISCUSSION
La société Banque du développement des PME est immatriculée au RCS depuis le 25 octobre 1996 avec pour sigle dûment enregistré Bdpme suivant l’extrait Kbis du 11 septembre 2003 versé aux débats. Elle a, selon cette même pièce, pour activité de « faciliter le développement et la pérennité des PME notamment en facilitant leur accès à toutes les formes de concours financiers qui leur sont nécessaires ».
Elle indique que la dénomination Bdpme sert à désigner ses activités économiques aux yeux du public et dans les différentes manifestations auxquelles elle participe et qu’elle constitue de ce fait son nom commercial, nonobstant son absence de mention en tant que tel sur l’extrait Kbis.
La société Banque du développement des PME a été absorbée par la société Cepme avec effet à compter du 1er janvier 2004, laquelle a adopté la dénomination sociale « Bdpme » (Banque du Développement des PME) au vu des « statuts de la société Cepme devenue Bdpme après fusion avec sa maison mère ».
La société Banque du développement des PME indique avoir réservé dès le 16 juillet 1997 le nom de domaine www.bdpme.fr et ouvert son site internet le 1er mai 2000.
La requérante expose que désireuse de créer un site internet à vocation internationale dans l’extension générique « .biz » consacrée aux affaires, elle a souhaité en vain enregistrer le nom de domaine « bdpme ».biz », celui-ci étant déjà enregistré par Richard A., et de depuis le 10 juillet 2002, selon le constat de l’Agence pour la Protection des Programmes du 16 juillet 2003.
Elle considère que la réservation et l’exploitation de ce site par Richard A. portent atteinte à son sigle social, son nom commercial et son nom de domaine Bdpme et sont constitutifs d’agissements parasitaires.
La société Banque du développement des PME fait aussi valoir que Richard A. a également déposé à l’Inpi le 30 avril 2003 la marque française bdpme sous le n°033 223 100 ainsi que, sur le fondement de cette marque, le nom de domaine « bdpme.tm.fr » le 31 juillet 2003, alors qu’elle l’avait mis en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 juillet 2003 de cesser de porter atteinte à ses droits.
Enfin, elle souligne que Richard A. a poursuivi ses agissements contraires au jeu normal de la concurrence en s’immatriculant, au début de l’année 2004, au RCS de Paris sous le nom « Bdpme : Business Développement PME ».
Richard A. est le fondateur de l’entreprise « Business Développement PME » immatriculée au RCS depuis le 15 décembre 2003 dont l’objet est « conseils et services aux entreprises ».
Richard A. réplique que lors de l’enregistrement de son nom de domaine « bdpme.biz », il a informé par courrier électronique du 3 octobre 2002 la société Banque du développement des PME des activités de son entreprise ainsi que la mise en ligne de son site, laquelle n’a pas réagi et l’a ainsi conforté à s’investir davantage dans son projet qui s’est concrétisé notamment par le dépôt de la marque bdpme auprès de l’Inpi afin d’obtenir une extension en « .fr » avec le nom de domaine « bdpme.tm.fr » devenu effectif le 31 juillet 2003.
Il assure qu’en réalité la société Banque du développement des PME a tardivement communiqué sur le sigle bdpme, lequel n’était connu en 2002 que de quelques milieux professionnels seulement et qu’il n’a donc commis aucun acte d’usurpation fautive, et ce d’autant qu’il n’existe aucun risque de confusion s’agissant d’activités et de services distincts, la société Banque du développement des PME ayant pour vocation d’accorder des prêts ou de garantir le remboursement d’un financement, alors que son activité est le conseil en matière de nouvelles technologies et notamment l’assistance en matière de pilotage de projets informatiques.
Sur la titularité de droits antérieurs de la société Banque du développement des PME sur le sigle Bdpme :
Il est constant que la personne qui désire enregistrer un nom de domaine doit vérifier préalablement que celui-ci ne porte pas atteinte aux droits antérieurs de tiers, et notamment :
– d’une dénomination sociale, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public,
– d’un nom commercial connu sur l’ensemble du territoire national, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public,
– d’un nom de domaine effectivement exploité.
En application de l’article L 711-4 du code de la propriété intellectuelle, l’antériorité de la dénomination sociale existe dès l’immatriculation de la société au RCS, sans qu’il soit nécessaire d’en démontrer la notoriété. L’identité des signes n’est toutefois pas suffisante à créer un risque de confusion dans l’esprit du public, lequel présuppose notamment des activités si ce n’est identiques au moins similaires, étant précisé que dans cette recherche du risque de confusion, il n’y a pas lieu de se limiter à l’objet social tel qu’il résulte du RCS mais de s’attacher à l’activité réellement exercée par les parties.
Quand au nom commercial, l’article 8 de la Convention de Paris dispose que « le nom commercial sera protégé dans tous les pays de l’Union sans obligation de dépôt ou d’enregistrement, qu’il fasse ou non partie d’une marque de fabrique ou de commerce ». Cependant, pour bénéficier d’une antériorité, le nom commercial doit être connu sur l’ensemble du territoire français. S’agissant d’un critère géographique, cela implique une large diffusion sur le territoire laquelle est distincte de la notoriété, n’étant pas exigé que le nom soit connu d’un large public.
En l’espèce, l’extrait Kbis de la société Banque du développement des PME fait expressément mention du terme Bdpme à titre de « sigle », et ce depuis la transcription au RCS (cf extrait Kbis du 8 décembre 1997) d’une décision en ce sens de l’Assemblée générale de la requérante du 27 mars 1997, sigle sous lequel elle agit effectivement comme en témoignent des brochures commerciales éditées en 2001 par ses soins et destinées aux créateurs d’entreprise ou des publicités et sous lequel elle est connue des tiers, notamment des journalistes qui la désignent ainsi dans des articles parus dans Les Echos du 9 avril 1997, du 16 janvier 1998 et du 3 mars 2000, dans La Voix du Nord du 17 janvier 1997, dans Sud-Ouest du 21 avril 1998, dans le Figaro du 21 janvier 1997, du 18 février 1997 et du 3 février 1999, dans la Provence du 24 octobre 2000, dans France Soir du 11 octobre 2000, dans Le Parisien du 11 octobre 2000, dans La Montagne du 21 avril 2000, dans le Moniteur des Travaux publics et du bâtiment du 9 mars 2001, dans la Dépêche du Midi du 17 octobre 2001, dans Le Monde du 21 janvier 1997, du 19 avril 2000 et du 11 janvier 2002, soit dans la presse spécialisée mais également dans la presse grand public d’une large diffusion nationale.
En conséquence, il convient de considérer au vu des pièces versées aux débats que le sigle bdpme est utilisé par la société requérante comme nom commercial, lequel est nécessairement connu sur l’ensemble du territoire du fait de sa large diffusion par voie de presse et publicitaire du public concerné, soit les PME.
Richard A. indique par ailleurs avoir effectué une recherche, avant de procéder à l’enregistrement de son nom de domaine et à l’immatriculation de son entreprise, afin de d’assurer que l’utilisation du terme Bdpme par lui-même ne porterait pas atteinte aux droits de tiers. Il reconnaît avoir constaté alors que « bdpme.fr » était réservé depuis le 2 mars 1999 par la société Banque du développement des PME, mais dit-il non encore exploité, et « bdpme.com » créé le 3 mars 2001 par une personne physique résidant aux Etats-Unis et s’être adressé à la société Banque du développement des PME pour l’informer de l’enregistrement de son nom de domaine.
Le silence de la société Banque du développement des PME à cet égard ne peut valoir acceptation de celle-ci de l’utilisation du sigle bdpme par Richard A. Par ailleurs, ceci démontre qu’en enregistrant son nom de domaine, Richard A. avait bien connaissance de l’existence de celui de la société Banque du développement des PME, lequel contrairement à ce qui est soutenu était alors exploité, et ce depuis le mois de juillet 2000 au vu des pièces produites.
En conséquence, la société Banque du développement des PME justifie de droits antérieurs au 10 juillet 2002, date d’enregistrement du nom de domaine « bdpme.biz » par Richard A., sur le sigle bdpme utilisé par elle comme abréviation de sa dénomination sociale et nom commercial ainsi que comme nom de domaine.
Sur le risque de confusion :
La société Banque du développement des PME fait valoir que les activités développées par Richard A., par l’intermédiaire de son site internet www.bdpme.biz sont similaires à des activités exercées par la requérante, ce que dénie le défendeur.
Il n’est pas contesté que la vocation sociale de la société Banque du développement des PME est de favoriser la création et le développement des PME, « notamment en facilitant leurs accès à toutes les formes de concours financiers qui leur sont nécessaires » comme le précise son objet social tel qu’il résulte de l’extrait Kbis.
Si l’emploi de l’adverbe « notamment » laisse à penser que là n’est pas sa seule activité et si les pièces produites font état d’une mission de la société requérante portant sur quatre volets : la création d’entreprise, l’innovation et le développement technologique, l’investissement et la transmission, il s’agit cependant de missions qui, bien qu’incluant une assistance générale au développement de PME, s’exercent dans le domaine financier sous l’aspect du financement des projets des entreprises.
Richard A. quant à lui se présente comme un « conseil en gestion et développement d’entreprises ». Il décrit la vocation de son entreprise Business Développement PME ainsi :
« – piloter des projets, missions ou fonctions relatives à des déploiements orientés business sur le web, geo-marketing, informatique nomade, centre de contacts clients, e-procurement, e-learning, ainsi que sur les différentes formes de vigilances offensives qui composent l’intelligence économique,
– créer, développer, coordonner, manager des centres de rentabilité en termes de marchés, projets produits ou services, par l’utilisation des outils de nouvelles technologies de communication de l’information et les applications interactives ».
Il en résulte que son activité ne se limite pas, comme il le prétend, au conseil en matière de nouvelles technologies et notamment à l’assistance en matière de pilotage de projets informatiques, mais s’étend à des activités plus générales de conseil en développement des PME, comme en témoigne la dénomination de son entreprise Business Développement des PME.
S’il s’avère que les activités de l’une et l’autre partie ne sont pas directement concurrentes, il n’en demeure pas moins qu’elles s’exercent dans le même domaine de l’assistance au développement de l’entreprise et que les activités de Richard A. peuvent apparaître comme une déclinaison de celles de la société Banque du développement des PME, celui-ci développant l’aspect technique assistance en communication au regard de l’aspect financement revenant à la requérante, et se placent ainsi dans le sillage de la société Banque du développement des PME implantée dans ce secteur économique de plus longue date et au rayonnement bien plus large, et ce afin de tirer indûment profit de cette réputation.
En conséquence, le choix par Richard A. du nom de domaine « bdpme.biz » pour exploiter un site internet offrant des services complémentaires à ceux proposés par la société Banque du développement des PME dans son sillage direct, est générateur d’un risque de confusion et constitutif de parasitisme.
Afin de faire cesser ces agissements parasitaires, il convient d’ordonner le transfert, au profit de la société Banque du développement des PME disposant de droits antérieurs sur le sigle Bdpme, du nom de domaine « bdpme.biz » dans les conditions mentionnées au dispositif de la présente décision et de faire interdiction à Richard A. d’utiliser la dénomination Bdpme à quelque titre que ce soit, y compris notamment comme nom commercial ou comme nom de domaine, et ce comme indiqué au dispositif.
En revanche, en l’absence de pièces versées aux débats du chef du préjudice subi, l’atteinte portée au sigle social, au nom commercial et au nom de domaine de la société Banque du développement des PME sera justement réparé par l’octroi de la somme forfaitaire de 1000 €.
Sur la revendication de la marque bdpme 033 223 100 et le nom de domaine « bdpme.tm.fr » :
Richard A. a déposé le 30 avril 2003 la marque française bdpme sous le n°033 223 100 en classes 9, 16, 35, 36, 38, 39, 41, 42, 44 et 45.
La société Banque du développement des PME fonde sa demande en revendication sur l’article L 712-6 du code de la propriété intellectuelle aux termes duquel « si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d’un tiers, soit en violation d’une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice ».
Richard A. explique qu’en déposant la marque litigieuse, il n’a pas cherché à nuire aux intérêts de la société Banque du développement des PME, son objectif étant seulement de pouvoir déposer le nom de domaine bdpme avec une extension en « .fr », de sorte que le dépôt de la marque ne peut être considéré comme frauduleux. Il ajoute que le dépôt de la marque bdpme par ses soins n’a pas empêché la société requérante de faire enregistrer la marque communautaire homonyme Bdpme n°3666401 le 17 février 2004 et la marque française Oseo-Bdpme n°3334656 le 13 janvier 2005.
Il a été précédemment jugé que la société Banque du développement des PME dispose de droits antérieurs sur la dénomination Bdpme à titre de sigle social, de nom commercial et de nom de domaine.
Richard A. qui exerce son activité dans le domaine du développement des PME ne saurait sérieusement soutenir qu’il ignorait les droits antérieurs de la société Banque du développement des PME sur la dénomination Bdpme. De surcroît, l’envoi le 3 octobre 2002 à la société requérante d’un courriel pour l’informer de l’enregistrement du nom de domaine « bdpme.biz », via l’adresse électronique « webmasterabdpme.fr », démontre que celui-ci avait connaissance des droits de la société Banque du développement des PME sur la dénomination Bdpme sans pouvoir se prévaloir d’une simple homonymie d’initiale fortuite.
Le fait de déposer à titre de marque un signe que le déposant sait être identique à une dénomination sur laquelle un tiers a des droits caractérise l’intention frauduleuse, et ce d’autant qu’en l’espèce Richard A. empêche ainsi la société Banque du développement des PME de conforter ses droits sur une dénomination qu’elle utilise depuis 1997 ou à tout le moins profite indûment des efforts de communication déployés par celle-ci autour de cette dénomination.
L’argument du défendeur selon lequel il a déposé en toute bonne foi la marque litigieuse pour bénéficier d’un nom de domaine avec une extension ».fr » s’avère a posteriori non pertinent dès lors que l’enregistrement du nom de domaine « bdpme.tm.fr » sur le fondement de cette marque a eu lieu après une mise en demeure de la société Banque du développement des PME de cesser toute utilisation du terme Bdpme.
En conséquence, il convient de faire droit à l’action en revendication de la société Banque du développement des PME mais à titre partiel, tous les services et produits pour laquelle la marque a été enregistrée par Richard A. n’étant pas concernés par l’activité de la société Banque du développement des PME, soit pour les services et produits des classes 9, 16, 35, 36, 39, 41 et 42.
De même, il y a lieu d’ordonner le transfert du nom de domaine « bdpme.tm.fr » au profit de la société Banque du développement des PME.
Il n’est pas établi que Richard A. ait fait un usage de sa marque autre que celui lui ayant permis d’obtenir un nom de domaine avec une extension en « .fr », lequel a été mis hors ligne par le défendeur lui-même dès le début de la présente procédure. En conséquence, il sera alloué à la société Banque du développement des PME en réparation du préjudice subi du fait du dépôt de la marque frauduleux la somme de 1000 €.
Sur le dénigrement :
La société Banque du développement des PME reproche à Richard A. d’avoir diffusé sur le réseau internet, non au moyen d’un courrier électronique de nature privée, mais par l’intermédiaire d’un service accessible à tout utilisateur d’internet, des communiqués contenant, selon la requérante, des propos dénigrants et mensongers à son encontre, faisant notamment état du présent différent opposant les parties.
Il résulte de la lecture de ces communiqués rédigés sous forme interrogative plutôt que réprobatrice que leur contenu n’excède pas le champ de la libre expression de chacun, de sorte que la société Banque du développement des PME sera déboutée de ce chef.
En revanche, afin d’assurer l’information des tiers de manière plus objective, il y a lieu de faire droit à la demande de publication dans les termes du dispositif du présent jugement.
Sur l’exécution provisoire :
Compte tenu de la nature du litige, il convient d’ordonner l’exécution provisoire du chef des mesures d’interdiction et d’indemnisation.
Sur l’article 700 du ncpc :
Il convient de condamner Richard A. qui succombe à verser à la société Banque du développement des PME la somme de 3000 € en application de l’article 700 du ncpc.
DECISION
Le tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort,
. Dit qu’en enregistrant le nom de domaine « bdpme » dans l’extension « .biz » et en exploitant le site internet www.bdpme.biz, Richard A. a commis des actes d’usurpation de sigle social, de nom commercial et de nom de domaine constitutifs d’agissements parasitaires, au préjudice de la société Banque du développement des PME,
. Ordonne à Richard A. de transférer à ses frais et au profit de la société Banque du développement des PME le nom de domaine « bdpme.biz », dans un délai de deux mois à compter de la signification du présent jugement et sous astreinte de 150 € par jour de retard, astreinte commençant à courir à l’expiration du délai imparti,
. Fait interdiction à Richard A. d’utiliser la dénomination Bdpme à quelque titre que ce soit, de quelque manière que ce soit et sous quelque forme que ce soit, y compris notamment comme nom commercial ou comme nom de domaine, et ce à compter d’un délai de deux mois courant à partir de la signification du présent jugement et sous astreinte de 150 € par infraction constatée après l’expiration du délai imparti,
. Condamne Richard A. à payer à la société Banque du développement des PME la somme de 1000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait des agissements parasitaires susvisés,
. Dit que Richard A. a déposé la marque française bdpme le 30 avril 2003 sous le n° 033 223 100 et fait enregistrer le 31 juillet 2003 le nom de domaine « bdpme.tm.fr » en fraude des droits de la société Banque du développement des PME,
. Ordonne à Richard A. de transférer à ses frais la marque française bdpme n°033 223 100 pour les services et produits des classes 9, 16, 35, 36, 39, 41 et 42 au profit de la société Banque du développement des PME, dans un délai de deux mois à compter de la signification du présent jugement et sous astreinte de 150 € par jour de retard, astreinte commençant à courir à l’expiration du délai imparti,
. Ordonne à Richard A. de transférer à ses frais au profit de la société Banque du développement des PME le nom de domaine « bdpme.tm.fr », dans un délai de deux mois à compter de la signification du présent jugement et sous astreinte de 150 € par jour de retard, astreinte commençant à courir à l’expiration du délai imparti,
. Condamne Richard A. à payer à la société Banque du développement des PME la somme de 1000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du dépôt de marque frauduleux,
. Se réserve la liquidation des astreintes prononcées,
. Déboute la société Banque du développement des PME de sa demande formée au titre du dénigrement,
. Autorise la société Banque du développement des PME à faire publier le dispositif du présent jugement devenu définitif dans un journal ou une revue de son choix, aux frais de Richard A., dans la limite de 3000 € HT pour l’insertion,
. Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement du chef des mesures d’interdiction et d’indemnisation,
. Condamne Richard A. à verser à la société Banque du développement des PME la somme de 3000 € en vertu de l’article 700 du ncpc,
. Rejette le surplus des demandes,
. Condamne Richard A. aux entiers dépens.
Le tribunal : Mme Marie Claude Apelle (vice présidente), Mme Marie Courboulay (vice présidente), Mme Carole Chegaray (juge)
Avocats : Me Antoine Gendreau, Me Paul Hebert
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