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Jurisprudence : Marques

vendredi 24 janvier 2003
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Tribunal de grande instance de Paris Ordonnance de référé du 24 janvier 2003

Société d'éditions et de périodiques techniques / M. Pierre Jean Marie B.

marques - nom de domaine - site

Nous, Président,

Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil,

Vu l’assignation en date du 24 octobre 2002 et les conclusions en réplique par lesquelles la société d’éditions et de périodiques techniques, titulaire des marques constituées à partir du terme « Kifaikoi » sollicite la condamnation de M. B. à procéder à la fermeture du site « stayline.fr », à la publication de la présente décision aux lieu et place de ce dernier, à titre subsidiaire le prononcé d’une mesure d’interdiction de poursuivre l’exploitation des dénominations litigieuses et, à titre plus subsidiaire encore, la constitution de garanties ;

Vu les conclusions de M. B. qui soutient n’avoir agi qu’en tant que mandataire de la société Norvégienne Stayline Consulting, n’avoir aucune responsabilité éditoriale dans la tenue du site litigieux et qui oppose qu’une décision a déjà été rendue entre les mêmes parties le 16 octobre 2002 ;

La discussion

Sur le cadre de notre saisine

Attendu qu’il est constant que par ordonnance rendue le 16 octobre 2001 entre les mêmes parties, le juge du tribunal de commerce, statuant en référé, a fait interdiction au défendeur d’utiliser ou de reproduire les annonces et les logos de la demanderesse, de faire référence sur le site litigieux aux partenaires de celle-ci et à leurs logos, et a ordonné la suppression des liens hypertextes créés à partir du site « stayline.fr » en direction du site de la demanderesse ;

Attendu que dans le cadre de la présente instance la société demanderesse incrimine tout à la fois la contrefaçon de ses marques et la contrefaçon de ses droits d’auteur sur un de ses logos, pour conclure à la nécessité d’ordonner notamment la fermeture du site « stayline.fr », et la publication aux lieu et place de celui-ci, de l’intégralité de notre ordonnance ;

Mais attendu que la contrefaçon de logos apparaît avoir déjà été invoquée devant le juge commercial ; qu’en tous cas le cadre de notre saisine ne peut être que celui édicté par l’article L 716-6 du code de la propriété intellectuelle qui autorise le président saisi au fond d’une action en contrefaçon à prendre une mesure provisoire d’interdiction ou à subordonner la poursuite des actes incriminés, à la constitution d’une garantie, à la condition que l’action au fond lui apparaisse sérieuse et qu’elle ait été engagée à brefs délais ;

Attendu que les mesures sollicitées de fermeture du site et de publication sur celui-ci du contenu de notre ordonnance ne ressortent pas de la compétence du juge statuant dans le cadre de l’article L 716-6 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu qu’il sera relevé en outre que l’action au fond a été engagée par acte du 24 septembre 2001 sur le fondement des droits détenus par la société d’éditions et de périodiques techniques ci-après « Sept », sur les marques enregistrées sous les n° 3040455, 3168731, 3168732, 96647910 et 3074544 ;

Attendu que seuls sont produits, en copie, les certificats d’enregistrement des marques « Kifaikoi.fr, le portail des fournisseurs CHR.Collectivités » n° 003040455, déposée le 12 juillet 2000 pour désigner « les agences de presse et d’information, l’édition de livres, de revues », ainsi que la marque « Horeca » n° 96646910 déposée le 25 octobre 1996 pour désigner les services « d’édition, de publication de journaux, service de presse et diffusion d’informations, télématique, télé-informatique, service de serveur télématique, publicité et affaires » ;

Attendu que le caractère sérieux de l’action en contrefaçon ne sera donc apprécié que par rapport à ces deux marques ;

qu’enfin, il est indifférent au regard de notre compétence que les faits incriminés aient ou n’aient pas cessé.

Sur le caractère sérieux de l’action au fond

Attendu que M. B. ne conteste pas que sur le site « stayline.fr » sont ou furent reproduites ou imitées les deux marques précitées ;
que nous ne pouvons cependant que relever que la marque n°003040455 ne vise à son dépôt que « les agences de presse et d’informations, l’édition de livres et de revues », ce qui ne paraît pas être l’objet du site litigieux ;

Attendu en revanche que la marque « Horeca » a été déposée pour désigner les services de diffusion d’informations, la télé-informatique, la publicité et les affaires ;

Attendu que la défense de M. B. consiste à soutenir d’une part que son rôle s’est limité à réserver, pour le compte de la société Stayline, le nom de domaine « stayline.fr », et qu’il n’a aucune responsabilité éditoriale dans la tenue de ce site et d’autre part que la marque « Horeca » est dénuée de distinctivité ;

Mais attendu que M. B. qui a en effet procédé au dépôt à son nom du nom de domaine « stayline.fr » ne verse pas de document contractuel qui limiterait son rôle à celui d’un simple prestataire technique, dépourvu de qualité pour modifier le contenu du site ;

que le document contractuel qu’il produit (d’ailleurs non traduit) a trait en effet à l’enregistrement du nom de domaine et aux conditions de son usage mais ne concerne pas la tenue du site ouvert en France sous ce nom ;

que nous ne pouvons que relever que M. B. s’est abstenu de fournir tout document à cet égard et d’appeler en la cause la société de droit norvégien Stayline ;

qu’enfin, force est de constater que l’ordonnance précitée du 18 octobre 2002 prescrivant diverses mesures de cessation a, selon les propres dires de M. B., été exécutée alors que seul M. B. était en défense, la société Stayline n’ayant pas plus que dans la présente instance, était appelée dans la procédure commerciale ;

Attendu qu’en l’état des documents produits, l’action au fond apparaît donc sérieuse en ce qu’elle est dirigée à l’encontre de M. B. ;

Attendu que M. B. soutient que le terme « Horeca » qui constitue le sigle du secteur d’activités de l’hôtellerie, de la restauration et des cafés, serait dépourvu de toute distinctivité, et donc non appropriable à titre de marque ;

Attendu, cependant, que la distinctivité d’une marque ne peut s’apprécier qu’au regard des services visés à son dépôt, et à la date de celui-ci ;
qu’en l’espèce, M. B. ne rapporte pas la preuve qu’au 25 octobre 1996, le terme « Horeca » était d’un usage courant en France pour désigner un service de publicité et d’affaires ;

Attendu, en conséquence, que l’action au fond apparaissant sérieuse, il sera fait droit, dans les termes du dispositif ci-après, à la mesure d’interdiction sollicitée ;

Attendu que pour les motifs sus-exposés, les autres demandes sont irrecevables ;

Sur l’exécution provisoire et l’article 700 du ncpc

Attendu que l’exécution provisoire accompagnera la présente ordonnance ;
qu’il n’est pas inéquitable de condamner M. B. à la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du ncpc ;

La décision

Statuant publiquement en premier ressort, par ordonnance contradictoire,

Vu l’article 716-6 du code de la propriété intellectuelle ;

. Déclarons irrecevables les demandes de fermeture du site « stayline.fr » et de publication de la présente décision ;

. Interdisons à M. B. de faire tant usage sur le site précité du terme « Horeca » sous astreinte de 1500 € par jour de retard à compter de la signification de la présente décision ;

. Ordonnons l’exécution provisoire ;

. Rejetons toute autre demande ;

. Condamnons M. B. à verser à la demanderesse la somme de 2000 € sur le fondement de l’article 700 du ncpc et à supporter les entiers dépens.

Le tribunal : M. Girardet (vice président)

Avocats : Me Bensoussan, Me Guigues

 
 

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