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Jurisprudence : Responsabilité

lundi 12 septembre 2011
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Tribunal de grande instance de Nanterre 1ère chambre Ordonnance de mise en état du 01 septembre 2011

Mlle G. / Paperblog

auteur - communication - contrefaçon - données de connexion - droit d'auteur - hébergeur - identification

FAITS

Mlle G., comédienne, a notamment interprété le rôle de “Stella” dans le film “Riviera”, sorti en salles en janvier 2006.

Considérant que la reproduction, sans son autorisation, sur le site Paperblog d’une brève scène de ce film, dans laquelle elle apparaît à moitié dénudée, attente à son droit moral et à son droit patrimonial d’artiste interprète, Mlle G. poursuit la société Paperblog, éditrice de ce site, en réparation des préjudices qu’elle déclare subir du fait de cette reproduction illicite.

PROCEDURE

Sur le fond

Par actes des 24 et 29 juin 2010, Mlle G. a fait assigner devant ce tribunal la société par actions simplifiée Paperblog et par conclusions signifiées et déposées au greffe le 18 février 2011, lui demande, au visa des articles L.212-2 et L.212-3 du code de la propriété intellectuelle et de l’article 138 du code de procédure civile, de :
– débouter la société Paperblog de ses demandes,
– condamner la société Paperblog à lui payer la somme de 10 000 € de dommages et intérêts en réparation de la violation de son droit moral et de son droit patrimonial d’artiste interprète,
– interdire à la société Paperblog de reproduire son interprétation dans le film Riviera sans son autorisation écrite préalable, sous astreinte de 10 000 € par infraction constatée, passé un délai de huit jours après la signification du jugement à intervenir,
– se réserver la liquidation de l’astreinte,
– condamner la société Paperblog à lui payer la somme de 3500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en ce compris le coût du procès-verbal de constat d’huissier pour un montant de 300 € et aux dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de Maître Vincent Toledano, en application de l’article 699 du code de procédure civile,
– d’ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Par dernières conclusions, signifiées et déposées au greffe le 4 avril 2011, la société Paperblog demande au tribunal, au visa des articles 6-I-2 et 6-I-7 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, 1382 du code civil, 32-1, 75, 367 et 700 du code de procédure civile, de :
– de débouter Mlle G. de ses demandes,
– de condamner Mlle G. à payer une amende civile et à lui payer la somme de 5000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive,
– de condamner Mlle G. à lui payer la somme de 5000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et aux dépens,
– d’ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Sur l’incident

Par conclusions, signifiées et déposées au greffe le 26 mai 2011, Mlle G. demande au juge de la mise en état, au visa de l’article 6 de la loi pour la confiance dans l’économie numérique, du décret n°2011-219 du 25 février 2011 et de la Directive N°200/31/CE du 8 juin 2000 sur le commerce électronique :
– d’ordonner à la société Paperblog la production des données permettant d’identifier toute personne ayant contribué à la création du contenu mis en ligne à l’adresse :
http://www.paperblog.fr/3043949/mlle-g-striptease-sur-la-plage-dans-le-filmriviera-film-star-nue/
– de réserver les dépens de l’incident.

Au soutien de sa demande, Mlle G. fait valoir que :
– compte tenu du rôle actif de la société Paperblog dans la gestion du site Paperblog, qui ressort notamment de la lecture des conditions générales publiées sur le site, celle-ci ne peut revendiquer le statut d’hébergeur,
– en tout état de cause, l’article 6 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique lui permet de solliciter les données d’identification de la personne ayant contribué à créer ce contenu illicite.

Par dernières conclusions, signifiées et déposées au greffe le 20 juin 2011, la société Paperblog demande au juge de la mise en état, au visa des articles 6-I-2 et 6-I-7 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 “informatique et libertés” et du décret n°2011-219 du 25 février 2011 relatif à la conservation et à la communication des données d’identification, de :
– dire et juger la demande de Mlle G. tardive et irrecevable,
– à titre subsidiaire, de la débouter de toutes ses demandes,
– à titre très subsidiaire, de constater qu’elle a conservé les données relatives au compte utilisateur de l’auteur du contenu litigieux et qu’elle est prête à communiquer ces seules données à Mlle G.,
– en tout état de cause, condamner Mlle G. à lui verser la somme de 1500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l’incident.

La société Paperblog expose que :
– le délai de conservation des données étant, selon l’article 3 du décret n°2011-219 du 25 février 2011, d’un an à compter de la création du contenu, la demande de Mlle G. est tardive,
– au delà de ce délai d’un an, l’article 6 de loi n°78-17 du 6 janvier 1978 “informatique et libertés”, limite la conservation à une durée qui n’excède pas la durée nécessaire, sous peine des sanctions prévues à l’article 226-20 du code pénal,
– à titre subsidiaire, elle possède, à ce jour, les données relatives au compte de l’auteur du contenu litigieux et se trouve donc en mesure de les fournir.

Au cours de l’audience du 23 juin 2011, le conseil de la société Paperblog, seul présent, a développé oralement la teneur de ses écritures, puis a été avisé de la mise à disposition de l’ordonnance au greffe le 1er septembre 2011.

DISCUSSION

Sur la communication des données d’identification

Pour s’opposer à la communication des données sollicitées par Mlle G., la société Paperblog fait état de la tardiveté de sa demande, eu égard aux dispositions de l’article 3 du décret n°2011-219 du 25 février 2011, qui limite à un an la durée de conservation des données mentionnées à l’article 1er de ce même décret.

Elle considère, en effet, que la demande a été formée le 26 mai 2011, alors que le contenu présenté comme étant illicite a été publié le 2 avril 2010, soit plus d’un an avant.

Or, l’article 3 du décret n°2011-219 du 25 février 2011 relatif à la conservation et à la communication des données permettant d’identifier toute personne ayant contribué à la création d’un contenu en ligne, vise les données mentionnées au II de l’article 6 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, qui sont détenues, soit par les fournisseurs d’accès à des services de communication au public en ligne (article 6-I-1 de la loi), soit à des hébergeurs (article 6-I-2 de la loi), dernière qualité revendiquée par la société Paperblog, mais contestée par Mlle G. qui la considère comme étant éditeur du site.

La résolution de cette contestation conditionne la mise en jeu de la responsabilité civile de la société Paperblog et donc la solution du litige. Elle excède ainsi la compétence du juge de la mise en état, qui appartient au tribunal.

En revanche, la société Paperblog, qui soutient être hébergeur du site éponyme, propose de communiquer les données du compte de l’auteur du contenu litigieux, encore en sa possession, il convient d’y faire droit, dans les conditions énoncées au dispositif.

Sur l’article 700 du code de procédure civile

Il n’est pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais par elle exposés et non compris dans les dépens.

Sur les dépens

Ils seront réservés.

DECISION

Par ces motifs, statuant publiquement, contradictoirement et par décision susceptible d’appel dans les conditions de l’article 776 du code de procédure civile,

. Ordonnons à la société par actions simplifiée Paperblog de communiquer à Mlle G. l’adresse de courriel, la date de naissance, le nom du blog personnel et les données relatives aux blogs déclarés du titulaire du compte de l’auteur du contenu mis en ligne à l’adresse : http://www.paperblog.fr/3043949/mlle-g-striptease-sur-la-plage-dans-le-film-riviera-film-star-nue/,

. Enjoignons à Mlle G. de conclure avant le 15 octobre 2011, à la société par actions simplifiée Paperblog de répliquer avant le 30 novembre 2011,

. Renvoyons l’affaire à l’audience de mise en état pour clôture ou radiation,

. Laissons à la charge de chacune des parties ses frais irrépétibles,

. Réservons les dépens.

Le tribunal : M. François Leplat (juge de la mise en état)

Avocats : Me Vincent Toledano, Me Olivier Iteanu

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* Nous portons l'attention de nos lecteurs sur les possibilités d'homonymies particuliérement lorsque les décisions ne comportent pas le prénom des personnes.